• Aucun résultat trouvé

Mikhaïl Bakhtine et le matérialisme de la pratique : quelques propositions

Dans le document La structuration des pratiques sociales (Page 58-72)

et interrogations

On peut, selon nous, envisager le matérialisme comme un matérialisme de la pratique. Formule ramassée qui met l’accent sur la pratique, ou plutôt les pratiques comme trait spécifique du monde social. Parler de pratiques, c’est parler d’action. Le monde social se présente comme le lieu de reproduction de pratiques sociales. Le réel existe dans le monde social d’une manière dis- tincte des modalités d’existence du monde naturel. Dans le monde naturel, les événements, les processus, se produisent indé- pendamment des individus humains. Ce qui délimite l’objectivité des réalités naturelles. L’objectivité des événements sociaux ne saurait être du même ordre. Dire que le réel social n’existe que sous la modalité des pratiques sociales liées à des actions, indique immédiatement que l’on doit reconnaître que les acteurs sociaux sont les agents de ces pratiques. Reconnaissance qui n’a, cepen- dant, rien à voir avec la mise en exergue d’une spontanéité créa- trice d’un sujet dont la liberté désignerait l’essence.

Refuser d’admettre que la réalité sociale est le lieu d’effectuation de pratiques irréductibles aux processus du monde de la nature, entraîne une tendance à penser le réel social dans des termes homologues au réel naturel. Ce refus conduit à une conception objectiviste. On le sait, l’objectivisme a pour caracté- ristique de définir les contraintes du monde social sur le modèle des contraintes naturelles. Il a pour présupposé le refoulement et l’élision de la dimension subjective du monde social. Pour l’objectivisme, comme on le voit chez Durkheim, la réalité so- ciale est le domaine de faits sociaux. Ceux-ci se caractérisent par leur extériorité par rapport aux individus et les contraintes qu’ils exercent sur eux. Les faits sociaux sont, dans cette perspective, des modes collectifs d’agir, de penser et de sentir. Ils sont fonda-

mentalement, des lors, principalement assimilés aux institutions. L’action sociale n’est que la résultante d’une imposition norma- tive, qui s’enracine dans les institutions qui composent la société. Marx n’a pas échappé à la figure de l’objectivisme, on le voit, par exemple lorsqu’il formule l’idée que les individus entrent dans des rapports sociaux de production qui existent indépendamment et extérieurement à leur volonté. Ce qui a permis à certains so- ciologues de réunir, sous le même chef objectiviste, Marx et Durkheim.

Dire que la réalité sociale se présente sous la modalité de pra- tiques sociales ne revient pas, pour autant, à récuser l’existence de contraintes sociales. Mais celles-ci doivent être définies à partir d’un point de vue qui rompt avec l’idée de contraintes qui dé- terminerait, à titre de causes extérieures, les pratiques des indivi- dus sociaux. L’un des enjeux du matérialisme de la pratique est de reformuler la relation entre contrainte et action, entre struc- ture et pratique. Ce matérialisme ne peut-être qu’un matéria- lisme, qui, saisissant les pratiques en termes d’action, soit capable, dans le même temps, d’articuler les actions humaines aux traits structurels des institutions sociales et des sociétés. Il s’agit de s’opposer à toute vision qui, en référence au couple dichoto- mique sujet/objet, raisonne en termes de dualisme de l’individu et de la société. Dualisme dont on voit en permanence les effets pernicieux. Certaines conceptions de la société mettent en évi- dence le poids des contraintes sociales sur les individus (objecti- visme), tandis que d’autres privilégient les individus comme agents de l’action et négligent, par la même, les contraintes insti- tutionnelles (subjectivisme).

Selon nous, Bakhtine introduit dans l’espace théorique ouvert par Marx, les éléments d’une rupture avec aussi bien l’objectivisme que le subjectivisme. S’attachant à rendre compte, dans Marxisme et philosophie du langage, de la spécificité des pra- tiques linguistiques, il entend établir, à l’encontre de l’objectivisme de Saussure, qui affirme le primat de la langue sur la parole, où le social renvoie à la langue et la parole à l’individuel, une posture où le langage est saisi, de manière privi-

légiée, en termes d’énonciation (Saussure, 1972). Bakhtine s’inscrit en faux contre toute dichotomie entre l’objet et le sujet, où le système détient une prééminence sur l’action. À la diffé- rence de Saussure, l’étude du langage, pour Bakhtine, présuppose que l’on prête, en premier lieu, attention aux formes de commu- nication tant verbale que scripturale.

La critique opérée par Bakhtine de Saussure, en tant qu’elle incarne un objectivisme abstrait, qui préfigure, par ailleurs, les travaux structuralistes qui, par la suite, vont s’appuyer sur ses prémisses, a, selon nous, une portée proprement révolutionnaire. Elle anticipe, pour une large part, les tendances les plus récentes de la linguistique moderne, qu’il s’agisse de celles liées, à partir d’Austin (1970), à la pragmatique, où de celles de l’interactionnisme linguistique défendus par Gumperz (1989), pour ne citer qu’elles. On ne peut que constater, de même, la parenté qu’entretiennent ses thèses avec celles soutenues, au même moment, par G. H. Mead (1963), aux États-Unis, et avec les courants de la sociologie interprétative qui, dans la filiation théorique de Dilthey, Weber, Simmel et Mead, vont donner leurs lettres de noblesse à des propositions et des analyses qui cir- conscrivent une problématique radicalement anti-positiviste, et battent en brèche l’orthodoxie structuro-fonctionnaliste issue de Parsons. Enfin, on ne saurait oublier, de même, combien les ana- lyses de Bakhtine ne sont pas sans relation avec les positions du second Wittgenstein (1961a) sur les jeux de langage et les formes de la vie, ainsi qu’avec ceux de Gadamer (1996), de Ricœur (1986), dans le champ de l’herméneutique, ou avec la Théorie de l’agir communicationnel d’Habermas (1987).

C’est dire combien l’œuvre de Bakhtine présente une richesse théorique foisonnante, qui énonce les termes d’une refonte de la théorie de Marx. Œuvre ignorée, refoulée, cantonnée au seul domaine des études linguistiques ou littéraires, alors qu’elle l’excède largement pour affecter nombre d’analyses ancrées dans le continent du matérialisme historique et les divers marxismes historiques qui l’ont occupé. On peut même ajouter qu’elle ruine, de manière décisive, par anticipation, dès les années 1920, les fondements théoriques de ce qui allait devenir, avec Staline, le fameux « Dia-Mat ».

S’agissant, dans un premier temps, de la critique de l’objectivisme abstrait de Saussure, ce que Bakhtine dénonce, dans Marxisme et philosophie du langage, c’est le traitement du lan- gage comme système de règles grammaticales, syntaxiques et phonétiques, comme forme qui gouverne, à titre de norme con- traignante, la parole, auxquelles le locuteur se trouve soumis et sur laquelle il n’a aucune prise. Ce qui intéresse fondamentale- ment Saussure, c’est la « logique interne du système de signes lui- même. Celui-ci est considéré comme une algèbre tout à fait in- dépendamment des significations idéologiques qui s’y ratta- chent. » (Bakhtine, 1977, p. 88)

En vérité, pour Bakhtine la langue, comme systèmes de signes, et le statut subordonné de la parole qui en est le corol- laire, est le pur produit de la réflexion théorique savante. Saus- sure construit une structure formelle, dotée de relations abstraites, qui va être attribuée, comme principe contraignant, aux agents, en tant que locuteurs. Ceux-ci obéissent en permanence à celui- ci quand ils font usage de la parole. Tout se passe comme si chaque individu, dans l’exercice de la parole, se référait de ma- nière automatique à ce modèle. Ce paralogisme, où le modèle élaboré par le scientifique est conçu comme principe réel des pratiques, n’est-il pas celui-là même dont Levi-Strauss (1958), dans son analyse des mythes, où ceux-ci sont dotés d’une struc- ture binaire, exhibée par l’ethnologue, qui commande à l’insu des individus l’usage concret des mythes à l’intérieur des pra- tiques sociales ?

Pour Bakhtine, on ne peut se satisfaire de ce dualisme langue/parole et de la distinction entre synchronie et diachronie qui lui est associée. Les normes à l’œuvre à l’intérieur de l’usage de la langue ne peuvent être pensées en fonction de critères for- mels. Il s’agit de se défaire du couple antithétique langue/parole pour s’orienter vers une théorie de l’énonciation, qui récuse toute conception du signe où le mot se présente « comme tiré du dictionnaire » (Bakhtine, 1977, p. 102). Si le mot est signe orga- nisé à l’intérieur d’une parole énoncée, on ne peut, en consé- quence, l’appréhender qu’à l’intérieur du contexte où il est em- ployé.

On comprend ici combien se dessine, chez Bakhtine, une posture anti-intellectualiste qui se heurte à la représentation sa- vante du monde, pour laquelle l’énonciation, les actes de parole, pour reprendre la terminologie du philosophe anglais Austin, désignant le « niveau » de l’individuel, n’ont qu’un statut margi- nal ou résiduel. Analyser le langage, c’est porter au jour les inte- ractions verbales entre individus au sein d’un contexte social donné, d’une rencontre (encounter), comme le soulignera plus tard Goffman (1973) dans la tradition de l’interactionnisme de Mead (1959/2006), Blumer (1969) et Hughes (1996).

La théorie bakhtinienne de l’énonciation est inséparable d’une focalisation sur les interactions en lesquelles s’organise l’immédiateté de la vie sociale. S’écarter de la vision objectiviste, revient à localiser l’analyse des pratiques sur un registre d’immanence, en centrant le regard de l’observateur sur l’ordinarité de la vie quotidienne, sur le « monde de la vie », en termes husserliens. On peut ajouter que Bakhtine symbolise la mise à l’écart d’un observateur défini comme sujet extérieur, transcendant, qui constitue le monde à la manière d’un spectacle, dont il s’agit de dévoiler les mécanismes qui agissent « dans le dos » des agents ordinaires. Ce changement de point de vue est bien celui d’un matérialisme de la pratique. Mais pour ce faire, Bakhtine est contraint d’introduire de nouveaux concepts à l’intérieur du continent marxiste.

Il en est ainsi du concept d’interaction. Dans la tradition de Marx, ce concept a été pensé sous l’expression d’action réci- proque. En tant que tel, quelle que soit la manière dont il a été formulé chez Marx et Engels, sa matrice est d’origine hégélienne. On le sait, ce concept permet aux fondateurs du matérialisme historique, dans sa combinaison avec d’autres concepts, de réfléchir la dialectique du monde social, les contradictions et les antagonismes du mode de production capitaliste et des sociétés où il exerce sa domination, contre toute chosification ou réification métaphysiques de ce dernier. Il s’articule étroitement à une intelligibilité du réel en termes de rapports. Il va jouer plus particulièrement un rôle stratégique au sein de la topique mar- xiste de l’espace social, celle où se nouent les rapports entre

structure économique et superstructures. En effet, s’efforçant de contourner l’économisme, pour qui les superstructures n’ont aucune efficace propre, Marx et Engels vont conforter l’idée de la détermination en dernière instance des superstructures par la structure économique, en introduisant le concept d’action en retour des superstructures sur la structure économique.

Or, un tel concept n’est lisible que parce qu’il s’intègre à l’intérieur du concept plus large d’action réciproque. L’infrastructure détermine la superstructure qui, en retour, réalise son efficace sur celle-ci. La nouveauté du concept d’interaction, chez Bakhtine, est, nous semble-t-il, la suivante : s’il est mani- feste, comme en témoigne nombre de ses écrits, qu’il ne remet pas formellement en cause la topique marxiste, il conçoit, néan- moins, la société selon une optique qui va bien au-delà de cette dernière. On peut dire, en relation avec ce que nous avons avan- cé antérieurement, qu’il déplace son regard du côté de l’élément immanent de la vie sociale. C’est pourquoi, prêtant attention au monde de la vie quotidienne, comme espace(s)-temps de l’existence immanente des individus ordinaires, il en vient à transformer la notion d’action réciproque, il opère son transfert en direction des champs des pratiques localisées, car ce à quoi l’on a affaire quand on examine les pratiques, c’est à leur contex- tualisation, elles s’organisent à l’intérieur de contextes immédiats, qui, derechef, se présentent sous la forme spécifique d’actions réciproques : d’interactions.

Autrement dit, la problématique inaugurée par Bakhtine en- gage une autre vision de la société, celle-ci ne va plus être discu- tée exclusivement à l’échelle du tout social, Bakhtine se propose d’investir désormais la texture de la socialité. On ne peut qu’ici voir combien, en raisonnant de cette manière, il bouscule la con- ception dominante de l’histoire. Penser l’histoire, ce n’est pas seulement prendre en compte la temporalité historique des for- mations sociales, les événements majeurs qui les scandent, c’est aussi se tourner vers la temporalité hétérogène des pratiques qui se forment et s’évanouissent de manière récurrente, et sont an- crées dans les contextes les plus immédiats. C’est donner une nouvelle dimension à l’historicité constitutive des pratiques so- ciales, à leur détermination spatio-temporelle. C’est dans cette

perspective que Bakhtine imbrique sa théorie de l’énonciation à une mise en exergue des interactions verbales à l’intérieur des- quelles toute énonciation se formule : « Quelle que soit la com- posante de l’expression-énonciation que nous considérons, elle sera déterminée par les conditions réelles de l’énonciation en question, c’est à dire avant tout par la situation sociale la plus immé- diate ». (Bakhtine, 1977, p. 123)

Bakhtine poursuit son argumentation de la manière suivante : « En effet l’énonciation est le produit de l’interaction de deux individus socialement organisés et, même s’il n’y a pas un interlo- cuteur réel, on peut substituer à celui-ci le représentant moyen du groupe social auquel appartient le locuteur. » (Ibid.) Cette dernière affirmation est importante car elle imprime au concept d’interaction un contenu qui ne la réduit pas à la seule situation de co-présence d’interactants. Ce concept acquiert ici, selon nous, une extension nouvelle qui permet de saisir les relations de réciprocité qui sous-tendent tout système social, que les agents qui y sont parties prenante, soient présents ou absents. C’est cette idée qui va, par exemple, gouverner l’idée centrale d’intertextualité, quand Bakhtine étudie la spécificité du roman. Ce que l’on voit s’annoncer, c’est la place décisive que doit oc- cuper la catégorie d’absence pour définir les termes d’un matéria- lisme de la pratique. Ce qu’il faut, selon nous, souligner ici, au- delà de cette dernière remarque, c’est la prise en compte par Bakhtine des positions sociales des interlocuteurs : « Le mot s’adresse à un interlocuteur ; il est fonction de la personne de cet interlocuteur : il variera selon qu’il s’agit d’un homme du même groupe social ou pas, selon qu’il est lié ou non au locuteur par des liens sociaux plus ou moins étroits (père, mère, frère, mari, etc.) » (Ibid.).

On ne peut que rapprocher une telle analyse de la critique adressée par Bourdieu à l’interactionnisme, quand il indique que celui-ci, centrant son attention sur les seules interactions visibles, omet de prendre en considération la structure sociale qui s’y réa- lise (Bourdieu, 1987, p. 151-153). Ce que Bourdieu dénonce avec raison, c’est le parti pris d’autonomisation d’un ordre de l’interaction qui fait fi de toute dimension structurelle, c’est-à- dire, pour lui, des positions sociales des agents au sein de champs

déterminés, qui seuls peuvent autoriser la compréhension de ce qui se joue au sein d’interactions concrètes. C’est dire, comme nous l’avons déjà précisé, la portée théorique de la perspective bakhtinienne. Non seulement elle anticipe les découvertes de l’interactionnisme nord-américain, mais elle en pose immédiate- ment les limites : celle d’une approche qui ne parvient pas à arti- culer l’étude des interactions à un « point de vue » structurel.

Une telle posture n’est possible que parce que Bakhtine re- double sa critique de l’objectivisme abstrait d’une critique du subjectivisme qui prévaut, par exemple, chez Dilthey, en qui il voit l’un des représentants les plus purs de la permanence d’une philosophie de la conscience. Mais avant d’aborder cette ques- tion, essayons de mesurer l’impact de la posture de Bakhtine dans le champ de la sociologie, plus particulièrement du coté de la sociologie de Durkheim, en tant qu’elle illustre, pour nous, l’une des formes les plus manifestes de l’objectivisme.

On peut ici affirmer que la posture inaugurée par Bakhtine prend à contre-pied le dualisme sujet/objet dont on repère l’existence, non seulement chez Saussure, mais aussi, de manière homologue, en sociologie, dans l’œuvre de Durkheim (1981), avec la distinction qu’il opère entre les faits sociaux et les actions des individus. En effet, pour le sociologue français, on ne peut rendre compte de ces dernières que si on les relie à leur dépen- dance contraignante et extérieure à l’égard des faits sociaux, comme modes collectifs d’agir, de penser et de sentir.

Selon cette optique, les actions vont être subordonnées, dans leur principe même, quand Durkheim se met a examiner, par exemple, les déterminations des conduites normatives, à des règles sociales (conçues exclusivement, par ailleurs, comme normes), qui ont pour siège les institutions de la société. Nous avons ici l’illustration claire d’une vision monologique du monde social : instaurant une sorte de face-à-face abstrait entre l’individu et la société, qui s’ancre dans l’ignorance du fait que les individus mettent en œuvre des règles sociales en situation de co-présence, il établit la relation entre individus et société sur le modèle de celle entre tout homme et le monde objectif de la nature.

En vérité, pour Durkheim, tout individu humain se trouve soumis, dans l’exercice de ses conduites à des contraintes sociales, qui, dans leur contenu même, sont isomorphes aux contraintes naturelles. De plus, quand Durkheim, ainsi qu’on le voit nette- ment avec la théorie des prénotions, entend édicter un certain nombre de règles méthodologiques, il attribue à tout agent, quel que soit par ailleurs son statut, une attitude objectivante envers quelque chose qui existe dans une relation extérieure à lui au sein d’un monde dit objectif. Que voulons nous dire par là ? Ne pre- nant pas en compte les interactions qui émergent entre individus au sein des contextes spatio-temporels immédiats de la vie ordi- naire, Durkheim s’interdit, contrairement à Weber, d’appréhender les significations et les interprétations diverses qui s’attachent aux actions sociales. Cependant, comme nous l’avons déjà mis en évidence dans un autre texte 1, cette élision de « l’ordre des interactions », quand il s’efforce d’analyser les con- duites sociales, a pour contrepartie, paradoxalement – mais dans le champ des règles méthodologiques et non pas dans celui de l’ontologie sociale – la reconnaissance d’une activité subjective des individus qui va être pensée sous le concept de prénotion.

Ne définissant pas les prénotions comme des représentations collectives, Durkheim enracine leur présence dans l’expérience sociale de chaque individu, qu’elles légitiment en retour. Utili- sant la métaphore du voile qui s’interpose entre l’individu et la société, Durkheim les décrit comme remplissant une fonction substitutive : elles se substituent aux concepts, en tant qu’elles s’articulent à une activité psycho-sociale récurrente ; elles sont un obstacle à toute connaissance objective du monde social, c’est-à- dire des faits sociaux. Autrement dit, le paradigme durkheimien admet en sous-main, mais dans le champ des préceptes méthodo- logiques, l’existence d’un élément interprétatif propre aux acteurs

Dans le document La structuration des pratiques sociales (Page 58-72)