• Aucun résultat trouvé

7.4 Méthodologie et moyens d'essai de compression uniaxiale 7.4.1 Précautions

Au cours d'un essai de compression, outre les erreurs liées aux différentes chaînes de mesure comme celles du déplacement, des déformations ou de la force (erreurs dont nous avons parlé au Chapitre 6), des sources d'imperfection existent en lien direct avec les conditions de contact entre machine d'essai et éprouvette. Celles-ci conduisent à des états de contrainte non homogènes au sein de l'éprouvette. Les principales causes et les solutions employées pour les pallier sont :

- un parallélisme incorrect entre plateau et éprouvette. Pour pallier cela, le parallélisme des plateaux est réglé systématiquement avant essai grâce à un montage réalisé spécifiquement permettant un réglage fin (Figure 7.4-a). De plus, une rotule équipe le plateau supérieur, empêchant une rotation de l'éprouvette. Par contre, l'emploi de la rotule requiert un centrage rigoureux de l'éprouvette.

- un frottement plateau-éprouvette empêchant plus ou moins le déplacement libre des sections de l'éprouvette et induisant du frettage. Celui-ci est distribué dans le volume de l'éprouvette sous forme de cônes dont l'ampleur dépend directement du diamètre de l'éprouvette (Figure 7.4-b). Pour diminuer son impact, une solution serait d'augmenter la hauteur de l'éprouvette pour un diamètre donné, mais cela introduirait alors des risques de flambement. Ainsi, un élancement de 2 (rapport longueur sur diamètre) est recommandé par la SIMR (Société Internationale de Mécanique des Roches) et les normes AFNOR (NFP 94-420, 422, 423, 425, 426).

De plus, pour limiter le frottement, les plateaux de compression en acier durci sont rectifiés et polis afin d'ôter toute aspérité.

- des effets de bord qui existent si le plateau et la section de l'éprouvette sont de même diamètre, de par l'extension radiale de l'éprouvette lors de l'essai. Nous employons donc des plateaux élargis (Figure 7.4-a).

(a) montage. (b) frettage théorique d'une éprouvette en

compression.

Figure 7.4 - Montage de l'éprouvette sur la machine d'essai.

Comme dans le cas des matériaux à comportement mécanique de type plutôt fragile, l'effet d'échelle est particulièrement important dans les argilites. Le comportement mécanique, en particulier la résistance à la compression, dépend de la taille de l'éprouvette d'essai. Cet effet peut être expliqué de manière assez simpliste, par une approche probabiliste souvent désignée par la théorie du maillon le

traverse mobile rotule éprouvette plateau inférieur montage alignement plateaux comparateur capteurs acoustiques jauges de déformation cellule de force frottement dilatation radiale état de contrainte homogène

Partie II - Méthodes et techniques expérimentales Chapitre 7 - Caractérisation mécanique

- II.65

plus faible ou l'effet Weibull : la probabilité de trouver un défaut critique menant à la ruine augmente avec le volume de l'éprouvette, ce qui tendrait à utiliser des éprouvettes de taille petite. Par contre, afin d'être représentatif, il convient classiquement d'utiliser des éprouvettes de taille supérieure de deux ordres de grandeur à la taille des grains. Comme décrit par la suite au Chapitre 9, l'argilite a des tailles de grains (carbonates-quartz) de l'ordre de 200 à 300 µm avec des hétérogénéités de constitution (par exemple, des zones comportant des grains plus petits) et des hétérogénéités méso- ou macro-scopiques (bioclaste, gros grains de mica…).

Ainsi, de par les considérations énoncées, la quantité disponible de matériau et la capacité des machines d'essai, la détermination des propriétés mécaniques statiques est réalisée sur des éprouvettes cylindriques à base circulaire de diamètre 36 mm et de hauteur 72 mm.

7.4.2 - Moyens d'essai

La sollicitation en compression uniaxiale est menée à l'aide d'une presse électromécanique Instron de capacité 100 kN, équipée de :

- deux plateaux de compression et d'une rotule de transmission de l'effort mécanique, - une cellule de force de capacité 100 kN,

- un capteur de déplacement de type transformateur différentiel (LVDT) de course 2 mm, - des jauges de déformation connectées à des ponts de Wheastone (¼ pont),

- de l'extensométrie optique et d'émission acoustique (cf. Chapitre 6),

- une carte d'acquisition National Instrument et un programme d'acquisition Agnès développé par V. de Greef au LMS.

La presse est pilotée en déplacement de traverse à une vitesse de 0,1 mm/mn. 7.4.3 - Détermination des paramètres mécaniques macroscopiques

La contrainte mentionnée par la suite correspond à la contrainte moyenne macroscopique calculée par le rapport entre la force appliquée et la section initiale de l'éprouvette testée.

La courbe contrainte-déformation σ−ε obtenue au cours d'un essai monotone de compression uniaxiale a la forme caractéristique donnée sur la Figure 7.5-a : après une phase initiale de serrage, une zone d'élasticité linéaire sur laquelle sont estimés les paramètres d'élasticité, n'existe pas systématiquement. Afin d'accéder aux paramètres d'élasticité, sont réalisés des cycles de charge/décharge jusqu'à 50% de la contrainte à la rupture ou résistance Rc (Figure 7.5-b). Les cycles que nous avons effectués sur les

échantillons d'argilite ont la forme type illustrée par la Figure 7.5-c (les points suivants sont référencés par rapport à celle-ci) : une phase de décharge décrite par la courbe [ABC] qui traduit une phase initiale visqueuse (augmentant avec le niveau de chargement mécanique) et une phase de recharge [CDE] quasi-linéaire (les points A et E étant systématiquement confondus dans nos essais). Nous avons choisi de déterminer les paramètres d'élasticité (module et coefficient de Poisson) sur la recharge [CDE].

Nos éprouvettes étant des cylindres à base circulaire, les déformations volumiques peuvent être estimées selon :

Équation 7.10 εvolumique = εL + 2εT pour θ = 90°, Équation 7.11 εvolumique = εL + εT⊥ + εT// pour θ = 0 et 45°.

Le tracé des déformations volumiques sur la courbe σaxiale−ε ou sur une courbe εvolumique-εL permet de

visualiser le caractère contractant ou dilatant en fonction de l'état de contrainte. Lorsque la courbe

σaxiale−εvolumique présente une partie linéaire (parfois visible jusqu'à la contrainte de contraction

maximale ou seuil de dilatance), la pente de cette courbe fournit un module équivalent désigné par module de compressibilité K sous hypothèse d'un matériau isotrope. Ainsi, en élasticité linaire, s'écrit la relation suivante reliant la contrainte moyenne et la déformation volumique :

Partie II - Méthodes et techniques expérimentales Chapitre 7 - Caractérisation mécanique

- II.66 Équation 7.12 .( ) . .( ) 3 1 x y z volumique z y x moyenne

σ

σ

σ

K

ε

K

ε

ε

ε

σ

= + + = = + +

Les paramètres de rupture (résistance Rc, déformations à la rupture εLmaxi et εTmaxi) ainsi que le

comportement sont analysés sur les sollicitations monotones ; en effet, le cyclage mécanique nécessaire pour la détermination des paramètres d'élasticité peut modifier le comportement de la roche (écrouissage).

(a) essai de compression uniaxiale monotone.

(b) essai de compression uniaxiale avec cycles de charge/décharge jusqu'à 0,50 Rc.

(c) calcul du module de Young sécant sur la zone linéaire de recharge d'un cycle à 0,25 Rc, sur un tracé σ−εL. Figure 7.5 – Représentation schématique des courbes contrainte normalisée par Rc - déformation.

(a) et (b) : les déformations macroscopiques obtenues par jauges de déformation axiale et orthoradiale sont reportées ainsi que les déformations axiales macroscopiques mesurées à partir du capteur de déplacement LVDT.

La contrainte est normalisée par rapport à la résistance Rc.

déformation axiale déformation volumique 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2 déformation contrainte normalisée (L) (T) (LVDT) L+2T T L LVDT déformation axiale for m a tion v o lumique 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2 déformation (L) (T) (LVDT) L T L+2T LVDT contr a in te nor mal isée 0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25 0.3 déformation contrainte normalisée

montée en charge à 25% Rc [A] décharge [ABC]

recharge jusqu'au cycle suivant [CDE] module à la recharge A B C D E

Au point A, le sens de la traverses est inversé et la décharge s'opère selon le trajet [ABC]. Ai point C, le déplacement de la traverse est de nouveau inversé et le recharge s'effectue selon [CDE].

Partie II - Méthodes et techniques expérimentales Chapitre 7 - Caractérisation mécanique

- II.67

7.5 - Modules dynamiques d'élasticité

Des paramètres d'élasticité peuvent aussi être déterminés à partir des célérités de propagation des ondes acoustiques. Les modules ainsi estimés sont dits dynamiques ou acoustiques. Par rapport aux paramètres d'élasticité statiques obtenus par des essais mécaniques, les conditions de sollicitation ne sont pas les mêmes [MAN 66] : dans le cas de propagation des ondes ultra-sonores, la sollicitation est dynamique et les variations de température engendrées par l'onde n'ont pas le temps de se diffuser par conduction thermique : il n'y a pas d'échange de chaleur (comportement isentropique) ; au contraire dans le cas d'une sollicitation mécanique statique, les conditions sont proches de l'isotherme. De plus, lors des propagations des ondes acoustiques, le mouvement de l'eau contenue dans les pores ne s'effectue pas à l'identique des essais statiques : l'eau n'a pas le temps de se mouvoir ce qui crée des conditions non drainées. Pour ces raisons, sur des matériaux hydratés, les paramètres d'élasticité identifiés par les méthodes acoustiques et statiques diffèrent. Par exemple, sur différents calcaires, des données de la littérature citées par Al-Shayea [SHA 04] montrent que les modules dynamiques sont en moyenne supérieurs aux modules statiques d'un facteur variant entre 1,20 et 1,70 ; il en est de même pour les coefficients de Poisson.

Les modules de Young et de cisaillement ainsi que le coefficient de Poisson acoustiques sont donnés par les relations suivantes à partir des célérités (VP et VS selon les modes de propagation de

compression et de cisaillement) et la masse volumique ρ :

Équation 7.13 2 2 4 2 2

4

3

S P S S P acoustique

V

V

V

V

V

E

−−

Équation 7.14

G

acoustique

V

S2 Équation 7.15

)

(

2

2

2 2 2 2 S P S P acoustique

V

V

V

V

=

ν

Pour la mesure des célérités des ondes élastiques, nous adoptons la même désignation de positionnement par rapport aux strates que dans le cas du positionnement des jauges de déformation. Par contre, la masse volumique est considérée comme une grandeur isotrope.

Partie II - Méthodes et techniques expérimentales