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Cependant, l’idée d’association devenait pressante pour les autorités

algériennes en raison des contraintes économiques et commerciales que l’accélération de la construction du Marché commun engendrait pour le pays.

§2 - Les contraintes économico- commerciales résultant pour

l’Algérie de la Construction du Marché commun

Sans minimiser le rôle des liens historiques et culturels dans le choix de

l’Algérie d’établir des relations durables avec la communauté, force est de constater que le poids des considérations économiques et commerciales était plus déterminant en la matière.

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Ce faisant, très tôt se manifesta de part et d’autre la volonté de redéfinir le

régime des relations. Le 13 février 1963 ; la commission adressait une note au conseil dans laquelle se déclarer favorable à l’association de l’Algérie à la communauté sur la base de l’article 238. Le 1er Juillet 1963, dans une lettre adressée aux autorités communautaires, le gouvernement algérien exprimait le voeux que des conversations soient engagées avec la communauté en vue de normaliser et de consolider les relations commerciales et économiques entre l’Algérie et la CEE. Cette demande ayant été confirmée dans une seconde lettre en décembre 1963 (

) .

Face à cette situation, l’Algérie ne devait plus se confiner dans une attitude

d’expectative ou d’hésitation. Les impératifs économiques et commerciaux l’emmenèrent, sans plus tarder, à demander l’ouverture de négociations avec la CEE.

Section II : Les problèmes rencontrés lors des négociations

La nécessité de redéfinir la nature des relations liant la communauté à

l’Algérie au lendemain de son indépendance et par le même coup dépasser le régime du statu quo jusque là maintenu de l’article 227 §2, devait engager des négociations entre les deux parties. Si les deux partenaires proclamèrent très tôt leur volonté d’aboutir à un accord permettant de régir de façon durable leurs relations et engagèrent des pourparlers à cet effet, de nombreuses divergences, relatives notamment au contenu de l’accord et à son fondement d’une part et au régime des produits agricoles d’autre part, apparurent.

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Pour l’Algérie , l’intérêt d’un accord avec la CEE était double : du point de vue

politique , il devait permettre d’effacer des liens hérités de la période coloniale , il s’agissait d’une part , de remplacer le régime imposé de l’art de 227 par un régime , et d’autre part , d’enserrer dans un cadre communautaire des relations , où la France gardait encore une place essentielle et d’essayer du même coup de développer les échanges avec les autres pays du Marché commun . Du point du vue économique, l’Algérie cherchait, à travers cet accord, à faire confirmer les avantages dont elle bénéficiait sur le Marché commun, et si ), le conseil donna alors mondât à la commission d’engager des pourparlers.

Dans le même temps, le Maroc et la Tunisie n’ont pu envisager sérieusement

l’ouverture de négociations avec la CEE que lorsque l’indépendance algérienne était acquise. On pouvait penser alors que les trois Etats du Maghreb allaient s’exprimer d’une seule voie et présenter un front uni devant la communauté. En vérité aucun projet commun ne fut élaboré par les trois Etats maghrébins qui engagèrent séparément lieurs négociations.

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Ibid.

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possible à obtenir de nouvelles concessions : en attendant les premiers résultats de la politique de redéploiement des échanges, il était nécessaire d’obtenir des garanties pour les débouchés existants.

La CEE, quant à elle se trouvait devant une situation juridiquement fort

simple : le maintien ou l’établissement de relations préférentielles avec un Etat non membre, quelles qu’en soient les raisons, ne peut s’effectuer que sur une base conventionnelle. Cela résulte des dispositions du Traité de Rome, et notamment de l’article 238.

Les pourparlers préliminaires débutèrent en Février 1964. Parallèlement, des

conversations étaient engagées avec le Maroc et la Tunisie. Les deux délégations furent d’accord pour considérer que le nouveau statut devait être établi sur une base conventionnelle et qu’il devait être conforme aux principes du G.A.T.T. Mais les divergences apparurent aussi tôt franchi ce stade.

§1- Le problème du contenu de l’accord

Dés le début des pourparlers, l’Algérie fit savoir qu’elle souhaitait conclure un

accord global et préférentiel avec la communauté. C’est à dire un accord qui comporte à la fois la révision des dispositions commerciales prises à son encontre, et l’établissement d’une coopération économique, Technique, financière et dans le domaine de la main d’oeuvre. Il devait être préférentiel, c’est à dire qu’il devait permettre de maintenir les avantages existants et si possible les développer.

Dans le domaine des échanges , l’Algérie souhaitait la mise en place d’une

zone de libre échange , mais « aménagée » de façon à tenir compte de l’inégalité de développement entre les partenaires : le désarment douanier et contingentaire s’effectuerait à un rythme beaucoup plus lent du côté algérien que du côté européen , des clauses de sauvegarde devraient être prévues , permettant de faire face à des difficultés budgétaires relatives à la balance des paiements , ou encore destinées à protéger des industries naissantes . Pour les produits agricoles en particulier, l’Algérie entendait obtenir de substantiels avantages, lui assurant au minimum le maintien des préférences dont elle jouissait alors.

Afin de renforcer leur position, les trois pays du Maghreb présentèrent des

demandes presque semblables. Pour eux, l’accord avec la CEE devait leur assurer un certain nombre d’avantages, en plus de ceux dont ils bénéficiaient déjà ( 68

Cela admis, il était nécessaire d’empêcher que les avantages consentis à

l’Algérie ne dépassent un certain seuil car, au delà de ce seuil, on risquait de se heurter à des réactions défavorables de la part de certains pays - notamment l’Espagne et Israël à cette époque - dont les relations commerciales avec la communauté étaient fondées sur la clause de la nation la plus favorisée et qui exportaient des produits concurrents de ceux du Maghreb. De telles réactions étaient également à craindre de la part des pays méditerranéens de la CEE. L’Italie en particulier manifesta de vives inquiétudes à la perspective d’accords préférentiels avec les pays du Maghreb, dans un mémorandum en date du 21 Avril 1964 (

).

Quant à la délégation de la communauté, se fondant sur la déclaration

d’intention, l’article 227 et surtout l’esprit du Traité de Rome, considérait que l’Algérie avait vocation à bénéficier d’un régime préférentiel .Pour respecter les règles du C.A.T.T, ces relations préférentielles devaient donner lieu à la construction soit d’une union douanière, soit d’une zone de libre échange.

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68

Sur les demandes des pays du Maghreb, voir 8e Rapport Général sur l’activité de la CEE, 1er Avril 1964 - 31 Mars 1965.

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Mémorandum sur les principes directeurs d’une politique globale de la communauté en ce qui concerne les relations avec les pays tiers, in Europe Documents du 16 Mai 1964.

) , elle exprimait ses craintes que de tels accords ne remettant en cause l’équilibre interne de la communauté et formulait un certain nombre de suggestions , elle ne condamnait pas le principe de relations privilégiées avec les pays du Maghreb , mais entendait qu’une certaine préférence soit maintenu en faveur des productions des Etats

membres par rapport aux productions similaires des Etats associés . Elle demandait aussi qu’en cas d’octroi d’une aide financière à un Etat associé, on réduise ou on supprime la contribution de l’état le plus touché sur le plan commercial.

Tenant compte de ces inquiétudes , la communauté proposait de soumettre

les produits agricoles soumis au régime de l’organisation commune de Marché à un régime intermédiaire communautaire et le régime réservé aux pays tiers . Mais encore fallait il déterminer la marge de préférence à conserver aux Etats membres.

Plus que sur le contenu exact de la zone de libre échange, c’est sur

l’extension de l’accord à des domaines non commerciaux que portait l’essentiel des divergences entre les deux délégations. La communauté n’envisageait pas de conclure un accord global et considérait que la négociation aurait seulement pour but de normaliser les relations commerciales avec l’Algérie.

§2 - Le problème du fondement de l’accord

L’Algérie désirant établir une coopération globale, les articles 111 et 113 du

Traité CEE, qui visent des accords commerciaux, ne pouvait constituer une base juridique valable à l’accord projeté. Mais l’Algérie refuserait l’utilisation de l’article 238 du Traité de Rome qui vise les accords d’association et l’Algérie ne souhaitait pas conclure une convention d’association comme celles passées avec le Maroc et la Tunisie en Mars 1969 se limitant au régime des échanges , mais un accord global et préférentiel . Car le terme déjà d’association risquait d’avoir de l’implication politique que l’Algérie, en raison de ses options en faveur du socialisme, voulait éviter.

Du côté de la communauté, l’accord envisageable devait en principe être

conclu sur la base de l’article 238.

Le problème était alors de savoir s’il était possible de conclure un accord sur

la base de l’article 238 sans le dénommer association. Ou bien fallait il trouver un autre fondement, la déclaration d’intention ou l’article 227 par exemple ? La commission réserva sa réponse. Elle estimait que le problème du fondement n’était pas en réalité un obstacle majeur à la conclusion de l’accord.

Telles étaient les positions des parties en 1964 : L’Algérie voulait conclure un

accord portant sur tous les domaine de la coopération économique, mais qui n’ait pas d’imbrications politiques. Et la communauté envisageait la conclusion d’un accord commercial préférentiel sur la base de l’article 238 qui institue une association. Les points de vue étaient-ils trop éloignés pour permettre l’ouverture éventuelle de négociations ?

A l’issue des pourparlers, un communique commun publié le 18 Décembre

1964, faisait ressortir les aspects positif des entretiens, en déclarant que « les conversations ont abouti à des résultats suffisants pour que les instances compétentes du gouvernement algérien et de la CEE puissent en être saisies en vue de l’ouverture éventuelle de négociations

proprement dites » (70 ).

Cette suspicion mutuelle de part et d’autre allait retarder l’ouverture de

négociations, alors même que la dégradation progressive de la situation de l’Algérie vis à vis de la CEE, rendait plus que jamais nécessaire la conclusion d’un accord.

La période allait de 1965 à 1972 est caractérisée par une faible activité

diplomatique. Pendant longtemps, les positions sont restées figées. L’Algérie se confinait dans une position intransigeante que ses voisins en vue d’obtenir un accord global, la Communauté était quant à elle, réticente à négocier sur des bases différentes de celles des négociations avec le Maroc et la Tunisie.

La conclusion par le Maroc et la Tunisie des accords d’association en 1969

marquait de ce fait l’échec total des négociations Algérie- CEE.

Ce n’est qu’en 1972 que le conseil de la communauté a fait connaître son

intention de proposer à l’Algérie l’ouverture de négociations en vue de la conclusion d’un accord global comprenant « outre un régime préférentiel pour les échanges , d’autres actions concernant la coopération économique , technique et financière » ( 71

La délégation algérienne s’est félicitée particulièrement de l’approche globale

adoptée par la communauté pour l’ouverture de ces négociations. Elle a rappelé que des 1963 elle avait souligné l’insuffisance d’une approche purement commerciale , compte ternir de la structure des échanges entre l’Algérie et la communauté et des besoins de développement de son pays (

) .Une proposition semblable était faite au Maroc et à la Tunisie , et la communauté précisait qu’il était souhaitable que les accords avec les trois pays entrent en vigueur à la même date , et si possible avant la 31 Août 1974 , date d’expiration des accords conclus avec le Maroc et la Tunisie .

Une première session des négociations a eu lieu à Bruxelles le 10 et 11

Juillet 1972 entre une délégation algérienne et une délégation de la communauté.

72

L’idée d’une politique méditerranéenne reposant sur la prise de conscience

de l’inter dépendance entre l’Europe et les pays du bassin méditerranéen, n’était pas nouvelle, mais il a fallut attendre l’élargissement de la communauté pour la mettre en oeuvre (

) .

Ce changement de position de la communauté est dû aux nouvelles données

de la politique extérieure de la communauté en particulier la définition de « l’approche globale méditerranéenne » et la mise en place d’un système de préférences généralisées.

73

Ce système semblait entraîner, pour les pays, comme l’Algérie qui bénéficiait

déjà d’avantages tarifaires, une détérioration de leur situation préférentielle. Les préférences tarifaires étant désormais le régime de droit commun pour les PVD, à partir de ce moment la communauté ne pouvait plus raisonnablement espérer conclure avec l’Algérie un accord purement commercial, et ce d’autant plus qu’elle n’était pas disposée à étendre les concessions dans le domaine agricole, le volet « coopération » devenait donc indispensable (

).

Dans l’ensemble, il se trouve que l’élargissement conduisait à rendre plus

difficile l’entrée des produits agricoles des pays méditerranéens sur les marchés des pays adhérents.

Pour compenser ce handicap, la communauté décida d’inclure dans les

accords en vigueur où à conclure avec ces pays des dispositions relatives à une coopération dans les domaines financiers, techniques et de l’emploi et de l’environnement.

La mise en place, à partir de 1971 d’un système communautaire de

préférences généralisées non réciproques en faveur des pays en voie de développement, en application des résolutions de la deuxième session de la CNUCED, organisée à New Delhi en 1968 .Ce système comportait des préférences douanières en faveur des produit manufacturés et semi finis originaires des PVD. Les produits agricoles et industrielles et les matières premières sont exclus du système communautaire.

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Il faut noter qu’au moment ou la Communauté venait de conclure la première

convention de Lomé (Lomé I) en février 1975 avec les Etats d’Afrique, caraïbes et pacifique (ACP) dont l’objectif est le développement économique de ces Etats, aucun accord n’a été conclu avec l’Algérie qui pourtant continuait à avoir des relations prépondérantes avec la Communauté. En effet, après l’indépendance de l’Algérie, la part de la communauté s’élève

).

71

6e Rapport Général sur l’activité des communautés, 1972, P.276.

72

Commission des communautés Européennes, Bruxelles, le 21.09.1972 rapport de la commission au conseil sur la première phrase des négociations avec l’Algérie (10 - 11.1.1972).

73

Cf. DIPOUY (Alain) en « le statut juridique de la coopération entre l’Algérie et la CEE » R.A.S.J.E.P, N°1 Mars 1979, P.13.

74

à 60 % - 65 % du commerce extérieur total de ce pays. de son côté, l’Algérie demeure le premier client de la Communauté en Afrique et son deuxième fournisseur après la Libye (75

Ce problème s’est posé pour la première fois lors de la conclusion de l’accord

d’association avec la Grèce. La formule trouvée était celle de l’accord mixte. Elle s’est avérée d’ailleurs la plus simple et partant la plus rapide (

).

L’accord de coopération aussi intervenu, après de longs préliminaires et

d’âpres négociations, a été jugé équilibré, à quelques nuances prés, par les deux nouveaux partenaires. Mais ce qui était alors apprécié, c’est l’équilibre supposé de l’accord, l’équilibre réel, lui ne pouvant l’être qu’après quelques années d’application. Les relations commerciales s’inscriront alors dans un cadre nouveau, encore en vigueur aujourd’hui, celui de l’accord de coopération et de son protocole additionnel d’adaptation.

Titre II :

Les relations commerciales CEE Algérie de l’accord de coopération