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c. Le LAH4-L1 induit une toxicité sur les embryons de poisson zèbre et une mortalité à forte dose chez les larves

Pour appliquer ces formulations aux études in vivo, ces dernières doivent être exemptées de toute toxicité. Dans le but d’analyser ce paramètre, nous avons utilisé un protocole mis au point au sein de l’équipe basé sur l’utilisation d’embryons de poisson zèbre. La manipulation de cet organisme modèle ne nécessite pas d’autorisation d’expérimentation animale jusqu’à 5 jours de développement (inclus), un stade au-delà duquel la larve commence à se nourrir. Pour analyser la toxicité, des embryons de poisson zèbre, deux approches ont été réalisées en parallèle. Dans la première approche, les analyses ont été effectuées sur des embryons fécondés depuis moins de 4 h et en présence du chorion, afin de voir un éventuel effet sur l’éclosion des embryons. Dans la deuxième approche, l’étude a été faite sur des larves de poisson zèbre de 24 heures dépourvues de leur chorion pour s’affranchir d’un éventuel effet protecteur de cette structure. Dans les deux cas, les embryons ou larves ont été immergés dans une solution comprenant les formulations à différentes concentrations et le développement de l’embryon a été analysé pendant 24 h. Pour chaque condition, 8 embryons ont été observés et une image représentative est présentée. La viabilité des embryons à 24 h est indiquée sur chaque image.

Dans le cas de la première approche, si la formulation n’induit pas de toxicité, l’embryon va se développer correctement et un profil identique à celui obtenu dans le contrôle (Mock) va être observé (Figure 56A). Au contraire, si les formulations présentent une certaine toxicité, le développement de l’embryon va être ralenti, altéré ou même stoppé. Par exemple, en présence de 3,4 dichloroaniline (3,4 DCA), une drogue affectant le développement, nous avons pu observer la présence de cellules isolées (Figure 56B). Le développement de l’embryon a été altéré par la drogue et les cellules ont été dégradées. La viabilité des embryons à 24 h est de 0 %. En présence des polyplexes et des nanocomplexes, nous avons observé que le développement et la viabilité des embryons sont fortement affectés, même à faible concentration (Figure 56C). Cette toxicité semble

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induite par le LAH4-L1. En effet, le peptide seul induit les mêmes résultats alors que les NP-PLA seules ne sont pas toxiques. Ces données suggèrent une toxicité des formulations comportant le LAH4-L1 dans ce modèle, avant même l’éclosion de l’embryon.

Figure 56 : Le LAH4-L1 présent dans les formulations induit un arrêt de développement et une mortalité sur les embryons de poisson zèbre après 24 h d’immersion.

Images des embryons de poisson zèbre à 24 h en présence de milieu de culture E3 (Mock) ( A), de 3,4 dichloroaniline (3,4 DCA) à une concentration de 8 μg/mL ( B) ou de l’une des formulations à différentes quantité s d’ARNm ou des équivalents pour les contrôles ( C). Une image représentative des 8 embryons testés est présentée pour chaque condition. La viabilité des embryons po ur chaque condition est inscrite sur chaque image.

Cependant, le LAH4-L1, un agent perturbateur des membranes, peut entrainer la formation de pores dans le chorion, entrainant l’entrée massive de composants présents dans le milieu de croissance et/ou issus des formulations. La présence de LAH4-L1 sur les cellules en division peut conduire à cette toxicité. Il est donc possible que la toxicité soit due à la propriété pénétrante du LAH4-L1.

Dans une deuxième approche, l’expérience a été répétée sur des larves de 24 heures dépourvues de leur chorion. Les larves ont été immergées dans une solution comportant une quantité de LAH4-L1 déterminée. Le développement correct des larves et leur viabilité ont été analysés après 24 h d’immersion (Figure 57). Nous avons pu remarquer que le peptide LAH4-L1 induit une mortalité chez les larves à partir de 30 ng d’ARNm par puit. En effet, la viabilité des embryons est de 25 % et 50 % pour les quantités d’ARNm égales à 30 et 60 ng / puit respectivement. Malgré cette mortalité, nous avons remarqué que le développement des embryons viables n’est pas affecté par la présence du LAH4-L1. De plus, au deux plus faibles doses d’ARNm, aucun impact du LAH4-L1 n’a

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été observé sur les 8 larves immergées. Le LAH4-L1 semble donc induire une toxicité limitée sur des organismes déjà formés à faible dose.

Figure 57 : Le LAH4-L1 induit une mortalité limitée, sans altération du développement, sur les larves de poisson zèbre après immersion pendant 24 h.

Images de larves de poisson zèbre de 48 h en présence de LAH4-L1 à différentes quantités . Une image représentative des 8 embryons testés est présentée pour chaque dose. La viabilité des embryons pour chaque condition est inscrite sur chaque image .

d. Les formulations basées sur l’utilisation de LAH4-L1 ne permettent pas

l’expression de l’ARNm vectorisé chez les larves de poisson zèbre

Dans une dernière partie, nous avons analysé la fonctionnalité des polyplexes et des nanocomplexes suite à des injections en intramusculaire sur des larves de poisson zèbre âgées de 15 jours (Figure 58A-B).

Figure 58 : Les ARNm vectorisés par les polyplexes et les nanocomplexes ne permettent pas l’expression des ARNm chez des larves de poisson zèbre.

(A) Images de larves de poisson zèbre de 15 jours suite à des injecti ons de 100 ng d’ARNm (ou équivalent pour les contrôles) en intramusculaire. Une image représentative des 6 larves injectées est présentée. La zone d’injection (encadrée en jaune) est agrandie dans l’image du dessous. La fluorescence verte dans l’intestin de la larve correspond à de l’auto -fluorescence. (B) Pourcentage de larves exprimant des cellules fluorescentes dans la zone d’injection. ( C) Viabilité des larves 24 heures après l’injection.

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Nous avons pu observer que seules les larves ayant été injectées avec l’ARNm libres ont exprimées ce dernier dans les cellules musculaires. En effet, 83 % des larves présentent des cellules fluorescentes au niveau du site d’injection. Cependant, avec les polyplexes et les nanocomplexes, une absence de fluorescence, synonyme d’une absence de fonctionnalité des complexes dans ces conditions, a été observée. Nous pouvons tout de même noter que l’injection des formulations chez les larves de 15 jours n’induit pas de mortalité (Figure 58C).

4. Discussions

Dans cette partie, nous nous sommes intéressés au potentiel des formulations basées sur l’utilisation du LAH4-L1 pour une application in vivo. En effet, dans la suite de ce projet, nous souhaitons analyser l’intérêt des formulations dans l’induction de réponses immunitaires chez les souris après injections en sous-cutanée. Pour cela, les formulations doivent être fonctionnelles dans un environnement comprenant du sérum et être exemptées de toute toxicité.

Dans un premier temps, nous avons analysé la fonctionnalité des formulations basées sur l’utilisation de LAH4-L1 dans du milieu complémenté en sérum. Nous avons pu observer que les polyplexes LAH4-L1/ARNm et les nanocomplexes NP-PLA/LAH4-L1/ARNm ne permettent pas d’induire une expression significative de l’ARNm eGFP dans trois types cellulaires (HEK293, HeLa et DC2.4) en présence de sérum. Dans la section précédente, nous avions observé un avantage particulier de ces formats de délivrance pour le ciblage des DC et l’induction d’une expression forte des transgènes. Afin de comprendre l’impact du sérum sur la fonctionnalité des ARNm vectorisés, un test de protection au sérum a été réalisé. Nous avons pu voir que l’ARNm présent dans les polyplexes et adsorbé à la surface des NP-PLA n’est pas protégé en présence de sérum. Le sérum comporte des enzymes de dégradation des ARNm, les RNAses, qui sont également présentes au niveau des tissus, et notamment au niveau sous-cutané, site d’injection prévu dans ce projet382. Une équipe a montré que la présence de RNasin®, un inhibiteur de protéase naturel, permet de protéger les ARNm des dégradations par les RNAses. Le traitement des sites d’injection avec des inhibiteurs de protéases et l’ajout de RNasin® dans les formulations peut prévenir la dégradation par les RNases au niveau des sites d’injection382. Il pourrait donc être intéressant de répéter l’expérience de protection en ajoutant dans les formulations le RNasin®.

Dans une deuxième partie, la toxicité associée aux formulations a été analysée dans un modèle de poisson zèbre, un Vertébré de petite taille au développement rapide. Nous avons pu remarquer que contrairement aux résultats obtenus sur les DC in vitro, les embryons de poisson zèbre sont sensibles aux formulations comportant le LAH4-L1. Cette toxicité n’est pas induite par les NP-PLA qui, seules, n’affectent pas le développement et la viabilité des embryons. Comme décrit précédemment, cette

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toxicité peut être induite par la propriété pénétrante du peptide LAH4-L1 qui entraine la formation de pores dans les membranes, une activité néfaste aux premiers stades de développement. Sur des larves de poisson zèbre de 24 h, la toxicité est plus modérée et apparait à partir d’un volume équivalent à l’ajout de 30 ng d’ARNm dans 100 μL (soit une concentration de LAH4-L1 de 6 ng/μL). Ensemble, ces données montrent un effet toxique des polyplexes et nanocomplexes induit par la présence du peptide LAH4-L1 à partir d’une concentration de 6 ng/μL. Cet effet est proportionnel à la quantité de peptide et au stade de développement du modèle animal.

Dans une dernière partie, la fonctionnalité des formulations a été testée sur des larves de poisson zèbre de 15 jours. Suite à des administrations en intramusculaire, nous avons pu voir que les polyplexes et les nanocomplexes formés à partir de LAH4-L1 ne permettent pas d’induire l’expression des ARNm dans ces conditions. Cependant, nous pouvons noter que la prise en charge de ces complexes est optimale par les cellules dendritiques. Pour cibler ces cellules dendritiques, il est préférable de réaliser des injections au niveau sous-cutanée. La réalisation d’analyses suite à des injections sous-cutanées dans un modèle souris pourra nous apporter plus d’informations quant à la fonctionnalité des ARNm ainsi vectorisés in vivo. De plus, il est important de noter que la nature de cellules phagocytaires ciblées est potentiellement très différente entre les poissons zèbres et les souris. Bien que des cellules phagocytaires présentatrices d’antigènes (macrophages) soient déjà présentes dans des jeunes larves de poisson, ces tests d’injection pourraient être tentés à un stade un peu plus tardif, après l’apparition de DC383. De plus, l’échelle de l’organisme étant très différente, les volumes injectables sont beaucoup plus petits chez la larve de poisson, ce qui ne permet que de potentiellement toucher petit nombre de cellules. Le poisson zèbre est un modèle avantageux pour les approches d’imagerie, cependant le passage au modèle souris est nécessaire dans la suite de ce projet.

Dans de prochaines études, il pourrait être intéressant d’éliminer l’excès de LAH4-L1 des formulations, par centrifugation douce sur filtre de taille adaptée. Bien que cet excès soit nécessaire au fonctionnement des formulations in vitro, il peut induire une toxicité et affecter la prise en charge

in vivo. En outre, l’encapsulation des polyplexes et nanocomplexes dans une bicouche lipidique

pourrait également être une stratégie prometteuse pour permettre la protection des ARNm vectorisés. En effet la présence de cette couronne permettrait de prévenir des dégradations, de favoriser le relargage direct des polyplexes et nanocomplexes dans le cytoplasme des cellules via la fusion des lipides avec la membrane plasmique, et de diminuer la cytotoxicité induite par la formation de pores dans les membranes.

Pour conclure, nous avons pu voir dans cette partie que des ajustements sont nécessaires pour pouvoir appliquer les polyplexes et les nanocomplexes in vivo chez la souris.