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L ’ EOLIENNE D ARRIEUS

III. 2.4.2.2 Calcul de l’angle d’attaque et effet de courbure de l’écoulement

III.3 Validation du code

III.3.2 Tests de machines Darrieus

III.3.2.1 Machine mono- pale (σ ≈ 0,123, σ p ≈ 0,246)

L’expérience qui sert de comparaison ici est celle de Graham [103]. Cette expérience a été évoquée dans le paragraphe II.4.1. Il s’agit d’une hydrolienne mono-pale partiellement immergée dont la corde mesure 0,1524 m et le rayon 0,62 m. La section de pale est un profil NACA0015. Les vitesses réduites sont d’environ 2,5, 5,1 et 7,6 et le nombre de Reynolds moyen est d’environ 67000. Ces vitesses réduites sont atteintes en mettant en mouvement un chariot qui porte le rotor. Ici, seuls deux cas sont présentés : λ η 7,6 où il n’y a pas de décrochage dynamique et λ η 2,5 où il y en a. Deux types de mesure ont été réalisés par Graham : des mesures instationnaires d’effort et des relevés instantanés de pression. En plus des premières mesures directes d’effort, Graham propose d’intégrer les pressions pour obtenir une seconde estimation des efforts aérodynamiques, mais étant donné le faible nombre de prises de pression et les écarts apparents entre les deux estimations, seules les mesures directes d’effort sont utilisées pour la comparaison. A partir de la deuxième rotation, les mesures des coefficients aérodynamiques sur les premières rotations sont données par l’auteur (issues d’une moyenne sur 5 essais). La comparaison portera sur les 2ème, 3ème et 4ème rotations. Il faut préciser que dans les simulations, on suppose une mise en rotation immédiate, ce qui n’est physiquement pas réaliste et qui modifie la phase transitoire, principalement perceptible sur la première rotation qui n’est pas comparée. Si pour la vitesse réduite la plus faible, le régime stationnaire est rapidement atteint (expérimentalement et numériquement), pour la vitesse réduite de 7,6, les simulations numériques attestent que le régime établi (périodique) n’est pas complètement atteint, même après 20 rotations.

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Les polaires statiques qui servent de données d’entrée pour la correction du décrochage dynamique sont issue d’une construction mélangeant données expérimentales et extensions théoriques (voir paragraphe III.2.4.2.1). Les coefficients aérodynamiques se basent sur ceux de Jacobs et Sherman [129] et sur une extension pour des incidences élevées issue du travail de Montgomerie [189].

Si l’on compare d’abord les coefficients aérodynamiques pour la vitesse réduite la plus grande (λ η 7,6, voir figure 53), on observe un bon accord du coefficient de force normale, en particulier dans la phase amont de la rotation où se situe le minimum. Il y a également peu d’écart entre le modèle numérique potentiel et visqueux, ce qui s’explique par le fait qu’à cette vitesse réduite, l’incidence ne dépasse pas 5° d’amplitude (d’après les simulations numériques). Il est intéressant de noter que la force normale reste presque constamment négative, ce qui est intuitivement illogique (comme le précise [76]) puisque l’incidence change de signe au cours d’un cycle. Néanmoins, cela a une explication tout à fait raisonnable : naturellement à cette vitesse réduite, l’angle d’incidence prend des valeurs très faibles en valeur absolue (négatives dans la phase amont et positives dans la phase aval). La valeur négative de coefficient de force normale malgré l’incidence positive est due à l’effet de courbure de l’écoulement. Globalement, l’effet de courbure réduit systématiquement l’incidence effective (prise aux trois-quarts de corde), menant jusqu’à un changement de signe si l’incidence est déjà faible comme dans la phase aval. Dans la simulation, l’incidence dans la phase aval a un ordre de grandeur proche de 2° et l’angle d’attaque aux trois-quarts de corde est estimé à environ -1°. Cette incidence effective négative résulte en une force normale négative.

En revanche, pour le coefficient de force tangentielle, la concordance des résultats numériques avec les résultats expérimentaux est plus faible. Dans l’expérience, un faible pic de force motrice apparaît dans chaque phase de la rotation (amont et aval), le reste correspondant à une force résistive (coefficient de force tangentielle négatif). Dans les simulations numériques, il existe un pic plus important dans la phase amont de la rotation et un plateau dans la phase aval où le coefficient de force tangentielle stagne à une valeur négative. Ce plateau s’explique par le déficit de vitesse lié au fort blocage induit par la vitesse réduite très élevée. La vitesse est fortement diminuée dans le rotor, ce qui empêche la pale dans la phase aval de récupérer de l’énergie. La partie aval ainsi bloquée, c’est la partie amont qui récupère toute l’énergie et qui voit donc son pic de coefficient de force tangentielle prendre une valeur importante. Il semble que le blocage effectivement ressenti dans l’expérience n’est pas aussi élevé que celui qui est obtenu numériquement. Des simulations avec et sans les parois latérales donnent des résultats comparables donc le blocage n’est pas artificiellement amplifié par un confinement de l’écoulement. On peut éventuellement supposer que l’angle d’incidence, très sujet aux interactions avec le sillage, est mal estimé. On peut aussi attribuer ces différences de comportement entre l’expérience et la simulation numérique à des erreurs expérimentales, la force tangentielle étant plus difficile à mesurer et plus sensible aux imprécisions de mesure.

Pour la vitesse réduite λ η 2,5 (figure 54), le niveau d’exactitude de l’évolution du coefficient de force normale est comparable au cas précédent. Mais cette fois, l’estimation du coefficient de force tangentielle est nettement améliorée, sans être encore idéale. Comme il n’y a plus un blocage important, on retrouve à la fois dans l’expérience et dans la simulation un pic de force motrice dans chaque phase de la rotation. Les positions des pics et leurs amplitudes sont légèrement différentes.

Puisque l’incidence atteint des valeurs élevées, le calcul potentiel qui suppose un écoulement inconditionnellement attaché surestime le coefficient de force tangentielle. La

139 correction du décrochage dynamique permet de ramener cette estimation à des valeurs plus raisonnables et réalistes.

Figure 53 – Coefficients de force normale (a) et de force tangentielle (b) pour un rotor mono-pale de solidité η 0,123 à une vitesse réduite de 7,62 (adapté des conditions expérimentales de Graham [103]).

En carrés rouges : coefficients dynamiques expérimentaux. En traits discontinus verts : coefficients numériques issus du calcul purement potentiel. En traits continus bleus : coefficients numériques issus du

modèle semi-empirique de Leishman-Beddoes.

Figure 54 – Coefficients de force normale (a) et de force tangentielle (b) pour un rotor mono-pale de solidité η 0,123 à une vitesse réduite de 2,54 (adapté des conditions expérimentales de Graham [103]).

En carrés rouges : coefficients dynamiques expérimentaux. En traits discontinus verts : coefficients numériques issus du calcul purement potentiel. En traits continus bleus : coefficients numériques issus du

modèle semi-empirique de Leishman-Beddoes.

Ce premier cas test d’une machine Darrieus montre que l’ajout d’une correction pour le décrochage dynamique apporte une amélioration des résultats. L’adéquation expérimental/numérique a un bilan un peu contrasté : un résultat partiel à haute vitesse réduite (très bon pour le coefficient de force normale et mitigé pour le coefficient de force tangentielle), et un résultat plutôt prometteur pour une vitesse réduite faible. Puisque dans le

400 500 600 700 800 900 1000 1100 1200 1300 1400 -100 -50 0 50  [°] Cn * 400 500 600 700 800 900 1000 1100 1200 1300 1400 -5 0 5  [°] Ct * Expérimental (  7,62,   0,123) Numérique (potentiel) Numérique (visqueux) Expérimental (  7,62,   0,123) Numérique (potentiel) Numérique (visqueux) 400 500 600 700 800 900 1000 1100 1200 1300 1400 -20 -10 0 10  [°] Cn * 400 500 600 700 800 900 1000 1100 1200 1300 1400 -2 0 2 4 6  [°] Ct * Expérimental (  2,54,   0,123) Numérique (potentiel) Numérique (visqueux) Expérimental (  2,54,   0,123) Numérique (potentiel) Numérique (visqueux) a) b) a) b)

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cadre de l’éolienne de référence, les faibles vitesses réduites nous intéressent, la balance des résultats est finalement positive.