• Aucun résultat trouvé

1. L’altération sensorielle chez les autistes

1.1. Particularités sensorielles

De nombreuses recherches ont été effectuées autour des personnes atteintes d’autisme portant sur leur perception des sens. Qu’il s’agisse des domaines visuels, auditifs ou tactiles, on y retrouve chez la plupart des autistes des troubles de la sensibilité. Ces derniers seraient présents chez environ 40% d’entre eux. Ces troubles sensoriels sont parfois évidents à évaluer, tandis que par ailleurs ils pourront être difficiles à observer. Mais bien souvent, « les particularités perceptives des personnes avec autisme sont souvent sous-évaluées, alors qu’elles donnent lieu à beaucoup d’inconfort au plan sensoriel et sont probablement responsables de nombreux troubles du comportement et d’anxiété. »1

Il est donc d’autant plus difficile d’effectuer une prise en charge adaptée à ces enfants, tant les particularités sensorielles sont présentes.

Les troubles dans le domaine visuel peuvent ainsi se développer de la manière suivante : les personnes avec autisme auront tendance à se focaliser sur un détail d’un objet et non sur une vue d’ensemble. Tout cela aura pour conséquence d’altérer les capacités d’exploration et de reconnaissance des visages par exemple, des mimiques, ou bien encore des images et des lettres. Toute vision dans la globalité est alors compliquée. La rééducation auprès d’un orthoptiste peut donc être nécessaire.

Les troubles dans le domaine tactile sont tout aussi handicapants. On peut retrouver chez certains autistes une totale insensibilité à la douleur, pouvant entraîner de graves conséquences. Chez d’autres enfants, on trouvera une abhorration au toucher, certains ne pouvant pas manipuler telle ou telle texture, tandis que d’autres seront en exploration tactile constante. La douleur chez ces personnes peut ainsi être très difficile à exprimer, ce qui peut donner lieu à des comportements d’automutilation, pour rechercher cette

1 « Entraînement aux habiletés sociales appliqué à l’autisme »

sensation de douleur. D’autres auront des comportements d’agressivité majeurs, n’ayant pas d’autre moyen d’exprimer leur inconfort. Il faut donc être très à l’écoute de tous ces comportements pour pouvoir prendre en charge ces personnes et les aider dans l’ajustement de ces troubles sensoriels.

D’autres troubles sensoriels peuvent aussi se présenter comme des défauts de sensibilité gustatifs et olfactifs. Nous pouvons donc rencontrer des enfants qui ne supporteront pas les aliments acides, qui ne pourront pas manger d’aliments en morceaux ou d’autres encore qui n’accepteront pas la texture du dentifrice pouvant provoquer des sensations désagréables. En ce qui concerne la sensibilité olfactive, il s’agira de personnes ne supportant pas certaines odeurs. D’autres à l’inverse présenteront une conduite de flairage, qui peut faire penser à un comportement stéréotypé : intérêt pour une odeur particulière ou encore un besoin majeur de sentir les aliments avant de les manger. Toutes ces conduites impliquent donc une prise en charge adaptée.

1.2. Hypo- ou hyper sensibilité auditive

Les troubles sensoriels liés à l’audition sont très courants chez les autistes. W. GOLDFARB en 1963 fut le premier à parler d’hypo- et hypersensibilité chez les personnes autistes. Dans de nombreux cas, on retrouvera surtout un trouble d’hypersensibilité. Mais on retrouve aussi des cas d’hyposensibilité. Dans la littérature, il arrive fréquemment de trouver le terme de « pseudo surdité » chez les personnes autistes. Beaucoup de parents s’inquiètent de l’audition de leur enfant, pensant qu’il est sourd. En effet, nombreux sont les enfants autistes qui ne réagissent pas à l’appel de leur prénom. Cependant, il a été démontré qu’ils réagissaient à des bruits très faibles et de fréquence très basse, que nous sommes presque incapables de percevoir. Ces bruits sont par exemple ceux du four à micro-ondes ou du frigidaire.

L’hyposensibilité auditive des enfants autistes peut se remarquer grâce à différents éléments. Nous rencontrerons alors des enfants qui « crient fréquemment ou émettent régulièrement des sons, qui aiment les jouets qui font du bruit, les sons répétitifs et forts

ou encore des enfants qui aiment frapper les objets contre la table, les murs, les meubles ou le plancher. »1

L’hypersensibilité auditive est elle aussi facilement remarquable chez les enfants autistes. Certains d’entre eux pourront être indisposés par des bruits du quotidien, comme une feuille que l’on froisse, ou bien ne pas supporter les bruits forts. Les réactions face à ces stimulations sont diverses : cris, agitation, ou bien souvent les mains sur les oreilles comme pour signaler une atteinte trop importante à leur propre monde. Il s’agit alors pour l’enfant de se rassurer et de retrouver son propre équilibre. Le plus souvent, nous retrouvons des troubles du comportement associés à ces réactions particulières au bruit.

2. Conséquences sur le langage

Comme il l’a été démontré, le lien entre audition et langage est évident. Les troubles sensoriels liés à l’audition auront donc des conséquences sur le développement du langage. Pour certains autistes, le langage verbal n’est pas le mode de communication privilégié. La compréhension langagière est elle aussi difficile, surtout lors de l’utilisation de phrases complexes. Il est souvent dit que les autistes ont « leur langage à eux », et qu’il est parfois difficile d’entrer en interaction avec eux du fait de leur trouble du langage. Mais certains autistes acquièrent tout de même la parole. Dans la plupart des cas, on retrouve un retard de langage assez conséquent. Des troubles de l’articulation peuvent aussi être présents, probablement imputables à une intégration auditive défaillante.

Le manque d’écoute, le manque d’intégration auditive dont font preuve les enfants autistes ont des répercussions sur le langage dont il faut tenir compte. Comme nous avons pu le voir, le lien entre audition et langage est primordial durant toute la petite enfance.

Chaque bruit, chaque son, chaque élément qui nous parvient à l’oreille entre dans la composition de ce que nous pouvons appeler notre univers auditif. L’homme est capable

1 « La personne autiste et le syndrome d’Asperger », de J-C JUHEL, Editions Les presses de l’université

de capter les ondes sonores pour ensuite les analyser et les faire devenir porteuses de sens. Toute la difficulté de la personne autiste est alors perceptible : sans ce jeu sonore et avec une altération du cheminement des sons, l’enfant ne peut être que passif dans cet univers des sons. Il capte ceux qui l’intéressent, parfois le plus infime des sons, et se forme son propre univers sonore. C’est alors à nous d’en saisir le véritable sens, d’utiliser ce que l’enfant nous propose pour lui faire acquérir un langage, quel qu’en soit la forme. L’accès au sens prendra certainement un temps plus important que chez tout autre enfant, mais la communication sera présente.

Et comme l’a très bien dit Françoise DOLTO : « Tout groupe humain prend sa richesse dans la communication, l’entraide et la solidarité visant à un but commun : l’épanouissement de chacun dans le respect des différences ».

Chapitre II

L’AUTISTE ET LES EMOTIONS