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Les limites conventionnelles découlant des dispositions de l’accord d’association

L’utilisation de règles d’origine non harmonisées l’utilisation abusive des clauses de sauvegarde , ainsi que la multiplication des obstacles à effet de substitution , dans le domaine agricole par exemple , constituent autant de limites conventionnelles à la libre circulation des marchandises .

§1 - Le manque d’harmonisation des règles d’origine

A)-L’effet restrictif des règles d’origine actuelles

sur la fluidité commerciale

Les règles d’origine peuvent constituer d’importantes limites à la libre circulation des marchandises. Nous avons vu précédemment comment les différents types de cumuls - bilatéral, diagonal et total - pouvaient exerce une restriction sur la fluidité commerciale au sein la zone de libre-échange. Le cumul total est le plus libéral, puisqu’il permet de prendre en compte toutes les transformations et ouvraisons subies par un produit à l’intérieur de la zone, sans pour autant que ce dernier soit originaire de ladite zone. Comparé au système de cumul bilatéral et diagonal, le cumul total est donc un puissant facteur de décloisonnement des marchés, puisqu’il permet l’utilisation des matières originaires des pays tiers à la zone de libre-échange. Le cumul total permet donc une meilleure circulation des marchandises que dans le cas du cumul bilatéral ou diagonal. Les règles d’origine ont pour effet de limiter l’utilisation de matières premières de pays tiers non bénéficiaires des préférences, dans le but de développer l’activité de transformation exportatrice aux seuls pays bénéficiaires du régime préférentiel. Tout dépend en fait du système de cumul appliqué entre les pays bénéficiaires de préférences. C’est ainsi que , plus une zone de libre-échange contiendra de membres qui s’octroient mutuellement un système de cumul total , et plus la circulation de marchandise sera effective avec pour corollaire la création de richesses , due notamment à une intégration économique de plus en plus poussée entre pays de la zone .

B)- Vers un élargissement du cumul dans la zone UE/PTM

Les accords euro méditerranéens d’association ne définissent qu’un simple cumul bilatéral, c’est-à-dire un cumul entre l’Union et le PTM concerné. Ceci aboutit à des relations en étoiles , dont l’Union européenne est le centre avec à chaque extrémité un PTM , sachant que les PTM ne s’accordent , en principe , aucun régime préférentiel entre eux

Il n’existe qu’une exception au schéma décrit ci-dessus : le Maroc, la Tunisie et l’Algérie, déjà réunis au sein de l’Union du Maghreb arabe, sont les seuls pays de l’ensemble méditerranéen à bénéficier d’un cumul bilatéral avec l’Union européenne auquel s’ajoute le cumul total euro-maghrébin. Ce cumul total euro-maghrébin date des accords de seconde génération que les trois pays du Maghreb avaient passées avec la Communauté à la fin des années 70 ( 407

407

Signé 22.04.2002 est entrée en vigueur le 01.09.2005. L’accord euro méditerranéen d’association est en cours de ratification par les deux parties. L’accord euro méditerranéen d’association Tunisie -Union européenne signé le 17.05.95 est en vigueur depuis le 01.03.98. L’accord euro - méditerranéen d’association Maroc - Union européenne singé depuis le 26.02.96 et entré en vigueur depuis le 01.03.2000.

). Rappelons ici que les trois pays du Maghreb central n’avaient tiré aucun bénéfice pratique de cette disposition. Aujourd’hui , ce cumul total entre le Maghreb et l’Union se retrouve dans les accords de troisième génération , et l’Algérie , signataire de l’accord d’association passé avec L’UE coopération n’est pas encore en vigueur , devrait bénéficier du cumul euro-maghrébin nouvelle formule .

Parmi les autres PTM, l’accord de cooptation Egypte - Communauté du 18

décembre 1972 est toujours en vigueur depuis le 28 septembre 1978. Dans le cadre des négociations en cours sur le nouvel accord d’association, Le Caire a demandé le bénéfice du cumul diagonal. La Jordanie qui a signé un accord d’association avec l’Union européenne en Novembre 1997 a souscrit à une déclaration visant le cumul et l’équité de traitement. Enfin, le Liban, dont l’accord de coopération du 03.05.78 est toujours en vigueur (depuis le 28.09.78), a fait une déclaration commune en vue du cumul au titre du nouvel accord euro méditerranéen d’association en cours de négociations.

Il apparaît clairement que l’objectif d’établissement d’une zone euro méditerranéenne de libre-échange à l’horizon 2010 passe préalablement par la définition de règles d’origine identiques , ainsi que par la mise en place du cumul de l’origine dans toute la zone méditerranéenne . Dans cette optique, il faudrait que les partenaires méditerranéens mettent en place, entre eux, un système d’élargissement du cumul de manière à rendre effectif le libre-échange horizontal. Divers avantages économiques pourraient bénéficier aux PTM pratique de larges économies d’échelles par les producteurs installés dans la zone méditerranéenne, diversification et multiplication des sources d’approvisionnement en matières première et produits intermédiaires ; coup de fouet au commerce horizontal (par opposition au commerce verticale dans une simple relation Union européenne - PTM) ; et enfin renforcement dés lien politiques et commerciaux avec l’Union.

L’extension du cumul dans toute la zone est donc une priorité pour l’Union, ainsi que pour les partenaires méditerranéens. Dans une communication intitulée « Le cumul euro méditerranéen de l’origine » (408 ), la Commission européenne a établi le plan d’action suivant pour la zone méditerranéenne :

introduction dans un premier temps de règles d’origine identiques au moyen d’accords bilatéraux mettant en rapport à chaque fois l’Union européenne et un PTM;

extension de ces règles d’origines accompagnées de méthodes de coopération administrative entre les PTM signataires d’accords bilatéraux avec l’Union ;

communication par les PTM de leurs règles d’origine à la Commission ;

entrée en vigueur à la même date du système de cumul de l’origine entre les PTM concernés et l’Union européenne.

Ce schéma théorique, devrait se traduire en pratique par la constitution de

zones de libre-échange sub-régionales. Un premier pôle d’action est composé par les trois pays du Maghreb (l’Algérie, le Maroc et la Tunisie), qui appliquent déjà un système de cumul. Le second pôle est le Mashrek avec l’Egypte, la Jordanie, les territoires de Cisjordanie - Gaza et Israël. Nous étudierons ce point précis infra.

Les cas de la Turquie, de Chypre et de Malte sont différents du reste des

PTM. La Turquie bénéficie d’une union douanière avec la Communauté depuis 1963 et se trouve en situation d’attente d’un probable feu vert politique du Conseil en vue d’une adhésion à l’Union ( 409

408

SEC (1998) 739, Bruxelles, le 19.05.98.

) . Par ailleurs la Turquie a négocié des accords avec les pays de la zone PECO/AELE. De plus, ce pays voudrait bénéficier du système de cumul européen dé Janvier 1999. La Turquie est donc une situation d’intégration avancée vis-à-vis du bloc UE/PECO-AELE. Ce qui, par la même occasion, l’éloigne du bloc Maghreb/Mashrek.

Chypre est en instance de pré adhésion depuis le sommet européen de

Luxembourg et a participé, avec Malte, à l’élaboration des règles d’origine devant constituer la base du système de cumul européen. Là encore, l’intégration économique au bloc européen est beaucoup plus poussée, surtout pour Chypre qui fait partie des sélectionnes pour le cinquième élargissement de l’Union européenne.

La diversité des règles d’origine en fonction des PTM devrait disparaître à terme, normalement en 2010, par le biais d’une harmonisation progressive dont l’épine dorsale est l’octroi du cumul de l’origine accompagné de la coopération administrative.

§2 - L’utilisation abusive des clauses de sauvegarde

Une seconde limité à la libre circulation des marchandises est l’utilisation abusive des mesures de sauvegarde qui constituent un redoutable instrument protectionniste permettant à une des deux parties à l’accord d’échapper, certes de manière, temporaire, à un engagement de libéralisation du commerce en vue l’établissement de la zone de libre -échange. Ces mesures de sauvegarde font l’objet d’un accord multilatéral au niveau mondial, d’un règlement communautaire au niveau européen et de dispositions conventionnelles au niveau bilatéral Union européenne-Algérie.

A)- Un régime conventionnel flexible par rapport au cadre OMC

Le régime conventionnel relatif aux mesures de sauvegarde est beaucoup plus flexible que le régime multilatéral OMC. Et , comme le font très justement remarquer BRAKELND J.-F. et. TURNER V, plus l’intégration commerciale est forte, plus les clauses de sauvegarde sont faciles à invoquer ( 410

Par contre, au niveau multilatéral OMC, l’imposition d’une mesure de sauvegarde passe au préalable par l’ouverture d’une enquête : ainsi l’article 3 de l’accord sur les sauvegardes (

).

Ainsi, l’article 24 de l’accord d’association entre l’Union européenne et l’Algérie prévoit, soit « un préjudice grave aux producteurs nationaux », soit « des perturbations sérieuses dans un secteur de l’activité économique, ou des difficultés pouvant se traduire par l’altération grave d’une situation économique régionale ». Cet article s’inspire en fait de la réglementation OMC et CE en la matière.

La première alternative de l’article 24 est basée sur l’article XIX OMC , qui fait référence à « un préjudice grave aux producteurs nationaux de produits similaires ou de produits directement concurrents » , tandis que la seconde est basée sur l’article 226 CE (abrogé dans Amsterdam ) qui dispose « qu’en cas de difficultés graves et susceptibles de persister dans un secteur de l’activité économique ainsi que de difficultés pouvant se traduire par l’altération grave d’une situation économique régionale , un Etat membre peut demander à être autorisé à adopter des mesures de sauvegarde ... » . Les conditions de fond en vue d’invoquer une clause de sauvegarde sont donc moins contraignantes qu’au niveau multilatéral , car elles offrent , au choix du pays utilisateur , soit la base multilatérale OMC, soit la base communautaire du traité CE .

De plus, dans le cadre bilatéral Union européenne - Algérie, il n’existe pas de procédure d’enquête préalable. Ainsi, l’article 26 prévoit une procédure administrative dont l’objet est de fournir des informations relatives à l’évolution des courants d’échange. Une solution à l’amiable est recherchée dans l’enceinte du Comité d’association et, si un accord n’a pas été trouvé dans les trente jours, la partie plaignante peut adopter « les mesures appropriées ».

411

Au niveau communautaire, on retrouve cette obligation de l’enquête préalable, car le règlement CE n°. 3285/94 (

) issu du cycle de L’Uruguay (1994), prévoit l’ouverture d’une enquête préalable avec consultation des pièces du dossier. Toutefois, cette obligation d’enquête, préalable à l’imposition de mesures de sauvegarde, disparaît dans les cas exceptionnels (art 6).

412

410

Voir BRAKELAND Jean-François et TURNER Vanessa, « Les mesures de sauvegarde dans le commerce international des marchandises : une perspective communautaire », Revue du Marché commun et de l’Union européenne, n° .410, Juillet - Août 1997, PP .454-469.

411

JOCE, n°.L 133 du 23.12.94.

412

JOCE, n°. L 349 du 31.12.94.

) du Conseil du 22 Décembre 1994 transpose fidèlement les nouvelles règles découlant de l’Uruguay round en matière de sauvegardes : un Etat membre demande à la Commission d’ouvrir une enquête, qui se

prononce sur l’opportunité d’ouvrir ou pas ladite enquête dans un délai de 30 jours. Ce délai permet à la Commission de consulter les différents Etat membres avant de rendre un avis d’ouverture d’enquête publié au JOCE. L’enquête doit être menée dans un délai de neuf mois, voire de onze en cas de circonstances exceptionnelles.

B)-La portée politique de la flexibilité observée au niveau bilatéral

Ces différences constatées entre les différents niveaux , multilatéral ( OMC ) , communautaire (CE) et bilatéral ( Algérie - UE ) , font craindre une utilisation abusive , par l’une ou l’autre des parties , des mesures de sauvegarde dans le cadre préférentiel entre l’Union européenne et l’Algérie .

Cette flexibilité qui caractérise le niveau bilatéral s’explique par la dimension politique des accords préférentiels : plus la libéralisation commerciale envisagée est grande, et plus il faut maîtriser, voire limiter le risque politique découlant de la signature de tels accords en insérant des clauses de sauvegarde qui permettent, du moins en théorie, de suspendre le libre- échange si celui-ci devient insoutenable. Dans la pratique, les clauses de sauvegarde ne peuvent être que d’utilisation temporaire, car en vertu de l’accord « les mesures qui apportent le moins de perturbation au fonctionnement du présent accord doivent être choisies en priorité ». De plus, on voit difficilement une des deux parties invoquer de façon permanente l’application de mesures de sauvegarde ; ce serait contraire à l’esprit de l’accord qui prévoit à terme une zone de libre - échange, et difficilement justifiable sur le plan politique.

A titre de comparaison, il semblerait que les conditions de mises en oeuvre des mesures antidumping communautaires se soient renfoncées parallèlement à l’intégration commerciale. En vertu de l’article 37 de l’accord de coopération de 1978, la partie qui constatait des pratiques de dumping pouvait prendre des mesures « conformément à l’accord relatif à la mise en oeuvre de l’article IV de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, dans les conditions et selon les procédures de l’article 38 ». En vertu de nouvel accord d’association, une partie peut prendre des mesures « conformément à l’accord relatif à la mise en oeuvre de l’article IV de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce et à sa législation interne pertinente et dans les conditions et les procédures prévues à l’accord 27 ».

Plus le degré d’intégration économique et commercial est élevé, plus

l’utilisation des clauses relatives à l’antidumping est contraignante : ainsi les mesures doivent être prises conformément à l’OMC et à la législation interne pertinente de la partie plaignante.

Au niveau communautaire, la nouvelle réglementation multilatérale en matière d’antidumping est transposée par le règlement CE n°. 3283/94 ( 413 ) du Conseil du 22 Décembre 1994. Ce règlement renforce les aspects procéduraux. La durée de la procédure ne peut dépasser 15 mois au maximum (dix mois normalement) ( 414

413

JOCE, n°. L 349 du 31.12.94.

414

Voir LANDES Valérie et LORIOT Guillaume, « La nouvelle réglementation antidumping communautaire / De omni re scibli ... », Ed. Techniques, Europe, Avril 1995, PP .1-5. Sur les modifications successives relatives à la réglementation communautaire antidumping, se reporter à la chronique de BOURDANT Joël, « L’activité antidumping communautaire », Revue du Marché et de

).