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La robustesse étant un objet protéiforme, il existe de nombreux moyens de prendre en compte les préoccupations liées à la robustesse en ordonnancement. Deux principales approches se dégagent : celles définissant la robustesse comme la stabilité des solutions vis-à-vis des

perturbations, et celle s’intéressant au caractère flexible des ordonnancements pour faire face à l’incertitude et à l’instabilité. Au sein de cette approche, la flexibilité peut être envisagée de manière réactive ou proactive. Chacune de ces approches vont maintenant être discutées.

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3.2.1 La robustesse considérée au travers de la stabilité des solutions

Dans les études basées sur des ordonnancements dynamiques, la robustesse est souvent

considérée au travers de la notion de stabilité, c’est-à-dire que les ordonnancements sont

robustes si l’affectation des ressources sur les tâches n’est pas modifiée lors de la survenue d’une perturbation (Herroelen et Leus, 2005 ; Quaglietta et al., 2013).

Pour les auteurs qui considèrent cette forme de robustesse, les réordonnancements sont considérés comme des changements qui dégradent les ordonnancements et qui doivent être

évités (Davenport, Gefflot et Beck, 2001). La robustesse est alors évaluée en termes d’écarts,

quantitatifs ou qualitatifs, qui peuvent exister entre un ordonnancement initial et les

réordonnancements afin d’évaluer les coûts engendrés par ces derniers (Quaglietta et al., 2013; Vieira, Hermann et Lin, 2003).

Cette forme de robustesse est souvent obtenue, grâce à des algorithmes ou des heuristiques élaborés en dehors des situations de travail. Jorge Leon, David Wu et Storer (1994), dans le

domaine de l’ordonnancement manufacturier, ont élaboré un algorithme pour concevoir des

ordonnancements robustes, c’est-à-dire qui ne dépassent pas un temps de fabrication moyen.

Néanmoins, comme le soulignent ces auteurs, cet algorithme n’est valide que pour la survenue d’une seule contrainte. Les ordonnancements étant élaborés dans des environnements dynamiques, la prise en compte de la stabilité comme seul critère de robustesse des ordonnancements est réducteur, compte tenu du nombre important de perturbations qui peuvent survenir.

3.2.2 La robustesse assimilée à la flexibilité de l’ordonnancement

Pour dépasser la limite du nombre de perturbation à gérer, Jorge Leon, David Wu et Storer (1994) proposent de considérer les remplacements qui sont effectués pour gérer les

perturbations. Dans ce cas, l’intérêt ne porte plus sur l’existence ou non de changements dans

les plans de production mais de leur effet sur la performance, c’est-à-dire si ces modifications

permettent de faire face à l’incertitude et aux perturbations tout en assurant les objectifs fixés

(Ourari, 2011 ; Roy, 2002). La robustesse renvoie ici à la notion de flexibilité des ordonnancements, et est modélisée selon une approche réactive suivant laquelle le réordonnancement permet l'amélioration des plans de productions.

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El Akremi, Igalens et Vicens (2004), qui se sont intéressés à la conceptualisation du concept de

flexibilité au-delà du champ de l’ordonnancement, soulignent que de nombreuses définitions

apparentent flexibilité et adaptation en considérant une vision réactive face à l’incertitude. Dans cette logique, la robustesse devient la capacité à adapter les ordonnancements aux changements

qui surviennent pendant la phase de mise en œuvre des plans de production (Sanlaville, 2002).

Cette approche de la robustesse en temps réel constitue l’inverse de celle assimilant robustesse

et stabilité selon laquelle la robustesse est définie a priori.

La flexibilité peut concerner différentes variables des plans de production, telles que le temps,

les ordres et les ressources. Dans le domaine de l’ordonnancement du personnel, la flexibilité sur le temps découle des politiques de gestion du personnel ou de production. Dans le secteur de la vente, Michon-Lacaze (2016) met en évidence que pour faire face au retard des opérateurs, les managers peuvent demander aux employés présents de réaliser des heures supplémentaires

« inopinées ». De la même façon dans l’industrie, les ordres de fabrication peuvent être

modifiés pour gérer la panne d’une machine (Xiong et al., 2013).

Le plus souvent ces réordonnancements sont réalisés par les ordonnanceurs. Néanmoins cette

approche de la flexibilité est partielle car le caractère flexible des solutions n’est pas inné. Selon Abdelghany, Abdelghany et Ekollu (2008) dans le domaine aérien, des plans sont robustes si au moment de la perturbation, les contrôleurs aériens, considérés comme des ordonnanceurs,

ont la possibilité d’échanger les avions pour ne pas engendrer de retards. Les possibilités de réordonnancements dépendent des choix réalisés plus tôt dans la conception, ce qui conduit à prendre en compte une autre vision de la flexibilité dite proactive (Herroelen et Leus, 2005).

Une robustesse construite à partir de l’articulation entre la flexibilité réactive et proactive

La flexibilité nécessaire aux ordonnanceurs pour modifier en temps réel leurs décisions se construit au cours de la conception même des ordonnancements (Herroelen et Leus, 2005 ; Morales, 2006).

Dans la littérature, plusieurs manières d’introduire la flexibilité sont décrites (Sanlaville, 2002).

Un ordonnancement complet peut être conçu, à partir duquel des réordonnancements peuvent

être réalisés. Dans d’autres cas, des options libres peuvent être laissées plus longtemps pour obtenir davantage de possibilités d’action lorsque des perturbations surviennent. La flexibilité peut également être apportée en construisant plusieurs ordonnancements ou une famille

d’ordonnancement parmi lesquels les ordonnanceurs vont choisir le plus adapté en fonction des

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Jusqu’à présent, une seule forme de robustesse a été considérée, soit en termes de stabilité soit en termes de flexibilité, selon deux approches opposées. Actuellement, il n’y a pas de travaux

existants qui portent sur le caractère dual de la robustesse.