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Les modalités d’information privilégiées par les adolescents

II- Organisation de l’éducation à la sexualité en France

III.5 Les modalités d’information privilégiées par les adolescents

adolescents : La prévention des risques, un enjeu essentiel » (104) précise que l’on ne compte en moyenne que 2,3 consultations par an par adolescent de 15 à 19 ans.

De plus, il a été démontré qu’une relation fondée sur l’écoute et respectueuse des préoccupations des adolescents améliorera leur accès à la contraception (47). En effet, la confiance des jeunes (11-25 ans) en leur médecin a été confirmée par l’étude menée par le Fil Santé en 2004 (105).

Il est donc important que les médecins instaurent le dialogue, qu’ils fassent connaitre leur ouverture d’esprit sur le sujet et leur disponibilité auprès de ces jeunes patients. Les préadolescents de notre étude sont tous favorables à cette initiative.

III.5 Les modalités d’information privilégiées par les adolescents

Dans le Manuel de psychologie « Enseigner à des adolescents » (88), C. Golder et D.

Gaonac’h précisent que les modalités d’enseignement doivent avant tout être adaptées aux thèmes abordés, aux conditions de réalisation de la séance et au public visé. Comme dit Charles-Antoine « Bah ça dépend de ce qu’il a à nous expliquer ! ».

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III.5.1 Des cours magistraux

Les préadolescents restent favorables aux cours magistraux, mais ils reconnaissent facilement « décrocher » si le sujet ne les intéresse pas. Conscients des limites de leurs connaissances sur le sujet, ils considèrent que les cours magistraux permettent d’aborder la sexualité sous des aspects inconnus, qu’ils ne soupçonnent même pas. Charlotte l’exprime bien quand elle dit : « Si on me parle d’autres choses, c’est peut être quelque chose auquel j’ai pas pensé parce que je connais pas….par contre s’il (le cours magistral) est barbant… ».

Les jeunes interrogés évoquent également un moyen d’information traditionnel, par le biais d’un support écrit, Laure propose en effet: « On les (les informations) met sur un papier et on le distribue aux élèves ». On peut se demander si c’est pour garder une trace de ce qui a été expliqué ou bien si c’est pour eux une façon plus impersonnelle d’évoquer de la sexualité.

C. Golder et D. Gaonac’h expliquent que le code verbal (oral et écrit) est un outil très puissant d’évocation et de représentation à condition d’avoir des connaissances antérieures auxquelles les rattacher (88).

Les techniques traditionnelles de transmission d’informations ne sont donc pas dérisoires, il est intéressant de les conserver, en complément de méthodes plus contemporaines.

III.5.2 Des séances interactives

Les jeunes adolescents interrogés sont très favorables aux séances interactives.

Ils soulignent que les adultes ne sont pas infaillibles. Ils précisent qu’ils doivent apprendre sur les jeunes et par les jeunes : Lise et Charlotte nous ont fait remarquer : « Les élèves pourraient poser leurs questions ou l’inverse, ça peut être les adultes aussi qui posent les questions » ; « Y’a des choses qu’ils ne savent pas sur nous ».

Frédéric propose que les élèves essaient de répondre eux-mêmes aux questions de leurs camarades : « Par exemple en leur faisant répondre aux questions ».

Ils souhaitent avoir la parole pour préciser ce qu’ils savent déjà afin de mieux cibler l’information. Jérémie nous dit par exemple : « Des échanges oralement, comme ça si y’a des choses qu’on sait pas, on les développe ».

Ils aimeraient qu’on leur demande leur avis, par exemple pouvoir poser leurs questions à l’oral ou à l’écrit, pouvoir constituer leurs groupes selon leurs affinités « S’ils préfèrent en groupe, je leur (élèves) demande avec quels élèves ils préfèrent être ».

Dans la thèse d’E. Martinez, les adolescentes critiquaient également les séances dont elles ont bénéficient, qu’elles ont jugées trop théoriques et répétitives, peu concrètes et sans réels échanges (106).

Nous pensons donc que les séances interactives peuvent augmenter l’attention et

98 / 207 l’intérêt des élèves pour ces séances, et qu’elles sont donc à développer.

III.5.3 Des séances ludiques

Les jeunes sont très demandeurs de séances ludiques.

Nous constatons à plusieurs reprises que les termes utilisés font référence au lexique du jeu et de l’amusement : Frédéric nous dit « On va mieux retenir parce qu’on se sera amusé ». Entre eux, d’ailleurs, ils rient du sujet et se moquent facilement les uns des autres : Lise nous raconte : « Les garçons, ils ont tous rigolé, alors nous aussi du coup on a rigolé ».

Est-ce pour démystifier ce sujet trop sérieux et gênant pour eux, ou est ce parce qu’ils prennent, au contraire, ce sujet à la légère ?

Dans le Manuel de psychologie « Comment enseigner à des adolescents », C. Golder et D.

Gaonac’h nous expliquent que selon les psychanalystes, les adolescents tentent maladroitement de maîtriser leur sexualité, source de tensions qu’ils ne peuvent encore décharger. Selon E. Bourgeois, cela se traduit par des grossièretés, des gestes déplacés, des moqueries ou des rires inappropriés (88, 6).

Sans laisser le désordre s’installer, il faut prendre en considération cette gêne. Les séances ludiques, en plus de faciliter l’apprentissage, semblent être un bon moyen pour

« dédramatiser » la sexualité et leur permettre de maîtriser le malaise suscité par le sujet.

III.5.3.1 Les « jeux éducatifs »

Les préadolescents sont favorables à des « jeux éducatifs » suivis d’explications. Ils pensent que c’est un bon support de réflexion pour les aider à comprendre les problématiques évoquées : Cédric nous dit bien : « ça nous amuserait un peu et puis ça nous ferait réfléchir…

Si on a des explications à la fin, on retient mieux parce qu’on se souvient du petit jeu. ».

Plusieurs jeunes nous disent mieux retenir les informations en s’amusant (sous réserve d’adapter les animations aux thèmes abordés et à l’âge des élèves).

Il a en effet été démontré par les résultats d’imagerie que l’émotion aide clairement au raisonnement : le cerveau corrige ses erreurs de raisonnement dans le but d’atteindre plus rapidement son objectif (88), ce qui explique pourquoi les élèves retiennent mieux les informations transmises par les « jeux éducatifs ».

Cependant, Charles-Antoine et Mathieu soulignent les limites de ces méthodes d’apprentissage : les problèmes d’attention : « Les jeux de rôle, certains pourraient ne pas les prendre au sérieux » et le manque de participation de certains élèves : « Si quelqu’un se prête pas au jeu, bah ça va tout mettre en l’air ».

Nous pensons donc que les « jeux-éducatifs » sont un moyen d’information sur la sexualité auprès des jeunes adolescents, à condition qu’ils soient suivis d’explications et qu’ils

99 / 207 soient bien encadrés par les animateurs de la séance.

III.5.3.2 Le photolangage

Dans son ouvrage « Adolescence, amour et sexualité : Photolangage pour dynamiser la parole et l’écoute » publié en 2003 (92), C. Belisle propose une méthode d’apprentissage par la parole. On demande aux participants de choisir un certain nombre de photos en réponse à une question énoncée pour exprimer devant le groupe certains aspects de leur expérience personnelle. Ce travail sollicite, par association d’images, des représentations que chacun a construites au cours de ses différentes expériences. Le fait d’en prendre conscience et de pouvoir en discuter en groupe peut conduire à un élargissement du champ de la conscience, à un regard plus critique et même à un développement de la sensibilité imaginative.

Cette technique semble particulièrement intéressante pour aborder la sexualité et les représentations qu’on s’en fait, sans dévoiler son intimité. C’est donc un bon moyen de libérer la parole, en particulier auprès de publics plus difficiles comme les jeunes ou les adolescents issus de milieux cosmopolites, ou encore d’élèves en difficulté scolaire…

III.5.3.3 Les films/documentaires

Les jeunes interrogés sont plutôt favorables aux films / documentaires suivis d’explications ; Emilie nous dit : « Après ils nous donneraient des explications… ça rend les choses plus concrètes… on comprend mieux avec des images ». En effet, pour E. Bourgeois (6), les films rendent les situations plus concrètes et peuvent être utilisés pour répondre aux questions les plus compliquées.

Les films / documentaires peuvent donc être retenus comme méthode pédagogique alternative à un cours théorique pour les séances d’information sur la sexualité.

III.5.3.4 Les débats

Les jeunes adolescents favorables aux débats pensent que cela leur permettrait de s’enrichir des avis des autres.

En effet, dans le manuel de Psychologie « Comment enseigner à des adolescents », C. Golder et D. Gaonac’h (88) évoquent l’école Freinet dont les principes centraux reposent sur l’expression, la collaboration et les échanges entre les élèves. Ce nouveau courant éducatif (parmi d’autres) tient compte des dernières découvertes sur le développement cognitif des adolescents. En effet, selon les approches socio cognitives et socio constructivistes actuelles, l’intérêt du travail en sous-groupe est de générer des conflits cognitifs par le biais de l’interaction sociale. Travaillant en collaboration pour répondre à une situation-problème et atteindre ainsi un but commun, les élèves doivent échanger des informations en vue de mutualiser leurs connaissances. Les avis divergents vont créer des conflits qu’il leur faut résoudre par consensus. Ce consensus sera acquis après un certains nombre d’échanges de connaissances. Ces connaissances sont autant d’informations susceptibles de modifier les représentations ou les connaissances de chaque élève. Avec ces nouvelles méthodes pédagogiques, et l’accessibilité à Internet, on considère qu’on ne transmet plus des

100 / 207 connaissances aux élèves mais des informations qu’ils pourront utiliser pour reconstruire et / ou compléter leurs propres connaissances.

D’autres préadolescents ne sont pas favorables aux débats.

Soit ils pensent qu’ils n’oseront pas y participer par crainte des moqueries des autres ; Emilie nous dit bien : « Y’en a toujours qui vont se moquer ».

C’est ce qui est expliqué dans l’ouvrage « Et si on parlait de sexe à nos ados ? » (7) qui souligne que laisser prendre la parole aux adolescents risque d’exposer leur intimité ou de dévoiler leur ignorance et de les mettre mal à l’aise, ce qui serait maladroit.

Soit ils se trouvent trop jeunes pour avoir une opinion et participer à ce genre de séance.

Il est vrai qu’à leur âge il est difficile de se projeter, mais nous pensons qu’ils peuvent déjà avoir une opinion sur certains sujets par exemple ceux en rapport avec l’actualité.

Nous pensons donc que les débats peuvent être proposés aux jeunes adolescents mais que le thème doit être choisi avec attention pour respecter l’intimité des élèves ainsi que leurs différences (religieuses, sociales…). Cela leur montrera que les échanges sur le sujet sont possibles sous réserve que le temps de parole de chacun soit préservé. C’est aussi un bon moyen de leur faire comprendre que la sexualité est un sujet qui les concerne déjà.

III.5.3.5 Les séances pratiques

Les adolescents interrogés se montrent réservés quand on leur propose des séances pratiques.

Ils y voient un intérêt, comme Charlotte : « Comme ça quand on devra le faire, on saura », mais ils se trouvent trop jeunes : « Je me verrais pas faire ça (séances pratiques) en 5ème, plutôt en 4ème- 3ème», nous dit Emilie.

Certains y sont même opposés, comme Laure : « Je me débrouillerai, moi, j’aime pas qu’on me montre ça (préservatifs) ». Peut-être par pudeur, par tabou ou parce que c’est trop suggestif et concret. C’est l’avis d’I. Nisand, B. Letombe et S. Marinopoulos (7) qui disent que présenter du matériel pédagogique devrait être réservé aux entretiens individuels, au risque d’humilier ou de mettre mal à l’aise certains enfants. Cela semble cependant discutable, car les préadolescents qui se disent favorables à ces séances précisent bien qu’ils ne seront pas mal à l’aise si toute la classe est concernée : ainsi Mathieu nous dit : « Bah si tout le monde le fait ça pourrait être drôle, ça me fait même rire, par contre si je suis tout seul… ».

Une fois encore, c’est à l’animateur de la séance de s’adapter à son auditoire et de présenter et orchestrer la séance afin que tout le monde soit à l’aise. Mais nous pensons que ces animations sont plutôt à réserver aux élèves plus âgés, notamment quand ils aborderont la contraception et les I.S.T.

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