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Nous avons collecté les informations nécessaires à l‟atteinte de nos objectifs de recherche dans la présente étude par le biais de deux instruments : un questionnaire auto- administré en ligne et une entrevue individuelle semi-structurée.

Dans ce qui suit, nous allons présenter successivement la justification du contenu et l‟organisation générale du questionnaire auto-administré, ainsi que du guide d‟entrevue

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individuelle. Les contenus complets de ces deux instruments sont présentés en annexe II et en annexe III.

Le questionnaire auto-administré en ligne

L‟objectif principal du questionnaire est d‟identifier les facteurs familiaux qui ont un impact significatif sur le niveau de matérialisme du jeune répondant. Les objectifs secondaires correspondent à l‟utilisation de ce niveau de matérialisme pour identifier deux groupes de répondants, ainsi que l‟invitation des membres de ces groupes pour participer à la deuxième phase de notre étude.

D‟après notre modèle analytique, les concepts à mesurer dans notre questionnaire sont les suivants : la fréquence de communication familiale; la socialisation économique; l‟influence des parents en tant que modèles de rôle directs; le matérialisme du jeune adulte; le matérialisme perçu de chacun des deux parents; l‟orientation sociale du type de communication familiale en matière de consommation; les ressources familiales; le statut socio-économique et la structure de la famille d‟origine; et enfin le niveau d‟insécurité développementale du répondant.

Toutes ces échelles de mesure étant issues d‟études effectuées dans le contexte anglo- saxon, elles ont fait l‟objet d‟un processus de traduction minutieux. Nous avons effectué une traduction des échelles originales vers le français, qui a été suivie par une re-traduction vers l‟anglais par une enseignante universitaire de la langue anglaise (Université de Tunis). Un deuxième enseignant de langue anglaise (Université de Toronto) a examiné les versions originale et traduite et a confirmé la justesse de la traduction.

Par ailleurs, nous avons testé notre questionnaire auprès d‟une quinzaine d‟étudiants, sollicités directement dans les locaux de la Faculté des Sciences de l‟Administration, et ce pour s‟assurer de la bonne compréhension des questions contenues dans notre instrument de mesure. Ce pré-test n‟a pas vraiment abouti à de grands changements dans notre questionnaire.

Enfin, la création, la mise en ligne de notre questionnaire ainsi que la récupération des données ont été faites à l‟aide de l‟outil Dynaforme de la Faculté des Sciences de l‟Administration - Université Laval.

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Dans le paragraphe (V.2) nous allons présenter l‟origine, l‟adaptation le cas échéant, ainsi que le contenu de chacune des échelles de mesure utilisées dans notre questionnaire, et ce parallèlement aux qualités psychométriques de celles-ci.

Le guide de l’entrevue individuelle

Concernant l‟entrevue individuelle, nous avons eu besoin d‟utiliser un guide dont l‟objectif principal est de diriger l‟attention du répondant vers les principaux thèmes que nous voulons investiguer tout en l‟incitant à les approfondir (Moore et Bowman, 2006). Ce guide nous a aidés à obtenir l‟information nécessaire tout en faisant de telle sorte que le participant sache ce que nous attendions de lui.

En s‟inspirant de la procédure utilisée dans d‟autres recherches basées sur des entrevues individuelles (Berg, 2004), nous avons élaboré un guide contenant un certain nombre de questions ouvertes. La préparation de ces questions a nécessité un soin particulier relativement à leur forme et à leur contenu.

Concernant la forme, nous avons pris en considération les conseils de Ritchie et Lewis (2003) ainsi que de Seidman (1998) relativement à la structuration générale des thèmes et aux types de questions à poser et à éviter dans une entrevue semi-structurée. Ainsi nous avons favorisé des questions dont le vocabulaire est simple, proche de celui du répondant et qui encouragent l‟émission de réponses profondes et développées, telles que des questions descriptives, de contraste ou projectives.

Concernant le contenu général des thèmes à aborder, nous nous sommes référés à quatre regroupements conceptuels que nous avons envisagés d‟aborder dans cette partie de l‟enquête, à savoir:

 Le style de consommation du répondant ainsi que de celui de ses parents et autres membres signifiants de sa famille;

 L‟expression du matérialisme du répondant, ainsi que celui de ses parents. Le matérialisme dans cette partie de l‟étude n‟est pas mesuré par une échelle mais il est étudié et appréhendé selon plusieurs «moyens d‟expression» correspondant aux sous-thèmes de ce groupement;

 La période de l‟adolescence;

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Ces groupements conceptuels n‟ont pas été présentés dans l‟entrevue selon cet ordre. En effet, les sous-thèmes qui les composent se chevauchent plus qu‟elles ne se succèdent comme nous allons le voir dans ce qui suit.

Il faut souligner à ce niveau que les thèmes explorés ont dû être remaniés au cours de la collecte de données dans cette deuxième phase. Ce remaniement a pris en considération les difficultés rencontrées par les participants à y répondre, ainsi que les informations supplémentaires qu‟ils auraient pu fournir et qui ont apporté alors des éléments nouveaux à explorer.

Avant d‟entamer les entrevues individuelles avec des répondants issus des niveaux extrêmes de l‟échelle du matérialisme, nous avons effectué un pré-test de notre guide d‟entrevue auprès d‟une dizaine de participants ayant enregistré des niveaux moyens de matérialisme. Le pré-test avait pour objectif de nous assurer la stabilité de ce guide, et ce pour optimiser la comparabilité des deux groupes à analyser ultérieurement. Le contenu du guide final utilisé est visible dans l‟annexe (III).

Nous avons suivi une certaine logique dans la structuration des thèmes à aborder : sur la base des interrelations existant entre les concepts à explorer et identifiées à travers notre modèle analytique, nous avons procédé à l‟élaboration de regroupements thématiques de certains de ces concepts. Ces regroupements ayant pour objectif de suggérer au répondant que les sous-thèmes en question sont reliés, et nous espérions qu‟il aurait ainsi tendance à les catégoriser.

Ainsi nous avons commencé nos entrevues par une première question générique qui, sans faire comprendre au répondant qu‟on parlera de matérialisme, l‟amènera à parler de consommation et de possessions matérielles. C‟est à travers notre interprétation ultérieure des propos recueillis, que nous induirons l‟impact de l‟importance accordée par la famille aux possessions matérielles. Il faut souligner par ailleurs que le répondant arrive déjà avec une idée préconçue sur le sujet de l‟entrevue puisque celle-ci a été annoncée, lors du recrutement pour cette deuxième phase, comme portant sur « l‟importance accordée aux possessions matérielles». Pour éviter de le brusquer, sans trop l‟égarer de notre sujet principal, nous avons commencé notre entrevue par une question générique portant sur sa

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dernière acquisition importante, et ce pour entamer par la suite le sous-thème correspondant à son style de consommation.

Ainsi, nous avons commencé l‟exploration de nos concepts prédéfinis avec le premier groupement thématique qui se rapproche le plus de cette première question générique. Ensuite nous nous sommes orientés vers plus de précision avec le thème relatif aux possessions spéciales (selon Richins, 1994a, le matérialisme peut être exprimé à travers la valeur donnée aux possessions spéciales), suivi par celui relatif aux possessions désirées (une question projective : la question à un million de dollars). Par la suite, nous nous sommes orientés vers le thème relatif à la narration de l‟expérience vécue durant la période de l‟adolescence. À la fin de ce thème, nous avons incité le répondant à commencer à nous parler de sa relation avec sa famille (ses parents et autres membres signifiants). Toujours dans l‟objectif de ne pas le brusquer, nous avons repoussé le moment d‟entamer la discussion sur sa famille à cette étape. Ainsi, après qu‟il ait déjà parlé assez profondément de son style de consommation, nous lui avons demandé de nous parler en détails du style de consommation de chacun de ses parents (et autres membres signifiants, que nous aurions pu déceler le cas échéant dans sa narration précédente sur la période de l‟adolescence).

Après avoir discuté du style de consommation individuel des parents, nous avons suggéré une récapitulation du groupement thématique relatif à la consommation et ce, en demandant au répondant d‟évaluer la contribution de sa famille à la formation de son style actuel de consommation. Ce thème revêt une importance particulière dans la mesure où il nous a permis d‟explorer en profondeur des dimensions relatives à la socialisation économique.

L‟introduction de ce thème au répondant a été basée sur une question d‟ordre général et à visée exploratoire : «Avec du recul, maintenant que tu es un jeune-adulte, comment penses-tu que ta famille a pu contribuer à la formation de ton style actuel de consommation?». Cette question est importante, nous l‟avons choisie avec soin. Notamment nous avons préféré l‟expression « contribuer » à l‟expression « influencer », car la deuxième pourrait susciter des réponses socialement désirables. Pour la même raison nous ne pouvions introduire nos propos en parlant directement de matérialisme. Cette valeur, de connotation plutôt péjorative, est généralement définie du point de vue

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scientifique et dans le domaine du comportement du consommateur, comme «l‟importance accordée aux possessions matérielles» (Richins et Dawson, 1992 ; Belk, 1985). Alors que du point de vue populaire le matérialisme correspond généralement à «la préoccupation d‟acquérir des biens» (Fournier et Richins, 1991).

Suite à ce thème, nous avons exploré généralement celui relatif à la cohésion familiale (un thème plutôt transitif) afin de pouvoir aborder, toujours sans risquer de brusquer, le thème relatif aux relations avec les parents et leur influence comme modèles. Ce dernier thème, outre le fait qu‟il nous a permis d‟explorer ce concept important, il nous a permis de passer à celui des critères de réussite dans la vie, aussi bien pour le répondant que la perception de ceux de ses parents.

Le thème de la réussite, qui est une des dimensions du matérialisme, nous a permis d‟entamer «doucement» l‟avant-dernier thème, à savoir celui de la relation entre l‟argent et le bonheur (une autre dimension du matérialisme). Ce thème sensible a été abordé par le biais d‟une question projective (l‟adage populaire: «L‟argent ne fait pas le bonheur»).

En dernier lieu nous avons abordé le groupement thématique le plus « risqué », celui du matérialisme du répondant. Ce thème a été placé à la fin du guide car il contient une discussion très directe portant sur son auto-évaluation de son propre matérialisme. À cette étape ultime de l‟entrevue, il n‟y a plus de précautions à prendre, le répondant ayant graduellement été mis à l‟aise, il a déjà discuté assez profondément de son style de consommation, de celui de ses parents, de sa relation avec eux, de la réussite dans la vie et de l‟argent : il était capable de parler sans complexes de son matérialisme, ou non matérialisme.