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PARTIE I : EXPLORATION DES CONCEPTIONS DES ENSEIGNANTS ET DES ELEVES

5.3. Hypothèses

5.4.3. Instruments

Nous avons appréhendé les conceptions des élèves à l’aide d’un questionnaire qui comportait 22 énoncés leur permettant d’exprimer leur degré d’accord avec différentes propositions concernant l’apprentissage sur une échelle en 4 point allant de 1 (pas du tout d’accord) à 4 (tout à fait d’accord). Nous avons choisi une échelle en quatre points afin de diminuer la possibilité de se réfugier dans une position centrale et neutre (Offer, Ostrov &

Howard, 1981). Par conséquent, lorsque la moyenne relative à un item est inférieure à 2, cela signifie que les élèves se sont exprimés en moyenne contre la proposition correspondante; à l’opposé, lorsque la moyenne est supérieure à 2, cela signifie que les élèves se sont exprimés en moyenne en faveur de la proposition correspondante.

92 Le questionnaire comportait également une partie complémentaire permettant de recueillir des informations relatives à l’appartenance sociale (métiers du père ainsi que de la mère). Nous avons utilisé ces informations pour créer un indicateur pour l'appartenance socio-économique. Sur la base des réponses des élèves et tenant compte de la classification de l'INSEE de France des catégories socioprofessionnelles, nous avons affilié chaque élève à l'une des catégories suivantes : "autre" (sans profession et au chômage) ; ouvrier ; employé ; profession intermédiaire ; cadre supérieur ; agriculteur.

Nous avons également soumis un questionnaire aux enseignants de chaque classe visant à estimer leur jugement scolaire sur chaque élève sur une échelle allant de 1 (très faible) à 4 (très bon). A partir de leurs réponses, nous avons créé un indicateur de jugement scolaire correspondant à une échelle de 1 à 4 (1 correspondant à un niveau "très faible" ; 2 à un niveau "faible" ; 3 à un "bon" niveau et 4 à un "très bon" niveau).

Pour formuler les 22 énoncés du questionnaire adressé aux élèves, nous nous sommes inspirés des résultats et de la catégorisation mis en évidence dans les travaux antérieurs (Dweck & Legget, 1988 ; Lee et al., 2008 ; Marton et al, 1993 ; Tsai et al., 2011) qui reflètent les principales théories de l’apprentissage (behavioriste, constructiviste, cognitiviste) mais aussi des résultats d’une recherche qualitative portant sur les perceptions des difficultés d’apprentissage en lecture (Marcoux & Crahay, 2008). Ces items se répartissent dans cinq dimensions. Chacune des dimensions renvoie à une vision de l’apprentissage ou manière de percevoir l’erreur :

1. La dimension « apprentissage par répétition » se compose de 4 items qui renvoient à la mémorisation et la reproduction dans l’apprentissage ;

2. La dimension « apprentissage par compréhension » se compose aussi de 4 items qui permettent de cerner le positionnement des élèves face à cette notion ;

3. La dimension « apprentissage implicite » comporte 4 items qui s’articulent autour de l’idée que l’apprentissage peut être perçu comme un processus non intentionnel, découlant de l’expérience de l’élève sans qu’il y ait des efforts réels de sa part en vue de création du sens (Logan, 1988 ; Seger, 1994).

4. La dimension « rôle de l’erreur » comporte 4 items qui permettent de voir le rôle que les élèves attribuent à l’erreur dans les apprentissages : constructif ou négatif.

5. La dimension « déclic » a émergé suite à l’analyse des discours des enseignants dans le cadre d’une recherche lorsqu’ils évoquent les difficultés en lecture et avancent en l’idée que l’apprentissage peut se produire de manière brusque et soudaine (Marcoux

& Crahay, 2008).

5.5. Résultats

Afin d'identifier les conceptions des élèves en matière d’apprentissage et vérifier notamment les hypothèses H1, H2 et H3, nous avons réalisé des analyses factorielles exploratoires et confirmatoires.

Pour mettre en évidence les différences interindividuelles et profils d’élèves selon leurs postures face à l’apprentissage (H4) nous avons recouru à des analyses en cluster. Et pour évaluer les effets du jugement scolaire et de l’appartenance sociale, nous avons effectué des analyses de variance (H5).

93 5.5.1. Identification de la structure des conceptions de l’apprentissage

Nous avons réalisé une série d’analyses préliminaires (valeurs d’asymétrie et d’aplatissement, corrélations inter-items) pour savoir si les données présagent un modèle pertinent. Les résultats ont révélé que les distributions de la majorité des items présentent de faibles écarts par rapport à la normalité, ce qui nous a permis de recourir à l’analyse factorielle exploratoire en utilisant la méthode de maximum de vraisemblance (voir annexe 1).

Il importe de souligner que l’énoncé « pour apprendre, il faut comprendre » se caractérise par une moyenne très élevée (3,75) et une distribution en J : plus de 85 % des élèves ont affiché un accord massif à son égard. Vu son indice d’asymétrie de -2,39, nous l’avons exclu des analyses factorielles qui ont donc porté sur un total de 21 items. Cependant, au moment de discuter des conceptions de l’apprentissage qu’ont les élèves français de 10-11 ans, il ne s’agira pas d’oublier que quasiment tous considèrent que compréhension et apprentissage sont liés.

Les indices du test de sphéricité de Bartlett (0,61) et de Kaiser, Meyer et Olkin (χ2 (55) = 2796,63, p < 0,001) ont également montré que les données sont suffisamment cohérentes pour se prêter à l’analyse factorielle. Nous avons donc conduit des analyses successives en ne retenant que les items ayant des indices de saturations supérieures à 0,30.

Les 10 items qui ne se retrouvent pas dans la structure finale sont les suivants :

 les items 1, 9 et 12 qui renvoient à la notion de mémorisation et répétition ;

 les items 5 et 8 véhiculant l’idée du rôle de l’expérience de l’élève

 les items 13 et 20 renvoyant à la place positive et négative de l’erreur

 les items 14 et 18 se rapportant à la dimension « compréhension »

 l’item 21 se rapportant à la dimension « déclic ». Cet item comporte une double négation ce qui explique probablement une difficulté de compréhension par les élèves qui affichent par ailleurs un désaccord massif (vu la moyenne obtenue de 1,22).

Au final, l’analyse a abouti à une structure en cinq facteurs, comportant 11 items, ayant un poids factoriel élevé. Celle-ci explique au total 55,76 % de la variance totale (tableau 1). Sur le plan de l’homogénéité des facteurs, l’analyse montre que les facteurs ont une bonne consistance interne, sauf le dernier. Les trois premiers facteurs contribuent à expliquer des parts plus importantes de la variance observée : respectivement 17,9 %, 12,38 % et 10, 59%.

Quant aux deux derniers facteurs qui suivent, il leur revient respectivement 7,34 %, et 7,56

% de la variance.

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Tableau 1 : Analyse factorielle et fiabilité des conceptions de l’apprentissage chez les élèves Méthode d'extraction des facteurs : Maximum de

vraisemblance.

Méthode de rotation : Promax avec normalisation de Kaiser.

Facteur

1 2 3 4 5

4. Certains élèves ne comprennent pas tout de suite, mais le déclic peut arriver plus tard.

,860

16. Lorsqu'on apprend de nouvelles choses, il arrive un moment où il y a un déclic.

,782

22. Au début, certains élèves n'arrivent pas à comprendre une nouvelle chose. Puis d'un coup ils comprennent.

,772

10. Quand on apprend quelque chose on ne peut pas le comprendre du premier coup.

,901

11. Lorsqu'on apprend quelque chose de nouveau, on commence toujours par faire des erreurs.

,694

19. Pour résoudre des problèmes, il ne faut pas nécessairement avoir tout compris des explications de l'enseignant.

,801

17. On peut réussir des exercices sans avoir compris les règles.

,709

7. Lorsqu'on on fait des erreurs, on risque de recommencer.

,685

3. L'erreur nous empêche d'apprendre ,622

2. Apprendre par coeur ne sert à rien lorsqu'on a bien compris

,819

15. Pour apprendre, il faut souvent répéter les mêmes choses. supérieures à 3,00) et renvoie donc à l’idée que l’apprentissage est perçu comme un processus qui se produit soudainement, par insight en quelque sorte. Le facteur 2, quant à lui, regroupe deux items appartenant initialement à deux dimensions différentes, à savoir la

« compréhension » et le « rôle de l’erreur». Ces deux items ont une moyenne élevée (respectivement….). On peut dire que ce facteur 2 véhicule l’idée qu’on ne peut pas comprendre toute de suite (item 10) et, partant, qu’en début de cheminement, on commence par faire des erreurs (item 11). L’erreur est donc vue comme une étape nécessaire à franchir pour aboutir à la compréhension. Nous parlerons d’apprentissage par compréhension et de rôle positif de l’erreur. Le facteur 3 se compose aussi de deux items (ayant des moyennes inférieures à 2,50), lesquels véhiculent l’idée qu’il est possible d’apprendre sans compréhension, donc qu’il peut y avoir « apprentissage implicite ». Le facteur 4 regroupe 2 items attribuant un rôle négatif à l’erreur et renvoie donc à l’idée que l’erreur est inutile.

Enfin, le facteur 5 réunit deux items qui traitent de la répétition et de la compréhension. Ces

95 deux items sont en opposition : d’un côté l’apprentissage par cœur ne sert à rien dès lors que l’on a compris (item 2) et, à l’opposé, l’idée qu’il est important de répéter pour apprendre (item 15, dont la saturation est faible). Nous interpréterons ce facteur comme opposant la compréhension et la répétition.

On notera que cette structure factorielle est fort proche de ce que supposait l’hypothèse 1. On retrouve en tous cas tel quel un facteur correspondant à l’apprentissage par déclic et un autre correspondant à l’apprentissage implicite. Deux conceptions de l’erreur se dégagent également. Cependant, l’analyse factorielle ne dégage pas un facteur propre à l’apprentissage par compréhension, ni un relatif à la répétition. La compréhension est soit associée au rôle constructif de l’erreur (facteur 2), soit opposé à la répétition (facteur 5).

Nous avons examiné les corrélations entre les facteurs pour savoir dans quelle mesure ils sont liés et comment ils sont liés (tableau 2). Les résultats révèlent que certaines associations entre les facteurs, bien que significatives (négatives et positives) sont, d’une très faible ampleur.

Tableau 2 : corrélation des facteurs des conceptions de l’apprentissage chez les élèves

Corrélations entre les facteurs 1 2 3 4

1 –Déclic

2 – Rôle positif de l’erreur .087**

3 –Apprentissage implicite -.022 .056

4 – Rôle négatif de l’erreur -.004 .186** .137**

5- Compréhension/Répétition -.116** -.097** .087** .021

**. La corrélation est significative au niveau 0.01 (bilatéral).

Assez bizarrement, les facteurs 2 et 4 sont corrélés positivement alors qu’ils accordent un rôle opposé à l’erreur ; ceci va à l’encontre de la seconde partie de l’hypothèse 2. Quant à l’hypothèse 3, il semble également difficile de la retenir telle quelle. Selon cette hypothèse, la conception constructive de l’erreur serait associée à l’apprentissage par compréhension. Ces deux idées se retrouvent associées au sein du facteur 2. Par ailleurs, les facteurs 2 et 5 sont corrélés négativement. Les conceptions des élèves en ce qui concerne l’apprentissage sont moins nettes que ce que nous avions supposé.

5.5.2. Validation de la structure des conceptions de l'apprentissage La structure factorielle que nous venons d'identifier a été soumise à un analyse factorielle confirmatoire. Celle-ci a été fondée sur l'analyse des saturations standardisées des paramètres et interprétée au regard de trois indices d'ajustement (Chi2 [χ2], CFI et RMSEA).

Les indices d’ajustement sont très bons (Chi-square (dl =47) = 93,92 ; RMSEA =0,04 et le CFI de 0,97) ce qui signifie que le modèle est acceptable. L’analyse confirmatoire permet également d'observer que les corrélations entre les facteurs restent faibles, variant ainsi entre -0,12 et +0, 13. Cette observation nous incite à conclure que les conceptions sont faiblement liées entre elles.

96 5.5.3. Identification de profils d’élèves eu égard à leurs conceptions de l’apprentissage

L'hypothèse 4 repose sur l’idée qu’il est possible de dégager différents profils de conceptions selon la plus ou moins grande focalisation sur la compréhension et le rôle constructif de l’erreur. De cette hypothèse forte, on peut tirer une hypothèse faible selon laquelle il existerait des profils de conceptions. C’est celle-là que nous allons tester avant de décider s’il est possible de prendre en considération l’hypothèse forte. Pour ce faire, nous avons effectué des analyses en cluster en combinant deux méthodes complémentaires (analyse hiérarchique et de K-moyenne) afin de mieux mettre en évidence des profils contrastés. Ces analyses nous ont permis de distinguer trois groupes d’élèves.

Si on observe les scores des trois groupes pour les différents facteurs sur la figure 1, on peut constater que le groupe majoritaire, composé de 458 élèves, affichent des scores élevés pour les facteurs "déclic", "on apprend par compréhension et l'erreur est positive" et bas pour le facteur compréhension/répétition. Il semble donc que les élèves de ce groupe adhérent fortement à l'apprentissage par déclic, tout en accordant une place constructive à l'erreur et à la compréhension. Ces élèves n’entrent pas en matière en ce qui concerne l’opposition compréhension-répétition.

Le deuxième cluster trace un profil de conceptions opposé au premier: score bas au facteur “déclic” et élevé pour le facteur compréhension/répétition. Autrement dit les 336 élèves de ce cluster rejette l’idée de l’apprentissage par déclic et attribue une grande importance à la compréhension versus la répétition. Etonnament, ce groupe est également favorable à l'apprentissage implicite. Il se positionne également de façon favorable par rapport aux deux facteurs “erreur”. Ainsi, ces élèves semblent accorder un double statut à l’erreur: à la fois constructive et négative.

Quant au troisième cluster, composé de 307 élèves, il dessine un profil selon lequel les 307 élèves le composant se positionnent de manière tiède à par rapport à deux facteurs:

l’apprentissage par déclic et celui opposant compréhension et répétition. Ils sont plutôt défavorables à l’apprentissage implicite et rejettent l’idée de l’inutilité de l’erreur, tout en étant encore plus opposés à l’idée que l’on apprend en comprenant et en se trompant (facteur 2). Bref, ces élèves rejettent à peu près toutes les conceptions de l’apprentissage qui leur ont été présentées. Concernant l’erreur, ces élèves ne lui accordent pas de place, ni positive, ni négative.

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-1,20 -1,00 -,80 -,60 -,40 -,20 ,00 ,20 ,40 ,60 ,80 1,00

cluster A (n=458) ,53 ,50 ,06 ,11 -,45

cluster B (n=336) -,72 ,29 ,22 ,27 ,53

cluster C (n=307) -,01 -1,07 -,33 -,45 ,09

FAC1_déclic FAC2_erreur_positive FAC3_App_implicite FAC4_erreur_négative FAC5_répétition

Figure 1 : profils d'élèves

Les résultats issus de l'analyse en cluster montrent clairement qu'il existe des différences interindividuelles dans la manière de se positionner à l'égard de l'apprentissage ainsi que de l'erreur. Ce résultat confirme donc partiellement l'hypothèse 4. Partiellement seulement car, s’il se confirme que les élèves ont tendance à combiner différentes conceptions à propos de l'apprentissage, les articulations ne paraissent guère cohérentes. Il est ainsi étonnant d’observer des élèves qui, dans le cluster 2, associent deux conceptions opposées de l’erreur. Quant aux élèves regroupés dans le troisième cluster, ils semblent ne pas adhérer à l'ensemble des propositions du questionnaire.

5.5.4. Quel est l'impact du jugement scolaire et de l'appartenance sociale sur les conceptions de l'apprentissage ?

L'analyse de variance que nous avons réalisée permet d'observer quelques différences entre les groupes d'élèves de statut scolaire différents pour trois des cinq facteurs : l'apprentissage implicite, le rôle négatif de l'erreur et le facteur opposant la conception constructiviste et reproductive. Globalement, comme on peut le constater à la lecture du tableau 3, les élèves "faibles", voire "très faibles" pensent davantage qu'on peut apprendre de manière non-intentionnelle, que la répétition est importante et qu'il faut éviter de faire des erreurs.

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Tableau 3 : effet du jugement scolaire sur les conceptions de l’apprentissage

Jugement scolaire F η2

3 –Apprentissage implicite 0,14 (0,88) 0,21 (0,86)b -0,05 (0,79)c

5-Compréhension/Répétition -0,05 (0,88) -0,15 (0,86)b

* pour chaque facteur, les moyennes avec des indices différents indiquent une différence significative à p<0,05 (test de Tukey)

En ce qui concerne l’appartenance sociale, des différences significatives apparaissent également. Les élèves d'origine sociale défavorisée (catégories "ouvriers", "employés") semblent attribuer à l'erreur à la fois une place constructive et négative, contrairement aux élèves d'origine favorisée (« cadre supérieur ») pour qui l'erreur paraît plutôt inacceptable. La répétition semble également plus importante pour les élèves d'origine sociale défavorisée que pour les élèves d'origine favorisée (voir le tableau 4).

Ces résultats confortent l'H5. Conforment aux résultats des travaux antérieurs (Lee, Johanson & Tsai, 2008 ; Tsai, 2004), les élèves moins performants et d'origine sociale défavorisée semblent plus attachés à l'apprentissage par répétition et se réalisant implicitement.

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Tableau 4 : effet de la catégorie socioprofessionnelle du père sur les conceptions de l'apprentissage

Catégorie socioprofessionnelle du père F η2

Autre

* pour chaque facteur, les moyennes avec des indices différents indiquent une différence significative à p<0,05 (test de Tukey)

5.6. Discussion et conclusion

Dans cette recherche nous nous sommes centrées sur l’étude de la structuration des conceptions de l’apprentissage chez les élèves en fin du primaire. L'examen de la littérature a montré que cette question a peu été investiguée de manière approfondie. Une autre problématique a également reçu peu d'intérêt constant à ce jour. Il s'agit de savoir si tous les élèves partagent les mêmes conceptions. C’est à ces deux questions principales que notre recherche a tenté de répondre en formulant une série de d'hypothèses et en prenant ancrage dans les travaux antérieurs et diverses théories de l'apprentissage.

Les analyses ont permis de confirmer globalement notre première hypothèse.

Conformément à celle-ci, la majorité des élèves en fin de primaire sont capables de concevoir la pluralité de l'apprentissage. De ce point de vue, notre recherche s’éloigne des recherches de Lee, Johanson et Tsai (2008) et Tsai (2001) qui avaient constaté que les jeunes élèves peuvent concevoir l’apprentissage seulement selon l’opposition reproduction/construction. Le questionnaire que nous avons élaboré et soumis à plus de mille élèves a permis de mettre en évidence diverses conceptions de l'apprentissage plutôt cohérentes du point de vue de leur contenu : apprentissage par déclic, apprentissage implicite, apprentissage par compréhension et par erreur, inutilité de l’erreur, compréhension opposée à la répétition.

100 Contrairement à ce que suggèrent certains travaux (Marton et al, 1993, Tzai, 2004 ; Sajo, 1979), nous n'avons observé ni des oppositions ni des liens forts entre la plupart des conceptions, hormis celle observée au sein du facteur opposant la compréhension à la répétition. De ce point de vue, nos résultats nous rapprochent de la position de Schommer (1990) qui soutient que les conceptions des élèves forment des entités plus ou moins indépendantes.

Rappelons cependant que ces interprétations doivent être considérées avec précaution puisque la structure des conceptions mise en évidence présente quatre facteurs sur cinq comportant seulement deux items. En revanche, il faut noter que les items composant ces facteurs ont des poids factoriels importants et que la structure d’ensemble a été validée par une analyse confirmatoire. Dans de futures investigations, il faudra porter attention à l'amélioration de la formulation de certains énoncés et ajouter de nouveaux items afin de consolider les structures.

Un autre résultat intéressant qui mérite d'être souligné concerne le lien entre le jugement scolaire de l’enseignant et la manière dont les élèves considèrent l’apprentissage (H5) : comme supposé, les élèves jugés faibles scolairement par leur enseignant adhèrent davantage à la reproduction des connaissances que les «bons » élèves qui semblent plus soucieux de comprendre et de s’investir activement dans les apprentissages. C’est au même constat qu’avaient abouti les recherches menées par Lee, Johanson et Tsai (2008) et par Tsai (2004) dans des contextes culturels différents (en Chine, Taiwan). Par ailleurs, une autre observation nous paraît importante à faire en ce qui concerne la perception de l’erreur.

Comme nous l’avons constaté, il s’est avéré que les élèves faibles ont une vision négative de l’erreur. Pour ces élèves, l’erreur est probablement révélatrice de leurs difficultés qu’ils attribuent à des causes internes, à savoir leurs capacités intellectuelles comme cela a été avancé par Dweck et Legget (1988). Pour confirmer ou infirmer cette hypothèse, d’autres études sont évidemment nécessaires.

Nos analyses ont également permis de confirmer l’existence de différences interindividuelles sur le plan des conceptions et ceci en conformité avec la première partie de notre hypothèse 4. Plus précisément, nous avons pu dégager trois possibilités de les combiner, mais les trois profils mis en évidence par l’analyse par cluster présentent des incohérences Ainsi, pour un groupe majoritaire d’élèves, l’apprentissage se fait par déclic. Cette conception s’accompagne d’une posture très favorable à l’égard d’un cheminement compréhensif émaillé d’erreurs dont le rôle serait favorable à l’apprentissage ; ce qui, sur le plan théorique, ne va pas de soi. Autre étonnement : les élèves du deuxième profil sont à la fois d’accord avec l’idée que l’erreur peut être constructive et avec celle considérant que l’erreur est inutile, voire empêche de progresser. Enfin, le troisième groupe d’élèves n’adhère de façon nette à aucune de conceptions dégagées par l’analyse factorielle. Ces incohérences peuvent peut-être s’expliquer par l’âge des élèves interrogés. Rappelons que Lee, Johanson et Tsai (2008) et Tsai (2001) concluent de leurs recherches que les jeunes élèves ont une conception limitée de l’apprentissage, se réduisant à l’opposition reproduction versus construction. Nos résultats semblent indiquer que les élèves français de 10-11 ans ont des conceptions diversifiées de l’apprentissage, sans que celles-ci soient déjà articulées de façon cohérente. Ainsi, il semble que la notion d’erreur renvoie, pour les élèves interrogés, à divers aspects qui sortent du

Nos analyses ont également permis de confirmer l’existence de différences interindividuelles sur le plan des conceptions et ceci en conformité avec la première partie de notre hypothèse 4. Plus précisément, nous avons pu dégager trois possibilités de les combiner, mais les trois profils mis en évidence par l’analyse par cluster présentent des incohérences Ainsi, pour un groupe majoritaire d’élèves, l’apprentissage se fait par déclic. Cette conception s’accompagne d’une posture très favorable à l’égard d’un cheminement compréhensif émaillé d’erreurs dont le rôle serait favorable à l’apprentissage ; ce qui, sur le plan théorique, ne va pas de soi. Autre étonnement : les élèves du deuxième profil sont à la fois d’accord avec l’idée que l’erreur peut être constructive et avec celle considérant que l’erreur est inutile, voire empêche de progresser. Enfin, le troisième groupe d’élèves n’adhère de façon nette à aucune de conceptions dégagées par l’analyse factorielle. Ces incohérences peuvent peut-être s’expliquer par l’âge des élèves interrogés. Rappelons que Lee, Johanson et Tsai (2008) et Tsai (2001) concluent de leurs recherches que les jeunes élèves ont une conception limitée de l’apprentissage, se réduisant à l’opposition reproduction versus construction. Nos résultats semblent indiquer que les élèves français de 10-11 ans ont des conceptions diversifiées de l’apprentissage, sans que celles-ci soient déjà articulées de façon cohérente. Ainsi, il semble que la notion d’erreur renvoie, pour les élèves interrogés, à divers aspects qui sortent du