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3 L’expérience de recherche au Vietnam

4.3 Les indicateurs

Les contributions des acteurs locaux à leur service d’assainissement dépendront du contexte, de leur demande et de leur capacité à participer. L’analyse a été d’abord divisée en trois échelles, à l’intérieur desquelles différents groupes d’acteurs ont été interrogés. La grille d’analyse générale suppose qu’à chaque échelle, la contribution des acteurs locaux dépendront du contexte, des besoins des acteurs, des objectifs en matière d’assainissement et de leurs capacités à participer.

La définition de départ de la demande est : les besoins et objectifs des familles, qui sont définis en fonction de leurs priorités, leurs intérêts et leurs préoccupations

(Lenton, Wright et al. 2005; IWA 2006). À partir de cette définition nous avons déterminé les indicateurs besoins et objectifs. Pour ce qui est de l’offre, nous l’analyserons en terme de capacité de l’acteur étudié à offrir un service.

Nous suggérons que la perspective peut s’exprimer en ces termes autant pour un individu, un groupe ou une institution. Elle peut aussi s’illustrer avant comme après la fourniture du service, dans un intérêt de maintenir ou améliorer le service.

D’abord, la capacité des acteurs de chaque échelle sera analysée selon ces indicateurs :

1.

Capacité institutionnelle;

2.

Capacité des ressources humaines;

3.

Capacité technique;

4.

Capacité financière;

5.

Capacité environnementale;

6.

Capacité sociale et culturelle.

Cette liste d’indicateurs de capacités rejoint en partie la recherche de Magpili (2003) qui, dans sa thèse de génie civil, a modélisé l’offre et les capacités des institutions pour l’assainissement aux Philippines. La méthode utilisée dans son cas était un modèle mathématique qui a été difficile à appliquer intégralement par manque de données. De même, les définitions des capacités y étaient peu développées. Sa thèse présente toutefois un modèle d’analyse intéressant qui nous a servi de point de départ pour élaborer notre liste d’indicateurs.

4.3.1 Capacité institutionnelle  

La capacité institutionnelle réfère au cadre législatif et procédural. SANDEC, dans l’approche axée sur les ménages la nomme « environnement favorable » à l’action, dans le sens où le cadre législatif et le gouvernement sont favorables à l’action du groupe (SANDEC/WSSCC 2004). Pour chaque acteur ou groupe d’acteur analysé, nous nous demanderons donc si le cadre législatif et gouvernemental soutient cet acteur dans l’atteinte de ses objectifs. Le support politique est pris ici au sens large vietnamien. Par exemple, dans certaines zones rurales, les organisations de masse

comme l’Union des Femmes ou des Vétérans ont un important pouvoir politique et peuvent supporter des actions locales. Leur support apporte donc une certaine capacité institutionnelle même si le gouvernement n’est pas officiellement impliqué.

4.3.2 Capacité des ressources humaines 

La capacité des ressources humaines réfère à l’ensemble des professionnels, de la main d’œuvre qualifiée et des ouvriers disponibles pour planifier, construire, entretenir et gérer le service d’assainissement. Cette capacité peut aussi s’exprimer en tant que capacité à former de la main d’œuvre qualifiée et fournir une formation continue à la main d’œuvre actuelle.

4.3.3 Capacité technique 

La capacité technique réfère au bagage matériel qui supporte la technologie, la construction, l’opération et la maintenance du service d’assainissement. Il est question de disponibilité de matériaux locaux abordables pour la construction, la disponibilité de pièces de rechange, d’outils, de machinerie et de véhicules (Magpili 2003). La présence d’entrepreneurs locaux en construction par exemple, s’ils sont bien équipés, démontre une capacité technique et de ressources humaines. Un autre exemple de capacité technique essentielle à la maintenance des fosses septiques est la disponibilité de camions-pompes.

4.3.4 Capacité financière 

La capacité financière réfère aux moyens de financer les opérations d’un service d’assainissement. La plus grande partie des auteurs s’entendent pour que les utilisateurs soient la principale source de financement des frais d’opération et de maintenance du service d’assainissement. La volonté et la capacité de payer des utilisateurs sont considérées ici (Whittington, Lauria et al. 1992), en plus des mécanismes de collecte pour récupérer ces frais.

La capacité de financement du capital inclut les fonds publics et privés, des programmes de subventions ou de prêts gouvernementaux, l’aide internationale ou l’accès au crédit. À plus grande échelle, les plus gros fournisseurs peuvent ou

pourront considérer des mécanismes de financement corporatifs comme l’émission de titres en bourse ou l’accès au crédit international.

Cette définition de la capacité sera utilisée pour l’évaluation large de toutes capacités financières possiblement disponibles, même si la plupart des capacités ne seraient disponibles qu’à certaines conditions. En plus de cette analyse, le chapitre 7 présente plus de détails sur la gestion financière avec une analyse coûts-bénéfices exhaustive du projet de Lai Xà.

4.3.5 Capacité environnementale 

Pour cet indicateur, nous utilisons le terme capacité environnementale pour rester constant avec les autres indicateurs de cette section. Cependant, ce que nous mesurons ici pourrait aussi référer à un besoin environnemental. Pour tous les indicateurs de capacité, nous entendons la possibilité et l’aptitude de l’acteur ou du milieu étudié de contribuer au service d’assainissement. En terme environnemental, le milieu est apte à recevoir le service si : (1) il (terrain, écosystème, air, eau, sol, etc.) peut supporter les impacts environnementaux des services d’assainissement prévus et existants; et (2) si le milieu ne peut plus supporter l’absence de service d’assainissement à cause d’une trop grande pollution de l’eau et des sols, et donc présente un besoin d’assainissement. Ce besoin d’assainissement se traduit ainsi par une grande capacité du milieu à recevoir un service d’assainissement. La capacité environnementale à recevoir le service d’assainissement dépend donc du besoin, mais aussi de la possibilité du terrain et de l’écosystème (superficie nécessaire, type de sol, etc.) à recevoir le système.

4.3.6 Capacité sociale et culturelle 

La capacité sociale pour l’assainissement réfère à l’habilité d’une communauté à s’organiser autour d’une perception partagée sur les besoins d’assainissement, à formuler une demande commune aux autorités, et à participer à un service d’assainissement communautaire lorsqu’approprié. Cette définition provient de l’adaptation du concept de capital social dans le sens de Robert Putman (2002), où le capital social est relatif aux « caractéristiques de l’organisation sociale telles que les réseaux, les normes, et la confiance, qui facilitent la coordination et la

coopération pour un bénéfice mutuel (Thiébault 2003)». La capacité sociale évalue donc d’abord la capacité de la communauté en tant que groupe à s’organiser autour d’un service d’assainissement.

La capacité d’une communauté et des individus à participer à un service d’assainissement dépend aussi de sa capacité culturelle. La capacité culturelle réfère aux valeurs socioculturelles qui définissent les préférences en matière d’assainissement (Whittington, Lauria et al. 1992; Wright 1997). Les interventions en assainissement requièrent parfois un changement des habitudes les plus intimes des individus, comme les pratiques d’hygiène personnelle et l’utilisation des latrines ou toilettes. Les ingénieurs qui ont tenté d’implanter de nouvelles technologies parlent de l’ « acceptabilité sociale (Mara, Drangert et al. 2007) » ou « durabilité sociale (Mukherjee and Van Wijk 2003) » comme facteur essentiel à l’implantation. “Only technology acceptable by the local people should get selected and implemented (Wilderer 2005).” La capacité culturelle sera donc évaluée par l’ouverture culturelle au service d’assainissement offert. Rappelons qu’autant la capacité sociale que la capacité culturelle ne sont pas immuables et ont souvent été modifiées par des activités de conscientisation et d’éducation.

4.3.7 Besoins et objectifs 

Les indicateurs besoins et objectifs proviennent de la définition de départ de la demande : les besoins et objectifs des familles, qui sont définis en fonction de leur priorités, leurs intérêts et leurs préoccupations (Lenton, Wright et al. 2005; IWA 2006).

Nous définissons besoins par : l’état du manque d’assainissement et l’amélioration désirée. Les objectifs sont les buts exprimés en matière d’assainissement. L’analyse de ces indicateurs sera grandement exploratoire et qualitative et ne pourra être détachée du contexte des acteurs étudiés. Tel que décrit dans la définition de départ, l’étude de ces besoins et objectifs inclura l’analyse des priorités, des intérêts et des préoccupations des acteurs.