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Modélisation à différentes échelles

2.5 Stratégies de calcul pour les nanoparticules

2.5.1 Modélisation à différentes échelles

Du point de vue calculatoire, deux méthodes de représentation des nanoparticules coexistent. D’une part, les nanoparticules peuvent être vues comme des assemblages de surfaces infinies ou des entités. De cela découlent deux modes de calculs utilisables et utilisés pour les nanoparticules. Surfaces. Les phénomènes chimiques étudiés sur les nanoparticules ayant principalement lieu à la surface de celles-ci, il est possible de modéliser une nanoparticule par un ensemble de surfaces infinies reproduisant les facettes cristallines que possède la dite nanoparticule. Une surface infinie peut être modélisée par un empilement de plans, compacts ou non, selon la nature de la surface considérée. Par exemple, une surface de ruthénium hcp (001) sera constituée d’un empilement de plans compacts, étendus dans deux directions de sorte à définir une surface dans la troisième, alors qu’une surface de molybdène bcc (110), tout en reprenant les mêmes caractéristiques d’extension directionnelle, aura un empilement différent. La réduction à deux directions de l’extension spatiale impose de pouvoir modéliser une réplication infinie dans deux directions, restreignant la troisième à une dimension finie. Pour cela, les conditions périodiques sont mises à profit et un empilement constitué de couches d’un atome par plan est utilisé. Ainsi la réplication d’un nombre minimal d’atomes dans les directions infinies est garantie alors que la structure de couches permet une flexibilité dans la dimension finie sans alourdir excessivement le coût computationnel. Il faut cependant déterminer le nombre minimal de couches à considérer pour pouvoir modéliser à la fois un cœur rigide et une surface flexible. Suivant un procédé établi précédemment[134], il a été calculé que pour chaque surface étudiée un modèle à six couches dont trois gelées répondait à ces critères. La figure 2.28 reproduit alors les géométries et cellules utilisées pour générer une surface de ruthénium hcp (001) (a) et une surface de molybdène bcc (110) (b).

Ce type de surface, de par sa régularité, peut modéliser correctement des facettes planes de nanoparticules assez grandes pour être considérées comme infinies et assez cristallines pour être considérées comme sans défaut. Cependant, sans même prendre en compte le problème de dimension, il est difficile de pouvoir considérer les nanoparticules expérimentales comme constituées de facettes

Figure 2.28: (a) Géométrie d’une surface de ruthénium hcp (001) dans la cellule permettant sa réplication périodique. (b) Même chose pour une surface de molybdène bcc (110).

parfaites, et de nombreux sites de nanoparticules, notamment proches des arêtes, peuvent être assimilés à des marches. C’est notamment le cas des sites B5, dont l’importance dans la réactivité des nanoparticules a été mise en évidence[135]. Ces sites ont été modélisés par introduction de marches sur la surface hcp (001). D’autres exemples de surfaces défectueuses se retrouvent dans la littérature, avec à chaque fois l’introduction de défauts tels que les marches ou l’utilisation de surfaces aux indices exotiques pour les modéliser. Par exemple, un motif de type double marche sur la surface hcp (001) de ruthénium a été reproduit par modélisation de la surface Ru(1015) pour étudier la dissociation de CO[136]. Le défaut est alors répliqué périodiquement, comme illustré sur la figure 2.29a. La surface Ru(1019) a quant à elle été utilisée pour modéliser une marche simple (figure 2.29b)[137]. Toujours pour l’étude de la dissociation de CO sur des surfaces de ruthénium, la surface Ru(1121) a également été étudiée car elle présente des sites de coordination sextuple, permettant d’abaisser la barrière de dissociation de CO[138].

Figure 2.29: (a) Etat de transition pour la dissociation de CO sur la surface Ru(1015), vu de côté et de dessus. (b) Surface Ru(1019). Figure adaptée d’après 136 et 137.

On peut cependant regretter que cette méthode ne permette pas de modéliser des nanoparticules peu cristallines ou ne permette pas d’effectuer des calculs prenant en compte des phénomènes se

2.5. STRATÉGIES DE CALCUL POUR LES NANOPARTICULES

déroulant sur une arête ou un sommet en impliquant plusieurs facettes que reproduisent les surfaces infinies. Au-delà de la modélisation des facettes d’une nanoparticule, ces calculs de surface sont également utilisés comme références auxquelles comparer les résultats obtenus sur des clusters. Clusters. Les calculs de clusters permettent de considérer un modèle de nanoparticule à part entière pour représenter la réalité expérimentale. Les problèmes liés à l’utilisation de surfaces infinies sont donc évités et il est possible de reproduire une grande gamme de caractéristiques de nanoparticules expérimentales sur un seul modèle. En effet, dans ce cas l’intégralité de la nanoparticule est modélisée, ce qui comprend les facettes, comme précédemment, mais également les jonctions entre facettes et des défauts structuraux, tels que des marches, des lacunes ou des atomes supplémentaires peuvent être modélisés de façon ponctuelle sur un site précis de la nanoparticule sans entraîner de reproduction périodique de l’altération. En contrepartie, cette méthode devient vite coûteuse lorsque la taille du cluster considéré augmente puisque la périodicité du système n’est pas exploitée. La cellule utilisée pour ce genre de cluster, dont la figure 2.30 reproduit l’exemple dans le cas de Ru55hcp, comporte du vide dans les trois directions, pour éviter les interactions entre images successives du cluster. L’utilisation d’ondes planes pour paver ces zones inoccupées de l’espace rend alors le calcul coûteux.

Figure2.30: Cluster modèle Ru55hcp dans sa cellule unitaire pour un calcul VASP.

Pour toutes les nanoparticules considérées ici, le modèle de cluster a été utilisé, avec la volonté de s’approcher au plus près de la réalité expérimentale en termes de morphologie et de taille. Cependant l’utilisation de modèles de clusters est coûteuse du point de vue computationnel, il faut donc trouver un compromis entre taille de cluster considérée et ressources nécessaires pour étudier la chimie de ce dernier. De ce fait, les comparaisons données avec l’expérience le sont pour de petites nanoparticules (∼ 1 nm), car les modèles les plus communément utilisés ici, et présentés dans la section 3.5, sont de cette dimension. A titre d’exemple, le coût d’une optimisation de géométrie pour ces clusters de 55 atomes est de 106 heures par pas d’optimisation, en supposant un calcul mono-cœur et une relation linéaire entre nombre de cœurs utilisés et coût de calcul.

Bulk. Le calcul du matériau massif, ou bulk, n’est pas à proprement parler une manière de modéliser les nanoparticules, mais il est nécessaire pour déterminer de façon théorique les paramètres de maille des empilements cristallins. En effet, à géométrie fixée, l’optimisation des paramètres de maille par minimisation de l’énergie du matériau massif dans la configuration associée à ces paramètres permet de déterminer quelle sera la valeur à considérer pour créer par la suite les cellules dans lesquelles seront optimisées les surfaces. En conséquence, cela permet de déterminer la distance interatomique théorique, qui sera alors une brique élémentaire pour la construction de toutes les structures dérivées de ce matériau massif. La figure 2.31a, montre l’évolution de l’énergie en fonction du paramètre de maille a dans le cas du rhénium, qui cristallise selon l’empilement hcp et la cellule correspondante est reproduite sur la figure 2.31b.

Figure2.31: (a) Evolution de l’énergie en fonction du paramètre de maille a pour le rhénium hcp et (b) cellule associée.