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I. Activités externalisés, gestion privée des services publics et principes des services publics

2. Le principe d’égalité face au service public

Le principe d’égalité figure à l’art. 1er de la Déclaration des Droits de l’Homme et du

Citoyen de 1789 : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune ». Ce principe

s’impose à toutes les autorités dans le cadre de leurs services publics.

En droit français, le principe d’égalité devant et dans les services publics découle du

principe d’égalité devant la loi et s’énonce très simplement : Les usagers du service

public se trouvant dans une même situation doivent subir le même traitement. Cela signifie, en principe, que toutes les personnes se trouvant dans une situation identique doivent bénéficier du même traitement. Il implique également le respect des différences de situation appréciables71.

La valeur juridique du principe d’égalité est consacrée par l’arrêt du Conseil d’Etat,

Sect., du 9 mars 1951, Société des concerts du conservatoire72, qui lui reconnaît la

valeur d’un principe général du droit. Selon cette jurisprudence, l’administration peut déroger au principe d’égalité dans trois cas.

Le premier fait référence à l’existence d’une disposition législative. Cette situation vaut essentiellement pour les services publics rendus obligatoires par la loi73. Par exemple,

les communes peuvent se trouver déchargées d’une partie des coûts que représentent les

prestations par des mesures compensatoires prévues par la loi, notamment, dans le cas des écoles publiques.

71 CE Ass., 28 mars 1997, Société Baxter, n° 179049, Rec. Lebon

72 CE Sec., 9 mars 1951, Société des concerts du conservatoire, n° 92004, Rec. p. 151.

73 En effet, le principe d’égalité : « […] ne s’oppose pas à ce que l’autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’elle déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un comme dans l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l’objet de la norme qui l’établit ». (CE Ass., 28 juin 2002, Villemain, n° 2203061, Rec. p. 586).

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Dans le deuxième cas, il existe un intérêt général lié au service public qui justifie une dérogation. Dans le troisième cas, une différence de situation objectivement comparable et appréciable entre les usagers concernés par l’objet du service public permet une

discrimination entre usagers.

Les différences doivent être ainsi justifiées par des critères objectifs. C’est le cas de l’égalité des candidats à l’entrée du service public74, l’égalité des agents publics dans le service public et l’égalité des usagers devant le service public. L’égalité impose également la neutralité de la part de l’administration face aux différences de sexe, de race, d’opinions politiques, religieuses ou philosophiques des usagers.

Dans le troisième cas, le principe du droit à la différence résulte de la décision du

Conseil d’Etat, Sect., du 10 mai 1974, Sieur Denoyez et Sieur Chorques75. Selon cette décision, une tarification différente applicable à diverses catégories d’usagers d’un service ou d’un ouvrage public implique soit qu’il existe entre les usagers des différences de situations appréciables, soit qu’une nécessité d’intérêt général en rapport avec les conditions d’exploitation du service ou de l’ouvrage commande cette mesure.

Cette différence doit être en relation à un même service rendu, à moins qu’elle ne soit la conséquence nécessaire d’une loi.

L’importance prise par les questions de discrimination a conduit le Conseil

constitutionnel et le Conseil d’Etat76à préciser la portée du principe d’égalité. La valeur

74 CE Ass., 28 mai 1954, Barel, n° 28238, Rec. Lebon p. 308, concl. Letourneur. Au sujet des concours publics, la décision duConseil d’Etat, du 22 nov. 1999, M. Rolland, n° 196437, Rec. p. 842, explique

que : « Le principe d'égalité n'implique pas que les candidats à un même concours se trouvant dans des situations différentes soient soumis à des épreuves différentes. Quelles que soient les différences d'âge existant entre les candidats à l'agrégation interne d'éducation physique et sportive, l'arrêté interministériel du 27 avril 1995 a pu, sans méconnaître le principe d'égalité, soumettre tous les candidats aux mêmes épreuves ». (Disponible sur : http://www.lex-publica.com/cgi-bin/lexdata/lexdata.cgi?board=spc;action=messageindex;start=20 ).

75 CE Sec., 10 mai 1974, Sieur Denoyez et Sieur Chorques, n° 88032, Rec. Lebon p. 274.

76Le Conseil d’Etat, dans les développements de son rapport public de 1996 consacré à l'égalité, relevait

que: « Le principe d'égalité est, en effet, menacé si la société dont il fonde l'ordre juridique voit s'étendre de nouvelles et graves inégalités. Or, celles-ci ne touchent pas seulement aux revenus mais aux liens fondamentaux qui relient chaque individu à la société, tels que le travail, le logement, l'éducation ou la culture. Lorsque ces liens sont fragilisés, voire rompus, l'égalité des droits risquent d'apparaître comme une pétition purement formelle. Dès lors, le principe d'égalité joue davantage sa crédibilité sur le terrain de l'égalité des chances. Compromise par une précarisation d'une partie de la population et notamment

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constitutionnelle du principe d’égalité a été reconnue par le Conseil constitutionnel à

travers la décision CC 79-107, du 12 juill. 1979, Ponts à péages77, selon laquelle face à des situations semblables il soit fait l’application de solutions semblables.

En droit brésilien, le principe d’égalité doit être appliqué sans distinction à toute activité de l’administration publique. Ce principe n'est rien de plus que le principe de

l'impersonnalité qui régit toute l'administration publique.

Le gouvernement et le prestataire privé ont le devoir de fournir le service public de manière égalitaire à toutes les personnes qui remplissent les conditions techniques et juridiques, sans aucune distinction de caractère personnel. Cette égalité doit néanmoins être interprétée et comprise à la lumière de la proportionnalité.

L'idée est que l'égalité suppose un traitement identique pour les personnes qui sont dans la même situation juridique et un traitement différent entre les personnes qui sont dans une situation naturellement différente.

L’égalité implique des traitements différenciés en fonction des situations et justifie, in exemplis, les tarifs sociaux appliqués à certaines catégories d’usagers, qui reposent sur

de la jeunesse, cette égalité ne peut être confortée que par une conception plus active de la solidarité ». (Disponible sur : http://www.senat.fr/rap/l97-472/l97-4728.html .

77 « 2. Considérant que, selon les auteurs de la saisine, ce texte porte atteinte à deux principes fondamentaux de notre droit constitutionnel qui sont la liberté d'aller et venir et l’égalité des citoyens

devant la loi et devant les charges publiques ; […] 4. Considérant, d'autre part, que si le principe

d’égalité devant la loi implique qu'à situations semblables il soit fait application de solutions semblables, il n'en résulte pas que des situations différentes ne puissent faire l'objet de solutions différentes ; qu'en précisant dans son article 4 que l'acte administratif instituant une redevance sur un ouvrage d'art reliant des voies départementales peut prévoir des tarifs différents ou la gratuité, selon les diverses catégories d'usagers, pour tenir compte soit d'une nécessité d'intérêt général en rapport avec les conditions d'exploitation de l'ouvrage d'art, soit de la situation particulière de certains usagers, et notamment de ceux qui ont leur domicile ou leur lieu de travail dans le ou les départements concernés, la loi dont il

s'agit a déterminé des critères qui ne sont contraires ni au principe de l’égalité devant la loi ni à son

corollaire, celui de l'égalité devant les charges publiques ; […] ». (CC Décision n° 79-107 DC du 12 juill. 1979 – Loi relative à certains ouvrages reliant les voies nationales ou départementales – Conformité, JORF du 13 juill. 1979, Rec. p. 31). Renaud Denoix de Saint Marc note que le principe d’égalité : « […]

s’applique, on le sait, de la façon la plus large et la plus générale puisqu’il s’agit d’un principe à valeur constitutionnelle qui domine l’ensemble de notre droit. Mais, dès avant la Seconde Guerre mondiale, le

Conseil d’Etat avait jugé que le principe d’égalité régissait le fonctionnement des services publics ». (SAINT MARC, Renaud Denoix de, L’Etat, Coll. « Que sais-je ? ». 2e éd. Paris : PUF, 2012, 128 p., sp. p. 66).

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des valeurs inférieures pour la fourniture de certains services publics. Elle implique également la gratuité tarifaire dégressive du service public pour un certain groupe

d’usagers, tels que les personnes âgées ou les étudiants78.