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: Les implications juridiques du concept de multifonctionnalité dans le GATT/OMC

La difficulté qu’il y a à discuter le concept de la multifonctionnalité ne réside pas dans la reconnaissance du concept, mais dans les moyens à mettre en œuvre pour la défense des considérations autres que d’ordre commercial. À défaut de définition conventionnelle, les discussions menées sur le concept ainsi que les différentes études de l’OCDE permettent de l’appréhender. Ainsi que nous l’avons déjà mentionné, le concept de multifonctionnalité n’est pas nouveau dans le système commercial multilatéral. Cela signifie donc que le concept de multifonctionnalité est pris en compte par le GATT/OMC (§1). Cette prise en compte du concept a des implications sur l’intervention publique (§2).

§1 : Le droit du GATT/OMC tient-il compte de la Multifonctionnalité de l’agriculture ?

La multifonctionnalité est un mot jusque là nouveau dans les discussions du GATT/OMC, mais le concept auquel il renvoie a régulièrement été débattu dans les négociations du GATT/OMC.

Ceci étant, il convient de rechercher le siège légal du concept dans le GATT/OMC (A). une fois la base légale déterminée, il est intéressant de discuter le contenu des différentes dispositions qui lui sont consacrées (B).

A – La base légale de la multifonctionnalité de l’agriculture dans le GATT/OMC Le préambule et l’article 20 de l’Accord sur l’agriculture

Deux dispositions de l’Accord sur l’agriculture revêtent une importance particulière en matière de multifonctionnalité de l’agriculture. Il s’agit d’abord du préambule qui dispose que :

« Notant que les engagements au titre du programme de réforme devraient être pris de manière équitable par tous les Membres, eu égard aux considérations autres que d'ordre commercial, y compris la sécurité alimentaire et la nécessité de protéger l'environnement, eu égard au fait qu'il est convenu qu'un traitement spécial et différencié pour les pays en développement est un élément qui fait partie intégrante des négociations, et compte tenu des effets négatifs possibles de la mise en

173  œuvre du programme de réforme sur les pays les moins avancés et les pays en développement importateurs nets de produits alimentaires […] »704.

Il s’agit ensuite de l’article 20 de l’Accord sur l’agriculture qui dispose que :

« Reconnaissant que l'objectif à long terme de réductions progressives substantielles du soutien et de la protection qui aboutiraient à une réforme fondamentale est un processus continu, les Membres conviennent que des négociations en vue de la poursuite du processus seront engagées un an avant la fin de la période de mise en œuvre, compte tenu : […] ;

c) des considérations autres que d'ordre commercial, du traitement spécial et différencié en faveur des pays en développement Membres et de l'objectif qui est d'établir un système de commerce des produits agricoles qui soit équitable et axé sur le marché, et des autres objectifs et préoccupations mentionnés dans le préambule du présent accord ; […] »705. Le préambule et l’article 20 de l’AsA partagent la même religion : les considérations autres que d’ordre commercial doivent être prises en compte dans les négociations du Cycle de Doha et dans les nouvelles règles à adopter sur l’agriculture. Curieusement, le sens de l’expression

« considérations autres que d’ordre commercial » n’a pas reçu de définition, les Membres se contentant de reconnaître que « l’agriculture ne se résume pas à la production de produits alimentaires et de fibres et qu’elle a d’autres fonctions, qui recouvrent notamment ces objectifs autres que d’ordre commercial »706. Dans une note commune sur les considérations autres que d’ordre commercial soumise à l’occasion d’une session extraordinaire du Comité de l’agriculture707, vingt sept Membres de l’OMC déclaraient que « chaque Membre a le droit, conformément à des règles mutuellement admises, de prendre en compte des considérations autres que d’ordre commercial, telles que la question du renforcement de la viabilité socio-économique et du développement des zones rurales, les questions de la sécurité alimentaire et de la protection de l’environnement et la question de la promotion de la coexistence de différents types d’agricultures »708.

La multifonctionnalité de l’agriculture est établie, de même qu’est admis le rapport entre l’agriculture et la sécurité alimentaire709. La question fondamentale qui se pose est celle des moyens       

704 Préambule de l’Accord sur l’agriculture, paragraphe 6 (non souligné dans le texte).

705 Article 20, c) de l’Accord sur l’agriculture (non souligné dans le texte).

706 http://www.wto.org/french/tratop_f/agric_f/negs_bkgrnd17_agri_f.htm.

707 LINDLAND (J.), « Coexistence dans un monde de diversité agricole. Le droit de chaque pays de défendre des considérations autres que d’ordre commercial », Actes du congrès de la société française d’économie rurale, mars 2002, p.38.

708 Barbade, Burundi, Chypre, Communautés européennes, Corée, Dominique, Estonie, Fidji, Islande, Israël, Japon, Lettonie, Liechtenstein, Madagascar, Malte, Maurice, Mauritanie, Mongolie, Norvège, Pologne, République slovaque, République tchèque, Roumanie, Sainte-Lucie, Slovénie, Suisse et Trinité-et-Tobago.

709 LINDLAND (J.)., op. cit., p. 40.

174  à mettre en œuvre pour intégrer la multifonctionnalité de l’agriculture dans l’AsA. De quelle manière pourra-t-on défendre les considérations autres que d’ordre commercial à l’échelle nationale710 ? C’est à cette question que devront répondre les Membres de l’OMC dans les négociations du Cycle de Doha.

La Déclaration ministérielle de Doha

L’approche de l’Accord sur l’agriculture est confirmée par la Déclaration ministérielle de Doha. La prise en compte de la multifonctionnalité de l’agriculture y est exprimée comme suit :

« Nous convenons que le traitement spécial et différencié pour les pays en développement fera partie intégrante de tous les éléments des négociations et sera incorporé dans les Listes de concessions et d'engagements et selon qu'il sera approprié dans les règles et disciplines à négocier, de manière à être effectif d'un point de vue opérationnel et à permettre aux pays en développement de tenir effectivement compte de leurs besoins de développement, y compris en matière de sécurité alimentaire et de développement rural. Nous prenons note des considérations autres que d'ordre commercial reflétées dans les propositions de négociation présentées par les Membres et confirmons que les considérations autres que d'ordre commercial seront prises en compte dans les négociations comme il est prévu dans l'Accord sur l'agriculture »711.

La reconnaissance de la multifonctionnalité de l’agriculture y est expresse, même si l’expression utilisée est différente. Il est intéressant de noter la proximité qu’il y a entre la reconnaissance des besoins particuliers des PED712 et celle de la multifonctionnalité. Les Membres ont-ils entendu mettre les PED au centre des discussions sur les considérations autres que d’ordre commercial ? Nous ne le pensons pas. Rien ne permet en effet de tirer une telle conclusion. Par ailleurs cela reviendrait à confondre traitement spécial et différencié et multifonctionnalité qui sont deux concepts bien différents. Alors que le premier est réservé aux PED, le second est l’expression du droit de tous les Membres à défendre leurs considérations autres que d’ordre commercial. Cette précision faite, il importe de discuter des moyens possibles de défense des CAOC.

      

710 Ibid., p.40.

711 Déclaration ministérielle de Doha, paragraphe 13, in fine (pas souligné dans le texte).

712« […] permettre aux pays en développement de tenir effectivement compte de leurs besoins de développement, y compris en matière de sécurité alimentaire et de développement rural […]» (extrait du paragraphe 13 de la Déclaration de Doha).

175  B – Du traitement juridique de la multifonctionnalité dans le GATT/OMC

1 – La protection de l'environnement et de la santé

La protection de l’environnement et de la santé est un thème intimement lié à la multifonctionnalité de l’agriculture. Bien avant le lancement du Cycle de Doha, certaines dispositions du GATT/OMC prenaint en compte ces questions et, intégraient par la même occasion le concept de multifonctionnalité dans le droit positif du GATT/OMC.

En effet, le GATT/OMC reconnaît aux Membres le droit d'adopter des mesures visant à protéger l'environnement et la santé. Cette autorisation de principe est cependant encadrée de façon stricte, l'objectif étant d'éviter que de telles mesures soient utilisées à des fins protectionnistes. Un Membre peut-il, sur l'argument de la protection de l'environnement et de la santé, restreindre l'importation sur son territoire d'un produit ou soumettre ce produit à des droits de douanes plus élevés ou encore le soumettre à un autre traitement ? Sous certaines conditions, divers types de mesures permettent à un Membre d’atteindre cet objectif. Ces conditions ont été discutées par la jurisprudence dans plusieurs affaires, notamment l’affaire Brésil-Mesures visant l’importation de pneumatiques rechapés.

Les faits

Depuis 2000, le Brésil a entrepris, par diverses mesures713, d’interdire l’importation sur son territoire l’importation de pneumatiques rechapés. En particulier, l’article 40 de la Porteria SECEX n°

14 du 17 novembre 2004 disposait qu’ « aucune licence d'importation ne sera accordée en ce qui concerne les pneumatiques rechapés et usagés, que ce soit en tant que produit de consommation ou en tant que matière première, classés sous le code 4012 de la NCM, à l'exception des pneumatiques remoulés, classés sous les codes 4012.11.00, 4012.12.00, 4012.13.00 et 4012.19.00 de la NCM, originaires et en provenance des États membres du MERCOSUR en vertu de l'Accord de complémentarité économique n° 18 ».

Cette disposition constituait, selon les Communautés européennes, la base juridique de l’interdiction d’importer des pneus rechapés714. Les mesures brésiliennes en cause peuvent être classées en trois groupes : 1) les mesures constituant une prohibition d’importer des pneumatiques usagés ou rechapés ; 2) les mesures imposant des amendes à quiconque échange, transporte, stocke, conserve       

713 Notamment, le Décret présidentiel n° 3919 du 14 septembre 2001, la Loi n° 12.114 du 5 juillet 2004 du Rio Grande do Sul et la Portaria n° 14 du 17 novembre 2004 du Secrétariat au commerce extérieur du Ministère brésilien du développement, de l'industrie et du commerce international (SECEX).

714Brésil-Mesures visant l’importation de pneumatiques rechapés, Rapport du Groupe spécial, WT/DS332/R, 12 juin 2007, paragraphe 2.7.

176  ou garde dans un dépôt des pneumatiques usagés ou rechapés importés ; et 3) les mesures imposant des restrictions à la commercialisation de pneumatiques rechapés importés par la loi d’un État brésilien, le Rio Grande do Sul715.

Ces mesures ont eu pour conséquences de faire chuter le volume d’exportations européennes de pneus rechapés vers le Brésil. Aussi, la Commission européenne a-t-elle initié une demande d’ouverture de consultations dans le cadre du système de règlement des différends de l’OMC. La consultation n’ayant pas abouti, un Groupe spécial fut établi par le Directeur Général de l’OMC pour connaître du litige.

Les constatations

L’on retiendra que le Groupe spécial était d’avis que les mesures brésiliennes violaient, d’une part, le principe de l’élimination des restrictions quantitatives prévu à l’article XI (1) du GATT, et violaient, d’autre part, le principe du traitement national inscrit dans l’article III (4) du GATT. Partant de cette constatation, l’intérêt de l’affaire réside dans l’argument du Brésil qui soutenait que ces violations étaient couvertes par l’article XX paragraphes b et d du GATT.

L’argument du Brésil : la justification par l’article XX b) du GATT

La jurisprudence antérieure716 à l’affaire Brésil-Pneumatiques rechapés a établi une méthode d’application de l’article XX du GATT. Cette méthode consiste en un triple test717 :

− vérifier d’abord que la politique dans laquelle s'inscrivaient les mesures pour lesquelles la disposition était invoquée entrait dans l’une des dix catégories d’exceptions prévues par l’article XX du GATT ;

− vérifier ensuite que les mesures incompatibles pour lesquelles l'exception était invoquée étaient nécessaires pour atteindre l'objectif de ladite politique ;

− et vérifier enfin que les mesures étaient appliquées en conformité avec les prescriptions du paragraphe introductif de l'article XX.

L’application de cette méthodologie à l’article XX b) du GATT a amené la jurisprudence à vérifier, d’une part, si les mesures en cause visaient effectivement la protection de la santé et de l’environnement, si elles étaient nécessaires à la protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou à la préservation des végétaux. Cette application l’a amenée, d’autre part, à vérifier       

715DUFOUR (G.) et BREAULT (P.), « Organe de règlement des différends de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) », Revue québécoise de droit international, (2007) 20.1, p. 469.

716 Notamment États-Unis-Prohibition à l'importation de certaines crevettes et de certains produits à base de crevettes, Rapport de l’Organe d’appel, WT/DS58/AB/R, paragraphes 118 et 119.

717CHETAN (C,) et BOJIN (L.), « Le test de nécessité environnementale et le principe de précaution comme éléments du droit de l’eau douce », Revue québécoise de droit international,(2006), 19.2, p.126.

177  que lesdites mesures n’étaient pas appliquées de façon à constituer soit un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays où les mêmes conditions existent, soit une restriction déguisée au commerce international.

La première étape du test n’appelle pas de commentaires particuliers. S’agissant de la nécessité, le concept a été discuté par le Groupe spécial qui a traité l’affaire États-Unis-L’article 337 de la Loi douanière de 1930. Ce Groupe spécial avait en effet estimé qu’un Membre « […] ne peut justifier une mesure incompatible avec une autre disposition de l'Accord généralen la déclarant nécessaire au sens de l'articleXX d) si elle dispose d’une autre mesure… unepartie contractante a l'obligation d'utiliser,parmi les mesures dont elle disposeraisonnablement, celle qui comporte le moindre degré d'incompatibilité avec les autres dispositions de l'Accord général »718. Ce critère de la moindre incompatibilité dégagé par le Groupe spécial, qui était jusque là largement admis dans la jurisprudence, a été renversé puisque l’Organe d’appel a estimé dans l’affaire Brésil-Pneumatiques rechapés que, « pour être qualifiée de nécessaire, une mesure n'a pas besoin d'être indispensable.

Cependant, sa contribution à la réalisation de l'objectif doit être importante, pas seulement marginale ou insignifiante, surtout si la mesure en cause est aussi restrictive pour le commerce qu'une interdiction d'importer »719.

En outre, la jurisprudence évalue la manière dont les mesures en cause sont appliquées. L’objectif est de s’assurer qu’elles ne sont pas des discriminations arbitraires ou injustifiées. Pour ce faire, elle doit vérifier si la discrimination résultant de l’application de la mesure en cause avait une raison d’être légitime au regard des objectifs poursuivis par le paragraphe b de l’article XX du GATT.

L’apport de l’affaire Brésil-pneumatiques rechapés

La particularité de l’affaire Brésil-pneumatiques rechapés réside dans l’évaluation de la discrimination résultant des mesures en cause. L’Organe d’appel a en effet confirmé le test de cohérence élaboré par le Groupe spécial. Dans son analyse, le Groupe spécial « a jugé que l’exemption appliquée à l’égard des pays membres du MERCOSUR et l’importation de pneumatiques usagés découlant des injonctions constituaient deux faits à prendre en considération dans l’évaluation de l’existence d’une discrimination »720. Ce test, nous semble-t-il, va au-delà de la prescription du paragraphe introductif de l’article XX du GATT qui veut que soit appréciée la

      

718 États-Unis-L'article 337 de la Loi douanière de 1930, 7 novembre 1989, IBDD, 36, paragraphe 5.26.

719Brésil-Mesures visant l’importation de pneumatiques rechapés, WT/DS332/AB/R du 3 décembre 2007, paragraphe 210.

720 DUFOUR (G.) et BREAULT (P.), op. cit., p 430.

178  manière dont la mesure en elle-même est appliquée, car il prend en compte des faits qui sont étrangers à l’application de la mesure en tant que telle721.

Par ailleurs, l’Organe d’appel a estimé que l’exception prévue au bénéfice des pays du MERCOSUR n’était pas suffisante à justifier une discrimination. En effet, « si l’Organe d’appel reconnaît que le comportement du Brésil n’était ni fantaisiste ni fortuit et qu’il était même rationnel, il n’en demeure pas moins qu’il donnait lieu à une discrimination arbitraire, car il n’était pas motivé par une raison d’être qui soit en relation avec l’objectif de sécurité sanitaire et environnementale »722. Certains auteurs723 voient en cela l’instauration d’un nouveau test. Pour ces auteurs, la position de l’Organe d’appel est contraire à l’interprétation jurisprudentielle habituelle qui exige qu’on recherche des éléments indicateurs de mauvaise foi ou d’abus de droit dans le comportement de l’État724. La démarche de la nouvelle jurisprudence, soutiennent-ils, « permet une analyse du comportement global de l’État, y compris celui qu’il adopte de manière rationnelle en conformité avec ses obligations aux niveaux interne, régional et international »725. Pour ces auteurs, « il résulte de cette situation que le pouvoir normatif des États se trouve extrêmement fragilisé »726.

Cette conclusion est discutable. Il semble plutôt que l’évolution de la jurisprudence, depuis les affaires États-Unis-Thon727, États-Unis-Essence728, États-Unis-Crevettes729, va dans le sens d’une flexibilité des conditions d’application de l’article XX du GATT. Sur l’interprétation de la « nécessité » en particulier, rappelons que la jurisprudence tenait pour mesure nécessaire celle qui était indispensable à la réalisation de l’objectif que s’est fixé le Membre. Autrement dit, « le test de nécessité semblait être une simple analyse comparative entre des mesures à effets similaires possibles, analyse faite en termes d’efficacité, de coûts et d’effets affectant la liberté du commerce »730. Cette jurisprudence ayant été renversée, la flexibilité dont il s’agit ici tient au fait que l’Organe d’appel, dans l’affaire Brésil-pneumatiques rechapés, retient « la contribution de la mesure à la réalisation de l’objectif poursuivi » comme suffisant pour justifier le caractère nécessaire de ladite mesure. Autrement dit, « la contribution de la mesure doit être mise en balance avec son caractère restrictif pour le commerce, compte tenu de l'importance des intérêts ou des valeurs sous-tendant l'objectif qu'elle poursuit »731. L’analyse de l’Organe d’appel suggère la réflexion suivante : peut-on considérer la multifonctionnalité comme une valeur importante pouvant passer avec succès       

727 États-Unis-Restrictions à l’importation de thon (Tuna I), Rapport du Groupe spécial, 3 septembre 1991, DS21/R - 39S/155.

728 États-Unis-Normes concernant l'essence nouvelle et ancienne formule, 1996, WT/DS2/AB/R

729 États-Unis-Prohibition à l’importation de certaines crevettes et de certains produits à base de crevettes, 1998, WT/DS58/AB/R

730 CHETAN (C,) et BOJIN (L.), op. cit., p. 129.

731 Brésil-Pneumatiques rechapés, op. cit., paragraphe 210.

179  le test de nécessité mis en place par l’Organe d’appel ? En l’état actuel des choses, il est hasardeux d’y répondre.

La discussion menée à l’occasion de cette affaire montre que, même si des dispositions de l’article XX du GATT permettent une protection de l’environnement, la mise en œuvre d’une telle protection est difficile, nonobstant la flexibilité introduite par l’Organe d’appel. En tout état de cause, notre opinion est que la prise en compte du concept de la multifonctionnalité devrait donner une plus grande marge de manœuvre aux Membres dans la prise de mesures environnementale. Il est peu probable que la jurisprudence franchisse le pas en dehors d’une prise en compte effective de la multifonctionnalité dans le système normatif de l’OMC.

Comme on peut le noter par ailleurs, aucune disposition de l’Accord sur l’agriculture ne tient directement compte de l’environnement et de la santé publique. La question de la protection de l’environnement et de la santé publique relève surtout de l’Accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS) qui est le pendant naturel de l’AsA. Sur cette base, l’on peut admettre que le principe de la protection de l’environnement et de la santé publique est donc admis dans le droit de l’OMC. Qu’en est-il du développement et de la sécurité alimentaire

2 – Le développement et la sécurité alimentaire dans le GATT/OMC Le développement

Le développement et la sécurité alimentaire sont des thèmes où le concept de multifonctionnalité de l’agriculture s’est le plus manifesté sous le GATT/OMC. En effet, plusieurs dispositions de l’Accord général et des différents accords de l’OMC peuvent être considérées comme une prise en compte de la multifonctionnalité.

S’agissant du développement, la principale difficulté qu’il y a à le discuter réside dans le fait que le concept-même de développement est débattu sans qu’il ne soit préalablement défini. En effet, il n’existe pas à l’OMC de définition conventionnelle du « développement ». Les Membres se réclament librement du statut de pays développés ou de pays en développement, étant entendu que

S’agissant du développement, la principale difficulté qu’il y a à le discuter réside dans le fait que le concept-même de développement est débattu sans qu’il ne soit préalablement défini. En effet, il n’existe pas à l’OMC de définition conventionnelle du « développement ». Les Membres se réclament librement du statut de pays développés ou de pays en développement, étant entendu que