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IV. Passation du protocole et résultats

3. Comparaison à la population témoin

Afin d’établir une fiabilité dans les résultats, nous avons décidé de comparer nos tests à une population témoin. Pour cela, nous avons choisi cinq enfants ne présentant pas de pathologie, en les appariant en âge et en sexe par rapport aux enfants autistes.

3.1. B. (enfant autiste) et W. (enfant témoin)

Les résultats de W. que nous pouvons retrouver en annexe VI montrent des scores légèrement meilleurs que ceux d’B. Nous remarquons qu’à de nombreuses reprises, W. fait preuve d’approches sonores en guise de réponses. En effet, dans la catégorie des moyens de transport, bien que trois réponses soient erronées, l’enfant réalise des approches sonores : chaque objet cité est un bruit de moteur. Nous soulignons donc que le registre cohyponymique est bien acquis, l’enfant citant notamment le « tracteur » pour la « voiture » puis le « train » pour le « camion ». Par ailleurs, le registre sonore dans lequel l’enfant se situe reste toujours celui du bruit de moteur, ce dernier étant à la base d’une reconnaissance correcte de la catégorie des moyens de transport.

Ce qui semble prégnant dans la comparaison de ces deux enfants est la réussite en ce qui concerne la reconnaissance des sons liés aux instruments de musique. Nous connaissons la difficulté des personnes autistes à discriminer les sons, compte tenu des troubles sensoriels auxquels elles sont confrontées. Nous savons aussi que les instruments de musique se classent dans la catégorie des sons complexes, comme nous avons pu le voir dans notre partie dédiée aux sons, et qu’il s’agit donc d’un mélange d’harmoniques qui sont plus difficiles à analyser par l’oreille. Nous pouvons donc émettre l’hypothèse que les personnes autistes ont davantage de difficultés à discriminer les sons variant le timbre et la hauteur par rapport aux personnes neurotypiques.

Enfin, W. n’a présenté aucune difficulté à différencier les émotions par le canal auditif, ni même à classifier les types de voix (féminine, masculine ou voix d’enfant). Le

registre émotionnel ne lui pose donc pas problème, ce qui n’était pas le cas pour B. qui confondait l’émotion de la peur et celle de la colère.

3.2. T. (enfant autiste) et L. (enfant témoin)

Sur la totalité des sons proposés, seuls deux n’ont pas été reconnus par L. Le premier est celui de l’« hélicoptère », interprété comme celui d’un « avion ». La réponse par cohyponyme est donc évidente, les deux faisant partie du même registre sémantique. Le second bruit qui n’est pas correctement reconnu est celui du « violon », la réponse de l’enfant étant celle d’« harmonica ». Une fois encore, nous pouvons souligner la réponse d’ordre cohyponymique. Par ailleurs, les approches sonores effectuées par L. sont tout à fait correctes, puisqu’elles restent dans le domaine sonore de la catégorie en question, c'est-à-dire celui des bruits de moteur pour les moyens de transport et celui des bruits musicaux pour les instruments de musique. La logique de réponse est donc évidente.

Lors de l’analyse des résultats de T., nous avions pu observer que de nombreuses réponses données étaient marquées par une généralisation des termes (« musique » pour trois des instruments notamment). Or, cette tendance à généraliser ne se retrouve pas chez notre enfant témoin qui, au contraire, cherche à particulariser ses réponses quitte à ce que ces dernières soient erronées.

Par ailleurs, nous avions souligné les persévérations effectuées par T., qui répétait à plusieurs reprises les mêmes termes. Cet aspect ne se retrouve pas non plus chez notre enfant témoin.

Des réponses d’ordre global montrant la difficulté à employer un terme précis, et des persévérations dans les réponses proposées, semblent donc être deux logiques adoptées par l’enfant autiste. Ces logiques n’ont pas relevées chez notre enfant témoin.

L. a parfaitement reconnu les émotions présentées sous forme sonore. Il en est de même pour T., qui les avait correctement interprétées dans leur globalité.

3.3. E. (enfant autiste) et K. (enfant témoin)

Quatre sons n’ont pas été correctement identifiés par K., notre enfant témoin. Les réponses données par ce dernier soulignent une nouvelle fois la capacité de l’enfant à

particulariser les termes. Nous pouvons souligner la tendance de K. à utiliser des approches sonores pour donner des réponses. En effet, lors de l’écoute du bruit de l’« aspirateur », il répond alors « usine ». Il s’agit dans les deux cas d’un bruit de moteur continu, que l’enfant parvient à analyser bien que le bon objet ne soit pas correctement identifié. Cependant, il parvient à rester dans le contexte sonore correct. Il en est de même pour l’interprétation du bruit du « brossage de dents » interprété comme celui d’ « insecte » pour lequel il réalise une approche sonore compte tenu de l’idée de stridulation dans ces deux sons. Lors de l’interprétation des résultats d’E., nous avions souligné que l’enfant réalisait une persévération et une réponse par généralisation (il faut comprendre par là un terme global manquant de précision). Cela ne s’est pas retrouvé avec K., qui comme nous l’avons dit, préfère particulariser les termes.

Par ailleurs, nous avions remarqué l’immaturité d’E., lors de l’écoute du son de l’« éternuement », qu’il avait interprété par « à tes souhaits ». Cette notion d’immaturité ne se retrouve pas chez K., bien que les enfants aient le même âge.

En ce qui concerne les émotions, rien n’est à souligner puisqu’elles ont été reconnues dans leur totalité par K. A l’inverse, E. semblait présenter des difficultés dans cette reconnaissance émotionnelle, certaines réponses ne présentant même aucun lien logique. L’émotion de la colère n’était pas maîtrisée, et E. présentait même des difficultés à la faire correspondre à la bonne expression faciale

3.4. Z. (enfant autiste) et N. (enfant témoin)

Les réponses données par N. mènent aux mêmes conclusions que celles faites pour nos enfants témoins. Il agit, à chaque mauvaise reconnaissance, par particularisation. Aucun terme n’est généralisé. Par ailleurs, les réponses par approche sonore sont aussi visibles chez cet enfant. En effet, concernant la catégorie des moyens de transport, les réponses données par N. entrent toutes dans le registre sonore des moteurs : « voiture » pour « moto » et « train » pour « camion ». La catégorisation est donc bien acquise chez cet enfant. Il en est de même pour la catégorie des instruments de musique dans laquelle l’enfant répond par cohyponyme. Par ailleurs, le bruit du « brossage de dents » a été interprété comme celui de la « cigale ». Or nous avons déjà vu que la confusion était courante entre les deux, puisque la stridulation chez les insectes peut effectivement faire

penser au bruit sourd et répétitif du brossage. La réponse n’est donc pas dénuée de sens, comme nous l’avions souligné auparavant.

En comparaison, nous avions souligné que Z., en ce qui concerne les instruments de musique, utilisait le terme global de « une chanson ». La différence entre notre enfant témoin et Z. est donc bien perceptible. Le premier tend à particulariser tandis que l’enfant autiste utilise la généralisation pour répondre (entendre ici un manque global de précision).

Par ailleurs, les persévérations que nous avions perçues chez Z. ne se retrouvent absolument pas chez N. L’hypothèse que nous avions évoquée concernant les persévérations chez les enfants autistes se vérifie donc davantage.

Enfin, N. a parfaitement reconnu les émotions qui lui ont été présentées. Z. avait confondu celle de la joie avec la tristesse, mais il parvenait cependant à faire correspondre la bonne émotion à l'expression faciale adéquate.

3.5. F. (enfant autiste) et M. (enfant témoin)

Sur l’ensemble des sons présentés, seuls trois n’ont pas été correctement interprétés par M. Ces derniers ont tous été identifiés par approche sonore. L’enfant s’est plus particulièrement intéressé au timbre et à l’intensité des sons pour fournir ses réponses. En effet, pour le bruit de la « voiture » il répond « vague, mer ». Or, comme nous l’avions vu précédemment, le bruit de voiture présenté est composé d’une augmentation de l’intensité puis de la diminution de celle-ci. Il en est de même lorsque la mer approche puis se retire. Nous pouvons parler de vague sonore, d’où l’interprétation de l’enfant selon l’intensité. Il en est de même pour le bruit de la « douche » que l’enfant interprète comme celui d’une « cascade d’eau ». Le lien entre les deux est donc évident, celui de réponse par approche sonore l’est aussi, ainsi que la réponse par cohyponyme. L’enfant a donc correctement interprété le timbre du son, celui de l’eau qui coule, bien que l’intensité ne soit pas tout à fait identique. De ce fait, la logique de réponse de M. est bien celle d’un rapport sonore.

Lors de l’analyse des résultats de F., nous avions souligné la tendance à généraliser de l’enfant. Cela ne se retrouve pas chez notre enfant témoin.

Par ailleurs, certaines réponses de F. ne comportaient pas de lien logique permettant d’expliquer le lien effectué. A l’inverse, en ce qui concerne M., les réponses erronées qu’il fournit comportent une logique que l’on peut facilement expliquer.

Enfin, les émotions ont toutes été correctement reconnues par M. Comme nous avions pu l’observer, F. ne maîtrisait pas l’émotion de la « peur », qu’il confondait à deux reprises et qu’il ne parvenait pas à analyser par expression faciale. Le déficit émotionnel est donc plus prégnant chez notre enfant autiste.