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compétences : complémentarité et/ou nouveauté

Chapitre 5 - L’approche par compétences en didactique du français en contexte algérien didactique du français en contexte algérien

4. Les caractéristiques de la nouvelle approche

Après avoir vu, dans le chapitre précédent, plusieurs définitions de la notion de « compétence » ainsi que certains éléments qui ont permis d'éclairer certains aspects de cette notion complexe, et après avoir passé en revue quelques travaux relatifs à l'approche par compétences, il nous semble utile de dire d’une part quelle est la définition que retiennent les programmes concernant cette notion et d’autre part, de reprendre ses principales caractéristiques.

4.1. La notion de compétence dans le programme de 3

ème

année primaire

La notion de compétences telle que définie dans le programme de 3ème année primaire (2003 : 7) s’énonce comme suit :

« La compétence est un ensemble de savoirs, savoir-faire et savoir-être. Elle se démultiplie en autant d’objectifs d’apprentissage que nécessaire ».

Partant de cette définition, nous pouvons dire que la ou les compétence(s) est/sont tout simplement un ensemble intégré (donc interdépendant et inter complémentaire) d'éléments cognitifs que l'apprenant aura intériorisés et/ou devra intérioriser à la fin d'un cursus scolaire s'articulant autour de 4 ou 5 projets. La maîtrise d'une ou de plusieurs compétences se réalise dans le cadre du projet. Rappelons que, pour les théoriciens (Hadji, Perrenoud, Le Boterf, Meirieu, Roegiers) que nous avons cités lors de la présentation de cette approche, le « savoir » relève des compétences déclaratives et le « savoir-faire » relève des compétences procédurales qui sont en fait les pratiques. Tous s’accordent à dire que les savoirs, les savoir-faire et les savoir-être exercés et intégrés par l'apprenant à l'occasion d'une tâche particulière sont à mobiliser à l'occasion d'autres tâches différentes de la première mais qui font partie de la même famille, qui appellent, en tout ou en partie, le même traitement. La généralisation est donc au cœur même de la compétence.

Les compétences sélectionnées dans le programme de 3ème année primaire couvrent les quatre domaines :

- oral/réception - oral/production - écrit/réception - écrit/production

Pour illustrer ces points, nous donnerons un exemple extrait de ce programme (2003 : 8-11) :

A l’oral

Deux compétences sont retenues dans le domaine de la réception (écouter/apprendre) :

.

1. Connaître le système phonologique et prosodique du français. 2. Construire le sens d’un message oral

Trois autres sont retenues dans le domaine de la production (parler) :

A l’écrit

Deux compétences sont retenues dans le domaine de la réception (déchiffrer et comprendre) :

Deux autres sont retenues dans le domaine de la production (écrire) :

4.2. La notion d’objectif d’apprentissage

Ces compétences retenues se démultiplient ensuite en plusieurs d'objectifs d'apprentissage. Et c'est à partir de l’identification de ces objectifs d'apprentissage que se dégage le dispositif d'enseignement/apprentissage qui repose essentiellement sur les contenus programmés et délimités, les activités conçues et les tâches à entreprendre.

Voyons, à titre d’exemple, dans le tableau ci-après, quels sont les objectifs d’apprentissage qui découlent des deux compétences retenues dans le domaine de la réception (écoute et compréhension).

1. Parler pour s’approprier la langue. 2. Prendre la parole pour s’exprimer

3. Prendre sa place dans un échange pour communiquer.

1. Connaître le système graphique du français. 2. Construire le sens d’un message écrit.

1. Connaître les aspects grapho-moteurs du français. 2. Activer la correspondance phonie-graphie.

Oral – Réception (écouter/comprendre)

Compétences Objectifs d’apprentissage

Connaître le système phonologique et prosodique du français

- discriminer les sons de la langue - discriminer les différentes intonations - mémoriser des mots, des phrases, de

courts textes

- adopter une attitude d’écoute.

Construire le sens d’un message oral

- discriminer des unités de sens

- identifier les interlocuteurs et leur statut (qui parle ? à qui ?)

- identifier le thème général (de quoi on parle ?). retrouver le cadre spatio-temporel (où et quand ?)

- déduire un sentiment, une émotion à partir d’une intonation (joie, colère,). L’objectif d’apprentissage permet d’identifier des actions précises, adaptés à un niveau déterminé. C’est un instrument fonctionnel intégré dans la logique de mise en place d’unités d’enseignement/apprentissage (séquences81). C’est à partir de ces séquences que se dégage le dispositif d’enseignement/apprentissage sur la base du triptyque : contenus, activités, tâches.

Nous pouvons donc dire que l’approche par compétences se caractérise principalement par : une pédagogie de l’intégration, une pédagogie différenciée, une centration sur l’apprenant et un enseignement/apprentissage de type communicatif.

4.3. Une pédagogie de l’intégration

Un enseignement défini en termes de compétences repose sur le choix d’une pédagogie de l’intégration. Cette pédagogie vise à ce que l’élève rassemble et organise ses acquis afin de les utiliser dans des situations complexes, appelées situations d’intégration82

. La notion d’intégration est très importante parce qu’elle met en évidence le besoin de créer des liens entre les différents éléments d’une

81 Couramment pratiquée en FLE puis transférée au français langue maternelle, la séquence consiste à développer une pédagogie sur un objectif précis en organisant l’ensemble du travail de la classe autour d’un projet sur plusieurs séances.

82 L’intégration est une opération intérieure et personnelle puisque personne ne peut intégrer à la place de l’autre. Elle a pour but d’aider chaque élève individuellement puisque chacun avance selon son propre rythme.

compétence. Ainsi, on ne peut parler d’intégration que si l’élève a déjà acquis une somme de savoirs, savoir-faire, savoir-être et compétences disciplinaires. Toutes ces connaissances vont être transférées de manière à pouvoir être activées de façon concrète dans des situations de la vie courante. Comme on le voit, c’est donc dans cette perspective que s’impose l’entrée dans les programmes par les compétences puisque c’est sur ce réinvestissement fondamental que s’appuient les partisans de cette nouvelle approche, qui, rappelons-le, a fait ses premières armes dans le domaine de l’entreprise. Ainsi, pour ce qui concerne l’apprentissage d’une langue, le programme (2003 : 6) de français précise qu’au terme de la 3ème année primaire, l’élève aura :

«développer des compétences d’écoute/réception et des compétences d’expression à l’oral de même qu’il aura commencé à aborder l’écrit. Il aura construit de nouveaux savoirs par reproduction et simulation dans le cadre des activités au sein de la classe qui constitue le contexte d’immersion privilégié. Il se sera familiarisé avec la lecture – à partir de textes courts adaptés à sa sensibilité et à son âge – et avec l’écriture, en (re)produisant quelques phrases à partir de situations signifiantes et diversifiées ».

Cette approche, qui consiste à établir des liens entre les apprentissages dans le but de pouvoir résoudre des situations complexes83 en mobilisant des connaissances et des savoir-faire acquis, se démarque des approches dont elle s’inspire, à savoir l’approche communicative et la pédagogie par objectifs dans la mesure où l’accent est mis sur le caractère d'intégration qu'elle revêt et essentiellement sur sa capacité de créer une passerelle entre la connaissance d'une part, et les compétences et les comportements – en milieu scolaire mais aussi et surtout en contexte non scolaire – d’autre part.

Cette démarche d’intégration est personnelle, propre à chaque apprenant, c’est pourquoi la ou les pédagogies mise(s) en place met(tent) l'élève au centre de ses apprentissages. Découlant directement de la pédagogie différenciée, cette notion de centration sur l’apprenant, on le verra dans les développements ultérieurs, pose bien des problèmes dans le contexte actuel de l’école algérienne.

4.4. Une pédagogie différenciée

Nous n’allons pas revenir sur cette pédagogie dite « nouvelle » au moment de son apparition dès le début du XXème siècle et dont avons tenté de cerner les

83 Ces situations complexes qui ne sont plus de simples applications ou des exercices de reproduction de solutions types doivent se rapprocher le plus possible des situations réelles de la vie.

aspects dans le chapitre précédent. C’est dans la perspective de son application en contexte algérien qu’il nous faut voir si cette démarche peut prendre tout son sens. Si nous voulions résumer les sept postulats énoncés par Burns (cf. pp. 124-125 de notre travail) nous pourrions dire que chaque élève avance à son propre rythme et apprend à sa manière. Les uns accèdent aux savoirs, savoir-faire et savoir-être par le biais de l’écoute, d’autres préfèrent visualiser pour apprendre et d’autres encore privilégient le toucher.

Compte tenu de cette diversité et des disparités de niveaux et dans le but de garantir l’égalité des chances à tous les élèves (ce qui rejoint, il faut le dire, le principe de démocratisation de l’enseignement évoqué dans tous les textes officiels algériens depuis l’indépendance) et afin de permettre à chacun d’avancer à son rythme et de progresser selon ses potentialités, l’enseignant se voit conférer un rôle beaucoup plus important et est appelé à respecter le rythme de chacun en appliquant la pédagogie différenciée.

4.5. Une centration sur l’apprenant

La nouvelle approche, nous l’avons vu dans le chapitre précédent, place l’élève au cœur de l’acte pédagogique et le fait participer de manière active et responsable au processus de son apprentissage. Il participe donc à la construction et à la structuration de ses apprentissages. C’est ce que les théoriciens appellent « la centration sur l’apprenant ». Cette formule « plutôt pédante »84

signifie qu’en pédagogie, l’élève est plus important que la méthode.

C’est dans le guide du maître de français de troisième année primaire (2004 : 17) que nous retrouvons ces principes énoncés comme suit :

« La méthode [Le monde de Didine] met l’accent sur l’engagement de l’élève dans le processus d’acquisition de connaissances et de stratégies. Elle mise sur sa motivation, sa sensibilité, sa curiosité, son besoin de comprendre. […] L’élève est directement concerné par l’acte pédagogique ; il remet en question ses représentations antérieurs et confronte son savoir à celui des autres, l’améliore, cherche, découvre, agit, essaie, retourne sur les activités ».

84

4.6. Un enseignement/apprentissage de type communicatif

Des changements sont opérés dans toutes les disciplines. Actuellement, on mise sur la maîtrise de compétences dans tous les plans de formation. Ainsi le document d’accompagnement du maître de français de la troisième année primaire (2004 : 11) propose la définition suivante d’une compétence :

« un ensemble intégré de savoirs, savoir-faire et savoir-être en vue d’une appropriation significative et durable des connaissances ».

Dès lors, l’accent est mis particulièrement sur le développement personnel et social de l’élève. En ce qui concerne l'enseignement du français, cette approche vise à développer des compétences de communication chez l'apprenant en mettant l'accent sur le caractère utilitaire de la langue plutôt que sur son apprentissage littéraire. Tel est le principe décliné dans le même document (2004 : 17) :

« Apprendre une langue c’est apprendre à communiquer dans cette langue. […]. Apprendre une langue c’est pratiquer des activités interactives : écouter, dire, lire et écrire. Apprendre une langue c’est aussi connaître le monde et la diversité culturelle ».

La langue française sera donc enseignée dans une optique de communication fonctionnelle permettant ainsi à l'apprenant de s'équiper d'un bagage linguistique lui donnant au terme de son cursus scolaire la facilité de pouvoir s'exprimer à l'oral comme à l'écrit en utilisant un français courant et correct dans une grande variété de situations de la vie de tous les jours.

Dorénavant cette nouvelle approche pourra mettre au service de l'enseignement du français un dispositif pédagogique et didactique innovant afin de déclencher chez l'apprenant le désir de comprendre et de se faire comprendre à travers des situations de communication de la vie organisées par simulation en classe.

4.7. Une pédagogie de projets

Avec les réaménagements apportés dans les programmes de l'enseignement fondamental, l’année scolaire 1997/1998 a vu la mise en place d'une rénovation du programme où le concept d’unité didactique85

inscrit dans le cadre de la pédagogie

85 Une unité didactique, comme son nom l'indique, est donc : « Une période d'enseignement d'une durée variable faisant partie d'un projet pédagogique et au cours de laquelle est dispensé un

par objectifs revêt une importance prépondérante et s’est substitué à la notion de

« dossier »86. Le programme soumis aux enseignants en mai 1998 fait également intervenir de nouvelles notions et de nouveaux concepts, à savoir : compétence, capacité, tâches d'enseignement et tâches d'apprentissage, évaluations diagnostique87, formative et sommative, grille d'évaluation88, etc.

Rappelons que la notion de projet existe depuis 1992 dans le cycle du secondaire mais pour ce qui concerne le niveau du cycle primaire, ce n'est qu'avec la mise en application de la nouvelle réforme du système éducatif (2003) que la pédagogie préconisée est dite « par projets ». Pédagogie pratiquée à l'heure présente, dans l’ensemble du système éducatif, sans distinction de palier.

Les activités sélectionnées dans le programme de 3ème année primaire s’organisent dans le cadre de projets pédagogiques. Le projet est défini comme suit dans le programme (2003 : 5) :

« Le projet est une nouvelle façon originale de travailler et de gérer le temps, l'espace, la classe et les apprentissages. Il se donne pour objectif l’élaboration d’une production matérielle, écrite ou orale. Il permet à l’élève de s’impliquer dans un travail de groupe et de recherche pour la réalisation d’un objectif collectif ».

4.7.1. Présentation du plan de formation de la 3ème année primaire

Comme pour toutes les années du cycle primaire, le programme de la 3ème année primaire s'inscrit dans le cadre de la pédagogie du projet qui organise les apprentissages en séquences. Ces dernières sont incluses dans des séances dont le

nombre fini d'exercices et d'activités soumis à évaluation ». Dictionnaire pratique de didactique

du FLE, 2002, p.152.

L’objectif de chaque unité didactique est de doter l’apprenant d’une compétence donnée dans une situation précise de communication.

86 Un dossier est un inventaire de connaissances, de savoirs à transmettre à l'élève à des fins conversationnelles par le biais de leçons (dialogue en 4ème et 5ème AF, langage/élocution en 6ème AF) et d'expression écrite.

87

L’évaluation diagnostique a lieu généralement en début d’année scolaire ou en début d’unité didactique. Située au début d’une séquence d’apprentissage, ce type d’évaluation aide l’enseignant à établir un état des lieux lui permettant de cibler son intervention. Elle ne fait l’objet ni de notation ni de correction exhaustive, elle sert surtout à élaborer un projet pédagogique intégrant des activités de remédiation progressive.

88 J-P. Cuq (2003 : 120) définit les grilles d’évaluation ainsi : « ce sont des tableaux qui comprennent des entrées se référant aux : compétences de l’apprenant […] ; compétences discursives et textuelles […] ; compétences linguistiques […]. Un barême est fixé pour chacune de ces trois entrées, en fonction de l’objectif que vise le test ou l’examen ».