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développemental d’un État « riche »

1.1. Un marché émergent

Ces cinq dernières années, il y a eu un regain d’intérêt pour le marché nigérian en tant que « marché émergent ». L’expression « marché émergent » a été forgée par Antoine van Agtmael en 1981. Elle fait référence à un pays sortant de la pauvreté et du sous-développement et s’engageant dans un processus de réformes116. Les marchés émergents sont considérés comme la dernière frontière du commerce international117. Bien qu’il n’en existe pas de définition claire, ils présentent certaines caractéristiques communes. Quelles sont-elles ? Ils apparaissent dans des pays en développement (PED) et connaissent des périodes de forte croissance

116 Van AGTMAEL, Antoine, The Emerging Markets Century: How a New Breed of World -Class Companies is

Overtaking the World, New York: Free Press, 2007; JAFFRELOT, Christophe, (dir.), L’Enjeu mondial : les pays émergents, Paris : Les Presses de Sciences Po-L’Express, 2008. L’expression “marché emergent” est parfois employée

dans le sens de l “économie émergente”. Par exemple, Arnold et Quelch (1998) ont défini une économie émergente en reference à un pays dont l’économie connait un taux de croissance rapide, est fondé sur un système de marché libre et où le government favorise la libéralisation économique. ARNOLD, David J., QUELCH, John A., “New Strategies in Emerging Markets”, Sloan Management Review, Vol. 40, No. 1, 1998, pp. 7-20.

La plupart des travaux sur les marchés emergents provienn ent des domaines de finance et de gestion. Nous avons: HOSKISSON, Robert E., EDEN, Lorraine, LAU, Chung M., WRIGHT, Mike, “Strategy in Emerging Economies”, The

Academy of Management Journal, Vol. 43, No. 3, 2000, pp. 249 – 267; MEYER, Klaus E., ESTRIN, Saul, BHAUMIK,

Sumon K., PENG, Mike W., “Institutions, Resources and Entry Strategies in Emerging Economies”, Strategic

Management Journal, Vol. 30, No.1, 2009, pp. 61 – 80; XU, Dean, MEYER, Klaus E., “Linking Theory and Context:

‘Strategy Research in Emerging Economies’ after Wright et al. (2005)”, Journal of Management Studies, Vol. 50, No. 7, 2013, pp. 1322-1346. MOBIUS, Mark, The Little Book of Emerging Markets : How to Make Money in the World’s

Fastest Growing Markets, Singapore : John Wiley & Sons, 2012.

117 BACH, Daniel C, “Africa in International Relations: The Frontier as Concept and Metaphor”, South African Journal

économique. Celles-ci s’avèrent suffisamment significatives pour attirer les investissements, notamment étrangers.

En général, les marches émergents présentent certaines caractérisques économiques et politiques dont : une expansion des marchés financiers, une rapide et facile accès au marché local, une main-d'œuvre peu coûteuse, des coûts de production peu élevés, de bonnes infrastructures, une stabilité politique et économique, un cadre juridique et institutionnel efficace118. En outre, ils sont en général situés dans des pays qui sont des puissances régionales. Ces pays, souvent très peuplés, forment d’immenses marchés. Ils sont considérés par les observateurs comme des acteurs régionaux de premier plan non seulement au niveau économique et social mais aussi politique.

Au cours de la dernière décennie, le Nigéria a connu une très forte croissance économique avec un taux minimum de six pour cent par an119. L’expansion de son économie et l’essor de sa classe moyenne120 présentent des opportunités pour l’investissement surtout en cette période de crise économique et financière mondiale. L’attrait actuel de l’économie nigériane trouve aussi son origine dans les réformes engagées par le pays depuis sa transition démocratique de 1999. Les réformes économiques visaient la diversification de l’économie. Étaient organisées sa privatisation, sa déréglementation, sa stabilisation et la suppression de certaines barrières à l’investissement. Enfin, la réforme du secteur bancaire a eu lieu en deux phases, 1999-2004 puis 2005-2006121.

118 KEHL, J.R., « Emerging Markets in Africa », African Journal of Political Science and International Relations , Vol. 1, No. 1, 2007, pp. 1-8.

119 AfDB, OECD, UNDP, UNECA, African Economic Outlook: Nigeria, 2012.

120 La classe moyenne était estimée à 22, 8 pour cent de la population en 2011. La Banque Africaine de Développement propose trois catégories de classes moyennes: une classe moyenne flottante (2 à 4 dollars américains/par jour), une classe moyenne inférieure (4 à 10 dollars américains par jour) et une classe moyenne supérieure (10 à 20 dollars américains par jour). Ce pourcentage recouvre toutes les catégories confondues. AFRICAN DEVELOPMENT BANK, “The Middle of the Pyramid: Dynamics of the Middle Class in Africa”, Market Brief, African Development Bank, 20 avril, 2011. Cependant le bureau national des statistiques estime les classes moyennes à 30 pour cent. NATIONAL BUREAU OF STATISTICS (NBS), The Middle Class in Nigeria: Analysis of Profile, Determinants and Characteristics (1980 – 2007), Abuja (Nigeria): Federal Republic of Nigeria, 2007; McKINSEY, “Africa’s Growing Giant: Nigeria’s New Retail Economy”, Consumer and Shopper Insights, décembre 2013.

121 Ces réformes sont articulées dans le programme de politique économique, la National Economic Empowerment and

Development Strategy (NEEDS). NIGERIAN NATIONAL PLANNING COMMISSION, National Economic Empowerment Development Strategy (NEEDS), 2005; OKONJO-IWEALA, Ngozi, Reforming the Unreformable: Lessons from Nigeria, Massachusetts/London: The MIT Press, 2012; OKONJO-IWEALA, Ngozi, OSAFO-KWAAKO, Philip,

Des réformes politiques ont également eu lieu. Celles-ci instauraient des structures publiques de lutte contre la corruption, telles que l’Independent Corrupt Practices and other related Offences Commission (ICPC) en 2000 et l’Economic and Financial Crimes Commission (EFCC) en 2003. En outre, le Nigéria a adhéré à l’initiative Extractive Industries Transparency Initiative (NEITI), pour promouvoir la transparence dans le secteur pétrolier. Les promoteurs de ces réformes estimaient nécessaire de privatiser les entreprises publiques, notoirement peu efficaces jusque-là. Ils souhaitaient aussi attirer davantage l’Investissement Direct Étranger (IDE) pour diversifier l’économie.

En réponse à ce second objectif, furent mises en place des mesures pour créer un environnement favorable à l’investissement venu d’ailleurs. Elles comportaient des soubassements politiques : elles furent impulsées par le président en exercice à l’époque, Olusegun Obasanjo. Ce dernier voulait renverser l’image internationale d’État paria que ternissait sa réputation lors de sa venue au pouvoir. Sur le plan interne, il souhaitait que son gouvernement soit reconnu comme légitime au Nigéria car son élection avait été perçue comme le résultat d’un processus électoral corrompu. Sur la scène internationale, il aspirait à jouer le rôle d’un homme d’État africain de première importance, au-delà des simples frontières du continent122. Au surplus, le pays avait besoin de voir annulée sa dette auprès du Club d e Paris. Le pays devait se montrer méritant pour que soit prise en considération sa demande d’annulation de la dette. Autrement dit, le Nigéria, malgré sa grande richesse pétrolière, était endetté, au même titre que des pays plus pauvres sans ressource naturelle. La manifestation d’une transparence accrue en matière de gestion des revenus pétroliers s’inscrit dans cette stratégie.

En 2005, ces réformes ont portées leurs fruits lorsque le pays a obtenu un allégement de son passif à hauteur de 18 milliards de dollars américains123 auprès

“Nigeria’s Economic Reforms: Progress and Challenges”, Working Paper No. 6, Brookings Global Economy and Development, Washington D.C.: The Brookings Institution, 2007.

122 SHAXSON, Nicholas, Nigeria’s Extractive Industries Transparency Initiative, Just a Glorius Audi t ?, London : Chatham House, 2009, p. 15.

123 Soit presque 60 pour cent de sa dette. Voir OKONJO-IWEALA, Ngozi, Reforming the Unreformable…2012; BBC,

du Club de Paris. Cela a permis au pays d’obtenir des cotes de crédit souverain et ainsi attiré les investissements dans des secteurs non-pétroliers dont : les télécommunications, la construction, la finance, l’agricult ure, le commerce de gros et de détail, l’hôtellerie, la restauration et l’industrie124. Enweremadu (2013) a signalé que, contrairement aux idées reçues, l’amélioration des performances économiques implique que :

« Nigeria’s earlier problems were not just the result of ‘bad politics’ – corruption, political instability and territorial fragmentation…. - but were also the result of ‘flawed policies’ »125.

Cependant, la diversification de l’économie est encore loin d’être complètement réalisée. La croissance économique s’explique en grande partie par l’augmentation du prix du baril de pétrole brut pendant cette période. Entre 2001 et 2011 le prix du pétrole brut par baril a augmenté, passant de 24 à 113 dollars américains126. Entre 2003 et 2011 le pays a reçu plus de 116 milliards de dollars d’IDE127 dont quatre-vingt pour cent destinés à l’industrie pétrolière. Ce secteur, et par conséquent, les entreprises pétrolières qui l’occupent, tiennent une place prépondérante dans l’économie nationale. Il compte pour plus de quatre cinquièmes des recettes publiques128.

À la suite des attentats terroristes du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis et des guerres au Moyen Orient, le Nigéria a bénéficié de la nouvelle ruée vers les hydrocarbures du Golfe du Guinée. Le pays a également bénéficié de la croissance économique des géants asiatiques (la Chine et l’Inde). Cela a engendré une hausse de la demande et des prix des ressources naturelles129. Le Nigéria a profité de cette

124 AfDB, OECD, UNDP, UNECA, African Economic ….2012.

125 ENWEREMADU, David U., “Nigeria as an Emerging Economy? Making Sense of Expectations”, South African

Journal of International Affairs, Vol. 20, No. 1, 2013, p. 60.

126 ORGANIZATION OF THE PETROLEUM EXPORTING COUNTRIES (OPEC), Annual Statistical Bulletin, 2012. 127 ERNST & YOUNG, Building Bridges, Ernst & Young’s 2012 Attractiveness Survey: Africa , p. 50.

128 GARY, Ian, KARL, Terry, Bottom of the Barrel: Africa’s Oil Boom and the Poor, Catholic Relief Services, 2003. 129 Voir FRYNAS, Jêdrzej G., PAULO, Manuelo, “A New Scramble for African Oil? Historical, Political and Business Perpectives”, African Affairs, Vol. 106, No. 423, 2007, pp. 229 – 251; DE OLIVEIRA, Ricardo Soares, “The Geopolitics of Chinese Oil Investment in Africa”. Paper delivered at FLAD-IPRI Conference, Lisbon, 12 – 13 octobre 2006; SHIKWATI, James, “Africa as a New Frontier: Global Competition for Oil and India's Approach”, pp. in BERI, Ruchita, SINHA, Uttam Kumar, (eds.), Africa and Energy Security, Global Issues, Local Responses , New Delhi: Academic Foundation & Institute for Defence Studies and Analyses, 2009 , pp. 31-48; BACH, Daniel, “Africa's Commodity Boom: The Pitfalls of Change without Reform”, in BERI, Ruchita, SINHA, Uttam Kumar, (eds .), Africa and Energy Security,

situation, principalement grâce à la qualité et à la quantité de ses hydrocarbures et aux conditions contractuelles favorables pour les investisseurs130.

Selon la définition de van Agtmael, les marchés émergents devraient être en mesure de diminuer la pauvreté. Autrement dit, la croissance économi que des marchés émergents devrait accélérer la transition économique vers le développement131. Cela a été le cas dans les pays marchés émergents tels que la Chine, et la Corée du Sud132. Cependant, le même phénomène n’est pas observable au Nigéria. Sa forte croissance économique n’a pas contribué à la réduction de la pauvreté. Enweremadu (2013) souligne que la représentation extérieure que l’on peut avoir du Nigéria, en tant que marché émergent, est bien loin de la réalité de beaucoup de Nigérians133. Le nombre des pauvres continue à augmenter malgré la croissance économique. Le pourcentage d’individus vivant dans la pauvreté extrême134 est passé de 54,7 pour cent en 2004 à 60,9 pour cent en 2010135, malgré une hausse du Produit Intérieur Brut (PIB) par habitant (parité de pouvoir d’achat) de 853 à 2102 dollars américains entre 2001 et 2012. D’après Yemi Kale, le statisticien en chef du pays : « It remains a paradox […] that despite the fact that the Nigerian economy is growing, the proportion of Nigerians living in po verty is increasing every year »136.

…2009, pp. 81-90; YATES, Douglas, “Changing Patterns of Foreign Direct Investment in the Oil -Economies of the Gulf

of Guinea”, in TRAUB-MERZ, Rudolf, YATES, Douglas, (eds.), Oil Policy in the Gulf of Guinea, Security & Conflict,

Economic Growth, Social Development, Friedrich-Ebert-Stiftung, 2004, pp. 38-50; DIETERICH, Johannes, “The Gulf of

Guinea and the Global Oil Market: Supply and Demand”, in TRAUB-MERZ, Rudolf, YATES, Douglas, (eds.), Oil

Policy in the Gulf of…2004, pp. 28 – 37; ALDEN, Chris, LARGE, Daniel, OLIVEIRA, Ricardo Soares, (eds.), China Returns to Africa, A Rising Power and a Continent Embrace , New York: Columbia University Press, 2008; OBI, Cyril,

“African Oil in the Energy Security Calculations of China and India”, in CHERU, Fanta, OBI, Cyril, (eds.), The Rise of

China and India in Africa, London/New York: Zed Books, Nordiska Afrikainstitutet, 2010, pp. 181 – 192.

130 BERI, Ruchita Beri, SINHA, Uttam Kumar, (eds.), Africa and Energy Security, Global Issues….2009.

131 OECD, “Special Focus: Inequality in Emerging Economies (EES)”, in OECD, Divided We Stand, Why Inequality

Keeps Rising, 2011, p. 48; VERCUEIL, Julien, Les pays émergents: Brésil – Russie – Inde – Chine…Mutations économiques et nouveaux défis, Paris: Editions Bréal, 2010; CZINKOTA, M. R., RONKAINEN, I. A., “International

Business and Trade in the Next Decade: Report from a Delphi Study” , Working Paper 1777-25-297, Washington D.C.: Georgetown University, 1997.

132 THIÉBAULT, Jean-Louis, « Comment les pays émergents se sont-ils développés économiquement ? La perspective de l’économie politique », Revue internationale de politique comparée, Vol. 18, No. 3, 2011, pp. 11-46.

133 ENWEREMADU, David U., “Nigeria as an Emerging Econom y?....2013.

134 La pauvreté extrême est une condition dans laquelle une personne est priée de l’accès aux ressources et services (tels que l’eau potable, la nourriture, l’hébergement) pour assurer un niveau de vie minimum.

135 NATIONAL BUREAU OF STATISTICS, The Nigeria Poverty Profile 2010 Report, 2012.

136 Dans SUBAIR, Gbola, “Nigeria’s poverty level rises, hits 71.5% Sokoto, Niger top list of Poorest States”, Nigerian

Ce paradoxe est dû à une profonde disparité des revenus. La majeure partie de la richesse découlant de la croissance économique est concentrée dans quelques mains. En 2009, environ 20 pour cent de la population détient 65 pour cent du patrimoine national137. L’indice du développement humain138 des Nations Unies classe toujours le Nigeria dans la catégorie à faible développement humain. Le pays est classé 153ème pays sur 187 ; ce qui le place en dessous de la moyenne de l’Afrique Sub-saharienne139. Le pourcentage de la population vivant dans la pauvreté a augmenté de 60 pour cent entre 2004 et 2010140. Ce contexte a notamment contribué à l’augmentation de la violence dans quelques régions du pays, particulièrement dans la partie nord où il existe une incidence élevée de la pauvreté141.

Le pourcentage de la population au chômage a doublé entre 2006 et 2011142. La croissance économique n’a pas favorisé sa réduction car les secteurs qui présentent la perspective de croissance la plus importante (le pétrole et le gaz) sont enclavés. Ce sont de secteurs économiques à forte intensité de capitaux : elles ne génèrent pas beaucoup d’emplois. De surcroît, le taux de croissance de la population active dépasse celui de la création des emplois143. L’espérance de vie n’est que de 51 ans, 42 pour cent de la population n’a pas accès à l’eau potable et 69 pour cent à des installations sanitaires de base. Le ratio médecin-patient n’est que 1 pour 1000. 143 enfants sur mille meurent avant l’âge de 5 ans et 23,1 pour cent de ceux qui sont vivants souffrent d’insuffisance pondérale. Le taux de mortalité maternelle est de 630 décès pour 100 000 naissances pour lesquelles la mère s’en sort vivante, un taux parmi le dix plus critiques au monde144. Ces chiffres révèlent des défis importants en matière de développement dans ce pays.

137 UNDP, Human Development Report Nigeria 2008 – 2009: Achieving Growth with Equity, Abuja: United Nations Development Programme, 2009, p. 19.

138 L’indice du développement humain mesure et classe les niveaux de développement social et économique des pays selon les progrès réalisés dans les domaines de : la santé, l’éducation et la qualité de vie.

139 UNITED NATIONS DEVELOPMENT PROGRAMME (UNDP), “The Rise of the Global South…2013. 140 NATIONAL BUREAU OF STATISTICS (NBS), The Nigeria Poverty Profile… 2010.

141 SUBAIR, Gbola, “Nigeria’s poverty level rises, hits 71.5% Sokoto….2012.

142 NATIONAL BUREAU OF STATISTICS (NBS), The Nigeria Poverty Profile…. 2010.

143 NNODIM, Okechukwu, « Nigeria’s Unemployment Rate rises to 23.9% - NPC », Punch, 11 octobre 2013. 144 UNITED NATIONS DEVELOPMENT PROGRAMME (UNDP), “The Rise of the Global South ….2013.

Quelques progrès ont toutefois été réalisés, parmi les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD)145, notamment dans l’universalité de l’enseignement primaire, la réduction de certaines maladies et le partenariat mondial pour le développement. Neuf enfants sur dix sont inscrits à l’école primaire mais le taux d’achèvement de la scolarité primaire varie entre le Nord et le Sud. Seulement 2 pour cent des enfants inscrits terminent leurs études dans le Nord et 99 pour cent dans le Sud. On observe donc des inégalités considérables dans le taux d’achèvement de la scolarité146. Le nombre de cas de poliomyélite a diminué de 98 pour cent entre 2009 et 2010. La prévalence du VIH147 chez les femmes enceintes (entre 15 à 24 ans) a chuté de 5,8 pour cent en 2001 à 4,2 pour cent en 2008. Quant à la mise en place d’un partenariat mondial pour le développement, le service de la dette ne représentait plus que 0,5 pour cent des exportations en 2008 contre 15,2 pour cent en 2005148. Les autres objectifs ne devraient pas être réalisés avant 2015. Au vue de ces éléments, ainsi que la persistance de la corruption, la mauvaise gouvernance, la violence et l’instabilité politique il est prématuré de qualifier le Nigéria de marché émergent149.

En outre, la croissance économique n’a pas entraîné des investissements significatifs dans les infrastructures et les services sociaux150. Les entreprises ne

145 Les OMD sont huit objectifs mondiaux de développement adoptés en 2000 par l’ON U et 23 organisations internationales. Ces objectifs sont : éliminer l’extrême pauvreté et la faim ; assurer l’éducation primaire pour tous ; promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes ; réduire la mortalité infantile ; améliorer la santé maternelle ; combattre le VIH/SIDA, le paludisme et d’autres maladies ; préserver l’environnement ; et mettre en place un partenariat mondial pour le développement. Ils devraient être atteints en 2015.

146 GOVERNMENT OF THE FEDERAL REPUBLIC OF NIGERIA, Nigeria Millennium Development Goals Report, 2010, p. 5.

147 Virus de l’immunodéficience humaine

148 GOVERNMENT OF THE FEDERAL REPUBLIC OF NIGERIA, Nigeria Millennium Development Goals Report, 2010, p. 6.

149 ENWEREMADU, David U., “Nigeria as an Emerging Economy?...

150 Concernant la situation des infrastructures au Nigéria voir FOSTER, Vivien, PUSHAK, Nataliya, « Nigeria’s Infrastructure : A Continental Perspective», Policy Research Working Paper WPS5686, Washington D.C.: The World Bank, Africa Region, 2011; GAMES, Dianna, « ‘An Oil Giant Reforms’ : The Experience of South African Firms Doing Business in Nigeria », Business in Africa Report No. 3, The South African Institute of International Affairs, 2004; LAROSSI, Giuseppe, MOUSLEY, Peter, RADWAN, Ismail, “An Assess ment of the Investment Climate in Nigeria,” Directions in Development Private Sector Development, Washington D.C.: The World Bank , 2009; AGBOLI, Mary, UKAEGBU, Chikwendu C., « Business Environment and Entrepreneurial Activity in Nigeria : Implications for Industrial Development », The Journal of Modern African Studies, Vol. 44, No. 1, 2006, pp. 1 – 30; LADAN, Suleiman Iguda, “An Analysis of Air Transportation in Nigeria”, Journal of Research in National Development, Vol. 10, No. 2, 2012,pp. 3-33; HARDING, Alan, PALSSON, Gylfi, RABALLAND, GAEL, « Port and Maritime Transport Challenges in West and Central Africa », Sub-Saharan Africa Transport Policy Program SSATP Working Paper No. 84 , 2007; NDIKOM, Obed Boniface, « An Appraisal of the Operational Limitations of the Private Terminal Concessionnaires in Landlord Port Model », Continental Journal of Social Sciences, Vol. 6, No. 1, 2013, pp. 9 – 16; DONNAN, Shawn, “Big Bang Approach to Power Test”, Financial Times, 28 novembre 2012, p. 5.

sont pas épargnées par les problèmes liés à ce contexte. Elles sont confrontées à des défis d’infrastructures et à d’autres difficultés majeures comme l’insécurité151, la corruption152, l’accès aux financements, la bureaucratie inefficace, l’inflation, et le manque de main-d’œuvre qualifiée153. Un rapport du gouvernement sur la stratégie de développement économique résume la situation comme suit :

“Businesses wishing to operate in Nigeria face many constraints, including poor infrastructure; particularly road networks and electricity supply; inadequate physical security; corruption; weak enforcement of contracts; and the high cost of finance. These factors have deterred foreign entrepreneurs from investing in Nigeria and induced many Nigerians to take their money and their skills abroad”154.

Ces facteurs constituent un frein à l’investissement sauf peut -être pour les firmes pétrolières. Ces dernières opèrent dans une industrie où les besoins institutionnelles sont limités à l’octroi de droits de propriété et la sécurité155. Ceux-ci sont fournis par le gouvernement en raison de sa forte dépendance des revenus pétroliers.

Pour mieux appréhender le paradoxe susmentionné, il est possible de revenir à la définition des marchés émergents donnée par Bremmer (2005) : « an emerging market may be defined as a state in which politics matters at least as much as

151 Voir NATIONAL BUREAU OF STATISTICS (NBS), ECONOMIC AND FINANCIAL CRIMES COMMISSION (EFCC), Business Survey on Crime & Corruption and Awareness of EFCC in Nigeria, 2007, Summary Report , 2009; LAROSSI, Giuseppe, MOUSLEY, Peter, RADWAN, Ismail, 2009, “An Assessment of the Investmen t Climate in ….; THE ECONOMIST, Nigeria: The Kidnap Fear, 23 février 2013; WALLIS, Williams, “Unequal Growth puts Strain on