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La condition de respect des droits de l’homme se retrouve d’abord dans tous

les accords euro méditerranéens d’association entre l’Union européenne et les PTM .En effet , l’article 2 de l’accord conclu entre l’UE et l’Algérie dispose que « le respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux de l’homme , tels qu’énonces dans la déclaration universelle des droits de l’homme , inspire les politiques internes et internationales de la Communauté et de l’Algérie et constitue un élément essentiel du présent accord » .

La déclaration commune à l’article 90 ( 322

En outre, cette violation de tout ou partie d’un engagement international serait

de nature à engager la responsabilité juridique internationale de l’Etat contrevenant (

) explicite la notion d’élément essentiel de l’accord. La violation des éléments essentiels de l’accord repris à l’article 2 est assimilée à une violation substantielle dudit accord et à un cas d’urgence spéciale. En vertu de l’article 90§2, la partie qui considère que l’autre partie a violé ses obligations peut prendre des mesures appropriées sans en référer au Conseil d’association lorsqu’il s’agit d’un cas « d’urgence spéciale ». Le second cas « d’urgence spéciale » est celui du rejet de l’accord non autorisé par les règles générales du droit international.

La combinaison de l’art 90 et de la déclaration commune relative à ce même article constitue une clause de non-exécution de l’accord en cas de violation des droits de l’homme. Dans l’hypothèse d’un cas d’urgence spéciale, la suspension de l’application de l’accord aurait des conséquences sur tous les domaines de coopération, notamment le volet financier dont le titre IV dudit accord constitue la base juridique.

323

L’introduction de la clause du respect des droits de l’homme , des libertés fondamentales et de l’Etats de droit dans le règlement MEDA doit permette , lorsqu’il existe effectivement une violation des droits de l’homme par un pays bénéficiaire , la suspension de l’aide (

).

L’inscription de la clause dans le corps même de l’accord lui donne force

juridique supérieur à sa seule inclusion dans le règlement communautaire MEDA.

La clause des droits de l’homme fait également partie intégrante du

règlement financier MEDA. L’article 3 stipule en effet que « le présent règlement se fonde sur le respect des principes démocratiques et de l’Etat de droit, ainsi que des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qui en constituent un élément essentiel dont la violation justifie l’adoption de mesures appropriées ».

2- Une condition suspensive du volet financier du partenariat

324

322

Voir la partie « déclarations communes », annexée à l’accord euro méditerranéen d’association entre l’Union européenne et l’Algérie, cit. , supra.

323

Pour plus de détails sur la responsabilité internationale de l’Etat, voir à CARREAU Dominique, Droit International, Pedone, 5eme édition, 645 P.

) . Cette innovation ne va pas sans poser d’innombrables problèmes.

Les pays nordiques avaient une conception stricte de la conditionnalité. Selon eux, il fallait appliquer des critères objectifs - tels le multipartisme ou l’abolition de la peine de mort - permettant un déclenchement automatique des sanctions en cas de manquement par le pays bénéficiaire.

La Commission européenne et la France défendaient une position plus

nuancée, celle d’une conditionnalité relative. La suspension de la coopération financière devait se faire de manière graduée et proportionnelle à la gravité des violations commises en matière de droits de l’homme. C’est cette dernière position qui a été adoptée par le Conseil dans sa résolution sur « les droits de l’homme, la démocratie et le développement ». Ainsi, le Conseil estime que « alors qu’en règle générale la priorité doit être donnée à une approche positive et constructive, en cas de violations graves et persistantes des droits de l’homme ou en cas d’interruption sérieuse des processus démocratiques, la Communauté et ses Etats membres, guidés par des critères objectifs et équitables, étudieront les mesures appropriées aux circonstances. De telles mesures, proportionnelles à la gravité du cas d’espèce, pourraient comporter des démarches confidentielles ou publiques, la modifications du contenu des programmes de coopération ou des canaux utilisés, ou encore le report de signatures ou de décisions nécessaires à la mise en oeuvre de la coopération ou, au besoin, la suspension de la coopération avec les Etats concernées ».

Il existe toute une palette d’instruments à la disposition de l’Union pour faire pression sur les Etats tiers bénéficiaires de la coopération financière dans le cas de violation des droits de l’homme. De plus, la mise en application de la clause suspensive de l’article 3 du règlement MEDA n’est pas automatique, bien au contraire.

Il faut par ailleurs souligner le fait que l’Union s’est dotée d’un instrument comparable au niveau interne. Le traité d’Amsterdam introduit, et c’est là une nouveauté, une procédure de suspension d’un Etat membre en cas de violation des droits de l’homme.

Désormais, la conditionnalité des droits de l’homme s’applique au sein même de l’union. Le traité d’Amsterdam prévoit en effet une procédure d’exclusion pour les Etats membres qui ne respecteraient pas les droits de l’homme tels que reconnu par la CEDH. L’article 309§2 du traité d’Amsterdam introduit une clause suspensive, devant permettre de discipliner les nouveaux adhérents de l’Est. En vertu de cet article « lorsque l’existence d’une violation grave et persistante par un Etat membre de principes énonces à l’article 6§1 ( « L’Union est fondée sur les principes de la liberté , de la démocratie , du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales ainsi que de l’Etat de droit , principes qui sont communs aux Etats membres » ) , du traité sur l’Union européenne a été constatée conformément à l’article 7§1 dudit traité , le Conseil , statuant à la majorité qualifiée , peut décider de suspendre certains des droits découlant de l’application du présent traité à l’Etats membre en question . Ce faisant, le Conseil tient compte des conséquences éventuelles d’une telle suspension sur les droits et obligations des personnes physiques et morales. Les obligations qui incombent à l’Etat membre en question au titre du présent traité restent en tout état de cause contraignantes pour cet Etat ».

L’article 309 du traité d’Amsterdam est intéressant à plus d’un titre.

Premièrement, il permet à l’Union de confirmer, sur le plan des principes au moins, son attachement aux droits de l’homme.

En second lieu, l’Union européenne se prémunit préventivement des critiques de néocolonialisme que pourraient lui adresser les Etats tiers. Elle se soumet donc à la clause suspensive du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. En imposant cet élément essentiel à ses Etats membres ainsi qu’aux pays tiers, les critiques et néocolonialisme - souvent faites à la Commission européenne - n’aura plus la même force.

Troisièmement, l’inclusion d’une telle clause est un moyen de pression non négligeable sur les futurs nouveaux membres de l’Union. En théorie, leur adhésion n’aura pas le caractère de l’irréversibilité : dans l’hypothèse d’une violation flagrante des droits de l’homme ou des droits des minorités, les nouveaux adhérents de la zone PECO pourraient se voir infliger l’humiliation d’une suspension de « certains des droits découlant de l’application du présent traité (d’Amsterdam) » ( 325

325

Voir l’article 309§2 du traité d’Amsterdam.

) : il peut s’agir d’une suspension du droit de vote au Conseil par exemple. Mais, il peut aussi s’agir d’une suspension des importants transferts financiers auxquels ont droit les nouveaux membres en période de transition.

Dans sa résolution sur « les droits de l’homme, la démocratie et le

développement », le Conseil précise « qu’un tel ajustement passera par le choix des partenaires dans les projets et du type de programme de coopération. En tout état de cause, l’aide humanitaire et l’aide d’urgence, qui profitent directement aux couches les plus vulnérables, seront maintenues ».

Ceci illustre parfaitement toute la philosophie du programme MEDA, à

commercer par la liste des bénéficiaires qui sont l’Etats et les régions, mais aussi « les autorités locales, les organisations régionales, les organismes publics ou les opérateurs prives ... » ( 326

Le lien entre la démocratie et le développement a été institutionnalise par

l’article 5 de la convention de Lomé IV. C’est à cette occasion que la Communauté a inclus, dans un accord commercial régional, une référence aux droits fondamentaux de l’homme (

). Il existe en fait une tentative de contournement des Etats bénéficiaires au profit des autres acteurs. Peut-être faut il rappeler que le succès très relatif de la coopération décentralisée mise en oeuvre par le biais des programmes MED est en partie dû au rejet culturel des pays bénéficiaires dotés de traditions administratives et politiques fortement centralisatrices . Cet aspect sensible pourrait se représenter à nouveau dans l’hypothèse d’une suspension de la coopération financière par l’Union européenne et la mise en application des solutions de contournement privilégiant les acteurs autres qu’étatiques.

B)- L’origine de la clause des droits de l’homme :

la fin de la confrontation Est-Ouest

1- L’élaboration progressive d’une doctrine communautaire.

L’inclusion de la clause des droits de l’homme dans les accords euro méditerranéens d’association, ainsi que dans le règlement MEDA, trouve son origine dans une idée selon laquelle le développement économique et social ne peut avoir lieu sans la démocratie politique.

327 ). Ainsi, l’article 5§1 al.2 dispose que « la politique de développement et la coopération sont étroitement liées au respect et à la jouissance des droits et libertés fondamentales de l’homme » ( 328 ). Cette clause n’avait rien de contraignant car il n’existait à l’origine aucun mécanisme concret de suspension ou de sanction en cas de violation des droits de l’homme ( 329 ). Par ailleurs, les nombreux droits énumères à l’article 5 ( 330 ), ont eu un effet inflationniste. C’est ainsi, que Frédéric SUDRE a noté que l’article 5 de la convention de Lomé apparaissait « comme une disposition balai » ( 331

Il faut attendre la chute du mur de Berlin pour que se dégage, dés 1991, une doctrine européenne en la matière. C’est dans une communication de la Commission au Conseil sur « les droits de l’homme, la démocratie et la politique de coopération au développement » (

).

332

326

Voir l’article 1§2 du règlement MEDA, cit. . Supra.

327

La communauté n’en était pas à sa première tentative : une déclaration sur le respect des droits de l’homme a été introduite dans la Convention de Lomé III (1984) ... en annexe : voir sur ce point BURETTE-MAURAU. P, « Les difficultés d’internationalisation des droits de l’homme : à propos de la Convention de Lomé », RTDE, no, 3 Juillet 1985, P. 463.

328

JOCE, no, L 229 du 17.08.91, cit. Supra.

329

Toutefois, un mécanisme de suspension a été ajouté lors de la révision à mi-parcours de la convention de Lomé IV.

330

L’article 5§2 de la convention de Lomé cite les droits fondamentaux de la personne , les droits civils et politiques , les droits économiques , la lutte contre le système d’apartheid et la non-discrimination au bénéfice des travailleurs migrants , étudiants et autres étrangers .

331

Voir SUDRE Frédéric, Doit international et européen des droits de l’homme, 3 eme édition, PUF,

) que « la gardienne des traités » souhaite systématiser les interventions communautaires ainsi que celles des Etats membres - au titre de la coopération au développement dans une politique extérieur commune de promotion de la démocratie, des droits de l’homme et de l’Etat de droit.

Le parlement européen, champion des droits de l’homme, ne pouvait rester

silencieux en la matière. Par une importante résolution « sur les droits de l’homme, la démocratie et le développement » ( 333 ), le PE affirme cette relation entre le développement et la démocratie. Ainsi, les eurodéputés « considèrent que des avancées dans le sens du développement économique et de la satisfaction des besoins des peuples des pays en développement exigent des progrès dans le domaine des droits de l’homme et de la démocratie » (334

Enfin, le Parlement propose « d’associer étroitement la promotion de la démocratie aux processus de reformes économiques dans les pays en développement » (

) et demandent l’inclusion de l’esprit ou de lettre de l’article 5 de la Convention de Lomé dans tous les accords de coopération et protocoles financiers.

335 ). Cette résolution du PE a été décrite par Catherine GOYBET comme formant « la pierre angulaire de la nouvelle approche de la Communauté dans sa politique de coopération » ( 336

Le 28 Novembre 1991, le Conseil approuve cette communication par une

résolution sur « les droits de l’homme la démocratie et le développement » ( ).

337 ) et a consacré politiquement le lien entre les droits de l’homme et le développement. Ainsi, le Conseil estime que « les droits de l’homme et la démocratie s’inscrivent dans le cadre d’un ensemble plus vaste d’exigences permettant de parvenir à un développement équilibré et durable » ( 338

Jusqu’au traité de Maastricht, la Communauté n’était pas armée

juridiquement pour inclure des clauses relatives aux droits de l’homme dans ses accords avec les pays tiers. Le traité de Rome, qui jette en 1957 les bases d’une Communauté économique stricto sensu, ne définit en effet pas de politique extérieure de l’Union et ne fait aucune référence aux droits de l’homme. La jurisprudence de la CJCE en matière de droits fondamentaux (

).

Il faut attendre la conclusion et l’entrée en vigueur du traité de Maastricht pour que la Communauté européenne voie ses compétences étendues au domaine des droits de l’homme de l’Etat de droit et des libertés fondamentales. De plus , l’extension des pouvoirs parlementaires dans les domaine législatifs , budgétaires , et des droits de l’homme vont aller crescendo à chaque révision des traité constitutifs ( Maastricht , Amsterdam ) .

2-L’extension des compétences de la Communauté européenne