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La m´ecanique quantique repose essentiellement sur l’´etude du spectre d’op´erateurs hermitiens. En effet, l’un des postulats fondamentaux `a l’origine de la th´eorie quantique stipule que le spectre d’un op´erateur repr´esentant une observable fournit les quantit´es phy-siques mesurables du probl`eme. Dans la mesure o`u ces quantit´es telles que l’impulsion ou l’´energie d’une particule par exemple doivent ˆetre mesurables et donc r´eelles, l’op´erateur les repr´esentant est n´ecessairement hermitien. Si cette repr´esentation math´ematique fonc-tionne tr`es bien dans la plupart des cas physiques pr´esentant des ´etats li´es, cela complique consid´erablement le traitement de certains ph´enom`enes, en particulier les ph´enom`enes de diffusion.

3.2.1 Formule de Landau-Zener

Dans le chapitre 2, nous avons utilis´e l’approche hermitienne pour r´esoudre l’´equation de Schr¨odinger stationnaire et en d´eduire les ´etats propres du pi`ege dipolaire en pr´esence

d’une surface. Cependant, dans cette ´etude on a montr´e une similarit´e de comportement entre nos ´etats propres et les ´etats de Wannier-Stark repr´esentant une particule dans un potentiel p´eriodique augment´e d’un potentiel lin´eaire [44, 80]. Or, il a ´et´e d´emontr´e dans les ann´ees 30 que ce type d’´etats n’´etaient pas r´eellement des ´etats propres mais des ´etats m´etastables [83, 101] ayant un temps de vie fini. Cette instabilit´e est souvent interpr´et´ee comme un effet tunnel r´esonant entre les diff´erentes bandes d’´energie correspondant au probl`eme de Bloch.

En effet, un atome dans un puits donn´e a une probabilit´e non nulle d’effectuer une transition vers un ´etat de Wannier-Stark associ´e `a une bande de Bloch sup´erieure. Cette probabilit´e augmente avec l’indice de la bande jusqu’`a ce que l’atome ait une ´energie trop grande pour rester confin´e par le pi`ege. Il s’´echappe alors de celui-ci et son ´etat rejoint les ´etats du continuum. La d´etermination de la dur´ee de vie des ´etats de Wannier-Stark dans un pi`ege infini a ´et´e mod´elis´ee grˆace `a la formule dite de Landau-Zener [101–104]. Cette formule r´esulte de la solution analytique des ´equations r´egissant la dynamique de la tran-sition d’un syst`eme quantique `a deux niveaux dont l’Hamiltonien est tel que la s´eparation entre les deux niveaux varie lin´eairement avec le temps. Dans le cas d’une particule dans un potentiel p´eriodique plus un potentiel lin´eaire, les niveaux consid´er´es sont les niveaux de Wannier-Stark dont la s´eparation en ´energie est d´ependante du terme lin´eaire du po-tentiel [44].

Consid´erons un potentiel p´eriodique augment´e d’un potentiel lin´eaire de la forme

V (z) = U

2 (1− cos(2klz)) + F z (3.2.1)

kl ´etant la valeur du vecteur d’onde du pi`ege optique et F l’amplitude du terme lin´eaire. La probabilit´e de transiter `a travers le gap d’´energie de Bloch dans un tel potentiel peut alors s’exprimer sous la forme [105]

γ = dn= F e

αcF . (3.2.2)

Dans l’´equation (3.2.2), γ repr´esente le nombre de particules n qui passent au travers du gap ∆ par effet tunnel pendant un intervalle de temps dτ . Le terme αc = π∆K2 est l’ac-c´el´eration critique avec K = p2 correspondant au pi`eme gap. Cette formule permet donc d’estimer le temps de vie d’un ´etat de Wannier-Stark dans le potentiel (3.2.1) avant que la particule consid´er´ee ne passe dans un niveau d’´energie sup´erieure et ne sorte du pi`ege. Cependant, cette approche n’est valide que sous certaines conditions. En effet, pour ˆetre rigoureusement valable, l’´equation doit porter sur le syst`eme en entier c’est-`a-dire que sa description doit prendre en compte toutes les influences ext´erieures pouvant s’exercer sur le syst`eme `a deux niveaux tels que les ´eventuels champs ´electriques ou magn´etiques ou

encore les collisions. Ceci est extrˆemement difficile voir impossible `a r´ealiser. Dans leurs calculs, C. Zener [101] et L. Landau [102] ont donc introduit des approximations permet-tant de r´esoudre les ´equations analytiquement. En particulier, la s´eparation des niveaux d’´energie du syst`eme doit varier lin´eairement avec le temps.

Grˆace `a la sym´etrie du r´eseau, l’approche est parfaitement valable pour les ´etats de Wannier-Stark standards. En revanche, il n’est pas certain que ce soit toujours le cas pour les ´etats modifi´es par la pr´esence de la surface et encore moins si l’on prend en compte l’effet Casimir-Polder ou une ´eventuelle d´eviation `a la loi de la gravitation. Il convient donc de trouver une approche plus rigoureuse math´ematiquement permettant de calculer les ´etats m´etastables d’un syst`eme quantique quelconque. Ceci peut ˆetre r´ealis´e en s’inspirant des m´ethodes d´evelopp´ees dans le cadre de la th´eorie de la diffusion quantique.

3.2.2 L’approche diffusive

Les ´etats de Wannier-Stark ne sont pas `a proprement parler des ´etats li´es mais des r´esonances quantique inclues dans un continuum d’´etats [106]. Ce type d’´etat peut ˆetre rapproch´e des ´etats de diffusion in´elastique en m´ecanique quantique. En effet, lorsqu’on ´etudie le ph´enom`ene de diffusion, on regarde l’interaction entre une ”particule” et une ”cible” qui se traduit, dans le cas d’une diffusion in´elastique par un ´echange d’´energie entre ces deux objets. On peut alors distinguer trois cas de figure illustr´es sur la figure 3.1 : le premier correspond au pi´egeage de la particule dans le potentiel de la cible, le second correspond `a une diffusion directe o`u la particule passe `a proximit´e de la cible qui modifie sa trajectoire puis continue son chemin. Le troisi`eme cas enfin, et celui qui va nous int´eres-ser dans la suite correspond au cas o`u, en raison de multiples ph´enom`enes de diffusion, la particule est pi´eg´ee temporairement par la cible. On parle alors de r´esonance que l’on peut d´efinir comme un ´etat `a longue dur´ee de vie ayant suffisamment d’´energie pour se s´eparer en deux ou plusieurs sous-syst`emes [107]. Les r´esonances ainsi d´efinies sont caract´eris´ees par un spectre discret avec une ´energie fix´ee donnant la position de la r´esonance sur le spectre ´energ´etique et par une largeur de r´esonance Γ pouvant ˆetre reli´ee `a l’inverse du temps de vie de cet ´etat r´esonant.

La m´ethode classique pour ´etudier les r´esonances quantiques est donc logiquement de calculer la matrice de diffusion du probl`eme [108,109]. Plus particuli`erement, on cherche `a identifier les pˆoles complexes de cette matrice. En effet, consid´erons une particule diffus´ee sur une cible. Dans le cas de la diffusion standard, la particule est un paquet d’onde prove-nant de l’infini qui interagit avec le potentiel de la cible avant de repartir vers l’infini. La matrice de diffusion est alors une matrice r´eelle de passage mod´elisant la zone d’interaction entre la particule et la cible. En revanche, lorsqu’on a affaire `a une r´esonance, la particule

Figure 3.1 : Sch´ema des configurations de diffusions possibles. Le premier sch´ema correspond `

a la situation o`u la particule est pi´eg´ee dans le potentiel de la cible. Le second repr´esente une diffusion directe. Et le troisi`eme pr´esente le cas d’une r´esonance avec multi-diffusions (figure provenant de [107]).

va rester pi´eg´ee un certain temps dans le potentiel de la cible et ainsi former un nouveau syst`eme avec la cible. Ce nouveau syst`eme ayant un ´etat quasi-propre, ne correspond `a aucun paquet d’onde `a l’entr´ee de la zone de diffusion. On a donc un paquet d’onde sor-tant non nul correspondant `a un paquet d’onde entrant nul. La matrice de diffusion ´etant d´efinie comme le quotient de l’amplitude des ondes sortantes par celle des onde entrantes, la pr´esence d’une r´esonance se traduit par une division par 0 dans la matrice de diffusion c’est-`a-dire un pˆole.

En effet supposons que le potentiel de la cible soit un potentiel `a courte distance, de sorte que V → 0 lorsque la coordonn´ee spatiale r → ∞. Dans ce cas la solution de l’´equation de Schr¨odinger ind´ependante du temps lorsque r → ∞ peut s’´ecrire sous la forme

  

ϕ(r → ∞) = A(k)e−ikr+ B(k)eikr = A(k)e−ikr+ S(k, k)eikr

S(k, k) := B(kA(k)) (3.2.3)

A(k) et B(k) ´etant respectivement les amplitudes des ondes entrantes et sortantes et S(k, k) repr´esentant la matrice de diffusion. Lorsque A(k) → 0 l’onde entrante est nulle et la matrice S(k) pr´esente un pˆole. Si la partie imaginaire de ce pˆole est positive alors les ´etats qui lui sont associ´es sont des ´etats li´es et ne pr´esentent aucun int´erˆet pour la dynamique du processus de diffusion puisque leur temps de vie est infini. En revanche, si cette partie imaginaire est n´egative alors on peut associer ce pˆole `a un ph´enom`ene de r´esonance. Dans ce cas le syst`eme poss`ede une fonction d’onde dont l’´energie associ´ee est complexe et de la forme

En= ǫni

o`u ǫn repr´esente l’´energie de l’´etat et Γn est la largeur de la r´esonance. Γn est donc pro-portionnel `a l’inverse du temps de vie de l’´etat associ´e au niveau d’´energie En.

De nombreuses techniques ont ´et´e d´evelopp´ees pour calculer ces pˆoles soit en mod´e-lisant la diffusion compl`ete soit en s’int´eressant `a l’extraction des pˆoles dans le spectre directement (voir [110] pour une revue). Une des ces m´ethodes en particulier repose sur l’analyse des propri´et´es des op´erateurs en jeu dans la diffusion pour en d´eduire le spectre des r´esonances ainsi que les propri´et´es de celles-ci [111–114]. Nous allons donc d´evelopper cette m´ethode dans la suite.