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L ’ EOLIENNE D ARRIEUS

III. 2.2.2.2 Intensité du sillage proche

Le sillage proche est supposé attaché au bord de fuite et toute la vorticité du sillage est émise par le bord de fuite. On peut décrire la vorticité dans le sillage proche comme étant le terme qui permet de compenser la différence de vitesse entre les faces intérieure et extérieure de la pale au niveau du bord de fuite.

En considérant les vitesses tangentielles au bord de fuite sur les faces intérieure et extérieure dans le repère de la pale, notées respectivement ←TE-|p et ←TE+|p, on peut calculer le débit de rotationnel dans la couche limite de deux manières différentes13 : par une intégration approximative du débit de rotationnel dans les deux couches limites qui se rejoignent au bord de fuite et par dérivée temporelle de la circulation autour du profil. En combinant les deux expressions, on arrive à la relation :

D p Dt =

-←TE+|p2 - ←TE-|p2

2 (65)

Comme seules les vitesses aux points de contrôle sont estimées, les vitesses sur les faces intérieure et extérieure du bord de fuite sont considérées comme les vitesses aux points de contrôle des panneaux adjacents au bord de fuite (numérotés 1 et Np). De plus, il a été rappelé avec l’équation (20) que la circulation totale se conserve (théorème de Kelvin-Helmholtz) donc on peut relier la variation temporelle de circulation p autour du profil à la circulation s du sillage. L’intensité totale du sillage proche étant la variation θ s de la circulation du sillage sur un intervalle de temps θt, on peut déduire sa valeur par la relation :

13 Pour la démonstration, se référer par exemple au cours de l’←niversité de Poitiers de S. Huberson, Théorie des profils minces, 2008, ou au livre de Cottet et Koumoutsakos [56] qui présente une approche différente pour arriver au même résultat. Le résultat peut aussi se démontrer à l’aide de l’équation de Bernoulli instationnaire, en écrivant la continuité de la pression et de la densité au bord de fuite.

111 θ s η θt ←CP,Npi | p 2 - ←CP,1i |p2 2 = θls(←CP,Npi | p - ←CP,1i |p) (66)

Dès lors, la distribution linéique s de vorticité du sillage proche est égale à la différence de vitesse entre les deux panneaux adjacents au bord de fuite :

s

i = ←CP,Npi |

p - ←CP,1i |p (67)

III.2.2.3 Système d’équations et méthode de résolution

Pour caractériser l’écoulement dans le domaine fluide autour de la pale, il faut résoudre un système d’équations linéaires dont les inconnues sont les distributions de source et de vorticité : pour la pale, ce sont les débits ki pour k = 1…Np définis par unité de longueur pour les distributions de source et la circulation i par unité de longueur commune aux distributions de vorticité sur les panneaux, soit Np + 1 inconnues. On doit y ajouter l’intensité

s

i de la distribution de vorticité sur le segment de sillage proche, soit un total de N p + 2 variables à déterminer, donc autant d’équations à définir. Np premières équations découlent de la condition d’imperméabilité de la pale, par discrétisation de l’équation (59). Sur chacun des Np éléments constitutifs de la pale, une condition de vitesse normale nulle est vérifiée sur un point de contrôle placé au centre de chaque panneau :

← ⃗⃗⃗CP,k i |

p.e⃗ ,k = 0 pour k = 1…Np (68)

La vitesse au point de contrôle se déduit de la discrétisation de la relation (58). A un instant i et pour un point arbitraire X⃗⃗⃗, la vitesse locale s’exprime.

← ⃗⃗⃗(X⃗⃗⃗;i = ←⃗⃗⃗ + ∑ p,miX⃗⃗⃗ - X⃗⃗⃗' 2 (X⃗⃗⃗ - X⃗⃗⃗' 2ds(X⃗⃗⃗' θsm Np m = 1 + pi ∑ ∫ e⃗z×(X⃗⃗⃗ - X⃗⃗⃗' 2 (X⃗⃗⃗ - X⃗⃗⃗' 2ds(X⃗⃗⃗' θsm Np m = 1 + si ∫e⃗z×(X⃗⃗⃗ - X⃗⃗⃗' 2 (X⃗⃗⃗ - X⃗⃗⃗' 2ds(X⃗⃗⃗' θls + ∑ sj e⃗z×(X⃗⃗⃗ - X⃗⃗⃗' 2 (X⃗⃗⃗ - X⃗⃗⃗' 2 i - 1 j = 1 (69)

On remarque qu’avec cette discrétisation, on peut calculer individuellement les vitesses induites par les panneaux singuliers d’intensité unitaire puis multiplier par l’intensité de la source ou de la vorticité. On notera respectivement ←⃗⃗⃗ (X⃗⃗⃗;θsm , ←⃗⃗⃗ (X⃗⃗⃗;θsm , ←⃗⃗⃗ (X⃗⃗⃗;θls et ←⃗⃗⃗ (X⃗⃗⃗ les vitesses induites au point X⃗⃗⃗ par un panneau de distribution de source unitaire, un panneau de distribution de vorticité unitaire, le panneau de sillage proche d’intensité

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unitaire et un vortex ponctuel d’intensité unitaire. Les expressions de ces contributions unitaires sont détaillées dans l’annexe A.2.

Les conditions d’imperméabilité sur les panneaux définis par les relations (68) s’écrivent donc par Np équations :

0 = ←⃗⃗⃗.e⃗,k - ←⃗⃗⃗p X⃗⃗⃗CP,ki e⃗,k + ∑ p,mi ←⃗⃗⃗ X⃗⃗⃗CP,ki ;θsm .e⃗ ,k Np m = 1 + pi ∑ ←⃗⃗⃗ X⃗⃗⃗CP,ki ;θsm .e⃗,k Np m = 1 + si←⃗⃗⃗ X⃗⃗⃗CP,ki ;θls .e⃗,k + ∑ sj←⃗⃗⃗ X⃗⃗⃗CP,ki i - 1 j = 1 Pour k = 1…Np (70)

Une équation supplémentaire est fournie par la condition de Kutta au bord de fuite, il s’agit de l’équation (67). Enfin, une dernière équation est donnée par le théorème de Kelvin-Helmholtz qui stipule la conservation de la circulation. En partant de l’équation (20), on déduit par discrétisation que la circulation cumulée du profil et du sillage proche est égal :

θ s + i = i-1

(71)

Pour le pas de temps initial, puisque le rotor est arrêté, on considère la circulation totale nulle. En remplaçant par les variables que l’on cherche à déterminer, on arrive finalement à la relation suivante :

s

iθls + pi ∑ θsm Np m = 1

= i-1 (72)

Le système formé des équations (67), (70) et (72) peut se mettre sous forme matriciel. Il est résolu par un algorithme de décomposition LU (pour Low et Up, soit "bas" et "haut"). Ce procédé consiste à décomposer la matrice du système d’équation en des matrices triangulaires inférieure et supérieure grâce auxquelles le système peut se résoudre en deux étapes successives par substitutions élémentaires.

Dans le cas où plusieurs pales sont présentes, le système matriciel s’agrandit mais le même principe reste en place. En plus de prendre en compte les vitesses induites des panneaux et du sillage proche d’une pale sur elle-même, il faut prendre en considération les vitesses induites des panneaux et des sillages des autres pales.

III.2.2.4 Régularisation des singularités

Par définition, les singularités présentent des discontinuités et peuvent mener à des vitesses infinies et des instabilités non-physiques. Ceci est un problème numérique lié au

113 choix de modélisation du sillage par une interface infiniment fine discrétisée en particules tourbillonnaires. L’effet de cette instabilité est d’amplifier les modes de courte longueur d’onde ([141]), c’est-à-dire de créer des petits enroulements tourbillonnaires qui n’ont pas de raison d’exister d’un point de vue analytique.

En deux dimensions, la vitesse ←⃗⃗⃗ (X⃗⃗⃗ induite au point X⃗⃗⃗ par un vortex ponctuel d’intensité unitaire situé au point X⃗⃗⃗ est donnée dans l’annexe A.2 :

⃗⃗⃗ (X⃗⃗⃗ =21 (X⃗⃗⃗ - X⃗⃗⃗ ×e⃗z ‖X⃗⃗⃗ - X⃗⃗⃗ ‖2 =

1

2 re⃗ (73)

Où r = ‖X⃗⃗⃗ - X⃗⃗⃗ ‖ est la distance entre les points et e⃗ est le vecteur directeur du vecteur vitesse. Différentes solutions ont été imaginées par le passé pour éviter une vitesse infinie. La plupart font intervenir une longueur caractéristique pour régulariser la formule. On peut choisir de borner la vitesse à une valeur 2 1 lorsque r < , ou ajouter à la distance r de manière à avoir une vitesse 1

2 (r + . Une solution plus élégante est celle introduite par Krasny [141] qui consiste à estimer la norme de la vitesse avec la relation :

← = 21 r

r2 + 2 (74)

Il a également été imaginé que la physique analytique d’un vortex de rayon non-nul pouvait aider à calculer une régularisation du cas limite d’un vortex ponctuel. Le modèle le plus simple est celui du vortex de Rankine qui suppose une vorticité distribuée entièrement et uniformément dans un disque de rayon . La vitesse se décompose en deux formules selon si la distance r est supérieure ou inférieur au rayon . ←ne autre possibilité est celle d’approximer le vortex ponctuel par un vortex de Lamb-Oseen, dont la vitesse induite s’exprime par la formule :

← = 1

2 r 1 - e -αr22

(75)

Où est une constante. D’autres formules ont également été proposées depuis. Une liste non-exhaustive de quelques modèles de vortex est proposée par exemple par [66]. Dans la pratique, les différences entre les modèles sont d’un ordre de grandeur inférieur aux erreurs dues à la discrétisation de la nappe tourbillonnaire. Il n’y a donc pas réellement de critère de précision qui guide un choix plutôt qu’un autre. Il a été choisi arbitrairement d’utiliser la formule (74) de Krasny14 qui est simple et sans discontinuité.

Le choix de la longueur de régularisation module la stabilité numérique à travers l’amortissement des enroulements tourbillonnaires de courte longueur d’onde. Comme l’explique bien Mondoloni [188], on ne cherche pas à éliminer complètement l’instabilité qui existe dans le sillage, car cela exclurait tout enroulement tourbillonnaire alors même que c’est ce que l’on cherche à étudier. Il faut seulement atténuer les échelles de longueur qu’on ne peut pas résoudre avec précision du fait de la discrétisation. Mondoloni montre avec un cas simplifié que le critère de stabilité est réglé par le rapport entre et la distance θx entre deux tourbillons successifs. Le choix d’une longueur au moins supérieure à la distance θx2 semble

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être suffisant pour le problème de discrétisation qui nous intéresse. Or la distance θx varie selon les instants où les vortex sont générés. En négligeant les perturbations de vitesse, on peut estimer que la distance entre deux vortex peut être approximée par la formule :

θx η ←̅TE|pθt η ←rθt η ←θt√1 + 2λ cos + λ2 (76)

Auquel cas, on peut globalement borner cette distance par le cas limite où = 0°. Par simplicité, on opte pour une longueur unique pour toutes les particules égale à cette distance maximale entre deux particules :

= ←θt(1 + λ (77)

Qui vérifie bien > θx2. Avec les déplacements sur de grandes distances des particules tourbillonnaires indépendamment les unes des autres, les espaces entre les vortex peuvent varier et des oscillations d’origine numérique sont donc susceptibles d’apparaître. On suppose toutefois qu’aucune modification des longueurs de régularisation ni qu’aucune réorganisation des particules ne paraissent nécessaires dans le contexte de cette étude.

On peut aussi noter que pour l’étude d’une machine Darrieus, ↑an Nguyen [256] a utilisé un raisonnement et une théorie différente de celle présentée précédemment. Il arrive à une formule pour la longueur de régularisation qui semble ici trop faible pour amortir les instabilités numériques.

III.2.2.5 Transport des particules tourbillonnaires

La régularisation des singularités résout le problème d’instabilité numérique, mais permet aussi d’introduire une forme de viscosité au niveau des tourbillons. Pour le transport des particules tourbillonnaires, on choisit par clarification de repartir de l’équation de transport de la vorticité dans un écoulement visqueux bidimensionnel :

Ψ⃗⃗⃗⃗

Ψt + (←⃗⃗⃗.⃗⃗⃗ ⃗⃗⃗⃗ = ⃗⃗⃗2⃗⃗⃗⃗ (78)

En considérant cette évolution de l’écoulement, la vorticité est à la fois convectée et diffusée. Pour la discrétisation, une approche initiée par Chorin (d’après [56]) consiste en une dissociation des effets de la convection et de la diffusion, menant dans le cadre lagrangien à deux systèmes distincts d’équations :

{ DX⃗⃗⃗s Dt = ←⃗⃗⃗(X⃗⃗⃗s,t D⃗⃗⃗⃗(X⃗⃗⃗s,t Dt = 0⃗⃗ Convection pure { DX⃗⃗⃗s Dt = 0⃗⃗ D⃗⃗⃗⃗(X⃗⃗⃗s,t Dt = ⃗⃗⃗2⃗⃗⃗⃗(X⃗⃗⃗s,t Diffusion pure (79) (80)

115 Ce fractionnement est à l’origine d’un traitement indépendant de la convection et de la diffusion d’une particule tourbillonnaire de coordonnées X⃗⃗⃗s.