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CHAPITRE 4 SYNTHÈSE DES TRAVAUX

4.2 Sélections des scénarios préférés de pyrolyse rapide

4.2.4 Modification des critères environnementaux

4.2.4.1 Critères environnementaux modifiés

La modification des critères environnementaux ainsi que la tenue de deux panels supplémentaires employant une normalisation externe (simple et améliorée) avaient pour but de vérifier si le changement dans la normalisation des critères affectait de façon significative les résultats et si celle-ci changeait la distribution des résultats. Le tableau 4-6 présente la définition pratique des critères environnementaux employés dans les trois panels décisionnels.

Tableau 4-6 : Définition pratique des critères environnementaux associée aux panels ADMC

Critères Type de

normalisation Définition pratique

(GES) Gaz à effet de serre

Interne (I)

Réduction potentielle des émissions de gaz à effet de serre (GES) annuellement par rapport aux émissions du portefeuille de produits remplacés

Externe- Simplifiée (E-S)

Réduction potentielle des émissions de gaz à effet de serre (GES) annuelle par rapport aux émissions totales annuelles du Labrador

Externe- Améliorée (E-A)

Réduction des GES, en Tonne de CO2-eq/année, pour tous les habitants de

la province de Terre-Neuve-Labrador. La cible annuelle d’émissions de GES par habitant pour 2050 est de 2 tonnes de CO2-eq annuels/ habitant

(TC) Toxicité cancérigène

Interne (I) Réduction potentielle des émissions toxiques cancérigènes annuellement par rapport au portefeuille de produits remplacés

Externe- Simplifiée (E-S)

Réduction des années de perte de vie humaine causée par des émissions toxiques cancérigènes par rapport aux années de vie annuelles perdues, causées par le cancer, à Happy Valley-Goose Bay (HVGB)

Externe- Améliorée (E-A)

Réduction des années de vie non perdues causées par des émissions toxiques cancérigènes par rapport aux années de vie perdues par les émissions toxiques à cause des habitudes de consommation au Canada

Lors des panels employant la normalisation externe, pour le critère CT, les résultats ont été exprimés en année de perte de vie évitée (DALY). Cette valeur a été obtenue en appliquant la chaîne de cause à effet liée aux émissions de substances toxiques cancérogènes évitées. La chaîne de cause à effet de l'émission toxique considère un modèle de conséquence suivant les émissions. Ce modèle examine la concentration locale et la dose d’exposition individuelle afin d’obtenir la concentration dans les tissus corporels et ainsi, les impacts sur la morbidité et la mortalité des sujets étudiés [204]. La méthode d'évaluation du cycle de vie utilise la chaîne de causalité pour aider à la représentation de l'impact environnemental, car elle permet une meilleure communication et une meilleure interprétation du résultat, ce qui explique pourquoi les DALY ont été choisies comme unité pour la représentation de ce critère. Concernant le critère GES, la base de normalisation a été modifié cependant les unités utilisées (soit les CO2-eq) restent les mêmes.

4.2.4.2 Impact relié à la normalisation des critères environnementaux Le tableau 4-7 présente le classement des critères pour les trois panels réalisés. Tableau 4-7 : Classement des critères pour les trois panels de décision ADMC

Panels/ Critères

#1: Interne (I) #2: Externe - Simple (E-S) #3: Externe - Améliorée (E-A)

Poids Rang Poids Rang Poids Rang

DELD 23,0% 1 20,8% 1 20,4% 1 ISEL 21,3% 2 19,7% 2 19,1% 2 RCER 16,0% 3 12,9% 4 12,7% 4 AUF 16,0% 4 12,8% 5 12,3% 5 CIP 8,2% 5 8,0% 6 7,5% 7 TC 8,0% 6 5,8% 7 8,9% 6 TRI 5,6% 7 4,0% 8 2,9% 8 GES 1,9% 8 16,0% 3 16,1% 3

Pour chaque panel, le critère DELD a toujours été identifié comme le critère le plus important, toujours par rapport à l'objectif principal du projet. De plus, le critère ISEL a toujours été le deuxième critère le plus important, et le critère de TRI se situait toujours à la septième ou à la huitième place. La troisième place a été occupée par le critère RCER pour le panel utilisant la normalisation interne cependant, pour les deux panels utilisant la normalisation externe, le critère GES a obtenu la troisième place. Concernant le deuxième critère environnemental, TC, le changement dans le rang entre les panels est moins marqué, oscillant entre le 6e et 7e rang.

Concernant les poids des critères, il est bien connu que ceux-ci dépendent de trois facteurs: l’interprétation du critère, la variabilité du critère d’un scénario à l’autre et le compromis avec le critère le plus important. Comme le critère le plus important n’a changé pour aucun des panels et que la définition et l’interprétation des critères non environnementaux sont restées les mêmes, seules l’interprétation des critères environnementaux et leur variabilité entre les options peuvent expliquer le changement de pondération. Les poids du critère GES sont intimement liés à la variabilité des résultats, plutôt qu'à leur interprétation. En effet, lorsqu'une grande variabilité dans un résultat était observée, les membres du panel accordaient plus d'importance au critère. Les GES étant un critère bien connu de tous les panélistes, cette conclusion est tout à fait logique. Afin de déterminer si les modifications dans les poids des critères étaient significatives, il était nécessaire d’examiner les différences, d’une part, dans la distribution (test F) et, d’autre part, dans les poids (test t). Les résultats sont présentés au tableau 4-8.

Tableau 4-8 : Résultats des tests F et test-t Critère Type de

normalisation Poids

Différence significative dans la distribution (test F)*

Différence significative dans le poids (test-t)*

GES

Interne (I) 1,9% Référence Référence

Externe-Simple

(E-S) 16,0% Oui (P=0.03) Oui

Externe-Améliorée

(E-A) 16,1% Oui (P=0.03) Oui

TC

Interne (I) 8,0% Référence Référence

Externe-Simple

(E-S) 5,8% Non (P=0.43) Non

Externe-Améliorée

(E-A) 8,9% Non (P=0.33) Non

*95% niveau de confiance

Pour le critère des GES, les méthodes externes (simple et amélioré) ont entraîné une amélioration considérable du poids du critère. Ce critère étant bien connu, il était difficile d'augmenter le poids entre les deux normalisations externes. Pour le TC, un critère mal compris, il n’a pas été possible de modifier la répartition du poids à l’aide des deux méthodes externes. De plus, il était impossible d'améliorer le niveau de compréhension de ce critère, et il semble logique de dire que ce sera probablement le cas pour tous les résultats d'ACV avec des unités difficiles à comprendre. Il est envisagé que cela ne devrait probablement pas changer tant et aussi longtemps que ces types de critères ne sont vulgarisés auprès du grand public, comme le sont les GES par exemple.

Enfin, pour les GES et le TC, aucun panéliste n'a vu l'utilité d'aller plus loin dans la chaîne de cause à effet dans la normalisation. En effet, ils ont préféré utiliser des unités intermédiaires. Pour les GES, comme ce critère est bien compris, les résultats en CO2-eqétaient suffisants pour juger le critère, et il n’y avait absolument aucun avantage à les convertir en augmentation de la température de la terre. Pour TC, un effort a été fait pour aller plus loin dans la chaîne de cause à effet en incorporant la mesure des DALY. Les panélistes ont mieux compris ce point, mais il a également été reconnu qu’aller plus loin dans la chaîne de cause à effet introduisait une plus grande incertitude. En conclusion, cela a réduit la pondération du critère pour le panel Externe-Simple (E- S) puisque les panelistes avaient moins confiance dans les résultats.

Finalement, concernant l’impact du type de normalisation sur la classification des scénarios, la figure 4-6 présente les résultats finaux des trois panels en proposant une agrégation des critères environnementaux ainsi que tous les autres critères. Cette proposition de présentation des résultats

permet de comprendre l’impact joué par le changement de normalisation appliquée aux critères environnementaux.

Figure 4-6 : Résultats des panels ADMC (Interne; Externe-Simple et Externe-Améliorée) Il est possible de remarquer que la classification des scénarios reste toujours la même, quelle que soit la méthode de normalisation. Cependant, contrairement à la normalisation interne, avec le profil de normalisation externe (E-S et E-A), le profil des résultats change. En effet, en utilisant la normalisation interne, deux scénarios sont identifiés comme étant prometteurs alors qu’avec la normalisation externe, un seul scénario se démarque des résultats. De plus, avec la normalisation externe, quatre scénarios requièrent des analyses supplémentaires, contrairement à deux avec la normalisation interne, et un scénario est rejeté, contrairement à deux avec la normalisation interne. Certes, cette méthode de classification reste subjective, mais il faut tout de même noter que le profil des résultats change entre les deux méthodes de normalisation. Cependant, il n’y a pas de changement notable entre les deux normalisations externes (simple et améliorée) ce qui démontre que le poids acceptable pour ce critère a probablement été atteint, ce qui s’aligne avec la première sous-hypothèse. Il apparaît également que les poids des deux critères environnementaux sont généralement plus élevés pour les deux normalisations externes (E-S et E-E) comparativement à la normalisation interne.

Finalement, lors du dernier panel, la méthode de la distance à la cible a aussi été testée. Il a été impossible pour les panelistes d’identifier une cible pertinente pour le critère de toxicité cancérigène (TC), mais il a été possible d’identifier une cible pour le critère des GES. L’identification de la cible constitue donc un élément majeur avec cette méthode qui malheureusement, pour le moment, ne peut s’appliquer à tous les types d’impact environnemental. Cela explique pourquoi cette approche de normalisation n'a pas été incluse dans la méthodologie générale. Suite aux résultats obtenus avec l’approche de la méthode de la distance à cible, il apparait que cette méthode est très intéressante, mais doit être appliquée pour des projets de grande envergure, par exemple de niveau national. En effet, les cibles pouvant être utilisées doivent être inspirées de la recherche ou de cibles gouvernementales connue de la population. Par exemple, la cible utilisée lors du panel était la valeur de CO2-eqpar habitant qui devrait être atteinte en 2050 afin de limiter l'augmentation de la température moyenne mondiale à 2°C. Cette cible était intéressante, mais le problème résidait dans le fait qu’elle n’était pas à la même échelle que les scénarios évalués, ce qui ne permettait pas de les différencier les uns des autres. Ainsi, le critère GES a obtenu un très faible poids avec cette méthode puisqu’il n’y avait aucune variabilité dans les résultats.

4.3 Analyse environnementale des scénarios sélectionnés incluant

l’impact de la forêt

La considération des flux de carbone forestier a été identifiée comme nécessaire pour capturer l'impact environnemental réel d’une usine de bioraffinage produisant des biocarburants et des bioproduits [3, 46, 63, 77]. De plus, l’utilisation de la forêt permettant d’augmenter la capture nette du CO2 et d'aider à pallier aux problèmes liés aux changements climatiques est recommandé [45]. Il semble donc pertinent de regarder les aspects liés à l’atmosphère dans l’analyse environnementale. L’objectif de cette section est donc d’utiliser différentes méthodologies pour intégrer le calcul du carbone forestier dans l'analyse environnementale afin de comprendre le réel impact ou bénéfice sur les changements climatiques pour les scénarios de pyrolyse rapide.

Les scénarios du cas de base (FP-360) et de l’usine ayant une capacité doublée avec un procédé de condensation modifié pour la bio-huile, permettant la séparation de la lignine (FP/CON-720), ont été identifiés comme étant les plus prometteurs. Ces scénarios sont donc conservés pour la suite

des résultats. Cependant, afin d’analyser l’effet du stockage du carbone dans les bioproduits, un troisième scénario, hypothétique, a été créé. Ce scénario (FP-720) est en tout point identique au FP-360 à l’exception près de sa capacité qui est de 720 bdmt/jour. Ainsi, en comparant les scénarios FP-720 et FP/CON-720, il est possible d’étudier l’effet du stockage d’une partie du carbone dans la lignine. Ainsi, ce carbone n’est pas relâché à l’atmosphère comparativement aux carbones présents dans l’huile pyrolytique. L’analyse permet aussi d’étudier l’effet du remplacement du polyol pour la production de résine polyuréthane. Finalement, le scénario « statu quo » a aussi été étudié. Celui-ci considère uniquement la décomposition du bois du barrage hydroélectrique de Muskrat Falls, puisqu’il considère qu’aucune usine n’est construite. Il est à noter que l’annexe I comprend des résultats supplémentaires concernant cette section incluant le modèle de décomposition utilisé pour le bois de Muskrat Falls.