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Nous dégagerons ici les éléments essentiels de cette toile de fond afin de définir ce qu’est l’ART ADMINISTRATIF, sous forme d’axiomes, de propositions « synthétiques » [variables dépendantes

(VD)] ; de propositions « analytiques » [variables indépendantes (VI)] ; ainsi que d’hypothèses [H1 à H5] (Gauthier, 2003). Les axiomes représentent des prémisses de base acceptées, n’ayant point besoin d’être démontrées (Gauthier, 2003), et ils s’inspirent de dualismes soulevés dans l’analyse de la problématique : spécificité – généralité des situations ; décisions politiques – administratives ; intérêts collectifs – particuliers affectés par le changement. Les propositions synthétiques quant à elles sont des constructions plausibles, à partir de ces axiomes (Gauthier, 2003), que l’ART ADMINISTRATIF devrait produire, pour répondre aux préoccupations soulevées

par l’étude de la problématique, et que l’on tentera de démontrer. Elles mettent en relation le pouvoir discrétionnaire des administrateurs et l’actualisation des politiques publiques dans un environnement diversifié, complexe et dynamique. Le Tableau 4.1 présente à la page suivante la construction des propositions synthétiques, et expose les objets que la base d’action qui occupe la position structurale de l’acteur dominant doit influencer pour exercer l’ART ADMINISTRATIF.

173C’est-à-dire que le détenteur de pouvoir dans la position d’acteur dominant puisse être influencé par au moins

Tableau 4.1 Les propositions synthétiques comme variables dépendantes Axiomes

Associés à la nouvelle gouvernance publique

Propositions synthétiques

L’actualisation des politiques publiques dépend de l’influence exercée dans le but de :

Axiomes :

Pour tenir compte de la spécificité des situations, (1) les administrateurs publics font des choix qui déterminent l’intensité et la nature des services offerts par un programme public; et

(2) ces choix confèrent un contenu substantif aux politiques publiques.

Proposition synthétique 1 (P1) :

Identifier des problèmes et des solutions

Transcender les limites du cadre administratif, les normes de services/règlementation, pour prendre en compte la

diversité des intérêts des citoyens.

Axiomes :

(1) Les élus, assistés des hauts fonctionnaires, sont responsables de l’orientation des politiques publiques; et

(2) cette orientation définit les stratégies formelles d’intervention sur un environnement complexe.

Proposition synthétique 2 (P2) :

Sélectionner un mode d’action174

Mitiger175des situations complexes suscitant un intérêt sociopolitique, et pouvant affecter les stratégies

d’intervention du gouvernement.

Axiomes :

(1) La réalisation des politiques publiques sous la NGP favorise l’inclusion des parties prenantes concernées directement par leur mise en œuvre; et (2) ces politiques agissent sur des enjeux collectifs évolutifs, au sein d’un environnement dynamique.

Proposition synthétique 3 (P3) :

Prendre action

Générer une puissance d’agir inclusive des parties prenantes concernées, pour apporter les changements que

sollicite l’évolution d’un environnement dynamique.

La proposition synthétique P1 soulève qu’un environnement diversifié demande de tenir compte

de la spécificité des situations, et de la diversité des intérêts en cause. La vision humaniste d’une vie en société favorise l’émancipation individuelle, et ces individualités ne peuvent invariablement se fondre en un « moi collectif ». Les changements démographiques accentuent cette diversité, et cette diversification affecte les besoins d’actualisation des politiques publiques. Les problèmes devant être soulevés ne sont pas nécessairement apparents. Ils supposent l’attente de nouvelles façons de faire qui n’apparaissent pas encore justifiées. Pour les percevoir, il peut être nécessaire de transcender les formulations générales du cadre administratif et des politiques publiques. Identifier des problèmes peut alors solliciter un jugement critique de deuxième niveau. Ce jugement suppose une aptitude à envisager des solutions qui pourraient impliquer des changements de second degré. La faculté de juger de la teneur des problèmes et des solutions est un jugement critique posé sur un possible contenu substantif à être apporté aux politiques publiques.

174Par mode d’action, nous référons à une façon de procéder parmi d’autres. Toutefois, le terme se veut plus large

qu’une application mécaniste. Nous référons davantage à un type de fonctionnement organique.

La proposition synthétique P2 tient compte qu’un environnement complexe justifie des formes

organisationnelles et des décisions complexes. Elle met en cause des facteurs irréconciliables qui limitent la portée de la planification stratégique élaborée en ex ante. Ces limites à l’entendement rationnel justifient un jugement esthétique, lorsqu’il porte sur des enjeux d’intérêt sociopolitiques pouvant avoir une incidence sur l’élaboration des politiques et les stratégies d’intervention du gouvernement. La présence d’un environnement dynamique justifie en P3 une adaptation continuelle et inclusive des parties prenantes affectées par des

changements. Reconnaitre un problème et la décision d’intervenir n’est qu’une impulsion vers un changement qui reste à définir, au fur et à mesure qu’il se réalise, et qui doit être mis en œuvre. L’ART ADMINISTRATIF doit satisfaire les propositions synthétiques (P1-3) introduites

précédemment, ou du moins, influencer un dénouement en ces trois termes, lorsque les sujets en cause ont des incidences d’intérêt sociopolitique. Lorsque les représentations générales sont adéquates, il n’y a pas matière à exercer un pouvoir discrétionnaire, le besoin de répondre à la première condition (P1) ne se pose pas, et l’ART ADMINISTRATIFn’a pas à se manifester. Lorsque

l’enjeu décisionnel est simple et les implications sociopolitiques marginales, ou bien qu’une direction administrative demeure passive, la deuxième propriété fait défaut (P2). En absence de

changements qui puissent faire évoluer la situation, la troisième condition (P3) ne peut être

satisfaite. Une direction administrative ne serait pas en mesure de générer une puissance d’agir. Ces trois propositions synthétiques sont représentées à la Figure 4.1 de la page suivante, sous forme d’un processus dynamique d’évaluation176. Cette représentation réduit le processus de la décision politique (Anderson, 2000) à une circularité en trois étapes. Chaque étape fait appel à un jugement esthétique. À la première, identifier un problème et considérer des solutions potentielles requiert une attention critique des limites du cadre établi. La seconde implique un choix d’intervenir en des situations irrégulières qui rejoignent des enjeux stratégiques. La troisième étape consiste à faire évoluer la situation, en demeurant critique des actions prises. Cette critique vient en boucle de retour sur la première étape, puisque les changements déversent de nouvelles possibilités.

176Mme Sheila Fraser (Vérificatrice générale du Canada) a soulevé l’importance de ces trois étapes fondamentales

lors d’une conférence donnée à l’ÉNAP (Québec) le 6 octobre 2010 organisée par la Chaire de la Capitale en leadership. Elle considère ces trois étapes comme essentielles à un comportement éthique.

Figure 4.1 L’ART ADMINISTRATIF comme processus dynamique d’évaluation en trois étapes

Pour exercer l’ART ADMINISTRATIF, une direction administrative doit s’assurer que ces

conditions se réalisent (P1-3) en exerçant une influence davantage positive sur les parties

prenantes activement impliquées. Cette influence doit être orientée sur l’intérêt public (Gawthrop, 1998). Elle dépend du contrôle qu’une direction administrative peut exercer sur six moyens d’action. Ces moyens d’action lui permettent d’influencer la recherche de nouvelles façons de faire, la sélection de modes d’action, pour appuyer l’action dans tous les champs de compétence qui affectent sa mission. Les moyens d’action (Lemieux, 2006) introduits à la section précédente sont présentés au Tableau 4.2 ci-dessous, sous forme de propositions analytiques. Tableau 4.2 Propositions analytiques (VI)

Propositions analytiques portant sur les sources d’influence

Une influence (positive) déterminante peut être exercée en contrôlant les moyens d’action ci- dessous, présentés en ordre ascendant d’importance :

Proposition analytique 1 (X1) : Contrôle du moyen d’action matériel

Proposition analytique 2 (X2) : Contrôle du moyen d’action activateur

Proposition analytique 3 (X3) : Contrôle du moyen d’action informationnel

Proposition analytique 4 (X4) : Contrôle du moyen d’action positionnel

Proposition analytique 5 (X5) : Contrôle du moyen d’action relationnel

L’hypothèse générale de recherche présentée au Tableau 4.3 ci-dessous met en relation les propositions synthétiques et analytiques.

Tableau 4.3 Hypothèse générale de recherche

Hypothèse générale de recherche

Le contrôle des moyens d’action (X1-6) permet à une base d’action administrative d’exercer

une influence positive, auprès des parties prenantes en cause, dans le but de produire les propositions synthétiques P1-3, et ces trois effets révèlent l’exercice de l’ART ADMINISTRATIF.

Les flèches indiquent une condition préalable

Le symbole « > » signifie la présence de l’effet, formulé sous forme de proposition synthétique (P1-3)

Cette hypothèse générale de recherche se précisera davantage à l’aide d’hypothèses plus spécifiques. En s’inspirant du modèle Methodology of Scientific Research Programmes (MSRP) de Lakatos (2004), une distinction sera apportée entre les éléments qui appartiennent au noyau dur du cadre conceptuel, et ceux qui concernent les éléments périphériques. Les hypothèses H1, H2 et H3 présentées au Tableau 4.4 appartiennent au noyau dur de notre cadre de référence qui permet de répondre à la question de recherche. Elles confirment que l’influence d’une direction administrative puisse vraisemblablement être interprétée comme ART ADMINISTRATIF.

Tableau 4.4 Hypothèses spécifiques qui forment le noyau dur du cadre de référence H1 :Toutes les propositions synthétiques s’appliquent, P1,2,3>0

H2 :Au moins une proposition analytique justifie chaque proposition synthétique, XnJ P1,2,3

H3 :Les directions exercent une influence positive sur les parties prenantes en cause177à chaque étape P 1-3

177En référence aux catégories de parties prenantes et à celles activement impliquées, en recherche de solutions.

X1-6 ART ADMINISTRATIF

P1>0

P3>0

Les H1, H2, et H3 démontrent la force explicative de l’hypothèse générale de recherche en fonction des propositions analytiques. H1 établit que l’influence d’une direction administrative ait à se manifester pour influencer les trois étapes du processus d’évaluation (Figure 4.1). Pour l’H2, une direction doit exercer un contrôle déterminant sur au moins un moyen d’action pour influencer significativement une étape. Le contrôle de chaque moyen d’action peut potentiellement entrer en jeu. L’influence exercée pourra alors être interprétée en fonction du ou des moyens d’action en cause.

En ce qui concerne H3, l’influence doit être davantage positive, sur toutes les catégories de parties prenantes en cause, pour laisser une marge de manœuvre nécessaire et appuyer la créativité178dans une forme hybride de gouvernance. Selon l’inclinaison positive – négative, il sera possible d’analyser comment les moyens d’action se manifestent. Les H1, H2 et H3 doivent être remplies pour que l’ART ADMINISTRATIF puisse se manifester sous une forme idéale.

Les hypothèses spécifiques H4 et H5 quant à elles (Tableau 4.5) touchent les éléments périphériques du cadre théorique. Elles offrent l’occasion de nuancer l’interprétation des résultats, et d’enrichir le cadre théorique, sans le remettre en question. Si le contrôle de certains moyens d’action n’était pas déterminant, H4 permettra d’évaluer la portée de cette limitation. En ce qui concerne l’H5, elle soulève l’irréductibilité du contrôle des moyens d’action à un profil typique. Cette dernière hypothèse permet de vérifier que différentes conditions devraient justifier différentes logiques, pour expliquer le contrôle des moyens d’action, pour une étape, et d’une étape à l’autre.

Tableau 4.5 Hypothèses spécifiques périphériques au noyau dur du cadre de référence H4 :Chacune des propositions analytiques peut expliquer au moins une proposition synthétique : X1,2,3,4,5,6J P1,2,3

H5 : Les propositions analytiques X1-6s’appliquent différemment d’une proposition synthétique à une autre :





178Une influence contraignante imposée de l’extérieur.

P3] [X1-6 P2] [X1-6 P1] [X1-6

Les hypothèses précédentes permettent d’expliquer la manifestation de l’ART ADMINISTRATIF,

en fonction de l’étendue et de l’importance du contrôle des moyens d’action. Puisque la théorie confère déjà une hiérarchie à l’importance relative des moyens d’action (Lemieux, 2006), aucune hypothèse additionnelle n’a été émise à cet effet. Nous nous contentons de transposer le modèle de Lemieux (2006) à notre cadre d’analyse.

Il est toutefois nécessaire de préciser que, dans le présent cadre de référence, l’interprétation du contrôle des moyens d’action est présentée dans la perspective du destinataire d’influence, et non celui du destinateur. Par exemple, le contrôle du moyen d’action matériel supporte implicitement les valeurs du destinateur d’influence. Pour sa part, le destinataire peut très bien ne pas adhérer aux motivations normatives du destinateur. L’individualisme méthodologique (Crozier dans Rojot, 2003) est un concept qui met en lumière que les individus agissent aussi en fonction de leurs préférences personnelles. Dans l’exemple ci-dessus, le destinataire d’influence pourrait réagir exclusivement aux avantages matériels offerts. Au contraire, il se pourrait que le destinataire d’influence ait intériorisé les valeurs poursuivies par le destinateur. Dans le cas échéant, le répondant devrait signifier que le contrôle du moyen d’action normatif entre en jeu. Même si ce dernier moyen d’action pourrait être déterminant sur d’autres, ceux-ci ne seront pas nécessairement activés. Il y a donc une distinction à être apportée entre l’importance qu’un destinataire accorde au contrôle d’un moyen d’action par un destinateur d’influence, et l’importance relative que la théorie accorde à un moyen d’action selon sa capacité à être déterminant sur un autre. Chaque moyen d’action est potentiellement important. Ce qui importe dans notre cadre de référence est de faire ressortir le degré de certitude qu’évoque un répondant, qu’un moyen d’action soit activé à son endroit dans type de situation. Ce cadre de référence permet aussi de rassembler différents concepts et de faire appel à des outils qu’offre l’analyse structurale. En contrepartie, l’analyse institutionnelle est une approche conventionnelle qui évalue les capacités administratives, et non les effets sociaux. La présente recherche n’a aucune prétention d’évaluer les impacts ni la teneur des innovations d’un établissement comparativement à un autre. L’idée d’analyser une politique publique, en évaluant sa solidité (fragilité) en son centre de gravité, présente tout de même une solution simple et judicieuse, pour se prononcer sur les capacités structurantes de l’administration publique, dans un secteur précis d’activités. Cette approche met en lien les capacités

administratives avec les capacités étatiques. Elle reconnait l’importance du rôle politique qu’une base d’action administrative peut remplir dans ce rapprochement, que nous avons associé à une jonction stratégique.

L’ART ADMINISTRATIFest comme le tableau d’un peintre. La palette de couleurs représente les

moyens d’action, et la tonalité reflète l’inclinaison positive ou négative de l’influence exercée. Le peintre se sert des couleurs pour créer de nouvelles formes qui inspireront le progrès. Autant se veut-il critique de l’ordre établi, autant l’artiste qui nous intéresse a l’obligation d’exposer son concept, sa technique et son œuvre à la critique. Lors de situations irrégulières, la direction administrative d’une organisation publique est appelée à devenir cet artiste, et l’œuvre peut contribuer idéalement, ne serait-ce qu’à la marge, au développement d’une capacité étatique.

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E DEVIS DE RECHERCHE

La structure de preuve et les outils de collecte de données

5.1 Positionnement épistémologique

De concert avec notre positionnement ontologique et épistémologique réaliste critique, nous expliquerons ici la relation entre les structures causales non apparentes et les effets observables (Chia, 2002, p.11). L’ART ADMINISTRATIF constitue l’effet apparent observable à expliquer en fonction de

mécanismes générateurs. Ces mécanismes générateurs se manifestent sous forme de moyens d’action (Lemieux, 2006). Les explications recherchées sont celles qui dévoileront ces mécanismes qui produisent des évènements (Robson, 2002, p.32). La structure de preuve consiste donc à valider, empiriquement, l’existence de ces mécanismes générateurs. Pour découvrir s’ils sont actifs ou non, nous ferons appel, pour les parties prenantes en cause, au vécu de répondants représentatifs du phénomène étudié. Nous attirerons leur attention sur les moyens d’action qu’un directeur d’établissement a à sa disposition pour les influencer.

L’analyse structurale fait appel à des concepts de deuxième ordre. Les destinataires d’influence ne sont donc pas nécessairement conscients des moyens d’action à l’œuvre. Pour cette raison, ils doivent d’abord prendre conscience qu’une influence a été exercée, et puis, dans un processus de découverte, identifier les moyens d’action en cause. L’étude de cas est tout indiquée parce que, en sciences politiques, elle permet d’aborder un processus de décisions multiples. Elle place celles-ci dans leur contexte institutionnel, pour analyser « le jeu des acteurs apparents et non apparents » (Roy, 2003, p.162). Le positionnement épistémologique réaliste critique offre une vision stratifiée du monde par sa distinction entre le « réel », ce qu’il en est au « présent » (actual), et les manifestations « empiriques » (Sayer, 2004). Le réel existe en toute indépendance de notre conscience. Il s’étend aux propriétés potentielles des objets, qu’elles soient actives ou non, comme la capacité d’influencer ou de réagir. Les capacités « présentes » réfèrent aux pouvoirs activés, et leurs manifestations observables179se rapportent à l’empirique. Lorsque les administrateurs de terrain sont aux prises avec

179Ne pouvoir observer empiriquement la manifestation d’un pouvoir causal ne signifie pas qu’il ne soit pas

des frictions180, un directeur a potentiellement l’opportunité d’exercer un ART ADMINISTRATIF181. La

manifestation empirique d’une influence suggère la possibilité d’analyser les moyens d’action effectivement « présents », et qui se dévoilent partiellement.

5.2 Structure de preuve

Nous désirons aller au-delà de la description d’un état, et l’étude de cas est privilégiée. Elle permettra d’approfondir notre connaissance de l’ART ADMINISTRATIF, dans sa mise en application aux

directeurs d’établissements d’enseignement du primaire. Une recherche exploratoire privilégie une structure de preuve par étude de cas « qui permet la description en profondeur et l’enclenchement d’un processus inductif » (Gauthier, 2003, p.131). Ce genre d’analyse peut s’étendre à plus d’un cas, par exemple, « comme trois entités différentes, ou encore être comparés [ces cas] entre eux pour mieux distinguer les particularités de chaque cas, ou mieux, défendre une thèse quelconque » (Roy, 2003, p.162). Nous nous intéresserons au caractère suggestif des cas étudiés pour explorer l’ART ADMINISTRATIF. Le phénomène que nous anticipons pourrait être seulement embryonnaire.

Le cadre de référence et le devis de recherche se prêtent à l’analyse fonctionnelle, dont le schème d’intelligibilité peut être représenté par l’équation suivante (Berthelot, 1990, p.65):

(A U B) = (B H S, SJ BJS)

Cette forme logique représente B inclus dans A. Ce dernier correspond à un système physique (S), tel que B, comme sous-système de S, engendre des effets sur S. La relation entre S et B est circulaire de telle sorte que si les effets attribuables à B cessaient, ils perturberaient S.

Dans une perspective plus « féconde » du fonctionnalisme, Berthelot (1990) soulève que la fonction apparente d’une institution puisse couvrir une utilité cachée qui invite la mise en relation de la fonction manifeste avec la fonction latente. Cette perspective prône également l’idée de pluralité

fonctionnelle à l’endroit d’une institution. « Dans une société complexe, une même réalité peut être

180Nous avons déjà représenté les frictions comme une mesure d’entropie du système, représentant des bruits qui

signalent des actions contraires, et qui expliquent un écart entre un état idéal anticipé, et le vécu.

référée à divers systèmes par rapport auxquels elle peut remplir un rôle » (Berthelot, 1990, p.67). Le problème devient alors celui d’une explication plurifonctionnelle. L’effet attribuable à B conduit à une généralisation qui peut faire appel à plus d’un schème d’analyse, ce à quoi l’auteur réfère à des

effets de structure (ou de champ).

Chaque moyen d’action active un mécanisme générateur qui évoque un champ d’influence182 particulier, apparent ou non, que B peut contrôler pour générer un effet sur S. Ces champs complémentaires183 se superposent. Ils sont constitutifs d’une Gestalt, à la foi totalité et système de transformation, où la variation d’un élément affecte les autres (Piaget, 2007). Les interrelations sont multiples. Toutefois, chaque moyen d’action a des propriétés qui lui sont propres. Le Tableau 4.2 a introduit ces moyens d’action dans un ordre selon leur importance à être déterminant. Appliqués à l’objet empirique, les systèmes physiques en question peuvent être représentés comme suit :

o A : est un système doté d’une organisation déterminée « S »,

o S : correspond plus spécifiquement au système d’éducation qui relève de la responsabilité du ministère de l’Éducation des Loisirs et des Sports (MELS) avec ses dimensions humaines, économiques, physiques, organisationnelles, sociales et politiques,

o B : est un élément de S, en occurrence, les directeurs d’écoles qui, aux fins de cette étude, se limitent à l’ordre d’enseignement du primaire.

Le rôle des directeurs d’écoles se prête à l’analyse de l’ART ADMINISTRATIF parce que ces derniers

occupent une position structurale centrale, leur permettant d’influencer toutes les forces susceptibles de s’activer. Si la recherche s’était plutôt penchée sur les directions générales des commissions scolaires, elle accorderait davantage d’importance à un mode de gouvernance hiérarchique. Si, au contraire, les enseignants constituaient le centre de gravité du mode de gouvernance, nous