• Aucun résultat trouvé

Chapitre 3 Etude par culture de la flore microbienne des matériaux biosourcés

3.3. Caractérisation par culture des flores microbiennes in situ

3.3.2.1. Microorganismes issus des matières premières

Les matières premières ont été analysées dans un premier temps (Figure 3.9). Les quantités maximales de bactéries énumérées sont de l’ordre de 2,8 ± 0,7 x104 UFC/g pour les FAC et de 1,9 ± 0,3 x106 UFC/g pour la paille. Pour les moisissures, environ 2,6 ± 0,3 x102 UFC/g ont été détectées pour la FAC et 6,7± 0,1 x103 UFC/g pour la paille. La paille contiendrait donc significativement plus de microorganismes que la FAC, bactéries et champignons confondus.

Figure 3.9 : Unités formant colonie (moyennes ± écarts-types ; trois essais indépendants en triplicats techniques) par gramme de FAC (orange) et de paille (vert).

Les microorganismes isolés lors des essais ont été caractérisés sur la base de leurs phénotypes macroscopiques et microscopiques, ainsi que par spectrométrie de masse MALDI- TOF dans le cas des bactéries.

FAC

Pour la FAC, la majorité des isolats bactériens sont des bacilles à Gram + capables de croître dans des conditions aérobies (Tableau 3.5). Une identification plus poussée par spectrométrie de masse MALDI-TOF a révélé parmi ces bacilles une forte prédominance du genre Bacillus, avec différentes espèces, ainsi que d’autres genres proches (Paenibacillus, Solibacillus). Quelques coques à Gram + comme Micrococcus luteus et Staphylococcus pasteuri ont également été identifiés. Dans le cas des champignons, il a été possible de quantifier le nombre d’UFC pour chaque isolat. Les genres fongiques isolés sont principalement Penicillium (environ 40 % des UFC ; 4 isolats), Aspergillus (35 % ; 3 isolats),

0 1 2 3 4 5 6 7 Bactéries Champignons log1 0( U F C /g) FAC Paille * *

- 139 -

Cladosporium (10 % ; 2 isolats) et plus rarement, Rhizopus (2 % ; 1 isolat) et Ulocladium (2 % ; 1 isolat) (Figure 3.10).

Paille

Comme pour la FAC, les isolats bactériens provenant de paille sont principalement des bacilles à Gram +, avec Bacillus megaterium, Curtobacterium flaccumfaciens et Paenibacillus amylolyticus, ainsi que des coccobacilles ou coques à Gram + avec Arthrobacter scleromae et Staphylococcus epidermidis (Tableau 3.5). Contrairement aux FAC, des bacilles à Gram – ont été détectés au sein de la paille. Les isolats fongiques appartenaient principalement aux genres Aspergillus (environ 95 % ; 4 isolats), avec quelques Penicillium (2 % ; 2 isolats) et Rhizopus (2 % ; 1 isolat). Les phénotypes bactériens et fongiques observés sur milieu de culture à partir des prélèvements de la paille ont montré une richesse deux fois moins importante que celle de la FAC.

Tableau 3.5 : Identification des isolats bactériens (morphologie et signature MALDI TOF) et fongiques (identification morphologique) obtenus après isolement respectivement sur milieu TSA et

milieu PDA pour les matières premières.

Catégorie FAC Paille

Bactéries

Bacille à Gram + non

identifié Arthrobacter scleromae

Bacillus licheniformis Bacille à Gram + non identifié Bacillus mycoides Bacille à Gram - non identifié Bacillus simplex Bacillus megaterium

Bacillus subtilis Curtobacterium flaccumfaciens Bacillus thuringiensis Paenibacillus amylolyticus Micrococcus luteus Staphylococcus epidermidis Paenibacillus glucanolyticus Solibacillus silvestris Staphylococcus pasteuri Champignons Aspergillus sp. Aspergillus sp. Cladosporium sp. Penicillium sp. Penicillium sp. Rhizopus sp. Rhizopus sp. Ulocaldium sp.

- 140 -

Figure 3.10 : Observations par microscopie optique d’isolats d'Aspergillus sp. (A), Penicillium sp. (B) et Rhizopus sp. (C) après coloration au bleu coton (G x400).

3.3.2.2. Prélèvements et quantification sur des éprouvettes manufacturées

La figure 3.11 présente les UFC énumérées par cm² d’adhésif après prélèvement de la surface des éprouvettes cylindriques FAC-S0 % et FAC-S3 %, avant l'étape de séchage (Figure 3.11.A) ou après (Figure 3.11.B).Les éprouvettes FAC-S3% non séchées contenaient en moyenne 1 log10 de bactéries et de champignons par cm² d’adhésif de plus que les éprouvettes FAC-S0% non séchées. Bien que les éprouvettes FAC-S3% ne contiennent que 3 % de paille, l'addition de fibres végétales a conduit à la détection d'une quantité plus importante de microorganismes à la surface des éprouvettes qu’avec la terre seule. Les isolats obtenus sur les éprouvettes cylindriques étaient identiques à ceux retrouvés dans les deux types de matières premières.

Les prélèvements sur éprouvettes FAC-S0 % après séchage contenaient en moyenne 3 UFC d’isolats bactériens par cm² d’adhésif alors que, avant l’étape de séchage, la quantité de bactéries était de 2,6 ± 2,3 x103 UFC/cm². De même, les prélèvements des éprouvettes séchées FAC-S3 % contenaient en moyenne 10 UFC/cm² alors que les éprouvettes non séchées de même composition présentaient initialement 2,7 ± 2,2 x104 UFC/cm² à leur surface. Aucune valeur n’est indiqué pour les moisissures sur des éprouvettes après séchage car en moyenne moins d’1 UFC/cm² a été obtenue.

Afin de confirmer l'absence ou la présence de moisissures dans les éprouvettes séchées, un prélèvement a été effectué sur la surface et à l'intérieur des éprouvettes cylindriques puis le film adhésif a été directement déposé sur milieu de culture (Figure 3.12). Très peu de moisissures ont été isolées à partir de ces prélèvements de surface: moins d'un isolat par prélèvement, et seulement sur les éprouvettes FAC-S3 %. Mais dans le cas des prélèvements réalisés à l'intérieur des éprouvettes, diverses moisissures ont été observées. Ces résultats

- 141 -

suggèrent que certains microorganismes ont survécu à l'étape de séchage, et en particulier au cœur des produits manufacturés.

Figure 3.11 : Unités formant colonie (moyennes ± écarts-types; trois essais indépendants en triplicats techniques) par cm² prélevé obtenues lors des prélèvements à la surface des éprouvettes non séchées

(A) ou séchées (B).

Figure 3.12 : Isolats obtenus après 7 jours d’incubation à 22,5°C à partir des prélèvements réalisés par adhésif à la surface (à gauche) et à l’intérieur (à droite) des éprouvettes FAC-S0 % (A) et FAC-S3 %

(B) séchées.

3.3.2.3. Observation du développement microbien en condition de forte humidité en laboratoire sur éprouvettes manufacturées

Des éprouvettes cylindriques séchées ont été observées pendant trois mois en (i) condition sèche et (ii) condition humide. La condition humide correspond à une humidification totale du matériau avec de l’eau liquide. Elle a été mise en œuvre par remontée capillaire. Aucun développement visible à l’œil nu de moisissure n’a été observé sur les éprouvettes en condition sèche. Après un mois en condition d’humidité élevée, quelques mycéliums blancs sont apparus sur les éprouvettes de chaque composition et se sont lentement développés. À 6 semaines, des moisissures se sont fortement développées sur les éprouvettes

0 1 2 3 4 5 Bactéries Moisissures log10( UF C/c m ²) Bactéries Moisissures B A A B *

- 142 -

FAC-S0 % (Figure 3.13.A). Dans le même temps, pour les éprouvettes FAC-S3 % (Figure 3.13.B), deux d’entre elles ont présenté un important recouvrement par des moisissures noires. Le développement de moisissures dans les éprouvettes séchées mises en condition humide a confirmé les observations de la section 3.3.2.2, à savoir la persistance de moisissures dans l’éprouvette après séchage. Après 2 mois, le développement plus tardif de moisissures différentes a été observé à la surface des éprouvettes, avec une hétérogénéité quant à la localisation du développement. Ces résultats suggèrent que, même si certaines moisissures survivent au traitement thermique dans les échantillons, toutes n’ont pas la même cinétique de revivification et de croissance dans le matériau.

Figure 3.13 : Observations d’éprouvettes FAC-S0 % (A) et FAC-S3 % (B) après incubation à température ambiante pendant deux mois en condition humide (à gauche sur les photos) et en

condition sèche (à droite sur les photos).

La figure 3.14 présente les résultats de numération des bactéries (Figure 3.14.A) et des champignons (Figure 3.14.B) des prélèvements réalisés à la surface et à l’intérieur des éprouvettes pour chaque condition d’humidité après 3 mois. Dans le cas des éprouvettes humides, un des prélèvements de surface a été effectué sur une zone, notée Surface-M, où un mycélium était visible. Pour ce qui est des éprouvettes restées en condition sèches, aucune différence significative n’a pu être observée entre la surface et l’intérieur de l’éprouvette, et ce quelle que soit leur composition. Cependant, la quantité de bactéries prélevées après 3 mois se situe entre 8,5x101 UFC/cm² et 4,1x102 UFC/cm² alors qu’elle était inférieure à 101 UFC/cm² à la sortie de l’enceinte thermique. De même, des moisissures ont pu être détectées après 3 mois, ce qui n’avait pas été le cas juste après séchage. Il y a donc eu développement des microorganismes dans le produit malgré la condition « sèche » (HR ambiante). Lorsque les éprouvettes ont été mises en condition humide, un développement bactérien très important a pu être observé pour les deux compositions, que ce soit en surface ou à l’intérieur. Les éprouvettes FAC-S0% humides n’ont pas présenté significativement plus de moisissures à

A B

- 143 -

leur surface que celles en condition sèche, excepté dans la zone où le mycélium est visible, en accord avec un développement de moisissures très localisé ou une phase de latence très longue. Une augmentation significative de la quantité de champignons détectés à l’intérieur des éprouvettes humides peut toutefois être notée par rapport aux éprouvettes sèches, validant la deuxième hypothèse. Les prélèvements de l’éprouvette FAC-S3 % mise en condition humide ont révélé de leur côté une importante contamination fongique, y compris au niveau des surfaces ne présentant pas de mycélium visible et à l’intérieur. Enfin, les éprouvettes humides FAC-S3% présentent significativement plus de microorganismes que les éprouvettes humides FAC-S0%, hors zone de mycélium apparent. La paille pourrait donc avoir un rôle à la fois dans l’apport de contamination mais également en favorisant le maintien et le développement secondaire des microorganismes.

Figure 3.14 : Unités formant colonies (moyennes ± écarts-types; deux éprouvettes par condition) de bactéries (A) et de champignons (B) par cm² obtenues lors des prélèvements à la surface et à

l’intérieur des éprouvettes en fonction de leur condition d’humidité.