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CHAPITRE 4 SYNTHÈSE DES TRAVAUX

4.2 Sélections des scénarios préférés de pyrolyse rapide

4.3.2 Intégration aux modèles d’ACV

Une échelle temporelle de 250 ans est utilisée pour les méthodes d’analyse environnementale, telle que mentionnée au chapitre 3. Ainsi, la représentation des résultats peut être soit en flux instantané (évolution du CO2 ou du forçage radiatif annuel) ou en flux cumulatif (somme des flux instantanés). Afin de faciliter la présentation des résultats, la figure 4-10 présente les termes qui seront employés pour la description des résultats pour la section 4.3.2 ainsi que la section 4.4.5 lors de la représentation des flux de CO2 cumulatifs.

Figure 4-10 : Exemple de résultats de flux cumulatif (CO2 ou forçage radiatif)

Les impacts seront discutés différemment pour le court et le long terme. Pour le court terme, deux concepts seront utilisés. La dette en CO2 (ou climatique) qui représente le maximum de CO2 (ou de forçage radiatif) qui s’accumulera dans l’atmosphère suivant la mise en place d’une nouvelle usine de bioraffinage. Puis, le temps de la dette en CO2 (ou climatique) représente un retour aux conditions initiales. Ces deux concepts coïncident en tout point aux concepts définis à la section 2.3.2 de la revue de la littérature. Dans le long terme, le bénéfice sera discuté comme étant, annuellement, les réductions de CO2 et climatique (W.an.m-2) (voir figure 4-10) associées aux procédés de bioraffinage. Aussi, les bénéfices cumulatifs obtenus pendant 250 ans seront discutés. 4.3.2.1 Résultats de l’ACV

Tel que présenté à la section 4.2.2, les scénarios les plus prometteurs pour l’étude de cas d’Happy Valley-Goose Bay, FP-360 et FP/CON-720, permettent une réduction des émissions de GES annuelle de 120 et 255 kt de CO2-eq/an respectivement, calculés avec la méthode de l’ACV. Le scénario FP-720 permet une réduction de 240 kt de CO2-eq/an, représentant le double du scénario FP-360. Les résultats de la méthode de l’ACV pour les trois scénarios de pyrolyse rapide ainsi que le statu quo sont présentés à la figure 4-11.

Figure 4-11 : Méthode de l’ACV pour deux scénarios d’usine et le statu quo

Avec cette méthode, les bénéfices sur l’environnement sont immédiats et constants et les scénarios FP-360, FP-720 et FP/CON-720 permettent d’éviter l’émission de 30, 60 et 63 millions de tonnes de CO2-eq respectivement, sur 250 ans. À titre indicatif, les émissions du Labrador en 2014 représentaient 8,6 millions de tonnes de CO2-eq ainsi, annuellement, les usines permettent d’éviter 1,4% et 3,1% des émissions du Labrador. Pour le scénario FP-360, le fait d'éviter la production et principalement la combustion du mazout (HFO) explique en majeur parti l’évitement des émissions de CO2. Pour le scénario FP/CON-720, l’évitement du mazout est aussi important pour la réduction des émissions de GES, mais dans ce scénario, l’évitement de la production de polyol a également une contribution considérable pour la réduction des émissions de GES. Ainsi, la différence obtenue dans les CO2-eq évitée entre FP-720 et FP/CON-720 réside dans le fait que le portefeuille de produits est différent et représente la différence en termes de carbone fossile. Finalement, il est possible de constater que le scénario statu quo n’a aucun impact avec cette méthode, ce qui est cohérent puisque l’ACV ne tient pas compte du carbone forestier.

4.3.2.2 Résultats de l’ACV + Forêt

La figure 4-12 indique pour le scénario FP-360 tous les dix ans combien de CO2-éqsont émis ou évités de la production et de la combustion d’huile pyrolytique (CO2 biogénique), du portefeuille de produit évité (CO2 fossile) et de la forêt (CO2 biogénique). Les émissions de la forêt sont identiques à ceux présentés à la section 4.3.1 à l’exception qu'ils sont représentés en flux

instantanés, tous les 10 ans, ci-dessous. Les émissions évitées de la décomposition du bois de Muskrat Falls ne sont pas montrées dans ce graphique.

Figure 4-12 : Flux de CO2 instantané par décennie pour le scénario FP-360

L'état d'équilibre dans la forêt est atteint environ 100 ans après le début de l’opération de l'usine de bioraffinage et le CO2 biogénique résultant de la production et de la combustion de pyrolyse est presque identique à l'absorption de CO2 par la forêt. Les résultats de la méthode ACV + Forêt pour les trois scénarios de pyrolyse rapide ainsi que le statu quo sont présentés à la figure 4-13.

Pour tous les scénarios de pyrolyse rapide, il y a une dette en CO2 (entre 3 et 6 Mt de CO2-eq) et un temps de la dette en CO2 allant de 70 à 105 ans selon le scénario. En outre, pour les FP-360 et FP-720, représentant le même procédé, mais avec une capacité différente, bien que le temps de la dette soit similaire, il est possible de noter que la dette elle-même est deux fois plus grande avec FP-720. Ceci est logique, car la forêt croît au même rythme dans les deux cas. Par contre, à long terme, le scénario FP-720 permet de capter deux fois plus de CO2 et donc, donne un bénéfice cumulatif bien plus intéressant. Ceci démontre bien que l’indicateur du temps de la dette en CO2 à lui seul n’est pas un bon choix de critère afin d’identifier les scénarios ayant le plus de potentiel pour contribuer à la réduction du réchauffement climatique. Cela démontre aussi que des indicateurs à court et long terme sont nécessaires lors de l’évaluation des scénarios.

Le bénéfice cumulatif après 250 ans des scénarios FP-360, FP-720 et FP/CON-720 est d’environ 14, 28 et 46 Mt de CO2-eq. Ainsi, une réduction allant de 30% à 50% des bénéfices cumulatifs par rapport aux résultats de l’ACV traditionnelle est observée. Lors de l’atteinte du régime permanent, soit après environ 100 ans, la réduction annuelle des émissions de CO2 pour FP-360, FP-720 et FP/CON-720 est respectivement de 99, 198 et 270 kt de CO2-eq/an. Ceci représente une réduction annuelle de 1,2%, 2,3% et 3,2% des émissions du Labrador (calculé par rapport aux émissions de 2014). Ainsi, avec cette méthode, pour le scénario FP/CON-720, la réduction annuelle du CO2 est légèrement plus grande que celle calculée avec l’ACV traditionnelle.

De plus, avec cette méthode, l’effet du stockage est bien plus marqué puisqu’il combine l’effet du portefeuille de produit fossile remplacé, mais aussi du carbone biogénique forestier stocké. Ainsi, le fait d’avoir un bioproduit dans une usine de pyrolyse permet de réduire considérablement le temps de la dette de l’usine (soit d’environ 30 ans) et de réduire la dette elle-même (soit d’environ 50%) avec cet exemple. Ceci est important puisque l’identification de procédé permettant une bonne réduction de CO2 à long terme, mais en ayant le moins d’impact possible à court terme est un enjeu prioritaire pour la société. Finalement, il est possible de voir que le statu quo a un léger impact en termes de CO2. En effet, le CO2 est relâché graduellement à l’atmosphère et puisque ces arbres ne seront pas replantés, ce CO2 ne sera pas recapté.

4.3.2.3 Résultats de l’ACVD + Forêt

Les résultats de cette méthode pour les trois scénarios de pyrolyse rapide ainsi que le statu quo sont présentés à la figure 4-14.

Figure 4-14 : Méthode de l’ACVD+FC pour deux scénarios d’usine et le statu quo

Les résultats sont exprimés en unités de forçage radiatif (watts.an.m-2). Il est possible de remarquer que le temps de la dette sur le climat est d’environ 50 ans supplémentaires à celle observée avec la méthode de l’ACV + Forêt pour les scénarios FP-360 et FP-720. Cependant, pour le scénario FP/CON-720, le temps de la dette climatique est seulement d’environ 5 ans supplémentaires (comparativement à la méthode ACV+Forêt). Puis, tout comme la méthode ACV + Forêt, la dette climatique, c’est-à-dire l’augmentation du forçage radiatif cumulatif maximal, pour le FP-720 est deux fois supérieure à celle de FP-360 tandis que le temps de la dette climatique est semblable. Cependant, pour le scénario FP/CON-720 incluant du stockage de carbone et le remplacement du polyol, la dette climatique est réduite de 84% comparativement à FP-720. Ainsi, le bénéfice est plus important sur la dette climatique que sur la dette en CO2-eq (méthode ACV+Forêt). La même observation peut être faite pour le bénéfice climatique cumulatif sur 250 ans. En effet, le scénario FP/CON-720 permet un bénéfice de 142% supplémentaire comparativement au scénario FP-720, ce qui est supérieur au bénéfice supplémentaire en termes de CO2-eq, avec la méthode ACV+Forêt (+ 65%). Il y a deux explications à cela: premièrement le fait qu’une partie du carbone extrait de la forêt soit capturé dans la lignine et deuxièmement, le fait qu'il y a beaucoup d'émissions de CH4 dans la production de polyol. Étant donné que la méthode de l’ACV dynamique ne prend pas un facteur moyen sur 100 ans pour le potentiel de réchauffement planétaire (Global Warming Potential ou GWP) des GES, et que ceux-ci puissent avoir une cinétique de dégradation rapide (ex. : CH4)

ou lente (ex. : CO2), le type de GES évité affecte les impacts à court terme. Ceci explique la grande réduction observée pour l’impact à court terme mesuré avec cette méthode. Il est aussi intéressant de noter que les résultats évoluent différemment à long terme entre les différents scénarios. En effet, puisque la courbe de dégradation des GES dans l’atmosphère est exponentielle, l’effet de retirer une plus grande quantité de CO2 de l’atmosphère est aussi exponentiel.