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1916 1917 1918 1919 1920 Contrôle des

5.3. Fonctionnement des institutions politiques

5.4.3 Les cimetières

Un autre problème qui se pose est celui de la place dans les cimetières. La plupart des communes disposent de vieux cimetières qui, au moment de l’épidémie, se montrent subitement trop étroits. Pour beaucoup de villes et villages, cette question est vite devenue une priorité.

A St-Pierre-de-Clages, les paroissiens s’insurgent : « Mais le cimetière ! Quelques dizaines de mètres carrés pour une population de 200 habitants ! On y creuse les fosses sur tous les petits sentiers et dans les derniers recoins, sans alignement possible. On est même obligé d’effondrer des tombes de personnes ensevelies il y a quelques années à peine. Or en ces 334 ACS HP 3/9, lettre de la CSP au Rd chanoine Jean, curé de la ville de Sion, 13 octobre 1918.

335

AEV, Procès-verbal des séances du Conseil communal de Sion, A1-5 : 1912-juin 1919, séance du 25 octobre 1918, p. 439.

336 ACS, Procès-verbal des séances du Conseil communal de Sion, A 1-5 : 1912-juin 1919, séance du 11 septembre 1918, pp. 427-432.

337

ACS, 5710-1, 105, Protocole des séances des médecins de district 1922-1929, séance du 17 juin 1926.

temps d’épidémie, les ensevelissements se succèdent de près. Au nom de la décence des sépultures et surtout de la salubrité publique, nous réclamons une dernière fois que l’on procède immédiatement à l’agrandissement du cimetière existant. » 338

L’agrandissement ne sera pas immédiat, car on retrouve le sujet dans le procès-verbal de la commune de Chamoson à l’ordre du jour de la séance du 12 février 1920 : « La Commission de Salubrité publique est chargée de faire les démarches en vue de l’agrandissement ou de la construction d’un nouveau cimetière à St-Pierre-de-Clages.» 339 Les expropriations ne débuteront pas avant juillet 1920.

Un autre exemple est donné par la commune de Miège qui attend son cimetière depuis février 1905. En 1918, la situation devient critique et un cimetière doit être construit d’urgence340.

Illustration 76 : Lettre de la commune de Miège au DI, AEV, 5710-2 : 839, Salubrité publique : Miège (1919-1958).

338 Le Confédéré, 30 octobre 1918.

339 AEV, fonds des communes, commune de Chamoson, R21, procès-verbaux du Conseil communal 1913-1918. Séance du 12 février 1920, p. 60.

340

AEV, salubrité publique, SP 5710-2 : 839, lettre de la commune de Miège au Département de l’Intérieur.

Le cimetière de Leytron manque lui aussi de place. Dans une lettre adressée au Département de l’intérieur, on peut lire :

« Nous avons l’honneur de vous informer qu’en séance d’aujourd’hui le Conseil communal de Leytron a décidé de créer un nouveau cimetière. Il nous est impossible de tolérer plus longtemps les ensevelissements dans celui actuel. Faute de place les fosses sont creusées dans les allées. Nous vous prions de bien vouloir faire décréter d’urgence d’utilité publique l’expropriation du terrain nécessaire pour la construction d’un nouveau cimetière.» 341

Cette question sera également mise à l’ordre du jour à Sion, lors de la séance du conseil communal du 28 février 1920342.

Illustration 77 : Cimetière en hiver, val d’Hérens, env. 1920, (Pantaléon Binder, Médiathèque Valais – Martigny)

L’exemple des cimetières nous montre une fois de plus la suprématie de la souveraineté communale sur le canton. Certaines communes ont, en effet, court-circuité l’autorisation cantonale pour débuter les travaux d’agrandissement de leur cimetière, ce qui est vivement déploré par le Département de l’intérieur :

341 AEV, fonds des communes, commune de Leytron, R38, lettres 1917-1925, lettre au Département de l’intérieur, 31 décembre 1918.

342 ACS, Procès-verbal des séances du Conseil communal de Sion, A 1-6 : juin 1919-octobre 1924, séance du 2 février 1920, pp 29-30.

« En plusieurs localités, l’épidémie de grippe a mis à l’ordre du jour la question de l’agrandissement ou de l’établissement de nouveaux cimetières. Nous devons exprimer le regret que cette question soit parfois résolue de la part des communes, sans que les autorités sanitaires aient été consultées. D’autres communes, par contre, n’arrivent pas à commencer les travaux qui s’imposent du fait de l’exiguïté du cimetière actuel. » 343

Les décès augmentant, les corps s’amoncellent peu à peu et certains villages, dont les cimetières étaient déjà étroits, sont le théâtre de malencontreux malentendus, comme à Chippis et à Nendaz. A Chippis, tout d’abord, on accuse le prêtre et les autorités communales d’avoir discriminé un protestant en l’enterrant en dehors des limites du cimetière. Les protestants montent aux barricades pour dénoncer l’injustice. L’explication est donnée quelques jours plus tard dans Le Confédéré :

« La partie du cimetière, agrandi il y a douze ans, étant entièrement occupée par les enterrements exceptionnels de cette année, les fossoyeurs, vu l’urgence, ouvrirent une rangée de fosses dans la partie orientale, extérieure au cimetière. Le hasard voulût que ce soit un réformé qui allât occuper la première fosse de la dite rangée, dans la partie en contre-bas ! D’où colère et menaces d’un tel méfait ! » 344

La population est dans un état de tension telle que le moindre incident embrase les pages des journaux. Le deuxième événement qui agite les esprits est celui de Nendaz, où le corps d’un ouvrier étranger de la mine d’anthracite, catholique mais non pratiquant, s’est vu refuser l’entrée au cimetière. Il est jugé damné et selon les dires du curé « Les os de nos pères ne subiront pas la promiscuité des cendres de cet étranger (…) il faut que l’ivraie soit détachée du bon grain ! Depuis que je suis à Nendaz, je ne l’ai jamais vu à l’église.» 345 C’est un exemple qui illustre l’importance de l’Eglise et de la religion dans la société valaisanne de 1918.