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I. Les émotions

2. Les émotions « de base »

George SAND disait : « Il y a des émotions qu’on ne peut pas définir. »2 Cette citation est pleine de sens lorsque l’on sait la difficulté qu’ont les auteurs à donner une définition propre de l’émotion. Doit-on parler d’émotion, de sensation, de plaisir ou de désir ? « Ces phénomènes font partie de ce que l’on peut appeler le domaine affectif, au sein duquel on range également les passions, les humeurs et les sentiments. Tous ont une

1 Mémoire d’Orthophonie 2014, « De la couleur aux mots : Expérience d’atelier avec un groupe de patients

Alzheimer », M. SAMPER, p.62

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importance fondamentale. […] Le domaine affectif se distingue d’autres types de phénomènes mentaux auxquels le langage ordinaire fait également référence, comme les croyances, les perceptions, les désirs, les sensations, les épisodes imaginatifs et les souvenirs. »1

Il est donc difficile de pouvoir donner une définition claire de l’émotion, tant elle renvoie à différents termes. Certains auteurs parleront donc de sentiments pour désigner les émotions, c’est donc pour cela qu’il convient de bien les distinguer.

2.1. Le Circumplex de Plutchik

1 « Qu’est-ce qu’une émotion ? », J. DEONNA et F. TERONI, Collection Chemins Philosophiques, 2008,

p.7 et 8

Cette figure, créée par Robert PLUTCHIK en 1980, est une représentation géométrique de l’organisation des émotions. Huit émotions fondamentales sont représentées comme des quartiers d’orange. Au centre se trouve l’intensité forte de l’émotion. Ainsi sont représentées les émotions sous trois niveaux d’intensité. Du côté gauche, nous retrouvons les émotions dites négatives et du côté droit les émotions positives. Le voisinage de deux émotions peut former une émotion appelée émotion secondaire.

« Lorsque deux émotions sont voisines sur le Circumplex, comme deux couleurs adjacentes sur le cercle des couleurs, elles peuvent former une nuance intermédiaire et donc une émotion complexe ou secondaire ».1 Ainsi, l’émotion secondaire « amour » se situe entre la joie et la confiance sur le Circumplex. Cette organisation permet de classer les émotions de manière hiérarchique et selon différents degrés d’intensité pour en avoir une vision globale.

2.2. Les émotions positives

Le terme d’« émotion positive ou négative » est essentiellement tiré de la manière dont sont éprouvées les émotions. Certaines sembleront plus agréables à ressentir, c’est ce qui se regroupe sous l’appellation d’émotions positives.

René DESCARTES, en 1649, « considérait qu’il existait un nombre déterminé d’émotions « discrètes » (différenciées les unes des autres) appelées émotions de base ou émotions primaires. »2 Il en cita six, dont quatre dites positives : la surprise, le désir, la joie et l’amour. Paul EKMAN, psychologue américain, décrivit lui aussi les émotions en 1992. Il en dégagea six, dites « de base », dont la joie et la surprise que l’on classerait dans cette catégorie. Robert PLUTCHIK quant à lui, mit en avant dans le Circumplex huit émotions de base dont la joie, le consentement, la surprise et l’anticipation qui se regrouperaient dans ce sous-chapitre. Cependant, il reste très difficile de rendre claires les composantes de cette catégorie. Les auteurs ayant étudié sur le sujet ne sont pas parvenus

1 « Emotion et cognition, quand l’émotion parle à la cognition », de N. BLANC, Editions In Press 2006,

p.22

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à s’entendre sur un nombre certain d’émotions positives, ni même sur un classement ordonné des émotions en général. Aujourd'hui, les émotions de base sont généralement citées comme étant au nombre de quatre, la seule émotion positive étant la joie.

2.3. Les émotions négatives

Une nouvelle fois, il est complexe de citer les composantes des émotions dites négatives, puisque les auteurs diffèrent dans leur classement. Actuellement, les trois émotions principales utilisées sont la peur, la tristesse et la colère. A la naissance, le nourrisson n’est capable d’exprimer qu’une seule émotion, celle de l’agitation. Vers l’âge de trois mois, cette émotion se subdivise pour former une « agitation agréable » et une « agitation désagréable ». C’est à ce moment qu’apparait la distinction entre émotion positive et négative. Vers les six mois, de nouvelles nuances prennent place. L’agitation désagréable peut alors prendre le sens de contrariété, qui « se transforme par exemple en peur, colère ou douleur. Tant que l’enfant ne dispose pas encore du langage, il manifeste un nombre limité de sentiments : il s’agit d’émotions basiques, réflexes et simples. »1

La construction du ressenti émotionnel est donc évolutive, au même titre que se construit la personnalité du nourrisson. D’une émotion, il découvre et apprend à ressentir. C’est en développant le langage que l’enfant peut exprimer réellement ses émotions. Il s’agit parfois d’un phénomène abstrait que l’enfant peine à décrypter, tant il peut renvoyer à différentes définitions.

2.4. Les émotions secondaires

Les émotions complexes ou secondaires seraient le fruit et le mélange des émotions dites de base. La nostalgie, par exemple, peut se définir comme un mélange de joie et de tristesse. Cependant, il est difficile de considérer l’ensemble des émotions secondaires de cette manière, car certaines d’entre elles telles que l’envie ou encore le respect seraient difficilement définissables.

1

Jesse PRINZ, professeur de philosophie à l’université de New-York, s’est intéressé à cette notion d’émotions secondaires. Pour lui, elles relèveraient d’états cognitifs. Face à une stimulation, notre corps réagit jusqu’à l’obtention d’une réponse. La réponse obtenue, nous pouvons alors mettre un nom sur l’émotion ressentie. Cette réponse porterait alors le nom d’état cognitif. 1

En partant de ce postulat, nous pouvons mieux saisir l’interprétation de certaines émotions. De ce fait, « la colère déclenchée par la croyance que les affections de notre partenaire sont dirigées vers un autre est appelée jalousie »2. De nombreuses autres émotions peuvent alors se définir de la même manière, en tant que croyance ou ressenti personnel.

Ainsi, il serait impossible de donner une liste exhaustive d’émotions secondaires, tant elles relèvent du ressenti et de l’état cognitif de chacun. L’un définira la honte comme un ressenti provenant de la peur tandis que l’autre la définira comme étant proche de la tristesse. Les émotions sont donc propres à chacun, puisque comme le disait Saint- Exupéry dans le Petit Prince « On ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux. »

1 Extrait de « Is Emotion a form of Perception ? », J. PRINZ, Editions Canadian Journal of Philosophy,

p.148

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