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CHAPITRE 3 : Déterminants et effets de l’épanouissement au travail

I. Les déterminants du bien-être au travail et de l’épanouissement au travail

2. Le soutien organisationnel perçu comme déterminant organisationnel

Nous faisons le choix de détailler davantage le concept de soutien organisationnel perçu comme déterminant de l’épanouissement au travail. Les traits de personnalité sont bien étudiés par rapport au bien-être mais on en sait un peu moins sur les facteurs situationnels tels que le soutien social. Des études démontrent que bénéficier d’un soutien social satisfaisant se rapporte à un bien-être subjectif et psychologique supérieur (Keyes, 1998 ; Diener & Seligman, 2002, 2004 ; Huppert, 2009). Néanmoins, nous pensons que les autres caractéristiques citées en début de chapitre (la justice organisationnelle, le style de leadership, les pratiques managériales) contribuent aussi à l’épanouissement en milieu de travail.

La psychologie démontre que l’être humain est un être social et qui se construit principalement à travers les relations interpersonnelles. En milieu professionnel, les relations interpersonnelles renvoient aux liens que les personnes ont avec les collègues, les clients/patients et les supérieurs hiérarchiques. Lorsque les relations sont positives, elles contribuent à un climat de travail bienveillant (Truchot, 2004). Ces relations interpersonnelles peuvent se traduire en termes de soutien ou d’aide. Selon la définition de Caron et Guay (2005, p.16), le soutien social correspond « aux échanges de ressources émotionnelles, instrumentales ou d’informations par des non-professionnels, dans le contexte d’une réponse à la perception que les autres en ont besoin. Il s’actualise lors des interactions avec les membres du réseau social ou encore lors de la participation à des groupes sociaux ».

Le soutien social est un concept multidimensionnel et les chercheurs ne trouvent pas une définition qui fasse consensus (Ducharme, Stevens & Rowat, 1994). Selon Weiss (1973), le soutien social est décrit selon cinq processus permettant le maintien de l’équilibre chez l’individu : le sentiment d’utilité, l’affirmation de sa valeur (se sentir compétent dans un rôle donné), l’intégration sociale, le soutien émotionnel et la possession d’aide matérielle.

Barrera (1981) distingue trois dimensions : le soutien social reçu, la perception du soutien social et l’intégration sociale. Quant à Vaux, Phillips, Holly, Thomson, Williams, et Stewart (1986), ils présentent trois composantes : les comportements de soutien, le réseau de soutien et l’évaluation du soutien. Ainsi, des recherches étudient le soutien social et leurs effets dans le contexte du travail et hors travail. En ce sens, il semble pertinent de différencier le soutien social du soutien organisationnel (Bouterfas, 2014).

En outre, le soutien en milieu professionnel peut se diviser en trois catégories : le soutien des collègues, le soutien de la hiérarchie et le soutien de l’organisation. Le soutien émanant des collègues peut se référer aux attitudes amicales, à l’aide apportée dans le travail ou encore à la bienveillance envers autrui. Le soutien de la hiérarchie renvoie à l’aide, la bienveillance manifestée par le supérieur. Le soutien des collègues et de la hiérarchie sont mesurés par Karasek et Theorell (1989). Le soutien de l’organisation se réfère davantage aux mesures prises sur le plan du collectif afin de faciliter le travail, l’intégration et de promouvoir la santé des travailleurs. La littérature consacre un intérêt important sur ce type de soutien.

Rhoades et Eisenberger (1986 ; 2002) définissent le soutien organisationnel perçu par la perception que l’employé a de son Organisation. Elle se base sur les croyances de l’individu concernant la manière par laquelle l’organisation valorise sa contribution et s’intéresse à son bien-être. Le salarié doit avoir le sentiment d’être reconnu pour sa contribution à l’efficacité organisationnelle (Eisenberger & Rhoades, 1986). Les salariés estimant bénéficier de certaines ressources, telles que la reconnaissance et l’écoute, se sentiront valorisés par leur organisation, leur permettant d’adopter des comportements organisationnels adéquats (Eisenberger & Rhoades, 1986). Les auteurs définissent trois éléments déclenchant la perception du soutien organisationnel :

- La « justice procédurale » définit la perception de justice et d’équité envers les règles et les ressources transmises par l’organisation (Greenberg, 1990).

- Le « soutien du supérieur » influence la perception des salariés en fonction de l’évaluation qu’ils ont de leur superviseur. Cette variable serait la plus exhaustive puisqu’elle maintient le dialogue social entre les salariés et la hiérarchie (Bruchon-Schweitzer, 2002).

- Les « conditions de travail et de récompenses organisationnelles » (Shore & Shore, 1995 cité par Rhoades & Eisenberger, 2002) montrent qu’une gestion des ressources humaines compétente influencera de manière positive la perception du soutien puisqu’elle comprend la sécurité de l’emploi, la reconnaissance, la justice distributive (entre autre la rémunération), les exigences de travail et l’autonomie (Eisenberger & Rhoades, 1986).

Les individus percevant un soutien organisationnel important sont plus enclins à être reconnaissants envers l’entreprise et à accepter les règles organisationnelles. Gouldner (1960) (cité par Bruchon-Schweitzer et Boujut, 2014) explique cela par la norme de réciprocité permettant d’influencer positivement « l’engagement, l’implication, la satisfaction et le désir de rester dans l’organisation » (Modway & al., 1982 cité par Rhoades & Eisenberger, 2002). Le soutien organisationnel est considéré comme une ressource atténuant ainsi le stress perçu (Bruchon-Schweitzer, 2002). Il est donc associé à davantage de satisfaction professionnelle et réduit l’affectivité négative (LaRocco, House & French, 1980 cité par Bruchon-Schweitzer & Boujut, 2014). Le soutien social procure des expériences positives, conduisant à développer des affects positifs et augmenter le sentiment de bien-être (Casse, 1976 cité par Bruchon-Schweitzer & Boujut, 2014). Le soutien social encourage l’estime de soi (Lakey & Cassady, 1990). Notons, que le soutien social, l’autonomie et le climat organisationnel sont des prédicteurs importants de l’engagement (Hakanen & Roodt, 2010). En effet, des études montrent que le soutien des collègues ou des supérieurs est en lien avec l’engagement au

Aussi, le soutien organisationnel perçu a un effet modérateur sur le niveau de stress. La théorie de la préservation des ressources de Hobfoll et Shirom (1993) (cité par Ruiller, 2011) souligne l’importance de se tourner vers autrui afin de surmonter les situations personnelles et professionnelles difficiles. La recherche de soutien peut être catégorisée en tant que stratégie d’ajustement, puisque cela peut être un moyen de rétablir l’équilibre face à une situation dite stressante (Bruchon-Schweitzer & Boujut, 2014). Bono et al. (2012) constatent que le soutien social contribuerait à l’épanouissement et aurait des effets positifs sur la santé.