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Chapitre 2. Recension des écrits

2.5. Les recommandations pour la prise en charge des SCPD

Deux possibilités de traitements sont disponibles lors de la manifestation de SCPD chez les aînés avec un TNCM. Il s’agit des INP et des interventions pharmacologiques comme l’usage AP. La pharmacothérapie a été durant des années le traitement de prédilection pour tenter de diminuer ou de cesser les SCPD. Comme toute médication, l’usage d’AP comprend des inconvénients et des risques. L’utilisation d’AP est associée à plusieurs effets indésirables importants tels qu’un risque accru de mortalité, de maladies cardiovasculaires, d’accident vasculaire cérébral et de symptômes extrapyramidaux (INESSS, 2017). Plusieurs études ont étudié l’efficacité contestable de la médication pour la prise en charge des SCPD comparativement à l’efficacité tangible des INP. Sur la base d’une efficacité limitée des AP (Ballard et al., 2009), des études sur l’arrêt de l’usage d’AP (Declercq et al., 2013; Devanand et al., 2012) et de plus en plus de preuves d’INP efficaces (Brodaty et Arasaratnam, 2012; Chenoweth et al. 2014; Testad et al., 2014), il a été estimé que les deux tiers des prescriptions d’AP étaient inutiles (Ballard, Corbett et Howard, 2014). Selon un processus national Delphi consensuel modifié, les AP ont été sélectionnés comme une classe à prioriser dans l’élaboration des lignes directrices sur la déprescription étant donné leur risque de causer des torts et de leur utilisation très fréquente (Farrell, Tsang, Raman-Wilms, Irving, Conklin et Pottie, 2015). Des recommandations et des surveillances quant à l’usage optimal et sécuritaire des AP sont présentées dans un guide de pratique clinique fondé sur des données probantes Déprescription des

antipsychotiques pour les symptômes comportementaux et psychologiques de la démence et l’insomnie pour aider les cliniciens à prendre des décisions quant à la période et à la manière de

réduire ou de cesser les AP en toute sécurité (Bjerre et al., 2018).

Par ailleurs, un effort continu est fourni par divers organismes pour améliorer la qualité et la sécurité de la prescription d’AP. Lorsque l’on mentionne la gestion des SCPD chez les personnes présentant un TNCM, la première initiative devrait être l’utilisation d’INP (Peisah et al., 2015). C’est ce que mentionnent les lignes directrices cliniques à l’échelle internationale sur les TNCM (Peisah et al., 2015). La réponse thérapeutique au SCPD avec l’emploi d’INP est sure, efficace et ne comporte aucun effet indésirable. Ces lignes directrices internationales mentionnent également que si l’approche pharmacologique est nécessaire pour la gestion des SCPD, les approches non pharmacologiques doivent être utilisées en parallèle pour bonifier la gestion des SCPD (Peisah et al., 2015). Les lignes directrices de l’American Psychiatric Association (APA) (1997) aux États-Unis

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mentionnent que les interventions pharmacologiques doivent être utilisées selon le niveau de détresse ou de risque. Quant à l’Irlande, les lignes directrices évoquent que la pharmacothérapie devrait être administrée s’il y a un échec des INP (Howard et al., 2001). Finalement, au Canada, l’usage de médicaments devrait être utilisé de façon concomitante avec les INP dans certaines situations d’urgence seulement (CCSMH, 2014).

Des règlementations et des recommandations concernant les approches pharmacologiques ont été instaurées dans de nombreux pays pour un usage minimal des AP. Aux États-Unis, la réglementation fédérale relative aux établissements de soins de longue durée recommande fermement l’arrêt des AP après une période de 3 à 6 mois de traitement (Devanand et al., 2012). En effet, la durée du traitement doit être la plus courte possible. Ces recommandations ont été réitérées par l’Institut national pour l’excellence en santé et en services sociaux (INESSS) du Québec. Les auteurs des lignes directrices sont unanimes quant à l’importance de garantir un ajustement de la médication de manière régulière et de réévaluer l’indication tous les 3 à 6 mois ou après la stabilisation des SCPD (INESSS, 2017). Les recommandations issues de trois guides de pratiques cliniques ainsi que deux conférences de consensus canadiennes pour la déprescription d’AP dans la prise en charge des patients atteints de TNCM présentant des SCPD mentionnent que : « Les risques et avantages devraient être clairement identifiés et discutés avec le patient et/ou ses proches aidants. La dose initiale administrée devrait être la plus basse possible, et titrée graduellement jusqu’à la dose minimalement efficace » (INESSS, 2017, p.27). De plus, l’APA recommande un ajustement ou une tentative de sevrage de la médication chez les aînés qui présentent des effets indésirables aux AP, chez les aînés qui n’ont pas de réponse aux AP cliniquement marqués après 1 mois et chez ceux avec une réponse clinique positive après un maximum de 3 mois de traitement (INESSS, 2017). Toutes ses recommandations ont été élaborées pour éviter une utilisation inappropriée de la médication. En effet, elles visent à irradier une mauvaise utilisation soit d’éviter un risque supérieur aux bénéfices. L’excès de l’utilisation des AP, c’est-à-dire sans raison valable, inutilement (sans efficacité démontré) et pour une durée excessive sont des problèmes sociaux majeurs concernant la pharmacothérapie. Toute médication, particulièrement les AP, devrait être cessée si l’utilité est discutable.

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De l’observation et des interventions non pharmacologiques devraient précéder l’approche pharmacologique chez les aînés avec un TNCM. Il est recommandé qu’une évaluation de l’aîné, des SCPD et des facteurs contributifs précède l’amorce d’un traitement par AP (INESSS, 2017). Cette évaluation fait partie du rôle infirmier, y compris d’obtenir une histoire précise des SCPD et de la polymédication. De plus, les facteurs contributifs, dans la mesure du possible, devraient être écartés avant l’amorce d’un traitement par AP (INESSS, 2017). Un plan d’intervention devrait être établi pour toutes les aînées présentant des SCPD (INESSS, 2017). Ce plan d’intervention devrait comprendre l’utilisation d’INP puisqu’il s’agit du traitement privilégié (INESSS, 2017). Le personnel soignant doit fixer des objectifs thérapeutiques réalistes avec les ressources disponibles dans leur milieu. Il est primordial que le plan d’intervention soit connu de tous les intervenants et appliqué en tout temps pour conclure à son efficacité. Il n’est pas rare que celui-ci soit jugé inefficace pour la problématique ciblée, mais que son applicabilité soit discutable et qu’il n’est pas été réévalué ni ajusté par le personnel soignant. Finalement, une évaluation des risques et des avantages devrait devancer l’amorce d’un traitement par AP (INESSS, 2017) afin d’éviter la possibilité d’une ordonnance potentiellement non appropriée. En résumé, l’INESSS soulève des points importants quant à l’utilisation d’approches non-pharmacologique en première intention. La prescription de médication psychotrope devrait être considérée seulement en dernier recours.

L’infirmière a un rôle de premier plan dans la déprescription des AP. Elle doit avoir recours aux INP en premier lieu, tout en s’assurant que celles-ci sont bien appuyées scientifiquement et qu’elles sont soutenues en concertation avec le médecin traitant. En somme, le personnel infirmier peut mettre en place les INP et faire des recommandations sur l’usage des AP. L’infirmière doit reconnaitre que son évaluation clinique, son attitude, sa perception des médicaments et son observation des comportements influencent les décisions du médecin (Voyer, 2013). L’usage optimal des médicaments et la déprescription des AP découlent d’un intérêt à collaborer et à communiquer fréquemment avec les médecins traitants (Voyer, 2013). Il est cependant peu connu si les recommandations infirmières en lien avec la médication sont suivies par ceux-ci. Des données sur les facteurs facilitants ou nuisibles au suivi des recommandations faites par les infirmières sont également méconnues d’où l’importance de cette présente recherche.

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