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6 Étude de cas

6.5 Le projet de gestion environnementale de Lai Xà

Par ce projet, l’objectif principal de l’ONG était de proposer un modèle vietnamien à micro-échelle d’une gestion environnementale communautaire et intégrée des déchets solides et liquides. Le village de Lai Xà et la commune de Kim Chung présentaient une problématique environnementale typique et les leaders locaux étaient ouverts et expérimentés avec des projets de développement.

6.5.1  La phase 1 : Gestion des déchets solides 

Le premier projet de gestion des déchets solides a été implanté du début 2003 à décembre 2004. L’ONG a préféré débuter par les déchets solides pour deux raisons principales : le coût des infrastructures est moins important et la problématique des déchets solides bloquant le système de drainage devait être prise en charge avant la

construction de nouveaux drains. De plus, le projet sur la gestion des déchets portait en majeure partie sur un programme d’éducation et de gestion, plutôt que sur des dépenses de construction, ce qui représentait une plus grande opportunité d’améliorer les capacités de gestion pour les projets à venir.

Le comité organisateur du projet était formé de la chargée de projet de YWAM, du comptable de la commune de Kim Chung à titre de coordonateur du projet, du président du village de Lai Xà, du consultant scientifique de l’Institut de Science et Biologie de Hanoi, de la présidente de l’Union des Femmes et du représentant de l’Union des Agriculteurs comme organisateurs de la campagne d’éducation.

La campagne d’éducation s’est basée sur la formation d’un groupe d’ambassadeurs locaux : une quarantaine de représentants respectés, provenant des organisations de masse du village (Comité Populaire, Front de la Mère Patrie, Union des Femmes, Union des Agriculteurs, Union des Vétérans, etc.). Ces représentants avaient pour responsabilité de transmettre les informations à leurs membres, opération qui devait rejoindre près de 95% des habitants du village. Selon YWAM, cette approche a obtenu d’excellents résultats à court et long-terme dans les milieux ruraux vietnamiens. Elle utilise des couloirs de communication bien établis dans la communauté, favorise la participation de tous les groupes et responsabilise les leaders à long-terme pour maintenir et développer les acquis du projet.

Sur une période de six mois, une série d’ateliers de formation a été donnée aux ambassadeurs. Les premières activités de formation portaient sur les effets des déchets sur la santé et sur l’environnement, les suivants portaient sur les options technologiques pour la collecte et le traitement des déchets. Les ambassadeurs recevaient du matériel éducatif (documentation détaillée sur le projet, dépliants à distribuer, affiches, etc.) pour les aider à vulgariser le projet dans leur association et dans leur quartier. Des rencontres d’information et de discussions pour toutes les familles étaient aussi tenues dans les différents quartiers et toutes les informations sur le projet ont été affichées dans la salle communautaire. Les salles étaient toujours remplies aux ateliers et rencontres d’informations, les habitants étaient tous conscients du problème des déchets dans le village et étaient enthousiastes d’entendre « comment le village pouvait être plus propre et plus moderne ».

Figure 24 : Tri des déchets à la maison (photo : Julie Beauséjour)

Les choix de technologies et de fonctionnement du service ont été faits par le comité organisateur selon les discussions durant les ateliers de formation. Un groupe de 8 travailleurs environnementaux a été formé pour opérer la collecte et le traitement des déchets. Le groupe de travailleurs est sous la juridiction du comité populaire de la commune Kim Chung. En plus de collecter et traiter les déchets, d’entretenir les installations, les travailleurs sont responsables de collecter les frais aux ménages. Ils peuvent aussi informer le comité populaire des mauvais comportements et suggérer des règlements et des changements au service.

Les ménages ont été formés à séparer les déchets organiques des déchets inorganiques dans des bacs séparés (figure 24). L’administration du village a fourni le terrain pour le dépotoir, pour la station de compostage et la route d’accès. Le projet a acheté 5 charrettes manuelles similaires à celles utilisées à Hanoi et les employés collectent les déchets quotidiennement. Les déchets organiques sont triés et déposés en pile dans l’abri de compostage (figure 25). Une fois les piles compostées, le compost est déchiqueté à l’aide de moulins électriques pour être empaqueté en sacs (figure 19). Les déchets inorganiques sont déposés dans le

dépotoir adjacent, qui est muni d’un champ d’infiltration de sable et gravier pour la filtration du lixiviat26.

Figure 25 :Abri de compostage

Figure 26 : Compost déchiqueté

(photos : Julie Beauséjour)

En plus du groupe de travailleurs environnementaux, un tri informel des déchets s’effectue sur le site de traitement. Certains habitants viennent chercher des matériaux recyclables qu’ils pourraient revendre comme le papier, le métal ou les bouteilles de plastique.

Les ménages paient une contribution mensuelle de 10 000D (0,90$Can) par adulte par mois pour l’opération du système qui est maintenant entièrement géré par l’équipe locale. Le montant de la contribution a été déterminé selon la capacité de payer locale. Pour le comité organisateur, il était plus important de maintenir une contribution durable de tous les usagers, plutôt que de recouvrer à tout prix les coûts en capital du projet. Il a aussi été estimé que cette contribution des usagers parviendrait à couvrir les frais d’opération et maintenance de la collecte et du traitement.

6.5.2 Deux ans après l’instauration du projet de déchets solides  

En juin 2006, 90% des familles participaient toujours à la collecte sélective. Les habitants interviewés parlent de la fierté qu’ils ressentent à voir leur village et les rues plus propres. Le projet a coûté 35 000US$ au total. Les contributions des ménages sont collectées mensuellement par les employés du groupe environnemental. Ces contributions mensuelles (environ 20 millions de Dongs, équivalent de 1500$Can) parviennent à couvrir les salaires, et les coûts d’opération et d’entretien du site de compostage et de dépôt des déchets.

Le groupe environnemental espère commercialiser le compost produit en le vendant aux agriculteurs de la région. Depuis l’instauration du projet, ils ont amélioré le tri des déchets et le processus de compostage pour améliorer la qualité du produit. Ils ont aussi procédé à des essais de fertilisation sur des parcelles de culture de riz pour démontrer les propriétés fertilisantes du compost. En juin 2006, le groupe environnemental ne parvenait pas encore à vendre le compost dans la région.

Le projet a attiré l’attention des autorités de la province de Ha Tay et d’autres provinces. Des visites des autorités de plusieurs communes et districts voisins ont aussi été organisées à Lai Xà pour faire connaître le modèle communautaire de services environnementaux. Des représentants des autorités provinciales ont visité le village et les nouveaux équipements à quelques occasions, mais les plans de diffusion et d’application du modèle à d’autres communautés restent encore à se concrétiser. Par leurs bons résultats, cette ouverture et cette visibilité, les leaders du village espèrent que le gouvernement reconnaîtra leur travail et répondra positivement à leurs futures demandes de budgets.