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Le mariage de Colladon. Ses maisons à Bourges et ses domaines à la campagne

Descendant d'une famille influente et réputée, « des myeux provens » 44, Germain Colladon, lecteur à l'Université et avocat au Parlement de Bourges, put s'allier par mariage à l'une des plus anciennes et des plus considérables familles de Berry en épousant la toute jeune Claude Bigot 45, âgée de 15 ans et 9 mois seulement 46, fille de feu noble Nicolas Bigot, seigneur des Fontaines, conseiller du roi et lieutenant général du bailli de Berry 47, et de feu Cathrine Chevrier (ou Charrier), sa femme. Le contrat de mariage, que nous avons retrouvé à Bourges, fut dressé en bonne et due forme le 25 juin 1536 par un ami des Colladon, le notaire Jean Ragueau 48; il stipule, conformément à la Coutume de Berry 49, la communauté des biens meubles et conquêts immobiliers, précise très exactement la valeur et la nature des biens apportés par la future épouse 50 et comporte enfin les clauses usuelles de l'époque en fixant les droits et avantages de chacun des époux, notam-ment le préciput et le douaire de la veuve et le gain de survie du mari en cas de prédécès de sa femme 51Le mariage lui-même fut célébré un mois plus tard, le 24 juillet de la même année 52; il allait durer jusqu'à la mort de Claude, décédée le 18 juin 1571, atteinte de la peste 53

44 Cf. les «Lettres des juges de Bourges», déjà mentionnées v. p. 28, n. 41.

46 Sa belle-sœur, Guimon Bigot, sœur de Claude, était la femme de Léon Colladon, son frère.

46 Cf. David Colladon, I.e., p. 61.

47 Cf. Thaumas de la Thaumassière, Histoire du Berry, p. 1030 ss.

48 Cf. Archives du Cher, Min. Jean Ragi.1eau du 25.6.1536; v. infra.

49 Cf. Henri Mallard, Le droit des gens mariés d'après les coutumes du Berry, thèse Paris 1905.

60 Notre contrat fixe la valeur de ces biens à 1500 livres tournois, dont 1000 auront

«nature d'héritage propre» à Claude Bigot, 500 «nature de meubles».

61 Pour les détails, v., infra.

52 Cf. David Colladon, I.e., p. 61.

63 Cf. AEG Registre des décès, XI, fol. 4.

De ce mariage devaient naître douze enfants 5'1: les sept premiers à Bourges; les cinq derniers à Genève 55 Les plus connus sont:

Claude (1546-1606), qui était dès 1578 (sinon déjà plus tôt) secrétaire du prince Henri de Condé et fut, en 1583, son émissaire en Allemagne, pour devenir plus tard « conseiller du Roi (Henry IV) et maître des requêtes en son hôtel de Navarre» 56; David (1555-1635), qui fut professeur de droit l'Aca-démie de Genève dont il fut également le recteur pendant quatre ans, ayant

·été élu à cette charge en 1596 et réélu en 1598 60; né en 1562, il mourut le 18 juillet 1611; en regard de la mention qui le concerne sur le registre des décès, on lit les mots: «maximum scholae et pauperum detrimentum »,note dont le laconisme éloquent nous apprend à la fois les succès qu'obtenait le professeur dans sa chaire et les habitudes charitables que pratiquait l'homme privé 61

Germain Colladon possédait une fortune considérable. Les « lettres réquisitoires des juges de Bourges » 62 relèvent sa richesse, sans d'ailleurs

«Mémoires sur l'histoire de Genève», qu'il paraît avoir vus mais qui ont disparu depuis;

cf. Dufour, I.e., p. 63 ss. Quant au «Livret de famille» de David Colladon, v. supra.

58 Ce «Journal» fut retrouvé et édité (en 1883) par John Jullien, avec une introduction de Théophile Dufour.

59 Il a été, paraît-il, le médecin de Théodore de Bèze; cf. Dufour, dans son introduction p. VII au «Journal» d'Esaïe Colladon que nous venons de citer.

spécifier en quoi elle consistait 63Une première précision nous est fournie cependant par le contrat de mariage de Colladon de 1536: d'autres rensei-gnements nous sont donnés par des sources postérieures, par des textes littéraires et par une série d'actes notariés que nous avons pu recueillir aux Archives de Bourges et de Genève. Il en résulte que Colladon était non seulement titulaire de rentes foncières qui lui assuraient, selon la pratique si largement répandue au

xvre

siècle, un revenu annuel et perpétuel 64, mais qu'il était aussi - surtout - propriétaire d'un complexe notable de biens immobiliers, de maisons en ville et de terres à la campagne.

A Bourges, Colladon était propriétaire, depuis son mariage ou peu après, d'une grande maison 65, comprenant cour, jardin, étable, de vastes celliers voûtés, des greniers et des magasins étendus, « assise » en la rue d'Orron (aujourd'hui la rue des Beaux-Arts), près du couvent des Carmes 66 D'appa-rence quelque peu claustrale par sa haute façade formant pignon sur la rue et ornée d'une large fenêtre surmontée à son tour de trois arcs brisés, cette maison était à l'époque (et est encore de nos jours) un des hôtels parti-culiers les plus importants de Bourges, bien qu'elle ne possède ni la splen-deur de la maison de Cujas ni le faste somptueux du palais de Jacques Cœur.

Construite au XIIIe siècle(?), peut-être sur des fondations romaines 67, par les religieux de l'abbaye bénédictine de Saint-Sulpice (située aux portes de la ville) 68 pour lui servir de refuge 'intra muras', elle avait déjà subi de nombreuses transformations au cours des temps, lorsque Colladon en

63 L'auteur du libelle mentionné à la p. 27, n. 39, estime que les frères Léon et Germain Colladon étaient « riches de plus de vingt mille».

64 V. Archives du Cher, Min. Adenet Dorléans du 20.4.1543 (quittance donnée par Germain Colladon et sa femme, concernant «le remboursement d'une rente portant sur une somme de 226 livres tournois payables en or»); v. aussi ibidem Min. Jehan Girardeau du 5.1.1549 (n. st.), relatif à la constitution en faveur de Colladon d'une rente annuelle, perpétuelle et foncière» (de peu de valeur), assise sur une vigne à Sainte-Solange. Claude Bigot était également titulaire d'une rente de 13 livres tournois pour une somme de 200 livres; v. son contrat de mariage déjà mentionné.

65 Cf. Jean Chaumeau, Histoire du Berry (1566), p. 235, selon lequel la maison en question était en 1538 «de nouvel acquise». L'acte notarié relatif à cette acquisition de Colladon ne s'est pas retrouvé à Bourges et nous ignorons aussi le prix d'achat de la dite maison.

66 Un acte du notaire Barthélémy Ragueau du 25.10.1566, dont nous ne connaissons que la transcription dans !'Inventaire des titres de Notre-Dame de Fourchault (Archives du Cher, 4 H 261, n° 16, v. aussi 4 H 2), donne la description et les limites exactes de la maison Colladon.

67 En creusant un puits dans sa maison, Colladon trouva, enfoui dans la terre, un vrai trésor romain; plusieurs fragments de marbre, une statue de marbre, un vase funéraire et une grande quantité de monnaies et médailles romaines impériales; cf. Chaumeau, I.e., p. 235; v. aussi Cathérinot, Bourges souterrain (1685), p. 3.

68 Du côté de la route d'Orléans.

32 ERICH-HANS KADEN

fit

l'acquisition et la remania une nouvelle fois

.

Il remplaça l'escalier par