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approches physicochimiques et structurales

1.3.5 La spectroscopie RMN

Comme vu dans la partie « Matériel et Méthodes » (paragraphe A.4), un spectre HSQC est un spectre 2D représentant la corrélation entre des noyaux de nature différente. Dans notre cas, notre étude s’est appuyée sur la corrélation 1H-15N (couplage scalaire du proton amide d’un résidu avec l’azote amide du résidu voisin), au sein de la protéine CopH. Pour cela, la protéine a été surexprimée en milieu enrichi en 15N. Sur le spectre enregistré (Fig. 88), les fréquences RMN des différentes résonances sont largement distribuées dans le plan des déplacements chimiques δ(1H) et δ(15N), ce qui est caractéristique des protéines correctement repliées. En effet, au sein d’une structure globulaire, bien structurée et peu flexible, chaque proton amide se trouve dans un environnement électronique qui lui est propre. Chacun est caractérisé par un déplacement chimique δ différent de celui de son voisin, d’où une large distribution de ces valeurs dans le plan 1H-15N. Au contraire, les acides aminés, situés dans une région plus flexible, sont exposés au solvant et se trouvent donc tous dans un environnement chimique similaire. L’environnement électronique est donc semblable d’un résidu à l’autre, d’où l’observation de raies fines et intenses, qui se superposent, dans une zone au centre du spectre δH = 8,2-8,4 ppm. Le spectre de CopH présente une large distribution des résonances. On remarque cependant de nombreuses résonances, caractérisées par une intensité plus forte, au centre du spectre. Nous pouvons conclure que la protéine

présente des zones bien structurées mais aussi une partie très flexible, pauvre en structures secondaires. D’autre part, seulement 85 à 90 pics sur les 119 résonances attendues (127 résidus auxquels sont enlevés les 7 prolines et le groupement amino-terminal) sont visibles. Cette absence de pics peut avoir deux raisons : l’existence d’échanges conformationnels lents (menant à l’élargissement des raies qui deviennent donc moins intenses et disparaissent dans le bruit de fond), et/ou l’existence des protons amide en échanges rapides avec le solvant. Cet échange est catalysé par les ions hydroxyles OH-. A pH = 7,5, l’échange des protons amide non protégés est suffisamment rapide pour que la résonance ne soit plus visible. Ainsi, pour minimiser l’effet de ces échanges avec le solvant, nous avons abaissé le pH à 6,5 : plusieurs résonances nettes et intenses apparaissent au centre du spectre et 110 pics peuvent alors être décomptés (Fig. 88). Les résonances qui réapparaissent à pH = 6,5 se situent au centre du spectre, et font donc certainement partie de régions flexibles de la protéine. Par conséquent, l’absence d’un grand nombre de résonances à pH = 7,5, et la visualisation de certains d’entre eux à plus bas pH, au centre du spectre, révèle l’existence de nombreux protons échangeables avec l’eau au sein de parties flexibles, et donc la nature de la structure, pauvre en structures secondaires, aux alentours des résidus correspondants. D’autre part, les différentes résonances n’étant pas dédoublées, nous pouvons penser que CopH se présente sous la forme d’un dimère symétrique en solution.

Figure 88 : Spectre RMN de la protéine sauvage CopH à pH = 7,5 puis pH = 6,5. Les résonances sont largement

distribuées dans le plan des déplacements chimiques mais nombre d’entre elles sont rassemblées au centre du spectre, zone correspondant aux protons amide situées au sein de régions très flexibles de la protéine. A pH = 6,5, plusieurs résonances nettes et intenses apparaissent au centre du spectre, en comparaison du spectre enregistré à pH = 7,5, et 110 pics peuvent alors être décomptés.

15

N

1H

CopH apo

à pH = 7,5

15

N

1H

CopH apo

à pH = 6,5

NH

2

des Asn et

Gln

Gly

Acides aminés au

sein de parties très

flexibles

Trp

Une preuve supplémentaire de la nature pauvre en structures secondaires de la protéine a été donnée par l’analyse d’expériences de corrélation HET-SOFAST 1H-15N (Schanda, P. et al. 2006) (voir le chapitre « Matériels et Méthodes » – paragraphe A.4). Ces dernières sont issues de l’application de différentes idées, étudiées en méthodologie RMN, afin de minimiser le temps total nécessaire pour obtenir des informations structurales sur une protéine. L’une de ces idées est de minimiser le temps entre chaque scan, c’est-à-dire le temps de relaxation longitudinale de l’aimantation après impulsion, en diminuant par exemple l’angle d’impulsion. Une méthode, appelée 1H-15N HET-SOFAST-HMQC (Schanda, P. et al. 2006), a ainsi été mise au point au laboratoire de RMN (IBS) afin d’obtenir une détermination semiquantitative du repliement d’une protéine, en un temps très court. Dans les expériences nommées SOFAST-HMQC, une séquence de pulses mène à l’inclinaison sélective de l’aimantation d’un type de protons, par exemple les protons amide, d’un angle de 60° (120° puis 180°) < 90°. D’autre part, l’énergie envoyée est transférée à travers le réseau de spins 1H via les couplages dipolaires NOE 1H-1H, les protons aliphatiques, non excités par la séquence de pulses participant à la relaxation en servant de « réservoir » d’énergie. La relaxation longitudinale des protons amide se produit donc en un temps plus court. Les pulses visant les protons amide sont centrés à 9,5 ppm sur une largeur d’environ 4 ppm. Dans les expériences HET-SOFAST-HMQC, un pulse d’inversion sélectif (180°) est ajouté en début de séquence. L’expérience se passe en deux temps :

* elle consiste d’abord en une SOFAST-HMQC, qui constitue l’expérience de référence. Une séquence de pulses permet ainsi d’exciter sélectivement les protons amide. L’énergie est alors transférée à travers le réseau de spins 1H via les couplages dipolaires NOE 1H-1H, et évacuée vers les spins 1H situés au sein des parties flexibles de la protéine. On mesure alors Iréf, correspondant à la vitesse de relaxation de chaque proton, à travers le réseau de spins 1H. Si le proton se trouve au sein d’une région bien repliée de la protéine, alors le transfert d’énergie à travers le réseau de spins 1H sera efficace et Iréf sera grand. Au contraire, si le proton se situe dans une zone plus flexible, il aura plus de mal à transférer son énergie de polarisation via le réseau de spins 1H peu dense, et Iréf sera petit (Fig. 89).

* dans un deuxième temps, une impulsion de 180°, appliquée aux protons aliphatiques, est ajoutée en début de séquence. Cela correspond à une 1H-15N HET-SOFAST-HMQC. Dans ce cas, les protons aliphatiques possèdent une énergie de polarisation et ne peuvent plus jouer le rôle de ‘réservoir’ d’énergie. Ainsi, l’efficacité de la diffusion énergétique d’un proton amide particulier, à travers le réseau de couplages dipolaires de spins 1H, sera réduite et dépendra de son environnement en protons aliphatiques. On mesure alors Isat, vitesse de

relaxation des protons amide dans le cas où les protons aliphatiques ont été également excités. Le rapport Isat/Iréf = λNOE nous renseigne sur les interactions existant entre les protons amide et les protons aliphatiques. Dans le cas d’un proton situé dans une zone bien repliée de la protéine, la diffusion de l’aimantation auprès des autres protons du réseau est efficace et Isat < Iréf d’où λNOE < 1. Dans le cas d’un proton situé dans une région flexible, Isat ≈ Iréf et λNOE ≈ 1 (Fig. 89).

Figure 89 : Illustration de la diffusion des spins 1H-1H dans le cas (a) d’une chaîne polypeptidique allongée, flexible, caractérisée par un réseau de spins 1H de

faible densité (λNOE ≈ 1), et dans le cas (b) d’une

protéine globulaire bien repliée caractérisée par un réseau de spins 1H rigide, de forte densité (λNOE < 1)

(Schanda, P. et al. 2006).

Cette méthode a été utilisée dans notre cas pour la détermination semiquantitative de la structure globulaire et de l’hétérogénéité de la protéine CopH en solution à partir de l’étude de la densité en protons aliphatiques au niveau des protons de la liaison amide. La figure 90 montre la distribution des valeurs λnoe calculées pour les 81 pics de corrélation 1H-15N pour lesquels l’intensité a pu être mesurée de façon fiable. De faibles valeurs λnoe indiquent ainsi une haute densité en protons aliphatiques, autour du proton de la liaison amide. Cette information est reliée à la localisation du proton au sein de la région structurée de la protéine. La distribution des valeurs λnoe montre que CopH est une protéine dont la structure est très

hétérogène, structure constituées à la fois de régions structurées et de régions plus flexibles

(Schanda, P. et al. 2006). D’autre part, il apparaît que seulement 50 résidus

approximativement sont situés dans une région bien structurée (λnoe < 0,35), ce qui est en

Figure 90 : λnoe tracés pour chaque

résidu au sein de CopH apo (points noirs) et CopH métallée (points gris). λnoe < 0.35 caractérise les

groupes amides encombrés dans la partie bien structurée de la protéine.

λnoe > 0.35 indique une exposition

plus importante au solvant.

D’autre part, le Cu(II) étant paramagnétique, le moment magnétique de son électron non apparié affecte les résonances des noyaux aux alentours en induisant une élévation de leur temps de relaxation (Bertini, I. et Pierrattelli, R. 2004). Les pics des noyaux correspondants sont alors plus larges et difficiles à distinguer. Des expériences HET-SOFAST 1H-15N (Fig. 90) et HSQC 1H-15N (Fig. 91) ont alors été réalisées pour suivre les variations spectrales et structurales dues à la fixation de cuivre. Pour cela, du cuivre (CuCl2) a été ajouté petit à petit, jusqu’à 0,9 équivalents molaires, à une solution de protéine (dimérique) concentrée à 0,4 mM à pH = 6,5. La figure 91 montre la superposition des spectres HSQC 1H-15N de l’apo- protéine et de la protéine fixant le cuivre. L’ajout de cuivre sur CopH n’induit pas de changements majeurs au niveau des déplacements chimiques, confirmant encore une fois que

la fixation du cuivre n’induit pas de changements conformationnels significatifs. Comme

attendu, plusieurs pics disparaissent du spectre, pics correspondant aux résidus proches du cuivre. Les résidus correspondant se situent à la fois dans la région structurée (en particulier un résidu glycine, quelques résidus situés dans la région des chaînes latérales des asparagines et glutamines, et plusieurs résidus dans le quart inférieur gauche du spectre), et dans la partie plus flexible de la protéine (au centre du spectre), comme le montrent le spectre de la figure 23 et les valeurs λnoe mesurées pour les mêmes pics sur le spectre de l’apo-protéine. La comparaison des valeurs λnoe de la forme apo et de la forme métallée (Fig. 90) démontre également que la fixation du cuivre n’induit pas de structuration au sein de la protéine, résultats concordant avec ceux obtenus par CD.

Partant de l’idée que le site cuivre se situerait du côté N-terminal, proche des histidines, il est raisonnnable de penser que la résonance disparaissant dans la région propre aux glycines, lors de l’ajout de cuivre, est la glycine 27.

Figure 91 : Superposition des spectres HSQC 1H-15N de CopH (0.4 mM) en absence (en noir) et en présence de 1,8 équivalents de Cu(II) (en rouge). Les deux spectres ont été enregistrés à pH = 6,5 à 25°C. La fixation de cuivre n’induit pas de changements conformationnels significatifs. Plusieurs résonances disparaissent cependant du spectre : par exemple, un résidu glycine (peut-être la glycine 27 ?), quelques résidus dans la zone des arginines et glutamines (en vert) et plusieurs résidus dans le quart inférieur gauche du spectre (en bleu), puis plusieurs résidus dans la partie plus flexible de la protéine (au centre du spectre) (en rose).

Enfin, d’autres enregistrements RMN visant à attribuer les différentes résonances à chaque résidu ont été réalisés. L’attribution est en cours mais s’avère difficile pour deux principales raisons : le grand nombre de superpositions des résonances au centre du spectre, et la forte intensité des pics situés dans cette même région et masquant alors les voisins (Fig. 88).

Gly 27 ?