• Aucun résultat trouvé

Les critères de choix des adolescents pour les intervenants et interlocuteurs

II- Organisation de l’éducation à la sexualité en France

III.4 Quelles personnes peuvent informer les jeunes sur la sexualité ?

III.4.2 Les critères de choix des adolescents pour les intervenants et interlocuteurs

Nous avons mis en évidence quatre critères principaux : - l’âge et le sexe,

- la connaissance personnelle de l’adolescent et la confiance accordée,

- les compétences pédagogiques, - la disponibilité.

94 / 207 III.4.2.1 Le sexe et l’âge

Les préadolescents, en particuliers les jeunes filles, semblent plus à l’aise pour parler de sexualité avec des personnes du même sexe. Clélie, par exemple, ne veut pas aborder le sujet avec son médecin parce que c’est un homme.

Ces jeunes adolescentes ont ainsi le sentiment d’être mieux comprises : « Je suis mieux à l’aise, elle comprend mieux que un garçon » nous dit Emilie. Sans doutes pensent-elles que les personnes de même sexe sont confrontées aux mêmes situations, se posent les mêmes questions et vivent les mêmes angoisses…

L’avis des adolescents est important à prendre en compte ; cependant aller dans leur sens peut les conforter dans leurs retranchements. En leur démontrant qu’une femme sait s’adresser aux jeunes garçons (ou l’inverse), on peut les aider à dépasser la barrière des sexes et à lever ce tabou. Cela leur permettrait ensuite d’être à l’aise pour parler de sexualité avec les autres personnes de sexe différent, adultes ou adolescents.

Le critère de l’âge est davantage controversé. Bien qu’ils citent tous leurs camarades comme interlocuteurs de choix, les jeunes adolescents sont conscients que ces derniers peuvent se tromper. De plus, comme nous l’avons vu, au début de l’adolescence, ils ne sont pas encore en opposition avec leurs éducateurs. Les adultes ont donc encore toute leur place dans leur stratégie d’information.

Dans le travail de thèse d’E. Martinez, les jeunes femmes interrogées disent être plus à l'aise avec des personnes un peu plus âgées mais sans trop de différence d'âge (18-22ans) (102).

Ceci a également été mis en évidence dans la thèse de Valérie Scalliet réalisée en 2008 qui a évalué les connaissances des moyens d’information sur les méthodes contraceptives et la sexualité auprès des adolescents et jeunes adultes scolarisés en Charente (77). Là encore, on peut penser que les différences de résultats avec notre étude s’expliquent par la différence d’âge des populations interrogées.

Selon E. Bourgeois (6), I. Nisand, B. Letombe et S. Marinopoulos (7), le rapprochement d’âge permet aux jeunes de se projeter sur leurs interlocuteurs : ils ont l’impression d’être mieux compris et que le discours proposé est plus moderne et moins moralisateur.

Nous voyons là un intérêt supplémentaire de solliciter plusieurs interlocuteurs qui pourraient être d’âges différents. Cela montrerait aux préadolescents que des personnes de générations différentes peuvent facilement échanger autour de la sexualité et que des personnes d’âge mûr peuvent avoir un discours moderne sur le sujet.

III.4.2.2 La connaissance et la confiance

Les préadolescents expriment le besoin de connaitre les personnes avec lesquelles ils abordent la sexualité. Ils parlent souvent de « Personne de confiance ». C’est également ce dont témoignent les personnes qui ont travaillé sur la sexualité avec les jeunes, comme l’infirmière E. Bourgeois (6).

95 / 207 La confidentialité des informations partagées leur semble ainsi assurée. Car comme nous l’avons constaté, ils ont souvent honte de leurs connaissances et des questions qu’ils se posent.

Ils utilisent souvent le verbe « rassurer ». Nous pouvons en déduire que la sexualité est un sujet angoissant pour eux. C’est probablement parce qu’elle représente un univers inconnu et très proche pour eux, et que les préadolescents subissent des changements rapides, physiques et émotionnels qu’ils ne maîtrisent pas ce qui crée un sentiment d’insécurité qui est angoissant.

En effet E. Bourgeois (6), D. Dumas (1), C. Golder et D. Gaonac’h (88), l’adolescence est un moment où les jeunes mettent de la distance avec leurs parents et leurs repères habituels alors qu’en plein bouleversement physique, hormonal et psychique, ils traversent une période de grande fragilité pendant laquelle ils auraient besoin d’eux.

Ces constats témoignent de l’importance de respecter l’intimité des élèves pendants les séances d’information et d’aborder le sujet plus personnellement ensuite avec les médecins ou l’infirmière scolaire.

III.4.2.3 Les compétences pédagogiques

Les préadolescents insistent sur les compétences pédagogiques de leurs interlocuteurs, qu’ils attribuent volontiers à leurs enseignants.

Ils apprécient des intervenants qui ont de l’expérience auprès des jeunes car ils savent employer les termes adaptés et donner des explications claires ; comme dit Emilie : « C’est eux qui font les cours, ils savent bien expliquer ».

III.4.2.4 La disponibilité

Les interlocuteurs, qui agissent en amont et en aval des séances d’information doivent être facilement disponibles et accessibles car les besoins des préadolescents sont parfois imprévus et leurs interrogations parfois urgentes. En effet, pour Ismaël, l’infirmière n’est pas un interlocuteur de choix car elle peu accessible dans son collège : « Elle est tout le temps occupée et presque jamais là ». Cela confirme ce que nous avons constaté en introduction sur la carence du nombre d’infirmières scolaires (48, 60, 59, 61). Il est également regrettable que les structures d’accueil et de soins ouverts aux mineures (comme les C.P.E.F.) soient difficiles d’accès (60, 35, 58).

Ainsi, les différents interlocuteurs des jeunes devraient signaler régulièrement leur disponibilité. On peut craindre que les adolescents qui ne trouvent personne à qui s’adresser au moment souhaité, aillent chercher les informations moins fiables sur Internet ou auprès de leurs amis, ou restent dans l’ignorance, ce qui serait préjudiciable dans certaines situations (mauvaise prise de pilule, retard de règles..).

96 / 207