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Le rôle de la famille dans le développement du matérialisme : une étude basée sur le paradigme du parcours de vie

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Academic year: 2021

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LE RÔLE DE LA FAMILLE DANS LE

DÉVELOPPEMENT DU MATÉRIALISME :

UNE ÉTUDE BASÉE SUR LE PARADIGME DU

PARCOURS DE VIE

Thèse

KAOUTHER SFAR FELFOUL

Doctorat en sciences de l’administration

Philosophiae Doctor (Ph.D.)

Québec, Canada

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RÉSUMÉ

Face à l‟évidence de l‟accroissement du matérialisme chez les jeunes, plusieurs explications ont été avancées. Toutefois, la recherche empirique reste fragmentée, et surtout divisée entre plusieurs domaines d‟étude. Parmi les antécédents possibles du développement du matérialisme chez le jeune, le rôle joué par la famille dans ce processus d‟apprentissage reste flou, relativement peu étudié et il n‟a pas été envisagé selon ses multiples facettes. Au vu de ces constatations dérivées d‟une revue de la littérature, nous avons exécuté la présente étude en vue d‟atteindre l‟objectif de recherche suivant : identifier et analyser le rôle des différents facteurs familiaux qui pourraient influencer le développement du matérialisme chez le jeune-adulte. Une première étape de type confirmatoire, visait à vérifier les propositions de recherche présentées dans notre modèle analytique. Elle est basée sur un questionnaire en ligne. Une seconde étape, basée sur des entrevues individuelles, a été effectuée sur une partie du premier échantillon (les extrêmes du niveau de matérialisme). Elle visait à approfondir les résultats de la première phase à travers une analyse comparative entre les deux groupes extrêmes. Ainsi notre étude apporte une contribution à ce domaine de recherche aussi bien à travers notre modèle analytique intégrateur qu‟à travers la méthodologie innovatrice utilisée. Les résultats de notre phase quantitative montrent que le matérialisme du jeune adulte est positivement associé à la fréquence des communications familiales relatives à la consommation, ainsi qu‟au matérialisme perçu de chacun des parents. En outre, l‟effet du matérialisme perçu de la mère semble être modéré par l‟étendue de son influence en tant que modèle de rôle direct. Par ailleurs, l‟insécurité développementale est positivement associée au matérialisme du jeune adulte, et elle exerce un rôle médiateur des effets de l‟orientation sociale de la communication familiale. Par ailleurs, notre phase qualitative met en évidence une grande disparité entre les deux groupes extrêmes étudiés, les matérialistes et les non matérialistes, et ce relativement à divers thèmes reliés au développement des orientations envers les possessions matérielles, la consommation et l‟argent.

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TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ --- III

TABLE DES MATIÈRES --- V

LISTE DES TABLEAUX--- IX

LISTE DES FIGURES --- XI

DÉDICACE --- XIII

REMERCIEMENTS --- XV

INTRODUCTION GÉNÉRALE --- 1

I- L’ÉTUDE DU MATÉRIALISME DANS LA LITTÉRATURE --- 7

I.1- Définition du matérialisme --- 7

I.1.1- Définition du matérialisme en psychologie --- 8

I.1.2- Définition du matérialisme en comportement du consommateur --- 10

I.2- Les facteurs associés au matérialisme --- 16

Matérialisme et rapport à l’argent --- 16

Matérialisme et facteurs personnels --- 18

Matérialisme et facteurs d’ordre social --- 19

Matérialisme et insécurité --- 23

Matérialisme et bien-être individuel --- 25

I.3- Le débat relatif aux causes et conséquences du matérialisme --- 29

Conclusion --- 34

II- LA RECHERCHE SUR LE COMPORTEMENT DU JEUNE CONSOMMATEUR --- 35

II.1- Les principaux cadres théoriques utilisés pour l’étude de l’apprentissage de la consommation35 II.1.1- La théorie du développement cognitif --- 35

II.1.2- La théorie de l’apprentissage social --- 36

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Les antécédents --- 38

Les agents de socialisation --- 41

Les mécanismes d’apprentissage --- 43

Le contenu de l’apprentissage --- 44

Le rôle de la famille en tant qu’agent de socialisation à la consommation --- 45

II.2- Les caractéristiques de la consommation des jeunes --- 50

Le jeune consommateur et le produit --- 51

Le jeune consommateur et la marque --- 54

Le jeune consommateur et le prix --- 56

Le jeune consommateur et la publicité --- 57

L’innovativité du jeune consommateur --- 58

L’autonomie du jeune consommateur --- 59

II.3- Le développement du matérialisme chez les jeunes consommateurs --- 62

II.3.1- Les effets de l’âge et du sexe --- 62

II.3.2- Le rôle des médias --- 66

L’exposition à la publicité --- 66

L’influence des modèles de rôle vicariants --- 68

La comparaison sociale avec les figures médiatiques --- 69

II.3.3- Le rôle des pairs --- 70

Conclusion--- 74

III- LE RÔLE DE LA FAMILLE DANS LE DÉVELOPPEMENT DU MATÉRIALISME : PROBLÉMATIQUE ET CADRES CONCEPTUEL ET ANALYTIQUE DE LA RECHERCHE --- 77

III.1- Définition de la problématique de recherche --- 78

III.2- Le modèle conceptuel de base --- 85

III.3 - Développement des questions et propositions de recherche : le modèle analytique --- 95

III.3.1- La première question de recherche --- 96

III.3.2- La deuxième question de recherche --- 107

IV- LE DESIGN DE RECHERCHE --- 127

IV.1- Le type du design de recherche et les principaux choix méthodologiques --- 127

IV.2- La procédure d’échantillonnage --- 134

IV.3- La procédure de collecte des données --- 140

IV.3.1- Les concepts à explorer --- 140

IV.3.2- Le choix des techniques de collecte de données --- 141

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Le questionnaire auto-administré en ligne --- 145

Le guide de l’entrevue individuelle --- 146

IV.3.4- La stratégie d’approche --- 149

Conclusion --- 151

V - LES RÉSULTATS DE LA PREMIÈRE PHASE DE L’ÉTUDE --- 153

V.1- Analyse descriptive de la première phase de l’étude --- 155

V.2- Analyse des qualités psychométriques des échelles et du modèle de mesure --- 159

L’échelle de mesure du matérialisme (du répondant) --- 161

L’échelle de mesure de l’’influence de la mère (père) comme modèle de rôle direct (MRD) -- 163

L’échelle de mesure de la fréquence de communication familiale relativement à la consommation --- 164

L’échelle de mesure de la socialisation économique --- 165

Échelle de mesure du matérialisme perçu de la mère (du matérialisme perçu du père) --- 167

L’échelle de mesure de l’orientation sociale --- 169

L’échelle de mesure des ressources familiales --- 170

L’échelle de mesure de l’insécurité développementale : l’attachement de l’adulte --- 172

La mesure du statut socio-économique de la famille d’origine --- 173

La mesure de la structure familiale --- 173

V.3- Validation du modèle analytique : analyse des modèles d’équations structurelles --- 176

V.3.1- Validation du modèle analytique de l’influence de l’exposition aux modèles sociaux sur le développement du matérialisme du jeune adulte --- 177

V.3.2- Validation du modèle analytique de l’influence de l’insécurité développementale et de ses stimuli sur le développement du matérialisme du jeune adulte --- 189

V.3.3. Synthèse et discussion des résultats quantitatifs --- 195

VI : LES RÉSULTATS DE LA DEUXIÈME PHASE, ET LA TRIANGULATION AVEC CEUX DE LA PREMIÈRE PHASE DE L’ÉTUDE --- 201

VI.1- Analyse descriptive de la deuxième phase de l’étude --- 201

VI.2- Analyse des données qualitatives --- 208

VI.2.1. Les résultats de l’analyse intra-site --- 214

VI.2.2. Les résultats de l’analyse comparative inter-groupes --- 236

LE STYLE DE CONSOMMATION --- 236

LA CONTRIBUTION DE LA FAMILLE DANS LA FORMATION DES ORIENTATIONS ENVERS LA CONSOMMATION ET L’ARGENT --- 248

ENTRE PASSÉ ET FUTUR : L’ADOLESCENCE ET LA PROJECTION FUTURE (LA DIMENSION RÉUSSITE) --- 262

LE THÈME DE L’IMPORTANCE DES POSSESSIONS MATÉRIELLES SPÉCIALES ET LE THÈME DES OBJETS ET EXPÉRIENCES DÉSIRÉES --- 273

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LE THÈME DU LIEN ENTRE MATÉRIALISME ET SOCIÉTÉ DE CONSOMMATION 282

VI.2.3. Discussion et triangulation avec les résultats quantitatifs --- 286

CONCLUSION GÉNÉRALE --- 303 RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES --- 317 ANNEXES --- 333 ANNEXE I --- 334 ANNEXE II --- 335 ANNEXE III --- 353

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1. Modes de communication familiale ... 47

Tableau 2. Les indices d’ajustement retenus ... 155

Tableau 3. L’âge du répondant ... 156

Tableau 4. Niveau et discipline d’études du répondant ... 157

Tableau 5. Origine ethnique des répondants ... 158

Tableau 6. Niveau financier estimé de la famille d’origine ... 158

Tableau 7. Résultats des analyses de la fiabilité interne et des validités convergente et discriminante des échelles. ... 175

Tableau 8. Les indices d’adéquation du modèle structurel I (avant respécification) ... 179

Tableau 9. Les indices d’adéquation du modèle structurel I (après respécification 1) ... 180

Tableau 10. Les indices d’adéquation du modèle structurel I (après respécification 2) ... 187

Tableau 11. Les résultats du modèle MIMIC ... 192

Tableau 12.Les indices d’adéquation du modèle structurel II ... 193

Tableau 13. Les effets standardisés direct, indirect et total de l’orientation sociale sur le matérialisme du jeune adulte ... 194

Tableau 14. Les effets standardisés direct, indirect et total de la satisfaction par rapport aux ressources familiales sur le matérialisme du jeune adulte ... 195

Tableau 15. Tableau croisé Groupe de matérialisme * Sexe du répondant ... 202

Tableau 16. Tableau croisé Groupe de matérialisme * Âge du répondant ... 203

Tableau 17. Tableau croisé Groupe de matérialisme * Niveau éducation répondant ... 204

Tableau 18. Tableau croisé Groupe de matérialisme * Discipline d'études du répondant ... 205

Tableau 19. Tableau croisé Groupe de matérialisme * Origine ethnique du répondant ... 206

Tableau 20. Tableau croisé Groupe de matérialisme * Structure familiale ... 207

Tableau 21.Tableau croisé Groupe de matérialisme * Niveau financier familial estimé ... 208

Tableau 22. Classification des possessions matérielles valorisées selon leur type (échantillon total) ... 218

Tableau 23. Classification des possessions matérielles valorisées selon leurs visibilités sociales (échantillon total) ... 220

Tableau 24. Les significations privées attachées aux possessions matérielles valorisées (échantillon total) ... 222

Tableau 25. La répartition de 1 million de $ selon les désirs des répondants (Échantillon total) ... 226

Tableau 26. Résultats de l’analyse comparative sur le thème du style de consommation ... 247

Tableau 27. Résultats de l’analyse comparative sur le thème de la contribution de la famille dans la formation du style de consommation et des orientations envers l’argent ... 261

Tableau 28. Résultats de l’analyse comparative effectuée sur les thèmes de l’adolescence et de la réussite ... 272

Tableau 29. Types et visibilité sociale des possessions matérielles spéciales selon le niveau de matérialisme du répondant ... 273

Tableau 30. Significations privées données par les répondants matérialistes et non matérialistes à leurs possessions matérielles spéciales ... 275

Tableau 31. Les souhaits de dépenses des répondants selon leurs niveaux de matérialisme ... 276

Tableau 32. Résultats de l’analyse comparative sur le thème du bonheur ... 282 Tableau 33. Résultats de l’analyse comparative effectuée sur le thème de la société de consommation 286

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LISTE DES FIGURES

Figure 1. Le modèle conceptuel de base ... 88

Figure 2. Relation entre structure familiale et matérialisme ... 113

Figure 3. Le modèle analytique ... 126

Figure 4. Design séquentiel explicatif : le modèle de sélection des participants. ... 133

Figure 5. Modèle analytique du rôle de l’exposition aux modèles sociaux dans le développement du matérialisme ... 178

Figure 6. Relation entre matérialisme parental perçu et matérialisme du jeune-adulte ... 181

Figure 7. Respécification de la relation entre matérialisme parental perçu, influence du parent comme MRD et matérialisme du jeune-adulte ... 183

Figure 8. Résultats d’estimation du modèle structurel du rôle de l’exposition aux modèles sociaux dans le développement du matérialisme ... 188

Figure 9. Modèle analytique du rôle de l’insécurité développementale et de ses stimuli dans le développement du matérialisme ... 190

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DÉDICACE

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REMERCIEMENTS

Je remercie tout d‟abord Dieu pour m‟avoir donnée la force de mener et de terminer ce long travail de recherche.

Je remercie mon directeur de thèse, Mr. Benny Rigaux-Bricmont, pour ses conseils judicieux, ses encouragements et son grand appui tout au long de ce travail. Je lui dois une infinie reconnaissance pour son aide précieuse. Je n‟aurais pas pu avoir un meilleur directeur pour ma thèse, et j‟espère un jour pouvoir être aussi aimée et respectée par mes étudiants, qu‟il l‟est par les siens. MERCI pour tout.

Je tiens à remercier Mr Joël Brée et Mr Nizar Souiden pour avoir accepté d‟évaluer ce travail, depuis l‟étape du projet de thèse jusqu‟à la phase finale. Ils ont contribué par la pertinence de leurs critiques et par leurs encouragements à améliorer la qualité de ce projet. Je remercie également Mr Christian Derbaix pour avoir accepté d‟être l‟examinateur externe de ma thèse, et de faire ainsi partie de mon jury final. C‟est un véritable plaisir et un grand honneur pour moi que d‟avoir un tel jury.

Mes remerciements vont aussi à plusieurs chercheurs qui ont œuvré dans le domaine d‟étude de la présente thèse, que j‟ai soit contactés, soit eu l‟opportunité de rencontrer, et qui m‟ont apportée une aide précieuse par leurs remarques et suggestions durant différentes phases de ce travail : Mr Tim Kasser, Mr George P. Moschis, Mr Russel Belk, Mme Pauline MacLaran, Mme Güliz Ger, et Mr Robert Ping.

Je remercie tous les participants anonymes de mon étude, et particulièrement ceux qui ont fait partie de ma phase qualitative.

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INTRODUCTION GÉNÉRALE

Cette étude se situe à l‟intersection de trois courants de recherche : les travaux sur le matérialisme, les travaux sur le jeune consommateur et les travaux sur l‟influence familiale.

En partant à la fois de l‟observation des changements et tendances pris par notre société contemporaine ainsi que de notre intérêt pour l‟étude du comportement de consommation chez les jeunes, il est possible de faire plusieurs constatations.

Le premier ensemble de constatations porte sur le développement du matérialisme. Il a été clairement établi que notre société, caractérisée justement de société de consommation, est devenue très matérialiste, un intérêt croissant étant accordé aux possessions matérielles et aux implications psychologiques, sociologiques et économiques qu‟elles confèrent. Néanmoins, le degré, les causes et les conséquences de ce matérialisme diffèrent beaucoup d‟une culture à une autre (Schaefer et al., 2004 ; Kasser, 2002), d‟une famille à une autre (Roberts et al., 2006) et d‟une personne à une autre (Richins et Dawson, 1992).

Par ailleurs, dans la littérature portant sur le matérialisme, et plus particulièrement dans le domaine du comportement du consommateur, il est possible de souligner l‟existence d‟un courant de recherche visant à soulever le débat entourant les conséquences négatives du matérialisme sur l‟équilibre psychologique et social de l‟individu (exemple : O‟Shaughnessy et O‟Shaughnessy, 2007 ; Abela, 2006 ; Burroughs et Rindfleish, 2002), et plus particulièrement du jeune individu (Bergadaa, 2007 ; Kramer, 2006 ; Burroughs et Rindfleisch, 1997).

En effet, les jeunes semblent constituer un groupe d‟âge qui présente des niveaux relativement élevés de matérialisme (Roedder John, 2001), ce qui inquiète les parents (Goldberg et al., 2003) et les pouvoirs publics (Bergadaa, 2007). Il est surprenant que, face au constat que les jeunes sont devenus trop matérialistes, les chercheurs académiques aient consacré relativement peu d‟attention à ce sujet. Le travail empirique par des chercheurs en sociologie, en psychologie et en marketing se rapportant à l‟étude

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de cette valeur, a surtout été centré sur l‟examen du matérialisme chez les adultes, alors que cette orientation commence à se développer et à s‟ancrer dès le plus jeune âge de l‟individu comme il a été démontré dans plusieurs études (Exemple : Goldberg et al., 2003 ; Roedder John, 2001 ; Achenreiner, 1997). D‟où le deuxième axe d‟intérêt de notre recherche : explorer l‟émergence du matérialisme chez des jeunes-adultes, en essayant de couvrir la période de leur adolescence, à laquelle ils sont situés à sa fin (Le Bigot et al., 2004).

L‟adolescence est généralement reconnue comme étant une période de transition entre l‟enfance et l‟âge adulte. En effet, le terme adolescence provient du verbe latin « adolescere » qui signifie « se développer vers la maturité » (Rice, 1992). Maturation psychologique, affirmation de la personnalité, accélération de la croissance physique et émancipations sociale et économique semblent être autant de transformations qui surviennent durant l‟adolescence. Le comportement de consommation, à l‟image de ces aspects, subit aussi de multiples changements au cours de l‟adolescence. En effet, pendant cette période transitoire l‟individu acquiert généralement plusieurs compétences reliées à la consommation et se transforme en un consommateur assez sophistiqué. De plus, la majorité des orientations liées à la consommation qui sont adoptées par les adolescents, semblent persister durant la vie adulte.

L‟orientation envers les possessions matérielles ainsi que l‟importance qu‟elles prennent dans la vie de l‟individu, qui constitue la conceptualisation la plus adoptée du matérialisme dans la littérature en comportement du consommateur, fait partie de l‟ensemble de ces orientations. Comme le notent Goldberg et al. (2003), « en tant que valeur émergente, le matérialisme permet de comprendre le comportement de consommation des jeunes ».

En effet, puisque la compréhension du développement du matérialisme chez les jeunes est une problématique qui représente un intérêt certain et croissant pour les parents, les éducateurs, les consuméristes et les régulateurs publics, mais aussi pour les chercheurs en comportement de consommation des jeunes, l‟objectif de comprendre le jeune consommateur suppose de s‟intéresser à ses valeurs, à ses particularités et à ses motivations envers la consommation.

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Étudier le concept du matérialisme est déjà une tâche difficile puisqu‟il s‟agit d‟un phénomène très complexe, dont la définition même n‟est pas unanimement reconnue parmi les chercheurs (Richins et Dawson, 1992 ; Belk, 1985). Étudier le matérialisme chez les jeunes est une tâche qui s‟avère encore plus difficile : primo, parce qu‟il s‟agit d‟un concept très abstrait dont la mesure adéquate auprès de jeunes populations nécessite beaucoup de créativité par le chercheur, et secundo parce que les valeurs du jeune se développent parallèlement à plusieurs autres aspects de son fonctionnement socio-cognitif (Roedder John, 1999). C‟est ce dernier point, qui est plutôt relié au développement théorique, qui a poussé plusieurs auteurs à suggérer qu‟il faille impérativement envisager la prise en compte des influences environnementales et sociales sur le comportement de consommation du jeune dans l‟étude de son adoption d‟une orientation matérialiste (Kasser, 2002 ; Roedder John, 2001 ; Lipscomb, 1988).

La famille qui a été entre autres définie comme étant « une unité de consommation, de production, de distribution et de socialisation » (Commuri et Gentry, 2000), constitue l‟une des sources majeures de ces influences sur le comportement du jeune consommateur. En effet, elle constitue la première école dans laquelle l‟individu fait son apprentissage de la consommation et adopte les valeurs qui lui sont associées. Malgré l‟intérêt d‟étude de cet agent de socialisation, relativement peu de recherches ont été effectuées relativement à son rôle dans l‟émergence et le développement des orientations envers la consommation et les possessions matérielles. Une revue approfondie de la littérature en comportement du consommateur sur ce sujet nous a permis de constater que le rôle de la famille reste flou et surtout fragmenté, relativement à celui d‟autres agents de socialisation impliqués dans le développement du matérialisme chez les jeunes, qui sont les pairs et les médias. Malgré le fait qu‟il y a un consentement général dans ce domaine d‟étude sur l‟importance du rôle de la famille, les mécanismes et les processus qui constituent la base de cette influence sont encore peu explorés. À partir de l‟ensemble de ces constatations, nous avons envisagé d‟effectuer la présente étude afin de connaître et de comprendre le rôle joué par la famille dans le développement du matérialisme chez le jeune consommateur.

Relativement au contexte d‟étude particulier des antécédents et des conditions du développement du matérialisme, nous nous sommes orientée vers les recherches

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effectuées sur ce thème dans le domaine de la psychologie sociale, afin d‟y déceler des éléments pouvant contribuer à apporter une réponse à notre problématique. Dans le but de mieux comprendre le rôle de la famille dans l‟émergence et le développement du matérialisme chez le jeune adulte, et sur la base d‟un développement conceptuel et d‟une analyse critique de la littérature en comportement du consommateur et en psychologie sociale, nous avons effectué une intégration de trois axes théoriques : le modèle de socialisation à la consommation (Moschis, 1987), la théorie du développement d‟une orientation matérialiste (Kasser et al., 2004) et le paradigme du parcours de vie (Moschis, 2007). Cette intégration théorique constitue la première originalité de la présente étude, car elle permet de présenter le rôle de la famille en tant qu‟agent de socialisation, impliqué dans un processus de développement des orientations matérialistes, et ce selon la théorie du développement de cette valeur, qui a été proposée en psychologie sociale. Selon cette théorie, le développement du matérialisme peut être fait selon deux axes : l‟exposition à un modèle social encourageant l‟adoption de l‟importance accordée aux possessions matérielles, et l‟exposition à des stimuli pouvant induire des sentiments d‟insécurité, associés à l‟émergence de cette valeur individuelle (Kasser et al., 2004). Le paradigme du parcours de vie, selon lequel l‟évolution des conditions de vie, sous la forme d‟expériences des évènements de la vie, crée des exigences sociales et émotionnelles auxquelles les individus doivent s‟adapter, constitue par ailleurs le fil conducteur aussi bien de notre cadre conceptuel, en permettant l‟intégration des deux premières perspectives théoriques, que de notre cadre opératoire.

La deuxième originalité de la présente étude réside par ailleurs dans la méthodologie novatrice, pour ce domaine d‟étude, utilisée pour combler notre objectif de recherche : connaître et comprendre en profondeur le rôle joué par la famille dans le développement du matérialisme. Dans le but d‟atteindre cet objectif, la présente recherche est basée sur un design de recherche de type séquentiel, explicatif et transformatif, basé sur deux phases. La première est de type quantitatif, elle vise à tester la validité des relations proposées entre les différents facteurs familiaux suggérés à l‟issue de notre développement conceptuel et analytique, alors que la deuxième phase est de type qualitatif, et elle vise à mieux comprendre les relations identifiées et à explorer d‟autres

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pistes relatives à l‟influence de la famille dans le développement d‟une orientation matérialiste.

La présentation de cette étude est organisée autour de six sections: nous allons commencer par présenter les axes théoriques dans lesquels elle s‟inscrit : l‟étude du matérialisme et les particularités du comportement de consommation des jeunes. Nous présenterons par la suite nos développements conceptuel et analytique, relativement à la problématique du rôle de la famille dans le développement du matérialisme. Les aspects méthodologiques de la présente étude, en termes de design de recherche et des choix et stratégies de mesure constitueront le cadre opératoire adopté. Les deux dernières sections seront consacrées à la présentation, analyse et discussion des résultats de la première et de la deuxième phase de notre étude, successivement. Enfin, dans une conclusion générale, nous passerons en revue les principaux apports et implications, ainsi que les limites et voies futures de recherche.

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I- L’étude du matérialisme dans la littérature

Dans la présente section nous allons présenter les différentes définitions qui ont été proposées pour conceptualiser le matérialisme. Nous passerons par la suite à la présentation des principaux facteurs qui ont été associés à ce concept, et nous finirons par soulever le débat relatif aux causes et surtout aux conséquences du matérialisme.

I.1- Définition du matérialisme

Le matérialisme est un concept fascinant qui a soulevé l‟intérêt de beaucoup de chercheurs à travers le temps et à travers les disciplines. On peut trouver des discussions relatives au thème du matérialisme en théologie, en philosophie, en économie, en économie politique, en sociologie, en psychologie et en comportement du consommateur.

Dans l‟usage philosophique le matérialisme fait généralement référence à la notion selon laquelle « rien n‟existe à l‟exception de la matière et de ses mouvements » (Lange, 1974). Dans cette discipline le matérialisme est généralement défini à travers sa mise en opposition avec le spiritualisme. Alors que dans l‟usage populaire, le matérialisme semble référer à une préoccupation excessive relativement à l‟acquisition des objets, à une dévotion aux désirs et besoins matériels, à la négation des aspects spirituels et à un style de vie basé sur les intérêts matériels (Richins et Dawson, 1992 ; Fournier et Richins, 1991). Cette définition du matérialisme selon l‟usage populaire possède plusieurs points communs, comme nous le verrons, avec les principales conceptualisations faites de ce construit dans la recherche en comportement du consommateur.

Dans le but de présenter une conceptualisation bien positionnée du phénomène du matérialisme individuel dans la littérature en comportement du consommateur, puisqu‟il s‟agit du domaine de recherche dans lequel s‟inscrit la présente étude, nous allons commencer par présenter les principales conceptualisations développées pour ce construit dans une discipline proche, celle de la psychologie. Ensuite nous passerons à la présentation des principales définitions qui ont été proposées pour ce concept dans le domaine du comportement du consommateur proprement dit. Enfin, nous préciserons le

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positionnement théorique du matérialisme dans ce domaine et ce en le distinguant d‟autres concepts qui lui sont similaires.

I.1.1- Définition du matérialisme en psychologie

Ce n‟est qu‟à partir des années ‟90 que le matérialisme est devenu un axe de recherche étudié en psychologie. On a globalement expliqué cet intérêt par le fait que le discours sur le matérialisme, traditionnellement émis par les sociologues et les philosophes, était à la fois trop large et trop normatif pour permettre de mener des recherches empiriques (Richins et Rudmin, 1994).

D‟après ces auteurs, qui ont présenté leur vision du matérialisme dans le domaine de la psychologie économique (discipline qui se penche sur l‟étude des effets de variables de différence individuelle sur le comportement économique), le matérialisme est la variable qui décrit le mieux la relation, réelle et désirée, établie entre l‟individu et les biens économiques. Elle est étroitement liée aux satisfactions que celui-ci tire de l‟acquisition et possessions des biens, et est reliée à l‟intensité et à la manière avec laquelle l‟individu poursuit des objectifs économiques. Ces auteurs ont démontré que le matérialisme peut être étudié en psychologie économique à travers l‟examen de son lien avec plusieurs variables économiques : l‟argent (dépense, épargne et endettement) et le travail (motivation et comportement).

Nous notons par ailleurs que c‟est principalement dans le domaine de la psychologie sociale que les recherches empiriques sur l‟orientation matérialiste individuelle avaient foisonné, notamment à travers les travaux de Kasser et son équipe.

Kasser (2002) a donné une autre explication à l‟intérêt des psychologues pour le matérialisme. Selon lui, depuis le début des années ‟90 il y a eu une tendance dans ce domaine vers des études qui permettaient de mettre l‟accent sur une psychologie plus « positive ». En effet, en faisant beaucoup de recherches sur ce domaine, cet auteur a noté que la majorité des études menées étaient centrées sur la recherche d‟une réponse à la question fondamentale : « L‟argent peut-il acheter le bonheur ?». Pour y apporter sa propre réponse, cet auteur s‟est intéressé au construit du matérialisme, qu‟il considère comme une valeur, et recommande de le cerner par le biais de sa centralité par rapport

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aux autres valeurs de l‟individu (idée qui a été appliquée à maintes reprises en comportement du consommateur, exemple : Burroughs et Rindfleisch, 2002).

En effet, Kasser et Ryan (1996) ont développé une échelle de mesure qu‟ils dénomment « Index de l‟aspiration ». Sur sa base, ils ont pu dégager trois types de valeurs qui caractérisent l‟orientation matérialiste de l‟individu : (a) le succès financier, (b) la reconnaissance sociale et (c) l‟attirance de l‟apparence. Le matérialisme individuel aurait ainsi trois dimensions : argent, célébrité et image. Les individus qui valorisent l‟un de ces aspects valorisent aussi les deux autres.

Ces auteurs caractérisent ces trois valeurs matérialistes d‟extrinsèques. Pour estimer l‟ampleur de l‟orientation matérialiste de l‟individu, ils évaluent leur centralité par rapport à d‟autres valeurs qu‟ils qualifient d‟intrinsèques, comme le développement personnel, les relations interpersonnelles et la contribution à la vie communautaire.

Plus tard, Kasser et son équipe ont développé leur conceptualisation du matérialisme. C‟est ainsi qu‟en 2002, par un ouvrage rendu célèbre depuis, Kasser a introduit les bases de sa théorie des valeurs matérialistes qui est ancrée dans les pensées humaniste, existentielle et organiciste, aussi bien que dans une multitude d‟études empiriques (Kasser, 2002). Cette théorie positionne la valeur matérialiste par rapport à ses causes et à ses conséquences.

Ainsi, Kasser propose selon cette théorie, que la valeur matérialiste se développe à travers deux voies principales :

 À partir d‟expériences qui induisent des sentiments d‟insécurité : les individus deviennent plus matérialistes lorsqu‟ils expérimentent des circonstances environnementales qui ne satisfont pas certains de leurs besoins psychologiques comme celui de l‟autonomie et de la sécurité. Ces circonstances peuvent être reliées à des environnements interpersonnels proches (famille, amis) aussi bien qu‟éloignés (environnements socio-économiques et culturels);

 À partir de l‟exposition à des modèles sociaux qui encouragent les valeurs matérialistes. Ces modèles exercent une influence plus directe sur le développement de la valeur matérialiste, à travers des processus de socialisation, d‟internalisation et d‟imitation.

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Par ailleurs, lorsque les valeurs matérialistes possèdent une position relativement centrale dans le système des valeurs de l‟individu, son bien-être personnel diminue suite à la diminution de la probabilité de mener des expériences qui satisfont ses importants besoins psychologiques. En outre, l‟orientation matérialiste encourage des comportements qui nuisent aux relations interpersonnelles, l‟auteur évoque par exemple la tendance des individus matérialistes envers l‟amitié « instrumentale ».

Sur la base de cette théorie qu‟ils avaient mieux structurée, Kasser et al. (2004) ont présenté leur vision d‟une orientation de valeur matérialiste (Materialistic Value

Orientation) qu‟ils définissent comme étant «l‟ensemble des objectifs, des croyances et

des comportements relatifs à la culture de consommation » (p.13). Selon ces auteurs la culture de consommation serait, en partie, une vision partagée du monde qui est logée à travers la psyché des membres de cette culture. Ils soulignent aussi le fait que vivre dans une culture de consommation signifie que les individus sont exposés à d‟énormes pressions pour se conformer aux croyances et valeurs de cette culture. Par conséquent, la vision partagée du monde dans une société caractérise les identités et vies de ses membres en les amenant à adopter les objectifs, et à s‟engager dans les pratiques qui soutiennent cette culture.

C‟est sur la base de cette conception relative à la culture de la consommation que ces auteurs pensent qu‟une orientation matérialiste entraîne la croyance selon laquelle il est important de poursuivre les objectifs, culturellement admis, d‟ : (a) atteindre le succès financier; (b) avoir de « bonnes » possessions; (c) avoir la « bonne » image et (d) avoir un statut élevé.

Comme nous le verrons dans le prochain paragraphe, les idées proposées dans le domaine de la psychologie sociale trouveront leur écho dans celui du comportement du consommateur.

I.1.2- Définition du matérialisme en comportement du consommateur

L‟étude du matérialisme dans le domaine du comportement du consommateur revêt un tel intérêt que Belk (1987) l‟a qualifiée de « macro-développement le plus significatif dans le comportement moderne de consommation » (p.26).

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Plusieurs définitions ont été avancées dans le but de conceptualiser le matérialisme dans le domaine du comportement du consommateur. Certaines ont été retenues par les chercheurs plus que d‟autres. Elles différent selon l‟emphase qui a été mise sur la relation établie entre l‟individu et ses possessions matérielles, mais aussi selon la dimensionnalité de ce construit.

Dans les premières recherches effectuées en comportement du consommateur sur le phénomène du matérialisme, celui-ci a été considéré comme étant un construit unidimensionnel. Ainsi, Ward et Wackman (1971) ont proposé l‟une des premières définitions du matérialisme dans ce domaine de recherche. Selon eux, il correspond à « une orientation qui consiste à considérer les biens matériels et l‟argent comme étant importants pour le bonheur personnel et le progrès social » (p. 422).

En faisant une revue des définitions ultérieures qui avaient été proposées pour conceptualiser le matérialisme, nous avons noté deux principaux courants : un courant qui appréhende le matérialisme comme une orientation envers les possessions matérielles, et un courant de recherche qui l‟appréhende différemment. Nous allons commencer par présenter les variantes de ce second cas.

Certains auteurs ont considéré que le matérialisme est une orientation accentuée envers la consommation. Ainsi, Rassuli et Hollander (1986) l‟ont défini comme étant « un intérêt pour l‟avoir et les dépenses, qui résulte de la perception des possibilités d‟acquérir de larges éventails de biens et de services, et de la perception que les autres sont généralement tout aussi concernés » (p.10). Alors que Muncy et Eastman (1998) pensent que le matérialisme est associé à une plus grande motivation à acquérir les biens que les marketers procurent aux consommateurs.

Dans la même perspective, Holt (1995) a critiqué l‟emphase mise dans plusieurs conceptualisations du matérialisme sur la notion de possessivité. Il propose de développer une nouvelle approche pour définir ce concept. Au lieu de se centrer sur l‟importance globale des possessions matérielles, qu‟il considère comme une mesure trop générale du matérialisme, il propose de le définir en termes des utilisations faites de ces possessions par les individus. Plus précisément, il propose de définir le matérialisme comme étant « le style de consommation qui résulte lorsque les consommateurs

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perçoivent que la valeur ne peut être inhérente qu‟aux objets de consommation, plutôt qu‟aux expériences et aux autres personnes » (p.13).

Par ailleurs, Micken et Roberts (1999) ont choisi d‟adopter une autre perspective, celle d‟appréhender le matérialisme par rapport à la formation de l‟identité individuelle. Pour ces auteurs, le matérialisme n‟est pas tant une orientation envers les possessions qu‟une préférence pour la certitude. Plus précisément, ils considèrent que les matérialistes utilisent les objets non seulement pour marquer leurs identités, mais aussi pour les fixer. Dans ce sens, les matérialistes seraient à la recherche de représentations concrètes du soi.

Malgré cette variabilité manifeste entre les points de vue qui ont été proposés pour conceptualiser le matérialisme, nous avons noté que dans la majorité des définitions qui ont été adoptées dans la recherche sur le matérialisme en comportement du consommateur, l‟accent a été le plus souvent placé sur la relation entre l‟individu et ses possessions matérielles.

Selon cette perspective, deux importantes études ont joué un rôle prépondérant dans l‟avancement de la recherche sur ce phénomène. Elles ont reflété deux conceptualisations totalement différentes du matérialisme, mais elles se sont toutes les deux basées sur le rôle joué par les possessions matérielles dans la caractérisation de cette orientation.

La première de ces deux conceptualisations a été présentée par Belk (1985) dans l‟un des articles les plus souvent cités du Journal of Consumer Research (Micken, 1995). Belk a appréhendé le matérialisme de la perspective d‟un trait de personnalité en le définissant généralement comme étant « l‟importance que le consommateur attache aux possessions matérielles (worldly possessions). Aux niveaux les plus élevés du matérialisme, ces possessions prennent une place centrale dans la vie de l‟individu et sont supposées générer les plus grandes sources de satisfaction et d‟insatisfaction ». Le matérialisme serait ainsi une manifestation de trois traits psychologiques : la possessivité, la non-générosité et l‟envie.

 La possessivité correspond à la tendance à garder le contrôle ou la propriété sur ses propres possessions;

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 La non-générosité correspond à une réticence à donner ou à partager ses possessions avec les autres;

 L‟envie correspond au sentiment résultant du désir des possessions d‟autrui, additionné d‟un ressentiment face à la perception de sa propre infériorité.

Dans une étude ultérieure, un quatrième trait a été ajouté aux trois premiers caractérisant le matérialisme selon Belk (1985): la préservation. Ce trait psychologique implique « la conservation d‟évènements, d‟expériences et de mémoires sous une forme matérielle » (Ger et Belk, 1996, p.64).

De ce point de vue, le matérialisme a été étudié en termes des tendances comportementales qui auraient été associées à ces traits.

Richins et Dawson (1992) ont adopté une perspective différente. Ces auteurs ont appréhendé le matérialisme comme une valeur personnelle qui s‟appuie sur un ensemble de croyances portant sur l‟importance accordée par l‟individu à l‟acquisition des possessions matérielles dans sa vie. Cet ensemble correspond aux trois domaines de croyances suivants :

La Centralité de l‟acquisition : elle reflète la tendance de l‟individu à placer les possessions et leur acquisition au centre de sa vie. Ce qui permet à l‟importance des possessions matérielles d‟avoir une place centrale dans l‟ensemble du système de valeurs individuel;

Le rôle de l‟acquisition dans la poursuite du bonheur : la croyance selon laquelle les possessions matérielles et leur acquisition sont le meilleur moyen pour atteindre le bonheur;

Le rôle des possessions dans la définition du succès : la tendance à se baser sur les possessions matérielles pour juger son propre succès et celui des autres.

Ces domaines de croyances correspondent aux trois dimensions utilisées pour mesurer le matérialisme. L‟échelle développée par Richins et Dawson (1992), composée à l‟origine de dix-huit items, a fait l‟objet d‟une révision ayant abouti à la création d‟une version plus courte (Richins, 2004b). Cette deuxième version semble posséder une structure dimensionnelle plus stable.

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Richins et Dawson (1992) ont défendu leur point de vue de considérer le matérialisme comme une valeur en soutenant qu‟ainsi, il peut refléter l‟importance que l‟individu accorde aux possessions et à leur acquisition comme une forme de conduite nécessaire pour atteindre des objectifs majeurs dans la vie, comme le bonheur.

Cette perspective a été partagée par plusieurs auteurs en comportement du consommateur. Certains d‟entre eux poussent cette idée encore plus loin et suggèrent que pour mieux comprendre le matérialisme, il convient de l‟étudier dans le cadre du système global des valeurs individuelles (Kilbourne et al., 2005 ; Burroughs et Rindfleisch, 2002). Une telle approche reflète la centralité de la valeur matérialiste, et est basée sur le fait que les individus sont rarement guidés par une seule valeur. Ce qui est inhérent au concept des valeurs (Rokeach, 1973).

Dans la recherche en comportement du consommateur, c‟est cette conception du matérialisme en tant qu‟une valeur individuelle qui a été presque unanimement retenue par les chercheurs qui se sont intéressés à l‟étude de ce phénomène. La conceptualisation de Richins et Dawson (1992) a été le point de départ d‟un impressionnant corps de recherche (Richins, 2004b). L‟échelle proposée par ces auteurs a fait l‟objet de nombreuses recherches ayant permis de mesurer le matérialisme individuel aussi bien dans le contexte nord-américain qu‟international (Kilbourne et al., 2005 ; Griffin et al., 2004 ; Wong et al., 2003 ; Ladwein, 2005).

Par ailleurs, l‟échelle de mesure du matérialisme proposée par Belk (1985) possède, selon plusieurs auteurs (exemple : Micken, 1995), de faibles qualités psychométriques, ce qui remet en question la conceptualisation théorique qui la sous-tend. En effet, l‟approche proposée par Belk (1985) aborde ce construit par le biais d‟un ensemble de traits de personnalité qui constituent une mesure indirecte du matérialisme (Tatzel, 2002).

Il faut cependant noter que Russel W. Belk reste l‟un des plus importants chercheurs ayant contribué à l‟avancement de la recherche sur le matérialisme en comportement du consommateur. Il s‟est notamment différencié par les interprétations et applications qu‟il a faites de ce concept. Par exemple, il a fait une analyse de contenu longitudinale des publicités parues dans les magazines populaires américains entre 1900 et 1980 afin d‟y

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rechercher des indicateurs de matérialisme (Belk et Pollay, 1985). Il a recherché aussi ces indicateurs à travers l‟étude des personnages (les héros versus les vilains) de bandes dessinées (Belk, 1987). Il a montré que les possessions matérielles peuvent être considérées comme l‟extension du soi dans la mesure où elles peuvent refléter et contribuer à la formation de l‟identité individuelle (Belk, 1988).

Même si les propositions de conceptualisation du matérialisme en tant qu‟une orientation envers les possessions matérielles sont celles qui ont été les plus adoptées en comportement du consommateur, il faut noter qu‟une certaine ambiguïté entoure encore ce concept. En effet, comme nous l‟avons vu, certaines des définitions avancées ont suggéré que le matérialisme puisse être une orientation envers les dépenses (Rassuli et Hollander, 1986). Par ailleurs, Fournier et Richins (1991) ont trouvé que dans l‟usage populaire de ce terme il y a une grande confusion entre matérialisme et « affichage de statut ».

C‟est dans cette perspective qu‟il convient de bien différencier le matérialisme par rapport à certains concepts qui lui sont proches.

Le premier est celui de la consommation de statut, définie par Eastman et al. (1999) comme étant « le processus motivationnel par lequel les individus essaient d‟améliorer leur position sociale, à travers la consommation ostentatoire de produits qui confèrent et symbolisent du statut, aussi bien pour l‟individu que pour les autres signifiants de son entourage » (p.42). Ces auteurs insistent sur le fait que ce construit est différent du matérialisme, auquel il est positivement relié.

Par ailleurs, selon la perspective de la considération du matérialisme comme une orientation envers les possessions matérielles, il convient de le différencier du concept de l‟attachement à la possession matérielle. En effet, ce dernier reflète la relation établie entre un individu spécifique et un objet spécifique. Plus précisément, l‟attachement à la possession matérielle a été défini par Kleine et Baker (2004) comme étant « une propriété multidimensionnelle de la relation entre un individu ou un groupe d‟individus spécifique et, un objet spécifique que l‟individu s‟est psychologiquement approprié, a décommodifié et a singularisé à travers une interaction individu-objet » (p.6).

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Pour conclure ce paragraphe relatif à la définition du matérialisme, nous retenons les deux points suivants:

Primo, la multitude de conceptualisations avancées par les chercheurs en

matérialisme relativement à ce construit suggère que ce dernier ne peut être qu‟un concept multidimensionnel.

Secundo, même si la variété des perspectives développées relativement à l‟étude du

matérialisme dans le domaine du comportement du consommateur suggère qu‟une certaine ambiguïté entoure encore ce concept; la définition et mesure du matérialisme proposées par Richins et Dawson (1992) constituent, à ce jour, la conceptualisation la plus largement adoptée par les chercheurs dans ce domaine de recherche. C‟est pour cette raison que nous la retenons dans la présente étude.

La précédente revue des définitions du matérialisme proposées par les chercheurs en comportement du consommateur, que nous avons présentée, illustre l‟importance que revêt ce concept dans cette discipline. C‟est pour cette raison que de nombreux chercheurs se sont intéressés à l‟étude des conditions de son émergence et de ses conséquences, ainsi qu‟aux caractéristiques qui sont associées à un niveau élevé de matérialisme. C‟est l‟objet du paragraphe suivant.

I.2- Les facteurs associés au matérialisme

Un grand nombre de facteurs ont été associés au matérialisme dans le domaine du comportement du consommateur. Dans ce qui suit nous allons essayer de les présenter en les regroupant en cinq catégories représentant successivement : le rapport à l‟argent, les facteurs personnels, les facteurs d‟ordre social, et la relation entre le matérialisme et les deux facteurs psychologiques que sont l‟insécurité et le bien-être individuel.

Matérialisme et rapport à l’argent

Les comportements de dépense et d‟endettement, ainsi que certains comportements qui leur sont associés, ont été mis en relation avec le niveau du matérialisme individuel dans diverses études récentes.

Ainsi, Watson (2003) a voulu étudier la relation entre le matérialisme d‟une part et les tendances de dépense, d‟épargne et d‟endettement d‟autre part. Il a notamment

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trouvé que les individus les plus matérialistes sont plus susceptibles de se percevoir comme étant des dépensiers et ont plus d‟attitudes favorables envers l‟endettement. À Sao Paolo (Brésil), on s‟est intéressé à vérifier si le matérialisme pouvait être une variable explicative du comportement d‟endettement (Canniatti Ponchio et Aranha, 2008). Le modèle proposé et testé par ces auteurs a confirmé que le matérialisme est une variable comportementale utile dans la prévision de la probabilité d‟endettement des individus dans le but de consommer. Son importance relative dans une telle prévision vient juste après celle du revenu, et est plus grande que celle de l‟âge.

Pour leur part, Fitzmaurice et Comegys (2006) ont non seulement démontré que le matérialisme est un prédicateur significatif et important du comportement de dépense, mais il l‟est aussi pour le temps passé au magasinage. Goldberg et al. (2003) se sont aussi intéressés à la relation entre le niveau de matérialisme et le comportement de magasinage. Ils ont étudié cette relation sur un échantillon de jeunes adolescents (9 à 14 ans) pour lesquels ils avaient d‟ailleurs développé une échelle de mesure du matérialisme, qui pourrait mieux convenir à leur niveau de développement cognitif et social. Ils ont trouvé que plus ces jeunes ont des niveaux élevés de matérialisme, plus fréquent est leur magasinage, et moins ils ont tendance à épargner.

Pirog III et Roberts (2007) ont abordé la question de l‟utilisation de la carte de crédit chez les étudiants, et sa relation avec leur niveau de matérialisme. Leur recherche a mis en évidence le fait que le matérialisme, considéré comme un trait de personnalité, est positivement associé à une mauvaise utilisation de la carte de crédit. Par ailleurs l‟impulsivité semble être un trait central qui joue un rôle significativement médiateur dans cette relation.

Enfin, nous avons noté que la relation entre le matérialisme et l‟achat compulsif, malgré le fait que plusieurs auteurs reconnaissent son intérêt, n‟a jamais été étudiée à notre connaissance. Plusieurs chercheurs ont étudié cependant ces deux variables, considérées toutes les deux comme d‟importantes résultantes de la culture de consommation (Rindfleisch et al., 1997, Richins et Dawson, 1992, Belk, 1985), d‟une manière parallèle. On a notamment cherché à connaître l‟effet de la structure familiale sur le matérialisme et la consommation compulsive chez des jeunes adultes (Rindfleisch

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et al., 1997), chez des jeunes adolescents (Roberts et al., 2003) et chez des adolescents plus âgés (Roberts et al., 2006).

Matérialisme et facteurs personnels

En voulant investiguer les facteurs corrélés à un niveau élevé de matérialisme, tel que mesuré par leur échelle de mesure, Richins et Dawson (1992) ont notamment trouvé que les individus les plus matérialistes préfèrent retenir les ressources dont ils disposent pour leur propre utilisation et ont moins tendance à partager ce qu‟ils possèdent, aussi bien en termes de leur argent qu‟en termes de leurs possessions. Ces auteurs ont ainsi trouvé une corrélation positive entre le matérialisme et le trait de non-générosité de l‟échelle développée par Belk (1985).

Cependant, la mise en évidence de l‟orientation interpersonnelle des matérialistes a surtout été présentée dans une étude effectuée par Burroughs et Rindfleisch (2002). Ces auteurs ont investigué le positionnement du matérialisme dans le système global des valeurs individuelles. Ils ont notamment trouvé que celui-ci est négativement corrélé aux valeurs à orientation collective. Plus précisément, plus l‟individu est matérialiste moins il a tendance à adopter des valeurs religieuses (le dévouement accordé en la croyance en une force divine et l‟importance accordée à la religion dans sa vie), des valeurs communautaires (la valeur placée dans le développement et maintien de liens avec sa communauté locale, géographiquement), et des valeurs familiales (la valeur placée dans le développement et maintien de relations intimes et chaleureuses avec sa famille immédiate).

Par ailleurs, concernant les facteurs personnels à portée individuelle, Troisi et al. (2006) ont démontré que le matérialisme est un prédicateur positif de la recherche de sensations, mais négatif de l‟ouverture à l‟expérience. Une interaction marginale a émergé cependant de leurs résultats, entre le matérialisme et les attitudes de dépense : les individus les moins matérialistes et les plus dépensiers sont particulièrement ouverts à l‟expérience.

L‟étude précédente a montré que les matérialistes ne sont pas vraiment ouverts à l‟expérience, par contre Goldberg et al. (2003) ont trouvé qu‟ils ont une tendance prononcée envers l‟innovativité en général. Park et al. (2007) ont pour leur part

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investigué une innovativité spécifique : l‟innovativité sur Internet. Plus précisément ils ont voulu étudier le rôle joué par l‟innovativité sur Internet dans l‟influence du matérialisme sur les attitudes de jeunes consommateurs envers l‟achat de produits liés à la mode à travers le commerce électronique. Ils ont trouvé que l‟innovativité sur Internet exerce un effet significatif et modérateur sur cette influence, qui était positive d‟ailleurs.

La relation entre le matérialisme et l‟innovativité est une question qui mériterait de faire l‟objet de plus d‟investigations, étant donné qu‟un lien significativement puissant semble exister entre l‟innovativité et le système des valeurs individuelles (Hartman et al., 2006).

Matérialisme et facteurs d’ordre social

La portée sociale du comportement de consommation des individus matérialistes a fait l‟objet de plusieurs recherches. Cette question a été abordée selon plusieurs perspectives, aussi différentes qu‟intéressantes.

Le facteur qui semble pouvoir décrire le plus généralement cette portée du comportement de consommation est celui de la motivation sociale pour la consommation. Ce concept a été précisément défini par Moschis (1981) comme étant « l‟ensemble des orientations cognitives concernant l‟importance de la consommation ostentatoire, et plus spécialement son importance pour l‟expression du soi » (p. 125). Selon cet auteur, cette motivation est une variable prédispositionnelle envers la consommation, au même titre que le matérialisme et la motivation économique envers la consommation (ensemble d‟orientations cognitives concernant l‟importance des attributs fonctionnels et économiques du produit).

Selon cette considération, Moschis et ses collègues n‟ont pas cherché à mettre la motivation sociale pour la consommation en relation avec le matérialisme, mais ils ont étudié ces deux facteurs parallèlement. Ils les ont notamment abordés comme étant des résultats possibles du processus de socialisation à la consommation (Churchill et Moschis, 1979 ; Moschis et Churchill, 1978). Plus spécifiquement, ces deux facteurs sont inclus dans un ensemble de résultats d‟apprentissage englobant les compétences, connaissances et attitudes indirectes de consommation : qui motivent l‟achat ou la consommation mais ne sont pas directement utiles dans la prise de décision elle-même.

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Fitzmaurice et Comegys (2006) ont été les premiers chercheurs à avoir étudié directement le lien entre le matérialisme et la motivation sociale pour la consommation. Le concept de la motivation sociale pour la consommation, tel qu‟il a été défini par Moschis (1981) met l‟accent sur le fait que les produits et les marques communiquent d‟importantes significations aux autres individus et, contrairement au concept de la consommation de statut (Eastman et al., 1999), il n‟est pas uniquement centré sur la communication du statut par le produit.

C‟est pour cette raison que Fitzmaurice et Comegys (2006) ont préféré adopter la perspective de la « consommation sociale » proposée par Moschis (1981) plutôt que celle proposée par Eastman et al. (1999). D‟autant plus que la mesure de la motivation sociale proposée par ce premier auteur va au-delà de la gestion d‟impression et inclut un élément d‟influence sociale et de conformité dans ses items. Un lien significativement positif entre le matérialisme et cette mesure de la motivation sociale de la consommation a émergé des résultats de Fitzmaurice et Comegys (2006). L‟aspect relatif à l‟influence sociale a été en plus vérifié dans le lien positif trouvé aussi entre le matérialisme et un niveau moyen de leadership d‟opinion.

Concernant la consommation de statut, dont nous avons présenté la définition dans le paragraphe (I.1.2), même si ce concept n‟a pas été repris par beaucoup de chercheurs en comportement du consommateur, on a cherché à le mettre en lien avec le matérialisme dans deux études différentes. La première a été réalisée en utilisant, et en comparant entre, des échantillons d‟étudiants chinois, américains et mexicains (Eastman et al., 1997). Dans ces trois pays un lien significativement positif a été trouvé entre le matérialisme et la consommation de statut. Eastman et al. (1999) ont par ailleurs proposé leur propre échelle de mesure de la consommation de statut, et en mettant ce facteur en relation avec le matérialisme, ils ont aussi trouvé que les individus matérialistes sont fortement motivés par la recherche du statut dans leur consommation.

Rose et DeJesus (2007) ont choisi d‟utiliser d‟autres facteurs pour investiguer le processus motivationnel des matérialistes. Ils ont proposé un modèle de « cognition motivée » pour étudier la relation pouvant être établie entre le matérialisme et le contrôle du soi. Plus spécifiquement, ces auteurs ont suggéré que cette relation ne peut pas être

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directe, et qu‟elle peut être médiée par l‟effet de deux facteurs : la motivation de l‟appartenance et les croyances sur achats pour appartenance (la tendance à faire des achats comme moyen de gagner l‟acceptation sociale).

Suite au test des relations proposées entre ces quatre variables, il s‟est effectivement avéré que les individus ayant des niveaux relativement plus élevés de contrôle de soi sont plus susceptibles d‟adopter des valeurs matérialistes. Ces valeurs semblent être dérivées de la forte motivation d‟appartenance de ces individus ayant un contrôle de soi élevé, ainsi que du sens qu‟ils attachent à l‟achat.

Le fait que la motivation de l‟acceptation sociale semble être un important antécédent du matérialisme confirme en quelque sorte un résultat ayant déjà été démontré par Chang et Arkin (2002), selon lequel les matérialistes sont particulièrement susceptibles à l‟une des dimensions de l‟influence interpersonnelle : la dimension normative.

L‟ensemble des résultats présentés ci-dessus, relativement aux antécédents motivationnels d‟origine sociale de l‟orientation matérialiste, suggère que les individus matérialistes sont non seulement guidés par la recherche de statut et par des motivations de conformisme et d‟acceptation sociale, mais aussi qu‟ils sont fortement sensibles à la capacité communicative des produits et des marques.

Cette sensibilité particulière a été par ailleurs investiguée, en profondeur, dans diverses recherches ayant porté sur le lien entre le niveau de matérialisme et le rapport établi avec les produits d‟une part, et les marques de l‟autre.

Nous avons noté que relativement peu de recherches avaient investigué ce premier rapport (entre matérialisme et significations sociales du produit). Lorsque cela a été fait, les catégories de produits utilisées pour étude, étaient choisies justement pour leur forte « capacité communicative ». C‟est le cas par exemple de la recherche menée par O‟Cass (2004), qui s‟est intéressé à l‟effet du matérialisme et de la congruence entre image du soi et image du produit sur l‟implication du consommateur dans la mode vestimentaire. Cette recherche a permis de mettre en évidence le fait que les valeurs matérialistes peuvent expliquer significativement son implication dans le domaine de la mode vestimentaire, ainsi que son implication dans la prise de décision relativement à cette catégorie de produits.

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Le lien pouvant exister entre l‟orientation matérialiste du consommateur et sa relation avec la marque a fasciné un plus grand nombre de chercheurs, notamment pendant les cinq dernières années, et ce dans divers contextes socio-culturels.

Ainsi, Kamineni (2005) s‟est notamment interrogé quant à la possibilité selon laquelle le niveau de matérialisme puisse affecter les perceptions des consommateurs par rapport aux marques de produits de luxe. En choisissant d‟étudier le cas de la marque Armani dans le contexte australien, cet auteur a notamment trouvé une corrélation positive entre le niveau de matérialisme des étudiants interrogés et la perception selon laquelle « posséder cette marque est un symbole de succès dans la société ». La capacité symbolique d‟une marque prestigieuse semble posséder, en effet, un fort impact sur les individus matérialistes, comme l‟a aussi montré l‟étude effectuée par Sangkhawasi et Johri (2007) dans le contexte thaïlandais, relativement au cas de la marque Mercedes Benz. Outre la signification symbolique de cette marque, les individus les plus matérialistes semblent aussi être particulièrement sensibles à ses attributs de qualité et à sa capacité d‟attirance émotionnelle.

Rindfleisch et al. (2009 ; 2007) sont les chercheurs qui ont apporté récemment d‟importantes contributions à ce courant de recherche, celui ayant pour objet la relation entre le matérialisme et la marque.

Dans une première étude (Rindfleisch et al., 2007), dont une partie était effectuée à Singapour et l‟autre aux États-Unis, ces chercheurs se sont proposés d‟investiguer la relation pouvant exister entre le matérialisme et trois types de connexions à la marque : fidélité, connexion soi-marque (le degré auquel le consommateur a intégré la marque dans son concept de soi), et connexion à la communauté de marque (le degré auquel le consommateur possède un sentiment d‟identification communale avec les autres utilisateurs de la marque). Dans cette recherche, alors que le matérialisme semble exercer une influence négligeable sur la fidélité à la marque, il a un effet significativement positif sur la connexion entre le soi et la marque et sur la connexion à la communauté de marque, et ce pour les quatre catégories de produits étudiées (voitures, Jeans, montres, téléphones cellulaires). Les auteurs en déduisent que les

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matérialistes essaient de gérer leur incertitude en établissant de fortes relations individuelles et communales avec leurs marques.

Dans le but de développer cette dernière idée, cette équipe de chercheurs a entrepris, dans une récente recherche effectuée entièrement dans le contexte nord-américain, de reprendre l‟étude de la relation entre le matérialisme et ces trois types de connexions à la marque, tout en les mettant en rapport avec un type particulier d‟incertitude : l‟insécurité existentielle (Rindfleisch et al., 2009). Tout comme dans la recherche précédente, ces auteurs arrivent à démontrer que les valeurs matérialistes possèdent un effet positif et direct aussi bien sur les connexions soi-marque qu‟avec les connexions communales avec la marque, et ce pour toutes les catégories de produits examinées (voitures, Jeans, fours à micro-ondes, montres, lecteurs MP3 et lunettes solaires) à l‟exception de cette dernière catégorie.

Mais plus important encore, les deux types d‟études sur lesquels ils se sont basés (enquête et expérimentation), ont indiqué que ces connexions établies avec la marque fonctionnent comme des moyens permettant, pour les individus matérialistes, de faire face à leur insécurité existentielle. L‟impact de ce dernier facteur, étant de portée plus psychologique que sociale, sera présenté avec plus de détails dans le paragraphe suivant puisqu‟il représente un type particulier d‟insécurité, laquelle notion semble jouer un rôle important dans la recherche sur le matérialisme.

Matérialisme et insécurité

Plusieurs recherches effectuées dans le domaine du comportement du consommateur, ainsi que celui de la psychologie sociale, ont permis de mettre en évidence le lien existant entre le matérialisme et différentes formes d‟insécurité. L‟insécurité étant définie comme étant un sens généralisé d‟incertitude, de vulnérabilité et d‟anxiété (Rindfleisch et al., 2009), elle peut prendre plusieurs formes : personnelle, sociale, développementale et existentielle.

En effet, on a démontré que l‟orientation matérialiste est liée à un faible niveau d‟estime de soi, cette dernière étant généralement décrite comme étant une évaluation personnelle de soi. Ce résultat a été vérifié aussi bien chez les adultes (Richins et Dawson, 1992) que chez les jeunes consommateurs (Chaplin et Roedder John, 2007).

Figure

Figure 1. Le modèle conceptuel de base
Figure 2. Relation entre structure familiale et matérialisme
Figure 3. Le modèle analytique
Tableau 5. Origine ethnique des répondants  Effectif  (%)  Européen  283  89,8  Africain   7  2,2  Arabe  11  3,5  Asiatique  5  1,6  Hispanique  5  1,6  Autres  4  1,3  Total  315  100
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