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Le Modèle cK¢

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CHAPITRE 2 : CADRE THÉORIQUE ET MÉTHODOLOGIE DE

2. C ADRE THÉORIQUE

2.1. Le Modèle cK¢

Notion de conception

Avant de présenter ce modèle, nous effectuons un survol de la notion de « conception » telle qu’elle est souvent utilisée dans les recherches en sciences cognitives, en didactique, et en particulier en didactique des mathématiques.

Dans le sens commun du mot, une conception peut être comprise comme une idée, une représentation ou une croyance qu’a un sujet à l’égard de quelque chose. Dans une approche constructiviste, une conception peut être définie comme un type particulier de connaissance individuelle construite dans l’interaction du sujet avec un milieu (un environnement). Elle dépend alors à la fois du milieu dans lequel le sujet se trouve et du sujet lui-même (son histoire, ses intentions…) (Charlier, 1998).

Les recherches en didactique et en particulier en didactique des mathématiques, ont développé un grand nombre de réflexions autour de cette question.

Tiberghien (2005)13, chercheur en didactique des sciences physiques, signale que dans les années 80-90, une pluralité de termes ayant tous la même signification a été utilisée dans les

13 http://pistes.org/docrec/conceptions/index2.html. (Lu en octobre 2005).

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recherches. Parmi ces termes, elle cite : représentations, conceptions, misconceptions, alternative framework, raisonnement spontané, modèle spontané. L’hypothèse sous-jacente à ces recherches est que le sujet est le constructeur de ses nouvelles connaissances, à partir de ses connaissances et de ses expériences antérieures. Les questions qui sont généralement à l’origine de ces travaux concernent l’identification des connaissances et des procédures utilisées par les élèves quand ils résolvent un problème, ainsi que leur évolution dans le temps. D’après l’auteur, la variété de termes utilisés dans les recherches témoigne qu'il n'y avait pas une approche théorique unique, adoptée par les différents courants.

Ce problème de vocabulaire est d’ailleurs constaté également par les chercheurs en didactique des mathématiques. Margolinas (1993) met en évidence les termes utilisés dans les différentes théories françaises pour parler des connaissances des élèves :

Gérard Vergnaud a forgé le concept de théorème en acte qui « désigne les propriétés des relations saisies et utilisées par le sujet en situation de confondues, est celui de conception, et il intervient dès que le discours se situe au niveau des opérations de pensée de l’apprenant, et plus généralement, de l’apprentissage.

(Ibid. p. 101) Artigue (1989) met en évidence deux nécessités auxquelles répond la notion de conception, ce qui permet d’expliquer pourquoi la notion de conception est très répandue en didactique des mathématiques :

- mettre en évidence la pluralité des points de vue possibles sur un même objet mathématique, différencier les représentations et modes de traitement qui lui sont associés, mettre en évidence leur adaptation plus ou moins bonne à la résolution de telle ou telle classe de problèmes,

- aider le didacticien à lutter contre l’illusion de transparence de la communication didactique véhiculée par les modèles empiristes de l’apprentissage, en lui permettant de différencier le savoir que l’enseignement veut transmettre et les connaissances effectivement construites par l’élève.

Artigue (1989, p. 14) En se fondant sur les recherches développées au sein de cette problématique, l’auteur constate que la notion de conception est utilisée dans ces recherches comme un outil pour la

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modélisation de l’élève, sans cependant avoir explicitement une définition didactique de cet outil. Ainsi, à partir de ces recherches, elle envisage une définition du terme conception qui est la suivante :

La conception est un objet local, étroitement associé au savoir en jeu et aux différents problèmes dans la résolution desquels il intervient ; elle va constituer un outil, aussi bien pour l’analyse de ce savoir et l’élaboration de situations didactiques que pour l’analyse stricte du comportement de l’élève.

(Ibid. p. 17) Auparavant, placé dans une problématique psychologique, Vergnaud (1982) propose d’utiliser le terme « conception » pour désigner le sujet analogue du concept, à un moment donné. Rappelons que dans sa Théorie des Champs Conceptuels, un concept est défini par le triplet constitué des ensembles :

 S : situations qui donnent du sens au concept ;

 I : invariants sur lesquels repose l’opérationnalité des schèmes (le signifié) ;

 s : formes langagière et non langagière qui permettent de représenter symboliquement le concept, ses propriétés, les situations et les procédures de traitement (le signifiant).

En se référant à cette définition, Artigue (ibid.) signale qu'une conception ainsi définie apparaît de façon plus pertinente comme « un objet lié au sujet » et « perd son caractère local ». Artigue montre toutefois les limites de cette approche pour une utilisation en didactique des mathématiques, vis-à-vis de l’intérêt de modéliser les relations du sujet en interaction avec le milieu (le système [sujet<>milieu]). Ceci fait ressortir l’importance du caractère local dans la caractérisation des conceptions pour les recherches dans ce domaine. A ce propos, Artigue (ibid.) avance :

En effet, ce qui intéresse le didacticien, ce n’est pas au fond la compréhension de cette structure globale hypothétique, mais l’identification de conceptions locales qui se manifestent en situation et l’analyse des conditions de passage de telle conception locale à telle autre, qu’il s’agisse de rejeter une conception erronée, de mettre en place une conception permettant d’améliorer l’efficacité dans la résolution de telle ou de telle classe de problèmes ou de favoriser la mobilité entre des conceptions déjà disponibles »

Artigue (1989, p. 18).

Les deux nécessités citées plus haut représentent un ancrage du modèle cK¢. A ce propos Balacheff et Margolinas déclarent :

On peut donc résumer en proposant qu’une conception est une instance de la connaissance de l’apprenant, qui se distingue par la représentation et les traitements qu’elle mobilise, mais dont la portée est locale, attestée sur un domaine de validité et d’efficacité particulier (éventuellement scolaire).

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Balacheff & Margolinas (2005, p. 79) Par ailleurs, le modèle cK¢ est ancré dans la théorie des situations didactiques (TSD) par la prise en compte de l’interaction entre le sujet et le milieu, ce dernier étant le « système antagoniste du système sujet ». La prise en compte de cette interaction définit une conception dans le cadre de ce modèle. Nous présentons ci-après la formalisation d’une conception proposée par cK¢.

La formalisation de conception dans le modèle cK¢

Une conception est définie dans ce modèle comme ci-après :

La conception est l’état d’équilibre d’un système, et plus précisément d’une boucle action/rétroaction du système [sujet<>milieu] sous des contraintes proscriptives de viabilité.

action rétroaction

S M

contraintes

Schéma 3. Boucle de rétroaction du système [sujet<>milieu] (Balacheff & Margolinas 2005, p. 80)

Dans ce modèle, une conception C est décrite par un quadruplet (P, R, L, ) dans lequel :

 P est un ensemble de problèmes ;

 R est un ensemble d’opérateurs ;

 L est un système de représentation ;

  est une structure de contrôle.

L’ensemble des problèmes (P)

Un problème est le résultat d’une perturbation de l’équilibre du système [sujet<>milieu]

(Balacheff, 1995, p. 227). Dans ce modèle, l’ensemble P d’une conception C est l’ensemble de problèmes pour lesquels la conception C participe à leur résolution. Nous parlerons ainsi de sphère de pratique ou de domaine de validité de la conception C. La sphère de pratique d’une conception est liée à la connaissance du sujet qui la mobilise, et non au savoir de référence. Gaudin affirme que « les sphères de pratiques attestent que la connaissance possède un domaine de validité sur lequel elle est reconnue comme un outil » (2005, p. 33).

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La question qui se pose est : comment caractériser la sphère de pratique (l’ensemble P) d’une conception C. La difficulté de cette caractérisation est soulignée par Gaudin (2005) :

La notion de situation fondamentale (Brousseau, 1998), sur laquelle ont porté de nombreux travaux de didactique, illustre la difficulté posée par la caractérisation des problèmes [...]. Cette représentation des problèmes est un outil théorique puissant qui a été utilisé pour l’étude des situations d’apprentissage de concepts mathématiques (voir par exemple Ratsimba-Rajohn (1982) pour l’étude des rationnels). Elle n’est cependant pas opératoire pour l’étude des conceptions, pour lesquelles la question de l’existence et de l’identification d’un (ou plusieurs) représentant(s) de l’ensemble des problèmes de la conception reste ouverte.

Gaudin (2005, p. 37)

L’ensemble d’opérateurs (R)

Les opérateurs permettent de transformer un problème initial P1 en un autre problème P2. Ils sont attestés dans l’action à partir des comportements de l’élève, sous la contrainte d’un système de représentation (L). Reprenons ici la définition donnée par Gaudin :

Les opérateurs sont les outils pour l’action. Ils peuvent être des actions concrètes sur un milieu matériel, ou des actions plus abstraites comme les transformations de représentations langagières, symboliques, graphiques, ou encore être une prise d’information [...].)

Gaudin (2005, p. 38)

La structure de contrôle (Σ)

La structure de contrôles d’une conception assure sa non-contradiction. Elle permet d’attester la légitimité, la validité d’une action du sujet :

Les contrôles rassemblent :

- des jugements, des décisions et plus généralement les moyens du choix ; - des méthodes, structures et organisations des opérateurs [...].

Balacheff & Margolinas (2005, p. 84) Gaudin avance que :

Les contrôles rendent compte des critères qui renvoient (pour le sujet) au choix, à la décision, à l’adéquation, à la validité d’une action, à la décision

« résolu » pour un problème.

Gaudin (2002, p. 37) De cette définition nous retenons que les contrôles sont mobilisés par un sujet tout au long du processus de résolution d’un problème. Ils ne sont pas nécessairement les mêmes tout au long du processus, certains pouvant apparaître au début et d’autres à la fin de celui-ci.

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Plusieurs travaux portent sur le moment où le sujet qui résout un problème exerce des contrôles : Hoc (1987), Schoenfeld (1985), Richard (1990), Coppé (1993) et Margolinas (1993). En s’appuyant sur ces différents travaux, Rolet (1996, p. 71) a étudié les différents types de contrôles exercés par les étudiants dans des tâches de lecture de dessin et de construction géométrique. Elle reprend notamment la distinction de trois moments où le sujet peut exercer des contrôles au cours des situations étudiées :

 lors de la planification de la tâche ;

 lors de l’exécution de la tâche ;

 lors de la vérification de la solution finale.

En résolvant un problème, le sujet se fait tout d’abord une représentation de la solution et à partir de celle-ci, il établit les buts et les sous-buts en termes d’actions à effectuer pour résoudre le problème. Il s’agit de la phase de planification. Les contrôles mobilisés dans cette phase sont relatifs aux choix et aux prises de décisions et permettent d’orienter la production du sujet. Cependant, cette planification peut être remise en cause pendant la phase suivante (ibid.).

Ensuite, le sujet passe à la phase d’exécution de l’activité. C’est ici que l’action concrète de résolution du problème (tracer, construire...) est réalisée. Au fur et à mesure que le problème est résolu, le sujet cherche à valider chaque étape de son action en vérifiant la cohérence avec ce qu’il a planifié. Les contrôles mobilisés dans cette phase sont relatifs au jugement de l’adéquation et à la validité de l’action.

Enfin, à un moment donné le sujet doit décider si le problème est déjà résolu, ou non. C’est la phase de vérification. Il cherche alors à valider sa production finale. Les contrôles mobilisés à ce moment relèvent de la validité de la production ou de la réponse de l’élève.

Par ailleurs, Rolet (1996) distingue les contrôles perceptifs et théoriques.

Un contrôle perceptif est celui qui s’exerce sur des dessins et utilise comme instrument la vue. Il est lié à une validation pragmatique.

Rolet (1996, p. 72) Ces contrôles perceptifs peuvent être de deux types : simple et instrumenté.

Le contrôle perceptif simple est celui qui n’utilise aucun instrument autre que la vue (et accessoirement une règle) pour lire des propriétés, les prendre en compte dans une reproduction ou construction, tant dans l’exécution de la tâche que dans la validation du résultat. […].

Par rapport au contrôle perceptif simple, le contrôle perceptif instrumenté utilise, dans les problèmes de lecture, de reproduction ou de construction, des instruments tels que calque, gabarit, papiers quadrillés ou règle, équerre, compas. Ces instruments peuvent permettre de lire, reproduire ou de construire des propriétés spatiales et/ou propriétés géométriques. [...] le 34

sujet, en utilisant des instruments, « cherche à voir » et à introduire les propriétés qu’il a vues.

(Ibid. p. 72 et 74) En se référant à Balacheff (1987), Rolet définit un contrôle théorique comme :

Celui de « l’élève-théoricien dont la justification de l’activité est celle de connaître ». Il utilisera des connaissances mathématiques pour prendre une décision, pour valider ses actions et son résultat.

(Ibid. p. 76) Cette typologie a son origine dans la caractérisation des problématiques dans lesquelles le sujet se place, pratique ou théorique. D’après Berthelot & Salin (1992), une problématique pratique a comme référence :

La pratique de la vie courante, des problèmes spatiaux « ordinaires » de la vie de monsieur « tout le monde », ou encore du sens pratique [...]. Se placer dans une problématique pratique, c’est donc essentiellement contrôler ses rapports de manière empirique et contingente.

Berthelot & Salin (1992, p. 69) Dans une problématique géométrique :

La pratique de référence est celle de la géométrie des mathématiciens [...].

Se placer dans une problématique géométrique, c’est donc entrer dans un rapport entre mathématiciens établi sur la base de déclarations concernant un espace conceptualisé et contrôlées par la consistance (au sens de non-contradiction) de l’ensemble de ce qui est déclaré sur lui.

(Ibid. p. 68-69)

Le système de représentation (L)

Le système de représentation permet l’expression des problèmes (P), des opérateurs (R), ainsi que des contrôles (Σ). En effet, « il décrit les signifiants engagés dans les interactions du système [sujet<>milieu]. Ces signifiants supportent l’action, les opérations et les décisions » (Gaudin, 2005, p. 39). Cette représentation peut être langagière ou non langagière.

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