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Loisir, santé et bien-être

Dans le document Usage de la cigarette (Page 72-81)

Emploi du temps et pratiques culturelles

11.1 Aspects méthodologiques

11.2.6 Loisir, santé et bien-être

Nous ne disposons pas ici de données suffisantes permettant de confirmer l’effet du loisir sur la santé ou l’acquisition de comportements sains; néanmoins, nous avons fait appel à quelques indicateurs pour évaluer la justesse ou non des hypothèses courantes en psychologie du loisir. À cet égard, nous avons, de manière exploratoire, croisé certaines variables du loisir à divers indices psychologiques élaborés par d’autres chercheurs dans le cadre de la présente enquête. Nous renvoyons le lecteur aux chapitres pertinents pour la définition des variables utilisées portant sur l’activité physique (chapitre 10), l’estime de soi, la détresse psychologique (chapitre 19) et les problèmes de comportement ou d’opposition (chapitre 20).

La relation positive entre la pratique du loisir et la pratique de l’activité physique, laquelle s’observe également parmi la population adulte (Pronovost, 1997), est confirmée sans l’ombre d’un doute. Le niveau d=activité physique est corrélé avec le nombre de pratiques de loisir. Il n’est pourtant pas évident que les plus actifs au plan culturel le soient aussi dans d’autres secteurs d=activité, que les fervents de la musique ou de la lecture soient aussi des sportifs réguliers. Le tableau 11.16 illustre ce processus déjà à l’œuvre dès le jeune âge; les jeunes les plus actifs au plan de l’activité physique démontrent une plus grande variété de pratiques de loisir. Il est à noter que les rapports à la lecture n’épousent pas cette tendance générale puisque les taux associés à la pratique de l’activité physique ne sont significatifs que dans le groupe des jeunes de 9 ans (tableau 11.17).

Tableau 11.16

Nombre de pratiques de loisir au cours d’une période d’une semaine selon le niveau d'activité physique au cours de la même période, Québec, 1999

Aucune activité Une activité Deux activités ou plus

% Niveau d’activité physique

9 ans

Bas ou modéré 64,41 25,9 9,72

Élevé ou très élevé 44,11 33,0 23,02

13 ans

Bas ou modéré 47,43 36,5 16,14

Élevé ou très élevé 25,43 32,4 42,24

16 ans

Bas ou modéré 38,75 38,6 22,66

Élevé ou très élevé 27,55 32,2 40,36

1-6 Les pourcentages dotés du même exposant sont significativement différents au seuil de 0,05.

Le test d’association entre le nombre de pratiques de loisir et le niveau d’activité physique est significatif au seuil de 0,05 à chaque âge.

* Coefficient de variation entre 15 % et 25 %; interpréter avec prudence.

** Coefficient de variation supérieur à 25 %; estimation imprécise fournie à titre indicatif seulement.

Source : Enquête sociale et de santé auprès des enfants et des adolescents québécois 1999, Institut de la statistique du Québec.

La relation entre la pratique du loisir et divers indices de comportement ou d’image de soi n’est cependant pas unilatérale. Ainsi, en fonction des données disponibles, aucun des tests psychologiques que nous avons utilisés (échelle de Marsh sur le concept général de soi chez les 9 ans; test de Rosenberg sur l’estime de soi et un indice de détresse psychologique chez les 13 et 16 ans) n’a démontré d’association avec le nombre de sources de lecture ou le nombre de pratiques de loisir.

Par contre, il y a une relation très nette entre quelques indices de comportement et la pratique du loisir. À 13 et à 16 ans, les plus actifs en matière de loisir (tel que mesuré, ne l’oublions pas, par seulement quelques

activités sélectionnées) sont ceux qui présentent des problèmes de comportement (figure 11.2); environ 40 % de ces jeunes ont eu deux activités de loisir ou plus sur une semaine, contre environ 27 % des jeunes ne présentant pas de tels problèmes. Par ailleurs, le nombre de sources de lecture est lié à des comportements d’opposition chez les adolescents de 13 ans (figure 11.3), ceux qui ont de tels comportements ayant moins de sources de lecture que les jeunes qui n’ont pas ce type de comportements.

Répétons qu’il s’agit de résultats sommaires demandant à être approfondis, d’autant plus que les données sur le loisir sont peu nombreuses.

Tableau 11.17

Nombre de sources de lecture pour le plaisir au cours d’une période d’une semaine selon le niveau d'activité physique au cours de la même période, enfants de 9 ans, Québec, 1999

Aucune source Une source Deux sources Trois sources

% Niveau d'activité physique

Bas ou modéré 15,61 55,1 24,62 4,7 *

Élevé ou très élevé 8,8 *1 47,6 35,52 8,2 *

1-2 Les pourcentages dotés du même exposant sont significativement différents au seuil de 0,05.

Le test d’association entre le nombre de sources de lecture et le niveau d’activité physique est significatif au seuil de 0,05 chez les 9 ans.

* Coefficient de variation entre 15 % et 25 %; interpréter avec prudence.

** Coefficient de variation supérieur à 25 %; estimation imprécise fournie à titre indicatif seulement.

Source : Enquête sociale et de santé auprès des enfants et des adolescents québécois 1999, Institut de la statistique du Québec Figure 11.2

Nombre de pratiques de loisir au cours d’une période d’une semaine selon la présence de problèmes de comportement, adolescents de 13 ans et 16 ans, Québec, 1999

1-4 Les pourcentages dotés du même exposant sont significativement différents au seuil de 0,05.

Le test d’association entre le nombre de pratiques de loisir et la présence de problèmes de comportement est significatif au seuil de 0,05 chez les 13 ans et les 16 ans.

Source : Enquête sociale et de santé auprès des enfants et des adolescents québécois 1999, Institut de la statistique du Québec.

26,81 30,4

42,82

38,21 35,3

26,52 26,13 33,1

40,84

36,03 36,5 27,64

0 10 20 30 40

% 50

Présence Absence Présence Absence

Aucune activité Une activité Deux activités ou plus

13 ans 16 ans

Figure 11.3

Nombre de sources de lecture pour le plaisir au cours d’une période d’une semaine selon la présence de comportements d'opposition, adolescents de 13 ans, Québec, 1999

1 Les pourcentages dotés du même exposant sont significativement différents au seuil de 0,05.

Le test d’association entre le nombre de pratiques de loisir et la présence de comportements d’opposition est significatif au seuil de 0,05.

* Coefficient de variation entre 15 % et 25 %; interpréter avec prudence.

Source : Enquête sociale et de santé auprès des enfants et des adolescents québécois 1999, Institut de la statistique du Québec.

Conclusion

Cette enquête de la Direction Santé Québec n’en est pas une sur les pratiques culturelles des jeunes. Le contenu portant sur le loisir et la culture chez les jeunes demeure forcément limité. Toutefois, les quelques résultats qui viennent d’être présentés permettent de décrire certaines caractéristiques de l’emploi du temps et des loisirs des jeunes. On est ici en présence d’un univers typique que de nombreuses autres études ont permis de caractériser. Pour la très vaste majorité des jeunes, l’univers des sorties et de la sociabilité prédomine nettement : en témoigne l’importance de la fréquentation du cinéma, des discothèques et des spectacles musicaux. Il s’agit de véritables pratiques identitaires. De manière plus générale, il est bien établi que chez les jeunes, les pratiques de sociabilité s’articulent autour de la musique et de la fréquentation de certains lieux typiques. L’importance des pratiques audiovisuelles domestiques, bien que mesurée de

manière indirecte dans la présente enquête (par des évaluations subjectives), ne constitue pas un obstacle aux sorties de toutes sortes. En fait, les jeunes de 16 ans tendent à diminuer leur consommation de télévision au profit de pratiques de loisir plus intenses.

En d’autres termes, si, comme le montrent la majorité des études, les jeunes sont parmi les moins grands amateurs du petit écran, une telle observation n’est probablement valable qu’au moment où l’univers culturel de l’adolescence commence à se former. Ainsi, les études américaines sur l’emploi du temps permettent de bien étayer cet investissement plus important dans la télévision et les jeux entre 12 et 15 ans, contrastant avec une baisse de l’écoute de la télévision et une hausse des sorties chez les jeunes plus âgés (Robinson et Godbey, 1999).

Il s’agit ici d=une enquête transversale, et non longitudinale; toute analyse de type « évolutif » demeure sujette à caution. Néanmoins, en comparant les données selon les trois groupes d’âge, il semble bien qu’une sorte de rupture avec le monde de l’enfance prenne place autour de l=âge de 13 ans, mais sans doute un peu avant. Cette hypothèse est étayée par une enquête française récente, laquelle parle d=une

« autonomisation des choix » qui s’effectuerait vers l=âge de 11 ans (ministère de la Culture et de la Communication, 1999). Par exemple, les choix de lectures sont nettement infléchis dès l=âge de 13 ans;

l’importance de la fréquentation du cinéma y est déjà notable; les heures déclarées d’écoute de la télévision y connaissent leur sommet pour décroître nettement à 16 ans. Le quart des jeunes exerce déjà un travail rémunéré à 13 ans, le tiers à 16 ans. Par l’observation des loisirs des jeunes et de leur emploi du temps, on peut assister aux premiers moments de leur entrée dans l’adolescence. Les enquêtes de participation culturelle indiquent que cet univers culturel de l’adolescence se prolongera bien au-delà de la vingtaine. Chose remarquable, certains effets de différenciation socioéconomique semblent s’atténuer pour un temps, sont même gommés pour quelques 21,2*1

Aucune source Une source Deux sources Trois sources

267 années (Patureau, 1992), mais nous savons qu’il s’agit

d’un intermède éphémère. Encore une fois, seules des analyses longitudinales permettraient de mieux appuyer ces hypothèses.

Les grands axes de la stratification socioéconomique exercent toujours leurs effets. Comme nous l’avons indiqué, le cercle du retrait culturel, sinon de l’isolement social, est déjà dessiné dès l=âge de 13 ans. Les écarts d’accès aux nouvelles technologies se calquent sur l’importance du revenu du ménage. Dans les sondages portant sur une population adulte, la relation observée entre la possession d’un ordinateur et la participation culturelle est constante. L’une des raisons avancées pour expliquer une telle situation tient aux facteurs socioéconomiques, puisque la possession d’un ordinateur et l’intensité de la participation culturelle sont toutes deux reliées au niveau de vie et au niveau d’éducation. D’autres travaux permettent d’étayer le fait que le niveau de vie et de scolarité des parents exerce une influence significative sur la diversité des activités pratiquées pendant le temps libre (ministère de l’Éducation, 1994). De même, ces travaux démontrent une relation significative entre la réussite scolaire et la pratique régulière d’activités. Dans la présente enquête, on observe une augmentation du nombre de pratiques de loisir avec une augmentation du niveau d’activité physique. De même, ceux qui lisent de façon plus diversifiée ont aussi plus de pratiques de loisir.

Quoiqu’on observe peu d’associations entre le revenu du ménage et les pratiques culturelles des enfants et des adolescents, le processus plus général qui est ici à l’œuvre pourrait être celui du cumul des activités en fonction du niveau de vie : dans la population adulte, plus on est scolarisé, ou encore plus le revenu est élevé, plus on observe une intensification et une diversification des activités pratiquées dans un même champ (univers culturel ou sportif par exemple), de même que dans la plupart des autres champs.

On doit encore souligner le caractère sexué de certaines pratiques. La cloison garçons-filles est déjà

manifeste dès l=âge de 9 ans : travail scolaire, choix de lectures, choix d’activités de loisir se différencient selon l’axe des stéréotypes masculins et féminins. À cet égard, le temps du loisir constitue un puissant lieu d’apprentissage des rôles sociaux.

La relation du loisir à la personnalité et aux comportements demeure à approfondir. Nous ne disposons pas de données suffisantes pour en démontrer les aspects les plus décisifs. Des analyses plus poussées seraient nécessaires. On peut néanmoins observer que la pratique du loisir renvoie à une certaine insertion dans l’univers social : on le voit par l’isolement de ceux qui pratiquent moins d’activités.

Elle traduit également autant des pratiques de refus que des pratiques d’opposition : le cas le plus net, ici, étant l’association des problèmes de comportement à l’intensité des sorties au cinéma ou dans les discothèques par exemple. Elle accompagne enfin, dans le cas de certaines pratiques culturelles fortes (telle la lecture) ou d=une diversité modérée de pratiques de loisir à l=extérieur, l’intégration progressive au monde des adultes et à ses normes, notamment le monde du travail.

Nous n’avons fait ici que présenter les grandes lignes des principaux résultats. Cet univers que nous avons décrit à grands traits ne doit pas faire oublier la diversité et la richesse des « univers jeunes » : opposition, refus, intégration, conformisme, consommation, modernisme, sociabilité, information, banalité, innovation, voilà d’autres termes qui permettraient certainement d’approcher d’autres caractéristiques des pratiques de loisir des jeunes Y dans des travaux ultérieurs.

Bibliographie

GARON, R. (1997). La culture en pantoufles et en souliers vernis : rapport d'enquête sur les pratiques culturelles au Québec, Québec, Les Publications du Québec.

MINISTÈRE DE L=ÉDUCATION (1994). En vacances et à l'école : les loisirs des élèves du secondaire, Québec, 55 p.

MINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION (1992). « Les pratiques culturelles des jeunes », Développement culturel, vol. 93, Paris.

MINISTÈRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION (1999). « Les loisirs des 8-19 ans », Développement culturel, vol. 131, Paris, 8 p.

NOLIN, B., D. PRUD’HOMME et M. GODBOUT (1996).

L’activité physique de loisir au Québec : une analyse en fonction des bénéfices pour la santé, monographie n° 5, Montréal, Santé Québec, Ministère de la Santé et des Services sociaux et Kino Québec, MAM, Gouvernement du Québec, 107 p.

PATUREAU, F. (1992). Les pratiques culturelles des jeunes, Paris, Ministère de la Culture et de la Communication, 221 p.

PRESSES DE L=UNIVERSITÉ DU QUÉBEC (1995).

« Loisir, santé et fonctionnement humain », Loisir et société/Society and leisure, Québec, vol. 18, n° 1.

PRONOVOST, G. (1997). Loisir et société, Traité de sociologie empirique, 2eéd., Québec, Presses de l'Université du Québec, 401 p.

ROBINSON, J., et G. GODBEY (1999). Time for life:

The Surprising Ways Americans Use their Time, 2e éd., University Park, Pennsylvania State University Press, 402 p.

SINGLY, F. de (1989). Lire à 12 ans : une enquête sur les lectures des adolescents, Paris, Nathan, 223 p.

Tableau complémentaire

Tableau C.11.1

Présence d’un ordinateur à la maison selon le revenu relatif du ménage, Québec, 1999

9 ans 13 ans 16 ans

%

Très faible ou faible 49,81 50,72 45,64

Moyen 64,8 61,73 68,04

Élevé ou très élevé 72,91 81,12, 3 81,94

1-4Les pourcentages dotés du même exposant sont significativement différents au seuil de 0,05.

Le test d’association entre la présence d’un ordinateur et le revenu relatif est significatif au seuil de 0,05.

Source : Enquête sociale et de santé auprès des enfants et des adolescents québécois 1999, Institut de la statistique du Québec.

Chapitre 12

Sexualité et mesures préventives

Dans le document Usage de la cigarette (Page 72-81)