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Conscience, pratique, conscience discursive et conscience idéologique

Dans le document La structuration des pratiques sociales (Page 118-130)

Les concepts de conscience pratique et de conscience discursive occupent un place majeure au sein du dispositif conceptuel sensibilisateur de la Théorie de la structuration. Comme nous l’avons vu au chapitre précédent, ces deux concepts ne peuvent être isolés de celui de pouvoir. Pour Giddens, chaque agent social est doté de pouvoir. Celui-ci est pensé comme la capacité transformatrice engagée en toute pratique. Capacité qui inclut toujours la possibilité d’agir autrement.

Ainsi que nous le montrerons, les schèmes interprétatifs liés à la conscience pratique, et qui s’exercent en toute action et interaction, sont inséparables des sanctions qui les accompagnent : sanctions continues, diffuses comme on l’observe dans une conversation. Les actes de parole qu’une personne adresse à une autre s’ajustent en permanence aux signes verbaux, mais aussi aux signes non verbaux : les mimiques du visage les marques d’intérêt, les gestes de lassitude, les bâillements, etc., que le partenaire d’interaction émet. C’est pourquoi Giddens ne dissocie pas l’aspect sémantique de la règle sociale, actualisée sous la forme de schèmes interprétatifs, de l’aspect normatif de la règle sociale, donc des sanctions qui affectent l’interaction.

Ces schèmes et [ces] sanctions sont aussi intriquées à la matérialisation du pouvoir au sein de relations différentielles et dissymétriques de pouvoir : on ne va pas saluer, par exemple, un supérieur hiérarchique, particulièrement hautain et méprisant à l’égard de ses subordonnés, de la même manière qu’un collègue de travail, avec qui l’on passe chaque semaine trois soirées à faire la fête. En fait, la dimension du pouvoir différentiel est toujours présente, dans l’action et l’interaction sociales, qui scandent le

déploiement de toute pratique. Ensemble de considérations qui méritent que l’on examine sérieusement la conscience pratique et la conscience discursive, dans leur[s] relation[s] au pouvoir, afin d’apprécier leur portée théorique, ainsi que leur effectivité empirique.

En premier lieu, on peut affirmer que, pour Giddens, les agents sociaux ont un savoir des conditions sociales dans lesquelles ils agissent. Mais ce savoir n’est pas un savoir « plein ». Il s’agit d’un savoir limité, restreint, non totalement maîtrisé. Il n’est pas, par ailleurs, transparent : il se rattache principalement à la mise en œuvre de la conscience pratique : il est, pourrait-on dire, tacite. Aspect que nous allons bientôt mettre au jour. Dire, tout d’abord, que ce savoir est restreint, c’est dire qu’il est conditionné, à la fois, par les conditions non reconnues de l’action, qui [trament] les potentialités de l’agir dans un contexte donné, et par les conséquences non intentionnelles de l’action, ses effets pervers, par exemple. D’autre part, il convient aussi de ne pas omettre les effets produits dans la pratique, notamment dans son élément discursif, sémiotique, par le fonctionnement des mécanismes de l’inconscient : ils se développent, bien entendu, à l’insu des individus et de leur conscience immédiate réfléchie.

En vérité, Giddens, formulant cette thématique, entend rompre avec cet improbable principe de non-conscience, que nombre de sociologues invoquent pour penser la régularité des pratiques. Mais ce faisant, il prend soin de ne pas concevoir les sujets compétents, connaissants que sont les agents sociaux, en tant que sujet auxquels serait conférée une conscience souveraine, spontanément auto-réfléchissante. Dans cette perspective, en effet, cette conscience serait le siège d’entités psychiques isolées et isolables (motivations, mobiles, intentions, etc.). Entités psychiques qui seraient, dès lors, conçues comme étant antécédentes à l’action, et, de ce fait, à son principe. Pour Giddens, toute action, toute pratique fait sens pour l’agent et pour autrui. C’est pourquoi les conduites, quelles qu’elles soient, ne sauraient être expliquées par des significations objectives, qui les gouverneraient, au titre de déterminants. En vérité, le sociologue britannique récuse toute vision d’un agent agi, de toute conception qui repose sur un principe de non-conscience,

et transforme, ainsi, tout agent en un véritable « cultural dope » [un idiot culturel].

Ce qu’il nous semble, maintenant, impérieux d’examiner, c’est le caractère tacite de la conscience pratique, trait que nous venons d’évoquer, et, deuxièmement, le caractère « réfléchi » de la conscience discursive. S’agissant, premièrement, de la conscience pratique, on peut avancer que l’aspect tacite qui la définit, renvoie tendanciellement à l’univers social du « taken for

granted ». Expression que nous pouvons traduire en français par

« le ça va de soi ». On le sait, c’est à Garfinkel que revient, avant tout, la mise en exergue de cette dimension cruciale de la vie sociale quotidienne. La grande majorité des actions est réalisée sous ce mode, à l’intérieur de cet univers. Ce qui veut dire, en premier lieu, que les acteurs sociaux dans la plupart des situations sociales ne s’interrogent pas sur la manière dont ils veulent agir : ils agissent, sans délibération préalable ; ils font ; et ce faire présente, néanmoins, des régularités empiriquement attestables ; il exhibe, par exemple, des routines. Routines qui sont l’un des axes de manifestation de ces régularités sociales. En sorte que l’on peut dire que la pratique excède, de façon prévalente, toute conscience réfléchie ou stratégique, au sens de l’action rationnelle en finalité, instrumentale, stratégique de l’individualisme méthodologique, dans ses variantes diverses. En fait, la rationalité instrumentale, stratégique apparaît, en réalité, étrangère à l’éventail des actions menées au jour le jour (chez soi, avec ses amis, au café et dans nombre d’autres espaces sociaux des pratiques…).

C’est, pour cette raison que l’on peut définir l’idée que la conscience pratique s’enchâsse dans la pratique. Elle est de l’ordre d’un savoir, d’un savoir pratique. Le savoir des conditions sociales dans lesquelles les individus agissent, ne peut-être séparable de ce savoir pratique. Celui-ci va être qualifié par Giddens de « savoir commun » (mutual knowledge). Il s’acquiert, plus particulièrement, au cours des processus de socialisation, mais on peut ajouter, selon nous, qu’il se complexifie, également, au fur et à mesure du développement biographique des individus. On peut soutenir, nous semble t-il, qu’il est un savoir non clos : il intègre et inscrit, sous sa forme de traces mnésiques, les expériences multiples dont

la vie sociale ordinaire est faite. Plus exactement, il inscrit ces expériences dans l’enfance, et plus tard à l’âge adulte, selon des « contours » lâches, flous, voir brouillés. Giddens, lorsqu’il construit ce concept de savoir commun va, en vérité, s’appuyer sur l’apport théorique de Schütz relatif aux « stocks of knowledge at

hand ». C’est-à-dire, en français, aux stocks ou aux réservoirs de

connaissance qui sont, en quelque sorte, mis à la disposition des agents sociaux.

Le savoir commun, dans cette perspective, ne décrit pas l’existence de dispositions durables et transposables, qui seraient incorporées, une fois pour toutes, par et dans le corps. Il s’agit, insistons sur cet aspect nodal, d’un savoir socialement composite, d’un savoir mis à disposition : dont un individu dispose. Ce qui implique que les individus ne cessent de puiser, de manière récurrente, à l’intérieur de celui-ci dans l’action, pour agir. On peut donc dire que ce savoir commun est un savoir souple, flexible, mobile, « en attente ou non » d’actualisation de ses composantes. Composantes qui peuvent être sédimentées et stratifiées, sous la forme de traces informées. Elles procèdent, en fait, sous des modalités lâches, des expériences pratiques, des pratiques, certes, inter-reliées dans une vie sociale biographique concrète, mais qui comporte une autonomie relative propre. En effet, on a toujours affaire dans le monde des pratiques sociales, à des pratiques socialement distinctes, différenciées. Ce que l’on peut appeler des pratiques à dominante, à inscription matérielle et originalité singulières (pratiques de travail, domestiques, de sociabilité, associative, sportive, politique, etc.). Pratiques qui peuvent être contradictoires entre elles chez un individu, en décalage les unes par rapport aux autres. Comme on le voit, s’agissant des contradictions qui peuvent se faire jour entre pratiques de travail et pratique familiale, pratique sexuelles et pratiques affectives. Autrement dit, le savoir commun n’est pas, selon nous, sans incorporer les contradictions des pratiques, l’expérience réitérée des contradictions et des antagonismes du monde social du capitalisme. Elles peuvent mettre à mal l’identité de soi et le projet réflexif du soi, comme instance délibérative de soi à visée d’autonomie biographique pratique.

Schütz, quand il envisage les stocks de connaissance, les compare à un livre de cuisine. Nombre de recettes, c’est sa fonction, y sont offertes, mais, on le sait, si les recettes aident à cuisiner tel plat, la dimension de la réalisation pratique du plat est l’élément décisif. Il ne suffit pas d’appliquer une recette pour cuisiner un met savoureux. Souvent, il convient de doser différemment les ingrédients. La recette guide, mais il ne convient pas de la suivre de manière stricte. C’est un guide pour l’action culinaire, en quelque sorte. Avec une même recette, deux personnes différentes feront, l’une, un plat exécrable, l’autre, un plat succulent, dont la seule vue et les parfums qu’il dégage donnent immédiatement « l’eau à la bouche » comme on dit… En réalité, là aussi, comme partout ailleurs, le critère de la pratique est déterminant.

Cette comparaison de Schütz sous semble pertinente. Mais il ne faut pas pousser trop loin l’analogie. Si effectivement la seule application de la recette ne saurait suffire à la qualité du met, et qu’en conséquence, la pratique est déterminante, une recette est, toutefois un texte écrit, concis qui objective une conduite à tenir. Or, si on examine ce qu’il en est de la mise en œuvre des règles sociales, il n’existe, par exemple, aucune règle sociale qui soit explicitement formulée à l’intérieur du savoir commun. Règle qu’il suffirait d’appliquer automatiquement aux situations que les individus rencontrent. Le savoir commun ne saurait en effet, délimiter un stock de règles sociales prêtes à l’emploi.

Le savoir commun est plutôt un savoir d’arrière-plan : il n’est pas énonçable comme tel. Il demeure implicite, tacite. On va acquérir au cours, notamment, des socialisations qu’il convient, par exemple, de saluer les personnes de notre connaissance, celles, plus particulièrement, que l’on a rencontré au moins une fois. En saluant, on notifie à ces personnes, un signe de reconnaissance, qui est aussi une manière de leur rendre hommage. Hommage rendu à leur présence qui se manifeste là, à un moment donné, ou deux trajectoires spatiales individuelles, deux unités véhiculaires, comme dirait Goffman, se croisent. Hommage également à leur soi, à son identité singulière.

En sorte que ce que l’on acquiert jamais, c’est le mode [correct] selon lequel on doit saluer dans telles ou telles

circonstances précises, à savoir le mode selon lequel une salutation donnée va répondre au cadre particulier d’une situation. Celle-ci se déroule, toujours, à l’intérieur de coordonnées spatio-temporelles définies. Songeons, par exemple, à la rencontre quotidienne, tôt le matin avant de se rendre à son travail, d’une voisine, alors qu’il fait encore nuit. Je le connais à peine, mais je le vois chaque jour, à peu près aux aurores. Ici, l’acte de salutation se modulera selon les circonstances ; je pourrais dire, simplement, « Bonjour », privant celui-ci d’un « Madame ». Je n’appuie pas, en saluant ainsi, sur son identité sexuelle, et, d’autre part, elle a approximativement mon âge, ce qui m’autorise à prononcer ce simple « Bonjour » laconique…

Au vrai, aucun apprentissage social ne peut fournir la clef d’une telle situation. Certes, nombre de situations présentent des analogies, des similitudes. Elles comportent une sorte de noyau invariant, signe de la routinisation qui la touche. Mais cela ne saurait revenir à nier les ressources d’imprévisibilité qu’elle recèlent et qui peuvent éventuellement survenir. Celles-ci peuvent être liées au jour de la semaine. Au travail, on le sait, le mercredi n’est pas le lundi et le vendredi est « mieux » que le mercredi : par exemple, la pause café de nombre de services administratifs, ou d’entreprises privées, préalable à la mise au travail est souvent la plus longue de la semaine, rivalisant avec celle du vendredi. La pause du lundi se caractérise, souvent, par la mise en scène de plaisanteries : celles-ci peuvent s’articuler à la narration du week-end de loisirs. Les plaisanteries, et les rires collectifs qu’elles peuvent provoquer, ont pour substrat un mode d’appréhension distancié du réel des pratiques, et sont, en conséquence, au principe d’imprévisibilité des conduites, conduites d’essence transgressive, notamment, qui brisent la routine quotidienne. La routine qui est celle du mardi, du mercredi et du jeudi apparaît dès lors comme suspendue.

Il s’ensuit que si, effectivement, régularité peut être synonyme de routinisation des pratiques, dans un certain nombre de cas, il faut, toutefois, prendre acte, aussi, que la régularité des pratiques est, sans doute, et cela de manière générale, non exclusive d’une singularité de leur configuration spatio-temporelle. Tenir compte de la singularité des pratiques, c’est affirmer l’existence, de ce

fait : d’une singularité nécessairement contingente. C’est pourquoi on peut dire que toute pratique, en ses régularités, réalise un accomplissement contingent ; ce dernier est localement situé, ainsi que pourrait le dire Garfinkel. Elle exige donc, l’exercice d’habiletés sociales, qui seront appropriées aux circonstances de son effectuation.

Tout cela pour soutenir, en ce qui concerne la mise en œuvre des règles sociales, que celles-ci ne peuvent être comprises que si l’on saisit cette mise en œuvre sous l’aspect des schèmes interprétatifs. Ils vont se trouver, d’une certaine façon, dans une relation d’intersection entre, d’une part, le savoir connu, en tant que savoir tacite, flou et flexible et non-exhaustif et, d’autre part, les coordonnées correctes du contexte où des individus interagissent dans la co-présence.

Dès lors, le savoir commun, comme savoir d’arrière-plan se transforme en savoir de premier plan, puisqu’il s’actualise sous la forme de schèmes interprétatifs articulés au contexte de l’action et de l’interaction en cours. Il s’opère un ajustement du savoir commun qui va prendre l’aspect de schèmes instantanés ; ceux-ci fonctionnent in situ et de visu. Par exemple, s’agissant d’une rencontre fortuite entre deux individus qui reconnaissent leur présence en se saluant, la salutation, va s’actualiser en fonction de la situation naturelle de la rencontre (un couloir d’université), du statut des individus (ils sont étudiants l’un et l’autre dans le même département), des circonstances (il se pressent pour arriver à l’heure en cours), du passé de leur première rencontre (ils ont été présentés l’un à l’autre par une amie commune, la veille, lors d’une soirée). Deuxièmement, l’acte de salutation va s’appuyer sur des éléments du savoir commun : il se réalise sous la figure de schèmes interprétatifs ; ceux-ci incorporent à leur fonctionnement les coordonnées du contexte cité.

Les règles sociales, on le voit, jouent sur le registre sémantique : elles se confondent avec des interprétations in vivo. Elles ne donnent lieu à aucune délibération de la part des interactants. C’est pour cette raison que l’on peut qualifier la conscience pratique de conscience tacite. Plus précisément, elle relève du « ça-va-de-soi ». Dans des situations analogues à celles que nous avons évoquées plus haut, les agents sociaux ne

peuvent, en aucun cas, s’attribuer un temps de délibération, impliqués qu’ils sont, simultanément et mutuellement, dans la pratique. La réciprocité des conduites s’apparente à une sorte de d’automaticité habile, à des réflexes. Mais ces réflexes, on le comprendra, n’ont rien à voir avec un jeu mécanique entre réponses et stimuli externes. Il s’agit de « réflexes sociaux », soutenus par l’existence du savoir commun, en tant que ce savoir est non explicitement articulé sous la forme des dispositions acquises. Dispositions qui ne pourraient, dans ce cas, s’actualiser dans la pratique qu’en soumettant les situations de la pratique aux schèmes qui leur sont liés, ou à des règles sociales strictes intériorisées, selon une perspective qui serait objectivement durkheimienne ou parsonienne. La mise en mouvement du savoir commun est « commandé » par les contextes et les actions qui s’y matérialisent. Il s’ensuit [que] le savoir commun ne décrit que des potentialités sociales, des ressources sociales emmagasinées : elles ont le statut de traces mnésiques. Ces potentialités se manifestent ou non, elle peuvent être mises en sommeil, mais elles sont aussi, pourrait-on dire, à l’état de veille. Leur actualisation sera raccordée à la pratique. Pour rendre intelligible ce mécanisme, il conviendrait, probablement, de recourir à la problématique aristotélicienne de la relation entre puissance et acte : c’est celui-ci qui « commande », [qui] « déclenche » l’actualisation de la puissance, la puissance n’existant alors réellement que dans l’acte qui va l’incarner.

La conscience pratique est donc bien une conscience tacite. Ce qui n’implique pas que l’on puisse la détacher des actes de parole : des schèmes interprétatifs tacites se caractérisent toujours à l’occasion de toute interaction verbale. S’il existe des processus interprétatifs directement reliés aux significations véhiculées par les énonciations verbales, ceux-ci ont également pour terrain, les indices extra- et non-verbaux qui les accompagnent inextricablement. Ce sont ces derniers qui permettent, derechef, de saisir, dans l’instant le sens implicite des actes de parole, au- delà du contenu manifeste signifiant qu’elles exhibent. Ces indices, nous l’avons déjà envisagé, se sont les mimiques du visage, les gestes qui ponctuent la parole notamment. Le verbal n’est donc pas séparable du non-verbal, de l’extra-verbal. Les

signes ne son pas réductibles à l’enchaînement ordonné de mots dans les phrases. Des significations latentes circulent. Elles peuvent renvoyer à des contextes antérieurs de rencontre, par exemple. Elles peuvent, également, se rapporter directement au contexte institutionnel de l’interacteur : celui de l’usine ou les deux interactants travaillent, et au moment historique de l’évolution économique de cette usine, saisissable lui-même à l’intérieur d’une conjoncture économique de branche et/ou globale…

La conscience pratique s’exerce, par conséquent, aussi, dans le cours même des interactions verbales. Une simple phrase comme « Passe moi le sel » va être interprétée en fonction des résonances implicites, des connotations muettes, qu’elle peut ouvrir. Illustrons cela par un exemple empirique. Si cette phrase est prononcée par un mari au cours d’un dîner en tête-à-tête avec sa femme, et que cette dernière réagit violemment à sa demande et refuse d’obtempérer, le « secret » de cette réaction, ne réside pas dans la littéralité de l’énoncé. Celui-ci, dans sa littéralité, apparaît, en effet, anodin. Il fait partie des énoncés performatifs quotidiens, ceux qui font advenir une action matérielle (ici, le déplacement de la femme vers le placard de la cuisine…). Ajoutons, au-delà de ce dernier aspect, que cette démarche peut, toutefois, signer une mauvaise habitude, où l’homme, le mari exerce un pouvoir différentiel, celui pouvant être rattaché aux effets de la domination masculine.

Comment expliquer la réaction de la femme à la demande de son mari ? Elle s’explique par le sens tacite qui s’imbrique à l’énoncé de la phrase. Ce sens va faire appel à une situation antérieure que l’homme et la femme ont vécu : ils se sont fâchés,

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