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VÉRIFICATION DE NOTRE HYPOTHÈSE

4.3 LE CONTRÔLE DE L’INSTRUCTION DANS LA FAMILLE

4.3.2 Les modalités du déroulement des contrôles

Lorsque l’âge des enfants correspond à celui qui est fixé pour le niveau primaire dans les établissements publics, c’est-à-dire entre 6 et 11 ans, ce sont les Inspecteurs Départementaux de l’Education Nationale54 qui se chargent du contrôle. Pour

les enfants plus âgés, il est effectué par les Inspecteurs d’Académie - Inspecteurs Pédagogiques Régionaux55. Ces dispositions ont été fixées par Madame ROYAL dans la

circulaire et ne sont donc pas de nature législative. Les modalités qu’elle prévoit sont même très précises : «pour les enfants relevant du niveau primaire, l’inspecteur d’académie procède au contrôle

ou désigne à cette fin des inspecteurs de l’éducation nationale, qui pourront se faire assister en tant que de besoin de personnels des services de santé ou des services sociaux de l’inspection d’académie, de psychologues scolaires. S’agissant des mineurs relevant du niveau secondaire, l’inspecteur d’académie doit saisir le

53 Ce chiffre élevé s’explique par le fait que les rapports sur lesquels nous nous appuyons pour notre

recherche nous ont été fournis grâce au service juridique de l’association «Les Enfants d’Abord». En raison de son rôle, ce service est informé essentiellement des résultats négatifs.

54 Notés IDEN dans la suite de ce document. 55 Notés IA-IPR dans la suite de ce document.

recteur d’académie, lequel désigne par priorité des membres des corps d’inspection, ainsi que les personnels qualifiés pour les assister (personnels médico-sociaux, conseillers d’orientation-psychologues)». Les termes

de la loi prévoient simplement que «l’inspecteur d’académie doit…faire vérifier que l’enseignement

assuré est conforme aux droits de l’enfant…»

Pour ce qui est de notre échantillon, les IDEN se font essentiellement seconder par un ou plusieurs conseillers pédagogiques en cas de besoin ; nous avons trouvé occasionnellement des membres du RASED56, une secrétaire de CCPE57et enfin une psychologue scolaire.

Pour les enfants plus âgés, les IA-IPR interviennent chaque fois, ils sont parfois accompagnés d’une assistante sociale, ou bien ils font partie d’une équipe composée d’un médecin scolaire, d’une assistante sociale et du directeur de Centre d’Information et d’Orientation qui est également psychologue. En cela, ces dispositions suivent, comme nous l’avons dit, les consignes de la circulaire, cependant que pour nous, elles créent des interrogations sur le bien fondé de cette mise en œuvre.

Deux raisons à cela :

- tout d’abord parce que nous observons la présence d’inspecteurs (IDEN et IA-IPR) ou de subordonnés (conseillers pédagogiques) dont la mission, en temps ordinaire, ne consiste jamais à mesurer les compétences des enfants ; cela nous renvoie de façon indirecte à notre questionnement antérieur sur la légitimité du contrôle des acquis ;

- en second lieu, nous nous interrogeons sur la présence du personnel accompagnant les IA- IPR alors que l’enquête «sociale» relève légalement de la compétence du maire. Le témoignage d’une famille confirme qu’il y a bien confusion des rôles de chacun : un IA-IPR affirmant que pour l’enquête sociale, le maire ne s’occupe que du primaire, la procédure, selon lui, étant différente pour le secondaire.

Nous trouvons dans les propos de Madame ROYAL, à travers la circulaire, deux déclarations qui portent à confusion :

- au sujet de l’enquête du maire, elle précise ce que nous venons de souligner, à savoir : «il

s’agit d’une enquête à caractère social ne portant pas sur la qualité de l’instruction, qui est de la

56 Réseau d’Aide Spécialisé pour les Enfants en Difficulté : équipe souvent composée d’un psychologue

scolaire, un psychomotricien, un maître de soutien, un rééducateur.

57 Commission de Circonscription Pré-élémentaire et Elémentaire dont le rôle est d’examiner le cas des

compétence de l’éducation nationale». Nous ajouterons personnellement qu’en cas de

manquement du maire à ses obligations la loi ne prévoit pas que l’enquête soit «diligentée» par l’Inspection Académique, mais «par le représentant de l’Etat dans le département», uniquement dans cette circonstance d’ailleurs, et non pas «à la demande du maire» comme il est dit par ailleurs dans la circulaire.

- Madame la ministre déléguée prévoit pourtant du personnel des services de santé et des services sociaux ainsi que des psychologues et conseillers d’orientation, pour le contrôle qui relève des services de son ministère. Comment analyser ce paradoxe ?

Nous pensons qu’il y a deux explications possibles :

1°) dans l’article 1 de la loi, il est fait état du développement de la personnalité et de l’insertion dans la vie sociale et professionnelle, auquel cas, Madame ROYAL considère que l’appréciation en revient à un psychologue, une assistante sociale, un conseiller d’orientation, voire même à un médecin58.

2°) Etant donné que Madame la ministre considère que la nouvelle loi ne doit être applicable essentiellement qu’à des enfants malades ou handicapés, le choix du personnel chargé du contrôle portera, entre autre, sur les personnes précédemment citées.

Comme nous l’avons déjà fait remarquer, les parents font état parfois d’une assimilation de la circulaire à la loi elle-même, de la part des services de l’administration.

«Mais Monsieur, c’est la Loi ! » s’est entendu répondre un père par une secrétaire du service

académique, alors que la discussion portait sur une disposition de la circulaire qui n’est mentionnée dans aucun texte législatif. Au surplus, la preuve en est faite par écrit, puisqu’un inspecteur s’exprime ainsi pour notifier la mise en demeure : «conformément à la circulaire…vous

devez inscrire vos enfants dans un établissement scolaire…»

Nous pouvons lire également dans un autre courrier administratif : «la circulaire…précise que

vous devez fournir des explications ou améliorer la situation dans un délai d’environ un mois…», alors

que nous lisons dans cette même circulaire : «il apparaît souhaitable…que ce délai ne soit pas

Nous ne pouvons que constater, à travers ces exemples, la carence des agents administratifs en terme de législation, remplacée par une forte soumission à la hiérarchie dans la mise en œuvre des modalités du contrôle. Lorsque nous regardons le fonctionnement du système éducatif, nous pouvons peut-être trouver une explication au constat qui est le nôtre. En effet, nous voyons que les inspecteurs d’Académie sont de hauts fonctionnaires nommés par décret pris en conseil des ministres et que l’Inspecteur d’Académie directeur des services départementaux est nommé sur proposition du ministre de l’Education Nationale, cet emploi pouvant être retiré dans l’intérêt du service.

Par ailleurs, le non-respect de la procédure elle-même est présent à plusieurs reprises : une mise en demeure après un seul contrôle au lieu des deux prévus par les textes ; des contrôles n’ayant pas eu lieu «notamment au domicile des parents de l’enfant» ; des résultats jamais notifiés aux personnes responsables même dans le cas d’une mise en demeure ; des délais non respectés ou non prévus, vis à vis des personnes responsables, délais dans lesquels «elles devront

fournir leurs explications ou améliorer la situation».