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PARTIE II : QUELLES INTERRELATIONS ENTRE LES DIFFERENTS TYPES DE CONCEPTIONS DES

8.4. Catégories de croyances retenues et hypothèses quant à leurs relations

8.7.3. Les croyances des enseignants se coordonnent-elles en théories

L'analyse typologique a relevé trois configurations de l’ensemble des croyances, examinées dans cette recherche. D’après ces configurations, les enseignants combinent, de manière plus ou moins cohérente, certaines croyances. D’abord, en ce qui concerne les croyances relatives à l’intelligence, les enseignants manifestent des positions assez tranchées et cohérentes. En revanche, en ce qui concerne l'apprentissage, celui-ci est considéré davantage comme un processus complémentaire dans lequel certaines visions de l’apprentissage, plutôt incompatibles sur le plan théorique (conceptions béhavioriste/constructiviste), s’articulent sans vraiment s’opposer. C'est au même constat que nous avons abouti en ce qui concerne l'évaluation (cf. paragraphe précédent) et à l’égard de l’auto-efficacité : à l’intérieur de chaque cluster, les enseignants affichent des postures proches face aux deux fonctions évaluatives et aux deux dimensions de l’auto-efficacité. Ces résultats nous amènent à penser que les enseignants que nous avons interrogés semblent se distinguer entre eux d’après leurs théories de l’intelligence qui constituent des sortes d’îlots de rationalité autour desquels gravitent des idées plus ou moins complémentaires ou contradictoires à propos de l’apprentissage, de l’évaluation et de l’auto-efficacité. Dans ce sens, nos constats montrent le bien fondé du postulat de Hofer et Pintrich (1997) concernant l’organisation des croyances épistémiques en îlots de rationalité.

Nous avons trouvé des résultats semblables, c’est à dire des combinaisons de croyances pédagogiques générales, plus ou moins cohérentes, dans une autre recherche toute récente (Crahay et al., soumis). D’autres travaux, examinant cette fois-ci les typologies d’enseignants selon leurs structures des croyances pédagogiques disciplinaires (Van Driel &

Verloop, 1999, Van driel et al., 2007), rapportent également que les enseignants ont tendance à intégrer dans leur pédagogie personnelle des différents points de vue, souvent contradictoires. Les auteurs expliquent leurs résultats par ce qu’ils nomment des « paradigmes fonctionnels » en référence aux travaux de Lantz et Kass (1987) ; ceci consiste à dire que certains enseignants fusionnent délibérément différentes idées sur l’enseignement parce qu’ils les jugent utiles et adaptées à diverses situations. Pour Kagan (1992), l’une des raisons qui pousse les enseignants à intégrer différentes idées dans leurs pédagogies personnelles est la nécessité d’échapper à l’incertitude et le doute qui les animent lorsqu’ils se trouvent dans des situations pédagogiques complexes et contraignantes. Toujours selon Kagan (1992), les croyances des enseignants ne véhiculent pas seulement des théories scientifiques mais aussi des représentations de sens commun souvent inconscientes et implicites et pour les cerner il faudrait multiplier et combiner les approches méthodologiques (questionnaire, entretien, observation).

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Chapitre 9 : Quelles relations entre les différents types de conceptions des élèves : une approche centrée sur l’analyse des conceptions et des élèves?

9.1. Introduction et problématique

De nombreux modèles théoriques traitant la problématique de la motivation scolaire et de l’autorégulation des apprentissages ont été développés ces dernières années pour expliquer l’échec et la réussite des élèves (Bandura, 2003 ; Bokaerts, 1999 ; Dweck & Leggett, 1988 ; Dweck, 1999 ; Wigfield & Eccles, 2000 ; Weiner, 1976). Bien que différents, ces modèles ont pour point commun d’attribuer un poids important à une série de conceptions et interprétations que les élèves se font à propos de la tâche, de la situation et de l’environnement de la classe, de leurs expériences scolaires, ou de leurs aptitudes. Par exemple, un rôle important est attribué à différentes conceptions de nature dispositionnelle ou située, désignées comme des composantes motivationnelles (Bandura, 2003 ; Bourgeois, 2009

; Bouffard & Veseau, 2011 ; Dweck, 2010 ; Pelgrims, 2006, 2009): la perception de la nature des capacités intellectuelles (stable ou évolutive), des compétences (sentiment d’auto efficacité personnelle), des attributions des réussites et échecs, de la valeur de la tâche (utilité, intérêt, importance), des buts d’accomplissement (compétence, maîtrise ou évitement). Si la plupart des modèles s'entendent sur l'idée que les conceptions des élèves constituent l’un des aspects majeurs de la motivation scolaire, processus par ailleurs considéré comme une interaction complexe entre un ensemble de variables personnelles et contextuelles selon la majorité des théories motivationnelles contemporaines (Bandura, 2003 ; Bouffard, Mariné &

Chouinard, Volet & Jarvela, 2001), ils divergèrent sur la question de la contribution et la nature de l'interaction de certaines des conceptions évoquées plus haut. Pour certains, ce sont les conceptions que les élèves se font de capacités intellectuelles qui influencent, par l’intermédiaire des buts d’accomplissement, leur perception de leurs propres capacités et compétences, et au final, leur manière de s’investir dans les tâches et de réagir aux situations d’apprentissage (Dweck & Legget 1988). Pour d’autres, « l’activation de l’intention d’appendre » est surtout subordonnée aux caractéristiques de la situation didactique qui peuvent affecter l’appréciation des élèves de la tâche, de l’activité cognitive, de ses propres capacités de réaliser la tâche (Pelgrims, 2006, 2009). Ainsi, dans ce cas, un rôle majeur est attribué aux interactions des contraintes situationnelles et des conceptions des élèves, nommées « situées », autrement dit des conceptions relatives à une tâche donnée ou spécifiques à un domaine particulier (Bokearts, 1999). Par ailleurs, peu de modèles théoriques (Wigfield & Eccles, 1992 ; Wigfield & Eccles, 2000) intègrent l’étude de plusieurs conceptions, dispositionnelles (decontextualisées) et situées, et décrivent la nature conjointe de leur influence. Bien évidemment, notre objectif, ici, n’est pas d’offrir un examen exhaustif de toutes les théories de la motivation scolaire et de l’autorégulation des apprentissages. Notre propos consiste à rappeler la considération qui est donnée à un ensemble de croyances et interprétations des élèves car comme le précise et le démontre récemment Pelgrims (2006, 2009), l’intention des élèves de s’engager ou désengager dans l’activité cognitive et dans les tâches dépend, d’un ensemble de conceptions qui « …contribuent à la formation d’un scénario plus ou moins favorable à l’apprentissage dans une discipline ou tâche donnée » (2006, p.41).

170 Du côté de la recherche, un certain nombre d’investigations tendent à confirmer le pouvoir explicatif de certaines conceptions, dispositionnelles ou situées, telles que les conceptions de l’intelligence, les buts d'accomplissement, le sentiment d’auto-efficacité, l’utilité, l’intérêt de la tâche (Bandura, 2003 ; Blackwell, Trzeniewski & Dweck, 2007;

Bokearts, 1999, Bouffard-Bouchard, 2006 ; Berger, 2012 ; Dupeyrat et Mariné, 2005 ; Dweck, 1999 ; Dweck & Molden, 2005 ; Dweck & Master, 2008 ; Hong et al., 1999 ; Nussbaum & Dweck, 2008 ; Ommundsen, 2003 ; Pelgrims, 2006). Néanmoins, les investigations tentant d’explorer l’impact conjoint et le poids de certaines conceptions ou encore leurs articulations, restent actuellement rares. Par exemple, les interactions des paramètres motivationnels, souvent évoquées dans la littérature comme étant le pivot de la réussite scolaire, tels que les conceptions que les élèves se font des capacités intellectuelles (Dweck, 1999, 2010) et leurs sentiments d’auto-efficacité (Bandura, 2003), ne sont, à notre connaissance, que très peu explorées. Leur rôle est étayé par de nombreuses recherches mais souvent de manière isolée ou en liens avec d’autres variables, principalement les stratégies d’apprentissage et d’autorégulation (Blackwell, Trzeniewski & Dweck, 2007; Bouffard-Bouchard, 2006 ; Dupeyrat et Mariné, 2005 ; Dweck, 1999 ; Dweck & Molden, 2005 ; Dweck

& Master, 2008 ; Hong et al., 1999 ; Elliot, McGregor & Gable, 1999 ; Nussbaum & Dweck, 2008 ; Ommundsen, 2003). Pourtant, cette perspective semble prometteuse puisque la recherche récente de Chen et Pajares (2010), menée aux Etats-Unis, a mis en évidence que ces deux construits interagissent et affectent les performances scolaires. Plus exactement, les résultats dévoilent que les conceptions qu’ont les élèves du secondaire du caractère des capacités intellectuelles, influencent de manière indirecte leurs sentiment d'auto-efficacité et compétences d'autorégulation en science, par le biais notamment des croyances épistémiques : les élèves ayant une conception fixiste de l'intelligence pensent que les connaissances sont absolues et immuables, ce qui affectent de manière négative leur sentiment d'auto-efficacité ; quant aux élèves ayant une conception évolutive de l'intelligence, ils considèrent que les connaissances doivent être justifiées et démontrées et ceci influence positivement leur sentiment d'auto-efficacité et compétences d'autorégulation. Par ailleurs, une autre recherche récente, réalisée toujours auprès des élèves du secondaire, mais au Taiwan cette fois-ci, montre que le sentiment d’efficacité est influencé également par un autre paramètre affectant la qualité des apprentissages scolaires : les conceptions de l’apprentissage (Chan, 2011). Une conception de type « behavioriste » a un impact négatif sur la compétence perçue en science alors qu’une conception de type constructiviste affecte positivement celle-ci. A la lecture de ces résultats, deux interrogations générales peuvent se dégager :

1. Existe-t-il une interaction entre les conceptions que les élèves se font des capacités, et de l’apprentissage et si oui, quelle est la nature de cette interaction ?

2. Comment ces deux types de conceptions infléchissent-elles le sentiment d’efficacité des élèves ? Et, plus précisément, quel est le poids respectif de chacune de ces deux conceptions sur le sentiment d’efficacité ?

Pour répondre à ces questions, nous allons d’abord présenter la théorie et les études qui nous permettent concrètement de formuler nos hypothèses.

9.2. Le modèle de Dweck et de Legget : apports, limites et nouvelles perspectives

La théorie sociocognitive de Dweck et de Legget (1988) de la motivation et de la personnalité constitue l’une des premières études qui tente d’expliquer le comportement scolaire et plus généralement le comportement humain en se basant sur les construits suivants : les conceptions de l’intelligence, la perception de l’erreur, de l’effort, les buts

171 d’accomplissement, l’auto-perception des capacités. Au départ, Dweck et de Legget (1988) ont développé leur théorie pour répondre à un questionnement crucial : pourquoi les élèves ayant les mêmes capacités ou performances scolaires n'adoptent pas toujours un comportement d'adaptation et interprètent de manière différentes leurs réussites et échecs scolaires ou plus précisément pourquoi, certains, relèvent des défis, affrontent sans crainte les tâches difficiles et les obstacles alors que d'autres les évitent ? En se fondant sur une série de données empiriques de nature principalement expérimentale (Diener & Dweck, 1978 1980, Dweck, 1975 ; Dweck & Reppucci, 1973, cités par Dweck et Legget, 1988), le comportement d’adaptation ou d’inadaptation des élèves a été expliqué par l'adoption de deux types de buts d’accomplissement (de performance versus apprentissage) à l'origine desquels il y a deux manières différentes d’interpréter l’intelligence, autrement dit deux théories implicites de l'intelligence. Les élèves qui penchent vers la théorie de l’entité de l’intelligence, pensent que l’intelligence est un trait global, fixe et incontrôlable. Ils se préoccupent par conséquent de la démonstration de leurs performances, ce qui les amène à avoir une plus faible perception de leurs capacités actuelles, à éviter les erreurs, vues comme signe d’incompétence, et à privilégier les tâches faciles. Ces élèves sont aussi plus sensibles aux jugements négatifs. Les élèves, en revanche, qui adhèrent à la théorie incrémentielle de l’intelligence, autrement dit, estiment que celle-ci évolue et est contrôlable par les efforts, sont soucieux de développer leurs connaissances et d'apprendre, perçoivent positivement leurs capacités actuelles, ainsi que les erreurs et ne craignent pas les jugements négatifs et les défis à relever (voir tableau 1).

Tableau 1 – Modèle causal de Dweck et Legget

Théories implicites

de l’intelligence Objectifs poursuivis

Perceptions de ses propres capacités

actuelles

Comportements d’adaptation

Comportements d’adaptation