• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 4 SYNTHÈSE DES TRAVAUX

4.2 Sélections des scénarios préférés de pyrolyse rapide

4.3.3 Interprétation des modèles d’analyse environnementale

Le tableau 4-9 compare les résultats obtenus à court et à long terme pour les méthodes ACV et ACV + Forêt.

Tableau 4-9 : Comparaison des résultats de l’ACV et l’ACV + Forêt

Scenario Method Dette (Mt CO2-eq) Temps de la dette (ans) Réduction annuelle* (kt CO2-eq/an) Bénéfice cumulatif (Mt CO2-eq)

Statu quo ACV 0 0 0 0

ACV+Forêt 0.8 250 0 -0.8 FP-360 ACV 0 0 120 30 ACV+Forêt 2.8 100 99 14 FP-720 ACV 0 0 240 60 ACV+Forêt 6.2 105 198 28 FP/CON-720 ACV 0 0 255 64 ACV+Forêt 3.3 70 270 46

*Le bénéfice cumulatif représente la moyenne annuelle calculée entre 150 et 250 ans d’opération Alors que la méthode traditionnelle d’ACV ne répertorie aucun impact à court terme, en considérant les émissions biogéniques provenant de la forêt, il est possible de constater une augmentation des émissions de CO2-eq envoyé à l’atmosphère entre 70 et 100 ans suivant le début de l’opération, dépendamment du type de scénario. De plus, il est possible de noter que les avantages sur le long terme sont moins importants en considérant la forêt. Cependant, après avoir atteint le régime permanent en forêt, soit environ 100 ans après le début des opérations, le scénario ayant du stockage de carbone dans les bioproduits permet de retirer chaque année plus de CO2-éq de l'atmosphère avec la méthode de l’ACV + Forêt, comparativement à l’ACV traditionnelle. Ceci permet d’identifier de grandes opportunités possibles pour la réduction des émissions de GES au niveau national. Si par exemple une usine forestière, s’alimentant dans une forêt gérée sainement,

doit fermer ses portes, la transformation de cette usine en bioraffinerie produisant du biocarburant et des bioproduits pourrait avoir un bénéfice immédiat en termes d’émissions de CO2-eq.

En ce qui concerne la méthode de l’ACVD + Forêt, le meilleur résultat obtenu en termes de réduction du forçage radiatif est de 0,004 W.m-2 après 250 ans d’exploitation avec le scénario FP/CON-720. Bien sûr, ce nombre peut être difficile à interpréter. En comparaison, l'augmentation du forçage radiatif causé par trois gaz principaux (CO2, CH4, N2O) de 1750 à 2004 était de 2,2 W.m-2 [205]. Cette réduction n'est bien sûr pas significative pour la température atmosphérique ce qui s’explique par le fait que cette valeur corresponde à l’opération d’une seule usine. Cette méthode donne également une indication sur le temps de la dette climatique, qui peut être comparé avec le temps de la dette en CO2 calculé avec la méthode ACV+Forêt. Il est intéressant d’évaluer systématiquement ces deux paramètres lorsqu’on compare des scénarios ayant un portefeuille de produits différent. En effet, en comparant des scénarios produisant uniquement des biocarburants avec des scénarios ayant des biocarburants et des bioproduits, cela permet d’identifier les bioproduits les plus prometteurs (qui par exemple vont remplacer différents produits fossiles). Cependant, la méthode de l’ACV dynamique ne prend pas en compte l’effet croisé de l'augmentation du CO2 atmosphérique sur les autres réservoirs de carbone tels que les océans, le pergélisol et les forêts. En effet, une augmentation du CO2 dans l’atmosphère pourrait affecter les dynamiques de ces différents puits et ultimement, rejeter encore plus de carbone à l’atmosphère. Ainsi, les valeurs de forçage radiatif calculées sur le long terme avec cette méthode contiennent une certaine incertitude et représentent le forçage associé uniquement aux GES des scénarios. Il n’en reste pas moins qu’une augmentation du CO2 peut avoir un impact sur le réchauffement et que celui-ci devrait être considéré. Toutefois, les résultats démontrent clairement l’importance d’évaluer l’impact au niveau atmosphérique lors de la comparaison de différents types de stratégies à mettre en œuvre par exemple au niveau national. En effet, la méthode met en évidence le fait que le choix du type de portefeuille de produits fossiles qui sera évité puisse considérablement affecter l'impact à court terme, et cela de façon plus marquée qu’avec la méthode de l’ACV + Forêt. Ainsi, il semble logique d’affirmer que notre gouvernement devrait tenir compte de ces facteurs lors de l’élaboration des stratégies qui viseront à réduire les émissions de GES pour les décennies à venir. Le tableau 4-10 présente une interprétation complète des trois méthodes employées pour l’analyse environnementale. Cette interprétation présente le but de chaque analyse, l’échelle de temps

pertinente, les forces et faiblesses ainsi qu’un exemple d’application pratique des différentes méthodes d’analyse environnementale.

Tableau 4-10 : Interprétation des trois méthodes d’analyse environnementale utilisée

Caractéristiques / Méthode ACV

ACV Traditionnelle ACV + Forêt ACVD + Forêt

Considère … Analyse du berceau au

tombeau incluant les émissions de GES

Considère en plus la gestion du carbone avec

la récolte, la séquestration, la croissance de la forêt et les bioproduits Considère en plus la cinétique de dégradation des GES dans l'atmosphère

Échelle de temps pertinente

Calcul en régime

permanent

≈ 100 ans (Croissance d’un arbre dans la forêt boréale)

≈ 200-300 ans (Dynamique

de l'atmosphère plus

longue)

Forces Simple (couramment

utilisée), considère la réduction potentielle des émissions de GES par la production de bioproduits

Considère en plus la gestion temporelle du carbone dans la forêt.

Essentiel dans le contexte d’évitement d’émission de CO2 avec les bioproduits Considère en plus la cinétique de dégradation dans l'atmosphère et donne une indication des impacts

et bénéfices sur le

réchauffement climatique

Faiblesses N’intègre pas le CO2

biogénique (provenant de la forêt) et la

dynamique de

l'atmosphère

N’intègre pas l'impact au niveau de l'atmosphère

associée à

l'augmentation de la

température. De plus, la forêt est un système très complexe et difficile à modéliser correctement.

Les unités de forçage radiatif (W.an.m-2) sont

moins facilement

interprétables que les

unités de CO2-eq et le

modèle représentant

l’atmosphère est simplifié puisqu’il n’intègre pas l'impact de l'augmentation du CO2 atmosphérique sur d’autres systèmes (océan, pergélisol, forêt)

Interprétation pratique

Utile sur un marché du carbone et pour le financement immédiat d'un projet encourageant le remplacement du carbone fossile Évalue différentes stratégies de capture du carbone (bois d'œuvre, lignine, etc.) et est facilement

compréhensibles par la population. Permet de présenter les avantages environnementaux des biocarburants

Évalue l'impact sur le réchauffement planétaire avec le forçage radiatif en considérant la cinétique de

transformation des

émissions de GES dans l'atmosphère. Permets d’identifier les stratégies ayant le moins d'impact sur l'atmosphère.

Il convient de rappeler que des travaux sont en cours au gouvernement du Québec pour la création et l’adaptation de protocoles de compensation [55]. Ces protocoles permettront aux entreprises de vendre leur crédit de CO2 biogénique aux grands émetteurs via le marché du carbone. Ainsi, la méthode de l’ACV+Forêt pourrait éventuellement être utilisée pour cette fin. Ceci permettrait donc d’encourager les projets ou les usines désirant optimiser les flux de carbone biogénique en utilisant des matières premières renouvelables.

Finalement, les résultats de l’interprétation des résultats pour les trois modèles environnementaux employés s’alignent avec la sous-hypothèse #2 mentionnant que l’analyse environnementale des scénarios de bioraffinage peut être effectuée à l’aide de différentes méthodes d’ACV mais que l’interprétation affecte de façon plus importante l’issue de l’analyse. En effet, il a été démontré que si l’interprétation n’est pas complète, par exemple en utilisant un seul critère afin de comparer les scénarios, une conclusion non représentative voire erronée peut s’en suivre dans l’identification du scénario préférable pour l’environnement.

4.4 Analyse de l’utilisation du bois perturbé dans les scénarios