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Les représentations sociales de la situation intergroupes globale

Dans le document UNIVERSITE LIBRE DE BRUXELLES (Page 84-88)

Effets différentiels du contexte de comparaison sur les auto- auto-stéréotypes des Belges francophones et néerlandophones

1. La variabilité contextuelle des stéréotypes

1.4. Les contraintes de la réalité

1.4.2. Les représentations sociales de la situation intergroupes globale

Ces « contraintes de la réalité » n’affectent la stéréotypisation que dans la mesure où elles font l’objet d’un consensus parmi les membres de chacun des groupes sociaux concernés (Ellemers et al., 1997). Dans le cas de grands groupes culturels, il va de soi que leur influence dépend moins de facteurs perceptifs – l’expérience directe de leurs membres – que des représentations partagées qu’ils ont de cette situation ; ce que Tajfel a appelé la ‘réalité sociale consensuelle de la hiérarchie des statuts’52 (Tajfel & Turner, 1986). Les représentations qu’ont les individus des situations relatives de leurs groupes interviennent de façon déterminante sur le choix des hypothèses qui peuvent être formulées à propos des effets du contexte de comparaison sur les auto-stéréotypes. Ainsi, nous présenterons ici deux brèves études descriptives concernant l’évaluation des tailles relatives de ces deux groupes (étude 1) ainsi que la perception de leurs statuts relatifs (étude 2)53.

2. Etude 1

Comme nous l’avons observé plus haut, le groupe néerlandophone se trouve actuellement dans une situation de majorité objective (à peu près 57 % de la population; 42 % de Francophones et 0.6 % de Germanophones) à l’échelle nationale alors qu’il se trouve en minorité dans la Région Bruxelloise (moins de 20 % de la population). Cette étude a pour but d’une part de confronter les estimations démographiques des sujets flamands et francophones à cette réalité objective et, d’autre part, de vérifier si les membres des deux groupes linguistiques partagent la même représentation de cette réalité.

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Les données de l’étude 3 ont été collectées en février 1997 pour l’échantillon francophone et en octobre 1998 pour l’échantillon néerlandophone.

52 The consensual social reality of the status hierarchy. 53

Ces deux études ont été réalisées après l’étude 3. Ces résultats sont néanmoins présentés ici pour la clarté de l’exposé.

2.1. Méthode

262 étudiants néerlandophones de première candidature en Sciences Economiques54 de l’Université de Leuven (K. U. L.) et 133 étudiants francophones de première candidature en Sciences Psychologiques et de l’Education de l’Université Libre de Bruxelles (U. L. B.)55 ont librement évalué le pourcentage de Néerlandophones, de Francophones et d’autres (indéterminé) vivant en Belgique ainsi que le pourcentage de Néerlandophones, de Francophones et d’autres vivant à Bruxelles56.

2.2. Résultats

Tableau 1: Estimations démographiques des groupes linguistiques au niveau national en fonction de l’appartenance linguistique des participant(e)s

Francophones Néerlandophones N FR > ND 39 29,3 % 18 6,9 % 57 FR = ND 32 24,1 % 42 16 % 74 FR < ND 62 46,6 % 202 77,1 % 264 N 133 262 395 FR : Francophones ND: Néerlandophones

Les estimations démographiques concernant la Belgique diffèrent considérablement entre les deux échantillons. (Χ² (2 dl) = 44.6 ; p = 0.0001). Le Tableau 1 indique la proportion de sujets qui ont estimé que les Francophones étaient en majorité (FR > ND) ; que les deux groupes étaient de même taille (FR = ND) ou que les Néerlandophones étaient en majorité (FR < ND). Il en ressort que 77.1 % des participant(e)s flamand(e)s estiment – correctement – que leur groupe est majoritaire ; seulement 6.9 % d’entre eux le pensent minoritaire. Par contre, seulement 46.6 % des Francophones reconnaissent leur statut minoritaire. Plus de la moitié d’entre eux donnent

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Il s’agit du même échantillon que celui de l’étude 3. 55 Il s’agit du même échantillon que celui de l’étude 4.

des réponses erronées : 24.1 % estiment que les deux groupes ont la même taille et 29.3 % déclarent que les Francophones sont majoritaires en Belgique.

Si nous comparons les estimations de nos participant(e)s avec les estimations démographiques, il apparaît que 51.9 % des Francophones surestiment la taille de leur groupe linguistique de plus de 5 %. Seulement 9.8 % d’entre eux la sous-estiment de plus de 5 % et 38.4 % donnent des réponses réalistes. D’autre part, seulement 45.5 % des Flamands donnent des réponses erronées ; et il y a autant de surestimations (22.6 %) que de sous-estimations (22.9 %).

Si l’on examine les tendances moyennes, il n’y a pas de différence significative entre les moyennes des estimations que les sujets Francophones font des tailles des deux groupes linguistiques alors que cette différence est clairement significative pour l’échantillon Flamand, en faveur des Néerlandophones (T (262) = 19.3 ; p < 0.0001). Il semble donc que les Francophones tendent à se représenter les deux groupes linguistiques comme étant de tailles à peu près égales. Par contre, les Néerlandophones interrogés sont conscients de leur situation majoritaire. Ils n’ont toutefois pas tendance à la surestimer. Tableau 2: Estimations démographiques des groupes linguistiques en Région Bruxelloise

en fonction de l’appartenance linguistique des participant(e)s

Francophones Néerlandophones N FR > ND 94 70,7 % 231 88,2 % 325 FR = ND 26 19,5 % 22 8,4 % 48 FR < ND 13 9,8 % 9 3,4 % 22 N 133 262 395 FR : Francophones ND: Néerlandophones

Les estimations démographiques émises pour Bruxelles (voir Tableau 2) sont également très différentes en fonction du groupe d’appartenance (Χ² (2dl) = 17.7 ; p = 0.0001). Les membres des deux groupes reconnaissent pour la plupart la majorité

francophone – bien qu’en regard des estimations démographiques ils la sous-estiment largement - mais, paradoxalement, les Francophones sont plus nombreux (29.3 %) à commettre des erreurs que les Néerlandophones (11.8 %). Ainsi, presque 20 % des participant(e)s francophones indiquent une répartition égale (50/50), alors que ce n’est le cas que pour 8.4 % des Flamands.

En bref, en ce qui concerne les tailles relatives des deux groupes linguistiques, les sujets flamands possèdent généralement une représentation assez réaliste de la situation réelle – qui est à leur avantage au niveau national et le sujet de revendications politiques au niveau bruxellois. Par contre, les représentations des sujets francophones s’écartent considérablement de cette réalité. Ils tendent à minimiser l’écart existant entre les deux groupes quel que soit le contexte réel décrit (situation majoritaire ou minoritaire).

3. Etude 2

Comme nous l’avons évoqué précédemment, les différences de statut des groupes sociaux constituent un facteur important qui conditionne les comportements de leurs membres (Ellemers et al., 1997; Hinkle & Brown, 1990; Jost & Banaji, 1994; Spears & Manstead, 1989 ). A l’instar des différences de taille, les différences de statut doivent être représentées comme telles et faire l’objet d’un consensus parmi les membres des groupes concernés.

Cette étude a pour but de s’assurer que les différences de statut des régions qui se dégagent d’indicateurs objectifs font l’objet de représentations partagées au sein de l’échantillon francophone57.

Belgique / à Bruxelles : Néerlandophones : …. % Francophones : …% Autres : …%

57 Nous ne possédons pas de données néerlandophones à ce sujet. Cette question était insérée dans un des questionnaires de notre étude concernant l’identité européenne qui a été réalisée après la fin de nos travaux sur les variations contextuelles des stéréotypes. Nous avons cependant jugé pertinent de faire figurer ces résultats ici.

3.1. Méthode

Un autre échantillon58 d’étudiants francophones de première candidature en Sciences Psychologiques et de l’Education (N = 202) de l’U. L. B. a évalué le statut des trois Régions belges (Flandre, Wallonie, Bruxelles) dans 7 domaines (pouvoir politique, histoire, culture, économie, qualité de vie et représentation à l’étranger) en leur attribuant un chiffre de 0 – statut très bas – à 10 – statut très élevé.

3.2. Résultats

Etant donné sa situation particulière en tant que capitale du pays, nous ne considérerons pas ici les résultats concernant la Région Bruxelloise. Ces résultats59 montrent que le statut de la Flandre est considéré comme significativement supérieur à celui de la Wallonie dans trois domaines : le pouvoir politique (T (169) = -8.25 ; p < .001), l’économie (T (169) = -13.31 ; p < .001) et la qualité de vie (T (170) = -8.01 ; p < .001). Il n’y a pas de différence significative de statut perçu dans les autres domaines (Histoire, culture et représentation à l’étranger). La Wallonie n’est pas considérée comme un groupe de statut supérieur, et ceci dans aucun domaine.

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