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CHAPITRE I : Etude bibliographique

I. 2.1.1) Le solvant ou le mélange de solvants

I.2.1.1.1) Influence sur la thermodynamique et la cinétique de coagulation

La N-méthyl-2-pyrrolidone (NMP), le diméthylformamide (DMF), le diméthylacétamide (DMAc), le triéthylphosphate (TEP) ou encore le diméthylsulfoxyde (DMSO) sont usuellement utilisés comme solvants du PvDF. On peut utiliser un mélange de plusieurs de ces solvants [47], associés dans certains cas à du non solvant pour modifier les propriétés de solvatation du solvant.

La qualité d’un solvant vis-à-vis d’un polymère peut être définie à l’aide des paramètres de solubilité de Hansen (HSP) [48]. La théorie de Hansen est une approche thermodynamique pour modéliser la solubilité d’un polymère dans un solvant en équilibre thermodynamique. Dans cette théorie, l’énergie totale de cohésion (ou de solubilité) E d’un liquide est divisée en trois composantes (interactions dispersives (Ed), interactions polaires (Ep) et interactions dues aux liaisons hydrogène (Eh), Cf. équation I.7a). E est calculée en mesurant l’enthalpie de vaporisation du liquide ΔHv, comme présenté dans l’équation 7b. δd, δp et δh sont les paramètres de Hansen des contributions dispersive, polaire et de liaisons hydrogène au paramètre de solubilité global δ et s’obtiennent en divisant chaque contribution à l’énergie par le volume molaire V du liquide (Cf. équation I.7c). Par transposition, on peut calculer les paramètres de solubilité d’un polymère dans un solvant. Si un polymère a une énergie de solubilité proche de celle du liquide, alors le liquide est un bon solvant du polymère d’après cette théorie ; la différence entre leur énergie de cohésion doit donc être faible. Pour mesurer cette différence, on définit la distance d'interactions D (équation I.7d). Donc plus D est faible, plus le solvant est efficace pour dissoudre le polymère.

⁄ ⁄ ⁄ ⁄

√( ) ( ) ( )

D est calculable pour le PvDF et de nombreux solvants grâce aux données de Li et al. [47] et de Bottino et al. [49] (Cf. tableau I.2).

D’un point de vue thermodynamique, le TEP est plus efficace pour dissoudre le PvDF que le DMF ou le DMSO par exemple. Mais ces paramètres ne peuvent pas prédire la rapidité à laquelle l’inversion de phases va se produire car ils ne renseignent pas sur la cinétique de coagulation.

Les diagrammes de phases ternaires obtenus par Bottino et al. [49] pour différents solvants sont présentés en figure I.10. Pour une valeur de 15wt% de PvDF par rapport au solvant (valeur typique de concentration du PvDF dans les collodions), on observe un décalage maximum entre la binodale du DMSO et celle de la NMP égal à 8wt% d’eau. Ce décalage est non-négligeable mais ne permet pas d’expliquer toutes les différences importantes observées entre les membranes obtenues à partir de ces collodions, notamment au niveau structural (Cf. I.2.1.1.2).

Figure I.10 : Diagrammes ternaires PvDF/Eau/Solvant obtenus pour différents solvants [49].

Solvant δd (MPa1/2) δp (MPa1/2) δh (MPa1/2) D (MPa1/2)

DMAc 16,8 11,5 10,2 1,5

DMF 17,4 13,7 11,3 2,4

DMSO 18,4 16,4 10,2 4,2

NMP 18,0 12,3 7,2 2,2

TEP 16,8 11,5 9,2 1,1

Polymère δd (MPa1/2) δp (MPa1/2) δh (MPa1/2) D (MPa1/2)

PvDF 17,2 12,5 9,2

Tableau I.2 : Paramètres de solubilité de Hansen à 25°C (δd, δp et δh) pour différents solvants [47] ainsi que pour le PvDF [49] et distances d’interactions (D) entre ces solvants et le PvDF.

Pour mesurer les différences de cinétiques de coagulation, il faut s’intéresser aux coefficients de diffusion mutuels solvant/non solvant. Bottino et al. ont mesuré ces coefficients pour des couples solvant/eau (non solvant utilisé en général pour l’inversion de phases) [49] et qui sont présentés dans le tableau I.3. Bottino et al. [49] définissent aussi un coefficient de diffusion moyen (moyenne harmonique), noté Dm, dont l’expression est donnée par l’équation I.8.

Avec DS-W le coefficient de diffusion mutuel d’un solvant dans l’eau (106 cm2.s-1) DW-S le coefficient de diffusion mutuel de l’eau dans ce solvant (106 cm2.s-1)

D’après les conclusions apportées par Bottino et al. [49], un coefficient moyen de diffusion Dm faible améliore les propriétés de structure et de transfert de matière des membranes. Toujours selon Bottino et al. [49], ce sont les critères cinétiques (coefficient moyen de diffusion) qui définissent le choix d’un bon couple solvant/non solvant pour la fabrication de membranes. Ils gouvernent la formation de la membrane PvDF bien plus que la thermodynamique ne le prévoit.

I.2.1.1.2) Influence sur les structures des membranes

Shih et al. [50] ainsi que Yeow et al. [51] ont montré que l’utilisation de TEP pour fabriquer des membranes planes en PvDF conduit à une structure mousseuse et asymétrique ce qui n’est pas toujours le cas pour la NMP, le DMAc et le DMF par exemple. Ces observations sont en accord avec les valeurs de coefficient de diffusion moyen (Cf. tableau I.3) calculées par Bottino et al. [49], confirmant ainsi le rôle prédominant de la cinétique de coagulation sur la structure des membranes. Yeow et al. [51] montrent aussi que la membrane a une structure plus mousseuse lorsque la concentration initiale en eau (non solvant) dans le collodion augmente. Wang et al. [52] montrent que l’utilisation d’éthanol ou de 1-propanol (non solvants du PvDF) améliore encore les structures de fibres creuses en PvDF par rapport à l’utilisation d’eau comme additif.

Solvant DS-W (106cm2.s-1) DW-S (106cm2.s-1) Dm (106cm2.s-1) DMAc 9,1 16,8 11,8 DMF 10,2 17,1 12,8 DMSO 10,7 6,9 8,4 NMP 8,9 9,3 9,1 TEP 6,3 13,7 8,6

Tableau I.3 : Coefficients de diffusion mutuels d’un solvant dans l’eau (DS-W) et de l’eau dans ce solvant (DW-S) pour différents solvants organiques usuels [49]. Coefficients moyens de diffusion (Cf. équation I.8)

I.2.1.1.3) Influence sur les propriétés de transfert de matière

Bottino et al. [49] ont montré qu’une membrane fabriquée à partir de DMF a une perméabilité quatre fois inférieure à celle d’une membrane réalisée avec du TEP et 16 fois plus faible que celle fabriquée à partir de NMP. Li et al. [47] ont montré que l’utilisation d’un mélange TEP/DMAc comme solvant améliore la sélectivité d’une membrane en comparaison du mélange de solvants TMP/DMAc mais la structure obtenue comporte plus de macrodéfauts. Elle est donc moins résistante mécaniquement.

La présence initiale d’eau dans le collodion permet d’augmenter la taille des pores et la porosité effective de la membrane d’après les résultats apportés par Khayet et Matsuura [53]. Ils ont montré que la substitution de 1,7wt% de DMAc par 1,7wt% d’eau dans le collodion double le rayon moyen des pores. La porosité effective (définie par Khayet comme le rapport entre la porosité et la perméabilité d’une membrane) est quant à elle multipliée par 1,6 (de 2851 m-1 à 4690 m-1). Le flux de perméat (mesuré à 1,66 MPa de pression d’alimentation) augmente avec la quantité d’eau ajoutée dans le collodion comme le montre la figure I.11.

Les travaux de Yeow et al. [51] montrent une augmentation de perméabilité due à l’eau ajoutée dans le collodion encore plus importante. L’addition de 3,7wt% d’eau (en remplacement du solvant DMAc) permet de multiplier par 100 la perméabilité qui passe de moins de 10 à 980 L.m-2h- 1

bar-1). Les travaux de Khayet et al. [54] montrent que l’addition de 1,2-éthanediol (non solvant du PvDF) apporte les mêmes modifications que l’ajout d’eau dans leurs précédentes études [53]. La seule différence est que la porosité de surface des membranes n’est pas modifiée.

La présence de non solvant (eau) initialement dans le collodion modifie la perméabilité des membranes ; la perméabilité est généralement augmentée. En contrepartie, les pores sont de taille plus importante, diminuant la sélectivité. Il faut donc trouver un bon compromis entre ces deux propriétés.

Figure I.11 : Flux de perméat (mesuré à 1,66 MPa de pression d’alimentation) en fonction de la quantité d’eau (additif) dans le collodion [53].

I.2.1.1.4) Conclusions

Le choix imposé par le contexte industriel du projet sur le couple solvant/non solvant s’est porté sur le couple NMP/eau. L’étude de la bibliographie n’a pas permis de répertorier beaucoup de données sur la fabrication de membranes à base de PvDF et de NMP. Le DMAc étant le solvant le plus généralement utilisé (Cf. I.2.1.1), on ne peut pas conclure à l’avance l’efficacité réelle d’utilisation de la NMP comme solvant. On notera que la NMP satisfait bien au critère cinétique de coagulation et permet l’obtention de membranes perméables [49], même s’il ne satisfait pas totalement au critère thermodynamique de coagulation. L’utilisation de la NMP imposée par des critères industriels est donc validée par des critères scientifiques.