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Le monopole et l’oligopole dynamiques Les fondateurs

1 2 Les fondements de la tarification dyna mique

1.2.1 Le monopole et l’oligopole dynamiques Les fondateurs

Les premiers travaux qui intègrent la dynamique des prix s’inté- ressent à l’existence d’un équilibre et non à la forme des politiques de tarification. Evans (1924) propose l’une des premières applica- tions du calcul des variations à l’analyse d’un problème économique. Il est le premier à caractériser le comportement du monopole dans un cadre dynamique où le temps t évolue sur l’intervalle [0, T]. Il re- tient une fonction de coût quadratique et introduit la dynamique au niveau de la demande. La demande D dépend du prix ainsi que de l’évolution du prix au cours du temps3 .

p. En omettant les arguments temporels des fonctions, nous avons

D(p,p.) = ap+b+hp,. (1.1)

3. La variation de toute fonction f par rapport au temps t , d f

dt, est notée par la

où(a, b, h) ∈R3 sont les paramètres du modèle.

Le problème de la firme est de maximiser le profit sur[0, T]. T est l’horizon temporel supposé fini et suffisamment court pour justifier des fonctions de demande et de coût fixes ainsi que l’omission d’un facteur d’actualisation. Ce problème de calcul de variations nécessite que le prix initial p0et le prix final pT soient donnés. Ces hypothèses

sont assez fortes puisque, en pratique, ces conditions aux bornes relèvent en pratique de choix discrétionnaires par la firme4

.

Evans (1924) montre qu’il existe toujours un équilibre unique. Ce résultat généralise en fait celui du monopole statique de Cournot5

(1927) pour lequel h = 0. Toutefois, Evans (1924) ne parvient pas à obtenir un résultat général sur la forme d’une politique de tarifica- tion intertemporelle.

Alors qu’à cette époque, la théorie des jeux n’est pas encore déve- loppée6

, Roos (1925) généralise le modèle précédent au duopole. Les hypothèses sur les fonctions de demande et de coût sont identiques. Tintner (1937) reprend le cadre monopolistique d’Evans (1924) en ne spécifiant ni la fonction de demande ni celle de coût. Il travaille sur les propriétés analytiques de fonctions générales. Il propose une fonction de demande qui dépend du prix et des dérivées du prix par rapport au temps. Tintner (1937) interprète l’intégration dans la fonction de demande des différentes dérivées du prix comme la capture des anticipations des agents sur les évolutions futures des

4. pT pourrait d’ailleurs être laissé à la discrétion de la firme. Auquel cas, il

faudrait reformuler le problème en terme de commande optimale et rajouter une condition de transversalité.

5. Si l’ouvrage est publié en 1927, les travaux de Cournot sont bien antérieurs

puisqu’il décède en 1877.

6. La théorie des jeux est théorisée dans l’ouvrage de Von Neumann et Mor-

genstern, Theory of Games and Economic Behavior (1944) dans le cadre statique et par Isaacs (1965) et Friedman (1971) dans le cadre dynamique.

1.2. Les fondements de la tarification dynamique 27 prix. La fonction de demande (1.1) devient

D =D(p,p,. p, ... )

Dans le cas particulier de Evans (1924) où la demande dépend du prix et de la première dérivée du prix D = D(p,p.), Tintner aboutit à un résultat analytique simple qui sert de règle d’optimisation : à l’optimum, la firme choisit toujours un prix tel que eπ.

p soit égal à

eπp. =1−πs π ,

avec eπ.

p l’élasticité partielle du profit par rapport au taux de varia-

tion du prix, πs le flux de profit du monopole statique et π le flux de

profit du monopole dynamique. Ce résultat est à mettre en relation avec celui du monopole statique pour lequel l’élasticité du profit par rapport au prix est nulle : eπ.

p = 0. Ainsi, alors que le monopoleur

dans un cadre statique choisit le prix de manière à ce que l’élasticité du profit par rapport au prix soit nulle, le monopoleur dynamique considère l’élasticité partielle du profit par rapport au taux de chan- gement du prix. Ce résultat illustre clairement la manière dont la prise en compte des effets dynamiques modifie les règles d’optimi- sation issues du cadre statique.

Dans les modèles que nous venons d’aborder, l’intégration de la dynamique porte sur la demande qui prend en compte les diffé- rentes variations du prix. Cette modélisation permet d’appliquer les techniques du calcul des variations qui traitent ces problèmes d’opti- misation. La question, dans ce cadre, n’est pas d’étudier la forme de la politique de tarification mais de vérifier l’existence et la stabilité de l’équilibre sur le marché. Si les limites des outils issus du calcul des

variations7

ne permettent pas de répondre à cette première question, la réponse à cette deuxième question est néanmoins possible.

Les contemporains

Le problème d’Evans (1924) et de Roos (1925) a été repris bien plus tard par Fershtman et Kamien (1987) qui fondent la littérature sur les sticky-prices. Ils analysent, pour le cas du duopole, l’équilibre de Nash d’open-loop en horizon infini. En posant q = q1+q2 où

qi (i =1, 2) est la quantité vendue par la firme i, la dynamique est

donnée par

.

p=s(d−q+ap).

Ces auteurs s’intéressent principalement aux relations entre l’équilibre de Nash du jeu dynamique et l’équilibre de Cournot sta- tique (obtenu lorsque s → ∞) ainsi que les implications des dif-

férentes structures informationnelles8

. Fershtman et Kamien (1987) calculent l’équilibre de la firme en horizon infini dans le cas du duo- pole. Dockner et Gaunersdorfer (2002) calculent en horizon fini et infini les équilibres de Nash d’open-loop et de close-loop pour n firmes. Les différentes formes de politique de tarification se rencontrent. Elles peuvent être liées à une volonté de discrimination des consom- mateurs de la part des firmes (politique d’écrémage), à une logique de développement de la base installée (politique de pénétration) ou à la saturation du marché (courbe en U inversé). La mesure de ces différents déterminants est la source de nombreuses contribu- tions.empiriques. Bils et Klenow (2004), par exemple, signalent l’im-

7. Rappelons que la commande optimale ne se diffuse véritablement qu’à partir

de la traduction en anglais des travaux de Pontriaguine et al. (1962).

8. Le lecteur intéressé par les différents équilibres dans les jeux différentiels

1.2. Les fondements de la tarification dynamique 29 portance en pratique des sticky-prices et Noel (2007) les mesure sur

le marché de détail du carburant.

Nous voyons donc que la question du monopole intertemporel est étudiée depuis les débuts de l’économie dynamique avec Evans (1924) et Tintner (1937). La généralisation des résultats au duopole est immédiate avec Roos (1925). Ces questions sont demeurées im- portantes en économie comme l’attestent les travaux de Fershtman et Kamien (1987) ou de Dockner et Gaunersdorfer (2002). Des dévelop- pement sont réalisés pour tenir compte des anticipations des agents, en particulier par Noel (2007) ou Mackowiak et Widerholt (2009).

1.2.2

La conjecture de Coase