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dyskinésies induites par la lévodopa sont les rongeurs (souris et rat) ainsi que les primates non-humains. Les dyskinésies étant obtenues par administration de lévodopa, les différences entre modèles animaux concernent le protocole d’induction de la maladie de Parkinson pré-requise. Un phénotype parkinsonien chez le modèle animal peut ainsi être obtenu par altérations génétiques, administration d’α-synucléine pathologique ou administration de toxine.

4.1. Modèles génétiques et α-synucléine

Les altérations génétiques produisant des modèles animaux de la maladie de Parkinson sont principalement les mêmes que celles retrouvées chez l’homme, mais leur effet est moindre. Ces modifications peuvent être induites par la génération de lignées d’animaux transgéniques ou par l’injection de virus recombinants à α-synucléine au niveau de la région nigrostriée. Les modèles génétiques majeurs sont LRRK2, Pink-1, Parkin, DJ-1 et ceux permettant la surexpression d’α-synucléine via SNCA (Blesa & Przedborski, 2014; Decressac et al., 2012). Actuellement toutefois, les seuls modèles génétiques permettant d’induire des dyskinésies clairement marquées sont la souris transgénique Aphakia (Ding et al., 2007) et l’injection de virus recombinants à α-synucléine. Un modèle de la maladie de Parkinson peut également être obtenue par l’injection, centrale ou périphérique, de fibriles d’α-synucléine ou bien d’α-synucléine pathologique issue de tissus cérébraux de patients humains parkinsoniens. Cette administration peut se faire chez des animaux sains ou présentant des modifications génétiques telles que celles susmentionnées. Cela entraîne un phénotype parkinsonien marqué pouvant exprimer des dyskinésies dopa-dépendantes (Blesa & Przedborski, 2014; Peelaerts et al., 2015).

4.2. Administration de toxines

La première toxine utilisée pour induire une déplétion transitoire en dopamine fut la réserpine chez la souris en 1957 (Carlsson et al., 1957). Par la suite, d’autres toxines furent utilisées telles que la roténone, le paraquat, le maneb et les dérivés de l’amphétamine. Toutefois, le MPTP et la 6-OHDA, dont l’action est irréversible, sont les plus efficaces et les plus couramment usitées.

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4.2.1. Le MPTP

L’administration systémique de MPTP induit une dégénérescence aigue, massive et bilatérale des neurones dopaminergiques de la substance noire compacte (et dans une moindre mesure de l’aire tegmentale ventrale et de la région rétrorubrale). Cette toxicité est induite par la conversion du MPTP liposoluble en son dérivé toxique MPP+ (1-méthyl-4-phenylpyridinium)via la monoamine oxydase-B dans les astrocytes. Le MPP+ s’intègre dans les mitochondries où il induit un stress oxydatif entraînant la mort neuronale (Singer & Ramsay, 1990). Le MPTP présente ainsi une très forte neurotoxicité dopaminergique. Toutefois le rat présente une résistance rendant impossible son utilisation. D’autre part, alors que chez le patient la neurodégénérescence est asymétrique, le MPTP entraîne une lésion bilatérale et n’induit pas l’apparition d’inclusions de Lewy. De plus, le phénotype comportemental de la lésion MPTP semble clairement visible principalement chez le primate (Blesa & Przedborski, 2014). Enfin, les transporteurs à la dopamine (DAT) étant présents dans d’autres régions du cerveau telles que le thalamus ou le cervelet, le MPTP présente le risque de léser initialement ces structures.

4.2.2. La 6-OHDA

La lésion unilatérale du système dopaminergique nigro-strié a été décrite pour la première fois par Urban Ungerstedt en 1968 chez le rat (Ungerstedt, 1968).

La 6-hydroxydopamine (6-OHDA) est une toxine sélective des neurones catécholaminergiques (dopaminergiques et noradrénergiques), son impact sur les neurones sérotoninergiques est controversé. La 6-OHDA s’intègre dans les neurones grâce aux transporteurs de recapture des catécholamines (DAT et NAT) et induit un stress oxydatif via sa dégradation en composés cytotoxiques par la monoamine oxydase-B. Elle n’affecte pas les terminaisons GABAergiques (Faure et al., 2005). Afin d’induire une lésion uniquement dopaminergique, il est donc nécessaire de la coupler à un inhibiteur de la recapture de la noradrénaline tel que la désipramine.

Ne traversant pas la barrière hémato-encéphalique, son administration s’effectue localement. Ainsi, certains modèles animaux de la maladie de Parkinson sont obtenus par l’administration de 6-OHDA au niveau du striatum ou de la substance noire compacte. Toutefois l’injection de 6-OHDA au niveau du faisceau médian du télencéphale (MFB) est la plus efficace. En effet, la lésion du MFB entraîne une neurodégénérescence massive des fibres dopaminergiques reliant la substance noire compacte au striatum dorsal. En outre, chez la souris, cela ne semble pas induire de lésion sérotoninergique (Francardo et al., 2011). L'injection striatale de 6-OHDA est utilisée pour induire une perte partielle des neurones à dopamine correspondant au stade précoce de la maladie peu

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dyskinésigénique, alors que les deux autres modes d'injection sont utilisés pour développer des lésions dopaminergiques correspondant à un stade avancé de la maladie et permettent donc d’obtenir des modèles animaux dyskinétiques lors de l’administration chronique de lévodopa. La 6-OHDA n’entraîne pas l’émergence d’inclusions de Lewy, toutefois elle a l’avantage de pouvoir induire une lésion unilatérale et localisée. De plus, elle permet d’obtenir un phénotype parkinsonien très marqué et quantifiable chez le rongeur. Cependant, les modèles animaux ainsi lésés présentent une perte de poids marquée pouvant être létale. L’administration de 6-OHDA dans le MFB nécessite donc un protocole de soins quotidiens, en particulier chez la souris (Francardo et al., 2011).

4.3. Induction des dyskinésies

Le protocole classique d’induction des mouvements involontaires anormaux (AIMs), ou dyskinésies, se fait par l’administration quotidienne de lévodopa chez l’animal parkinsonien. La lévodopa peut être administrée de façon orale, mélangée à la nourriture de l’animal, toutefois cette méthode ne permet pas de contrôler la quantité précisément ingérée. Le mode d’administration classiquement utilisé est l’injection sous-cutanée ou intra-péritonéale d’une solution de lévodopa methyl ester hydrochloride associée à un inhibiteur de la DOPA-décarboxylase tel que le bensérazide (Cenci & Lundblad, 2007). Chez la souris, 12 à 15 mg/kg/jour de bensérazide permettent d’induire une forte inhibition de la DOPA-décarboxylase périphérique sans affecter la conversion centrale de lévodopa en dopamine (Cenci & Lundblad, 2007). De plus, l’administration de 6mg/kg/jour de lévodopa permet aux souris lésées au niveau du MFB de développer de fortes dyskinésies en l’espace de quelques jours seulement, alors que les souris présentant une lésion intra-striatale nécessitent une dose de lévodopa 4 fois plus élevée (Lundblad et al., 2004; Pavón et al., 2006). Enfin, les AIMs atteignent un pic entre 30 et 60 minutes post injection de lévodopa puis décroissent pour disparaitre après 100 à 160 minutes (Cenci & Lundblad, 2007; Pavón et al., 2006). Les dyskinésies induites par la lévodopa se développent lorsqu’environ 70 % des fibres dopaminergiques sont perdues, et l’intensité des dyskinésies est corrélée à l’étendue de la lésion dopaminergique et à la dose de lévodopa administrée. Ainsi, les lésions au MPTP ou à la 6-OHDA sont les plus à-même de produire des dyskinésies suite à l’administration de lévodopa.

En particulier chez la souris, la lésion du MFB par la 6-OHDA entraîne une perte d’environ 85% des neurones dopaminergiques, il s’agit à l’heure actuelle du protocole d’induction de dyskinésies le plus rapide et le plus efficace (Cenci & Lundblad, 2007; Francardo et al., 2011).

Les mouvements involontaires anormaux (AIMs) dystoniques et choréiques induits par la lévodopa ont précisément été décrits pour la première fois chez le rat à la fin des années 90 par Angela Cenci

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et son équipe. Jusque-là, les études de l’effet de l’administration de lévodopa chez des rat rendus parkinsoniens se focalisaient sur le comportement rotationnel induit par le traitement (Cenci et al., 1998). Chez le rongeur, les AIMs présentent le même profil temporel que les dyskinésies de pic de dose chez le patient parkinsonien et leur intensité est accrue par l’administration répétée et la dose de lévodopa. De plus, les dyskinésies induites par la lévodopa chez le rat affectent des groupes de muscles similaires aux patients et sont également sensibles aux traitements anti-dyskinétiques tels que l’amantadine ou la clozapine (Dekundy et al., 2007)

Par ailleurs, outre les AIMs, notons également que l’administration de lévodopa chez l’animal rendu parkinsonien entraîne l’apparition d’altérations motrices. Ainsi, les performances locomotrices évaluées par la distance parcourue dans un openfield ou la durée passée sur un rotarod sont considérablement réduites chez l’animal parkinsonien et accrues par l’administration de lévodopa (Smith et al., 2012). De même, l’animal lésé unilatéralement à la 6-OHDA présente une asymétrie d’utilisation des pattes avant en faveur de la patte ipsi-latérale à la lésion observable dans un cylindre transparent. L’état dyskinétique suite à l’administration de lévodopa entraîne à l’inverse une utilisation préférentielle de la patte contra-latérale à la lésion (Larramendy et al., 2008; Paquette et al., 2012).

4.4. Echelles d’évaluations des dyskinésies chez le rongeur

L’équipe d’Angela Cenci est la première à avoir précisément développé et quantifié les mouvements involontaires anormaux (AIMs) induits par la lévodopa chez le rat (Cenci et al., 1998). Par la suite, les AIMs ont également été précisément rapportés et quantifiés chez la souris. Toutefois, de par leur rapidité et la petite taille du modèle, les AIMs chez la souris présentent plus difficultés à être quantifiés (Cenci & Lundblad, 2007; Pavón et al., 2006).

Ainsi, chez le rongeur unilatéralement lésé, les AIMs induits par la lévodopa peuvent être divisés en deux groupes : les AIMs locomoteurs et les AIMs non locomoteurs.

Les AIMs locomoteurs se manifestent par une hyperactivité locomotrice asymétrique induisant des rotations du coté contra-latéral à la lésion. Toutefois, d’autres drogues peu dyskinésigéniques telles que la bromocriptine peuvent induire ces rotations, et l’amantadine n’est pas en mesure de les réduire. Les AIMs locomoteurs ne fournissent donc pas une mesure spécifique des dyskinésies induites par la lévodopa (Sgroi et al., 2014).

Les AIMs non-locomoteurs sont les plus représentatifs de l’action de la lévodopa et sont ainsi analogues des dyskinésies induites par la lévodopa chez le patient. Ils peuvent affecter la patte, l’axe et la région oro-linguale de l’animal.

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Les AIMs de la patte affectent le membre avant contra-latéral à la lésion. La patte peut présenter des mouvements rapides et sans but ou bien des positions dystoniques. La pathologie peut s’étendre de l’extrémité de la patte (mouvements de saisies) à l’ensemble du membre.

Les AIMs axiaux correspondent à des torsions de l’animal suivant l’axe antéro-postérieur, du côté contra-latéral à la lésion.

Enfin, les AIMs oro-linguaux ou oro-faciaux correspondent à des mouvements involontaires anormaux pouvant affecter les lèvres, la mâchoire et la langue de l’animal. Leur quantification peut être sous-évaluée en raison de la difficulté à les observer, en particulier chez la souris. De plus, ils ne doivent pas être confondus avec des mouvements physiologiques tels que le grooming ou la mastication des aliments (Cenci & Lundblad, 2007). Ils sont en outre généralement moins présents que les autres types d’AIMs chez la souris (Doo et al., 2014; Pavón et al., 2006).

Afin d’évaluer les mouvements involontaires anormaux induits par la lévodopa chez le rongeur, une échelle globale d’intensité/sévérité et de durée est communément utilisée (Cenci & Lundblad, 2007; Sebastianutto et al., 2016; Winkler et al., 2002)

Ainsi, en particulier, la souris rendue parkinsonienne par injection de 6-OHDA dans le MFB présente des mouvements involontaires anormaux induits par la lévodopa pouvant affecter la région oro-linguale.

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