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Pour conduire cette recherche, différentes options méthodologiques s’offraient à nous, dont principalement la recherche action – intervention ou l’étude de cas.

1.3.1) Une recherche sous convention CIFRE en sciences de gestion : une recherche action - intervention ?

Conduire une recherche en sciences de gestion sous convention CIFRE pourrait laisser croire que ce travail soit une recherche action ou une recherche intervention. En effet, de part l’existence d’une « demande de recherche » de la part de l’entreprise associée à une

participation et une forte implication du chercheur sur le terrain, les ingrédients semblent réunis pour réaliser ce type de recherches.

La recherche action (David, 2000 ; Allard-Poesi & Perret, 2003) remplie en effet cette mission de production de connaissance et de changement. Visant principalement à transformer la réalité et produire des connaissances sur ces transformations, la recherche action reste cependant une approche très discutée et controversée.

En effet, « les trois dimensions de la recherche-action (changement, élaboration de connaissance et intervention) revêtent des significations différenciées en fonction des postulats épistémologiques et de la vision de la réalité sociale qu’ils portent » (Allard-Poesi

& Perret, 2003, p.87). Cependant, comme le souligne Martinet (1990) « la recherche en sciences de gestion ne peut se satisfaire d’une visée strictement explicative, encore moins descriptive. Car il ne s’agirait plus de gestion, mais de sociologie ou d’économie d’entreprise ». Ainsi, pour certains chercheurs, les sciences de gestion comportent nécessairement une visée prescriptive (Savall & Zardet, 2004).

Concernant les démarches d’intervention, David (2000b, p.203-204) propose quatre principes communs à ces recherches :

1. « L’objectif est de comprendre en profondeur le fonctionnement du système, de l’aider à définir des trajectoires possibles d’évolution, de l’aider à en choisir une, à la réaliser, à en évaluer le résultat. (…)

2. La production de connaissance se fait dans l’interaction avec le terrain. (…)

3. Le chercheur parcourt différents niveaux théoriques : faits mis en forme, théories intermédiaires, théories générales, niveaux axiomatique (concepts de base) et paradigmatiques (postulats de base). Le niveau théorique opératoire est celui des théories intermédiaires fondées (Glaser & Strauss, 1967) (…).

4. L’intervention sur la réalité justifie son caractère normatif par référence à des principes scientifiques (recherche de la vérité) et démocratiques (égal respect des acteurs) ».

David (2000a) nous propose également un cadre intégrateur qui permet de mieux comprendre le positionnement de notre recherche (cf. Tableau 26).

Tableau 26 : Un cadre intégrateur pour quatre démarches de recherche

De part leurs caractéristiques de nombreuses conventions CIFRE trouvent donc tout naturellement leur place dans le cadre de recherches action ou de recherches intervention.

Cependant, ne désirant pas (ou considérant qu’il nous est très difficile de) transformer ou intervenir sur notre objet de recherche (les comportements concurrentiels), nous avons choisit

« rester » au niveau de l’étude de cas. Ainsi si nous considérons que les sciences de gestion correspondent à une science de l’action, nous considérons qu’il est possible de proposer un processus de recherche valide et solide de production de connaissance et de concepts qui ne s’accompagnent pas nécessairement d’une intervention.

Ainsi si notre travail a bien le potentiel d’une recherche action - intervention nous avons structuré notre recherche sous convention CIFRE d’abord comme une étude de cas grâce à une observation participante et non comme une recherche action - intervention.

1.3.2) Une étude de cas

L’étude de cas en sciences de gestion est en effet une stratégie de recherche passionnante pour comprendre et expliquer des phénomènes complexes. Comme le souligne La Ville (2000) :

« dans le management stratégique, les études de cas sont largement utilisées pour

appréhender des phénomènes réputés complexes, c'est-à-dire des phénomènes qui englobent une multiplicité d’intervenants, qui intègrent différents niveaux d’actions enchâssées dans des dynamiques à la fois organisationnelles et environnementales, et dont les évolutions réellement significatives ne sont parfois décelables qu’a travers une approche longitudinale sur une longue période temporelle ».

Pour sa part, Wacheux (1996, p.89) définit l’étude de cas « comme une analyse spatiale et temporelle d’un phénomène complexe par les conditions, les évènements, les acteurs et les implications ». La définition la plus fréquemment utilisée est cependant celle proposée par Yin (1994) : « une étude de cas est une recherche empirique qui examine un phénomène contemporain au sein de son contexte réel lorsque les frontières entre phénomène et contexte ne sont pas évidentes et pour laquelle de multiples sources de données sont utilisées ».

Cette stratégie de recherche se distingue traditionnellement de l’enquête, de l’expérimentation, ou encore de l’étude historique. En effet, selon Yin (1994), l’enquête ou l’analyse documentaire s’intéressent aux questions de types « qui, quoi, où, combien » tandis que l’étude de cas est davantage axée sur une analyse en profondeur du « comment » et du

« pourquoi ». Si l’expérimentation s’intéresse à ces mêmes dernières questions, celle-ci cherche à dissocier le phénomène de son contexte. Par ses questions de recherche et son intérêt pour le contexte, l’étude historique est finalement proche de l’étude de cas, à la différence que l’une s’intéresse principalement à des faits passés et que l’autre se focalise essentiellement sur des évènements contemporains.

Plus globalement, l’étude de cas en gestion peut être une stratégie de recherche partielle, notamment dans le cadre de phase exploratoire, mais également une stratégie de recherche à part entière. Instrumentale ou intrinsèque (Stake, 1994), l’étude de cas peut être utilisée pour fournir une description, mais également tester ou générer une théorie (Eisenhardt, 1989).

Concernant la sélection des cas étudiés, ces derniers peuvent être uniques ou multiples (Hlady-Rispal, 2002), et avoir différents statuts : illustratif (valeur démonstrative), typique (cas général), test (de théories) ou enfin inédit ou exemplaire (rare ou innovant) (David, 2004).

Afin de comprendre et d’expliquer un phénomène complexe, l’étude de cas se base sur l’utilisation et la combinaison de différentes techniques de collecte des données : l’observation (participante ou non), l’analyse de documents et l’entretien.

Les limites des études de cas sont maintenant bien connues :

- critiques sur la rigueur scientifique et donc de fiabilité/validité des résultats - difficultés à généraliser les conclusions tirées d’un cas particulier

- analyses souvent lourdes et complexes qui peuvent être en décalage avec des attentes opérationnelles ou académiques.

Quoiqu’il en soit, même s’il a ses détracteurs, l’étude de cas reste un pratique de recherche qui garde ses atouts. « Les études de cas constituent une voie privilégiée d’investigation en ce qu’elles autorisent des analyses fines en termes de processus et qu’elles permettent d’aboutir à des modèles théoriques à la fois plus intégrateurs et dont la portée réelle peut être mieux cernée » (La Ville, 2000, p.74).