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2.1   Socioconstructivisme et travail en collaboration 36

2.2.5   Modèle de Berninger et Swanson (1994) 51

Le modèle de Berninger et Swanson (1994), en ce qui le concerne, rend compte de la mise en place des premières habiletés rédactionnelles et de leur évolution chez l’apprenti-scripteur. Étant donné que la clientèle participant à la recherche est constituée d'élèves en difficulté d’apprentissage, qui possèdent des caractéristiques particulières, et que ce modèle met l’accent sur le rythme d’apparition du processus d’écriture, il semble adéquat de le décrire ici. Effectivement, pour certains élèves en difficulté, il nous semble possible que leurs connaissances concernant l’écriture se situent à un proche niveau de celles des scripteurs débutants. Berninger et Swanson (1994) soutiennent que le modèle de Hayes et Flower (1980) concerne surtout le scripteur compétent/expert, de sorte qu’il n’est pas question des scripteurs débutants, en développement ou en difficulté.

Le modèle de Berninger et Swanson (1994) met aussi en lumière que l'élève, plus il avance dans sa scolarité et dans son apprentissage de l'écriture, doit faire face à

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plusieurs contraintes selon son âge et son niveau scolaire. Si l'on se fie aux niveaux scolaires du Québec, l'élève, de la première à la troisième année, voit apparaître en premier le processus de formulation. À cette étape, le jeune est capable de produire de l'écrit. Par contre, il ne prend pas encore le temps de planifier ses idées et d'évaluer si sa production est de qualité ou non, car il écrit ses idées au fur et à mesure. Dans le processus de formulation, deux processus sont à considérer : la génération, qui implique que les idées sont placées dans la mémoire de travail (l'élève trouve ses idées), et la transcription, qui permet à l'élève de transposer ses idées dans des phrases écrites. Ces deux étapes sont expliquées plus en détail dans les prochains paragraphes. À ce stade de l'apprentissage, l'élève n'a pas assez développé sa mémoire de travail pour être en mesure de préparer un plan global de son texte. Progressivement, les processus de planification et de révision évoluent.

D'après Berninger et Swanson (1994), la génération et la transcription se développent la plupart du temps en concomitance. En revanche, ce n’est pas le cas pour tous les scripteurs, étant donné que chez certains d’entre eux c’est l’un ou l’autre qui progresse plus rapidement. D’ailleurs, ces deux composantes jouent un rôle important dans le développement de l'écriture des scripteurs débutants. Il semblerait également que certains enfants dissocient la génération et la transcription. Souvent, il est plus facile pour eux de générer le texte (donc de trouver leurs idées) que de le transcrire (de le mettre en mots écrits). En outre, une étude réalisée par Englert, Raphael, Anderson, Anthony, Fear et Gregg (1988) a mis en évidence que les textes rédigés par les élèves en difficulté contiennent 50 % moins d’idées que les textes des élèves plus performants. Toutefois, les élèves en difficulté sont capables de transmettre plus d’idées qu’ils ne peuvent en écrire, ce qui laisse entrevoir que chez ces élèves le développement de la génération serait plus avancé que le développement de la transcription (Graham et Harris, 1997; Graham, Harris et Masson, 2005). Effectivement, ces élèves ont bel et bien plusieurs idées en mémoire, mais il demeure laborieux pour eux de les transférer en phrases écrites. Quant à Traweek, Cartwright

et Berninger (1992), ils ont démontré que la génération des idées se concrétise souvent plus tôt que la transcription. Chez la majorité des enfants, il est tout de même à noter qu'ils sont plus rapidement capables de transmettre des idées que de les générer, c'est-à-dire de les trouver. Il arrive également que le développement de la génération émerge simultanément avec la transcription. À ce moment, en même temps, les élèves sont capables de trouver leurs idées et de les placer en phrases écrites.

Toujours selon ces mêmes auteurs, à partir de la quatrième année, jusqu'en sixième année, l'élève devient de plus en plus autonome dans la planification de ses textes. Le scripteur est alors en mesure de prendre en considération les plans des textes, de même que les genres de ces derniers. Concernant la révision, les compétences du scripteur à cette étape sont assez limitées. Il est capable de réaliser uniquement une correction de surface lors de la révision, pour en finir, plus tard, par être capable de retravailler le sens de son texte. Par exemple, il peut réussir à faire la révision d'un paragraphe. La planification, quant à elle, s'effectue indépendamment de la révision. Enfin, Berninger et Swanson (1994) affirment que la troisième étape se déroule de la première à la troisième secondaire. Elle débute donc après la sixième année. À ce moment, l'élève est capable d'articuler la planification de son texte. Il progresse alors lentement dans celle-ci, dans le sens où il débute par faire une planification locale, pour en arriver à faire une planification de l'ensemble de son texte; ce processus débute à partir de 10-11 ans et se termine vers 15-16 ans. Plus il avance, plus l'élève est capable de faire appel à ses connaissances métacognitives, qui sont dans cette optique coordonnées de façon plus efficace. Ce modèle fait donc en sorte que plus l'élève prend de l'expérience en écriture, ce qui est en lien direct avec son cheminement scolaire, plus il est en mesure de faire appel à ses connaissances afin de rédiger un texte (Alamargot et Chanquoy, 2002; Berninger et Swanson, 1994; Chanquoy et Alamargot, 2002; Paradis, 2014). Ainsi, les précédents éléments mettent

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en évidence que l'écriture constitue une activité cognitive exigeante pour le scripteur (Bereiter et Scardamalia, 1987).