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Nous avons étudié l’influence des stimulations cérébelleuses répétées de rythme thêta sur la réduction des dyskinésies induites par la lévodopa dans un modèle animal de la maladie de Parkinson. Pour ce faire, nous avons utilisé une lignée de souris CD1 transgéniques exprimant la protéine ChR2 de façon spécifique dans les cellules de Purkinje du cervelet. Nous nous sommes en particulier intéressés à la stimulation de la région cérébelleuse orale crus II pour la réduction des mouvements involontaires anormaux oro-linguaux dopa-induits.

Les avantages de ce modèle animal résident en l’expression spécifique et endogène de la ChR2 dans les cellules de Purkinje, limitant le nombre de chirurgies et permettant de stimuler exclusivement la sortie du cortex cérébelleux.

L’utilisation de LEDs a l’avantage de permettre une stimulation étendue des cellules de Purkinje de la région crus II. Cette large couverture permet une activation des cellules de Purkinje pour une irradiance relativement faible en sortie de LED (8-10 mW/mm²) et réduit ainsi les risques de phototoxicité sur le long terme. La comparaison du nombre de cellules de Purkinje entre la région cérébelleuses contrôle et la région stimulée quotidiennement durant 2 à 4 semaines semble ainsi indiquer une absence de lésion cérébelleuse imputable aux stimulations optogénétiques répétées durant nos travaux.

D’autre part, le modèle d’induction du phénotype parkinsonien par l’injection unilatérale de la toxine 6-OHDA dans le faisceau médian du télencéphale (MFB) présente l’avantage d’induire un stade avancé de la maladie de Parkinson avec une lésion de la voie nigro-striée s’élevant à 86,32% en moyenne dans notre étude. L’unilatéralité de la lésion a l’avantage d’induire un phénotype parkinsonien et dyskinétique rotatoire permettant de plus facilement confirmer l’état parkinsonien ou la correcte administration de lévodopa, ainsi qu’une comparaison des altérations de l’hémisphère lésé vis-à-vis de l’hémisphère sain. Malgré nos précautions, les animaux contrôles non parkinsoniens injectés à l’acide ascorbique présentent également une faible lésion dopaminergique (11,95 % en moyenne) possiblement due à une lésion tissulaire causée par la canule d’injection. La perte dopaminergique aigue et importante induite par la lésion du MFB entraine un risque létal élevé (Francardo et al., 2011). Nous avons ainsi mis en place un protocole intensif de soins quotidiens durant les 3 semaines suivant la chirurgie et avons subi entre 10 et 30% de pertes post-chirurgie implantatoire. Certains animaux sont donc décédés suite à leur lésion, réduisant ainsi le nombre de sujets dans chaque groupe initialement établi.

Par ailleurs, notre protocole de 8 semaines nous a permis de suivre de façon longitudinale chaque animal, permettant ainsi l’évaluation, dans différentes conditions, du comportement et de l’activité électrophysiologique in vivo chez des animaux éveillés qui sont leurs propres contrôles. Toutefois,

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l’aspect invasif de la chirurgie implantatoire et éprouvant des expérimentations quotidiennes limitent la survie des animaux sur le long terme et impactent ainsi les analyses et contrôles anatomo-immuno-histochimiques nécessitant une euthanasie rigoureuse. La durée du protocole expérimental accroissant le risque de perte prématurée des sujets, nous avons ainsi mis en place un protocole de 8 semaines permettant d’optimiser le rapport expérimentations / survie.

En particulier, les analyses anatomiques nous ont permis d’observer une réduction d’environ 30% du nombre de cellules de Purkinje dans le cortex cérébelleux contra-latéral de sujets lésés de façon unilatérale au niveau du MFB par la 6-OHDA. Ces observations sont cependant à relativiser de par la nature même de l’implantation chronique de la LED et son mode d’extraction. En effet, l’expérimentation chronique nécessite la mise en place d’une structure de ciment dentaire solidement fixée à l’ensemble du crâne afin de conférer une protection aux électrodes et à la LED implantée. Les difficultés inhérentes au retrait de la LED peuvent ainsi entrainer une lésion des tissus corticaux sous-jacents, limitant la possibilité de comparaison des régions stimulées et contrôles. Nous avons ainsi effectué un comptage manuel du nombre de cellules de Purkinje au niveau des zones d’intérêt restées intactes suite au retrait de l’implant et de la tranche subséquente. Il peut sembler paradoxal que la lésion des projections dopaminergiques du MFB entraîne une réduction du nombre de cellules de Purkinje. Chez le patient parkinsonien, une réduction de la matière grise cérébelleuse a effectivement été observée (O’Callaghan et al., 2016), toutefois cette réduction pourrait être due à la dégénérescence de neurones cérébelleux corticaux autres que les cellules de Purkinje. D’autre part, une étude chez la souris rendue parkinsonienne par administration systémique de MPTP a rapporté une réduction du nombre de cellules de Purkinje, mais cette neurodégénérescence pourrait avoir été causée par une action non-spécifique du MPTP directement sur les cellules de Purkinje exprimant des transporteurs de recapture de la dopamine (Takada et al., 1993). Toutefois, malgré les limitations de notre procédure, il semble que nos résultats soient en adéquation avec de récentes observations décrivant une réduction du nombre de cellules de Purkinje chez le rat rendu parkinsonien par lésion du MFB à la 6-OHDA (Wu et al., 2016). L’impact de la lésion du MFB sur le nombre de cellules de Purkinje pourrait être expliqué par les afférences d’une structure intermédiaire, l’aire tegmentale ventrale, qui d’une part envoie des projections dopaminergiques sur les ganglions de la base en passant par le MFB, mais également d’autre part au niveau du cortex cérébelleux (Ikai et al., 1992). Au cours de notre procédure, la lésion du MFB pourrait donc avoir entrainé la neurodégénérescence des axones dopaminergiques de l’aire tegmentale ventrale, menant possiblement à la mort de l’ensemble de cette structure et donc à la perte de son afférence dopaminergique sur le cortex cérébelleux. Les cellules de Purkinje n’exprimant qu’une seule isoforme de pompe sodium (α3) (Calderon et al., 2011), et la dopamine modulant l’activité de la pompe sodium (Hazelwood et al., 2008), une telle

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déafférenciation pourrait entrainer une dérégulation de la pompe sodium et contribuer à la mort des cellules de Purkinje. Une autre explication réside dans le rôle du noyau sous-thalamique. En effet, comme décrit précédemment, à l’état parkinsonien cette structure est hyperactive. Or, chez le primate comme chez le rongeur, le noyau sous-thalamique se projette via une connexion di-synaptique sur le cortex cérébelleux (Bostan & Strick, 2010 ; Jwair et al., 2017). Un phénomène d’excitotoxicité pourrait ainsi expliquer la neurodégénérescence des cellules de Purkinje. Notons toutefois que contrairement au primate, il semble que l’afférence du noyau sous-thalamique du rongeur sur le cortex cérébelleux soit majoritairement localisée dans la partie vermale et dans une moindre mesure au niveau hémisphérique, rendant cette hypothèse moins probable dans notre cas. Par ailleurs, nous avons observé une asymétrie d’utilisation des pattes avant dans le test du cylindre en faveur de la patte ispi-latérale au MFB lésé chez les animaux parkinsoniens puis en faveur de la patte contra-latérale chez les animaux dyskinétiques, corroborant ainsi les données de la bibliographie (Larramendy et al., 2008; Paquette et al., 2012). Qui plus est, nous avons également observé une normalisation de l’asymétrie d’utilisation des pattes avant suite aux stimulations thérapeutiques de la région cérébelleuse orale crus II. Cet effet pourrait être dû à notre paradigme expérimental. Effectivement, notre modèle de stimulation par des LEDs confère un large champ peu focal dont le cône d’illumination est de 110°. Il est ainsi possible que le lobule paramédian adjacent à crus II et riche en champs récepteurs des membres et des pattes (voir figure 3, Apps & Hawkes, 2009) soit également illuminé par la LED, entrainant ainsi la modulation de cellules de Purkinje associées aux pattes avant mises en jeu dans le test du cylindre.

Enfin, les dyskinésies ont peu été étudiées chez la lignée de souris CD1 et l’échelle d’évaluation de ces mouvements involontaires anormaux (AIMs) a été mise au point chez le rat et la lignée de souris C57 (Lundblad et al., 2004). Il semble toutefois que le développement des AIMs oro-linguaux induits par la lévodopa chez les souris CD1 soit comparable à celui des souris C57 (Smith, Heuer et al., 2012). Cependant, la taille réduite des souris et leurs mouvements plus rapides rendent l’évaluation des AIMs plus complexe que chez le rat et constituent une limitation du modèle souris pour l’évaluation des AIMs (Lundblad et al., 2004).

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2. Les cellules de Purkinje sont impliquées dans l’effet