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A – Techniques relatives à CopH

A.3 La microcalorimétrie de titrage isotherme (ITC) 1 Principe

* Quelques rappels thermodynamiques

L’interaction non covalente entre une macromolécule M et son ligand L, donnant lieu à la formation d’un complexe ML, peut s’écrire comme la réaction réversible suivante :

M + L ML

La propension que cette réaction se fasse dans le sens de formation du complexe est définie par la constante d’association ou constante d’affinité Ka, égale au rapport entre la forme complexée et les formes libres des deux espèces : Ka = [ML] / [M][L].

Comme toute interaction moléculaire, celle-ci donne lieu à des échanges d’énergie. D’un point de vue thermodynamique, la constante d’affinité Ka est fonction de l’énergie libre de l’interaction (énergie de Gibbs ΔG) et s’écrit : Ka = e-ΔG / RT où T est la température (exprimée en kelvin) et R = 8.314 J.mol-1.K-1. Plus cette constante est grande, plus l’affinité entre les deux molécules est forte. L’énergie ΔG est la résultante des deux contributions énergétiques, l’enthalpie ΔH et l’entropie ΔS : ΔG = ΔH - TΔS. L’enthalpie reflète la force des interactions entre les deux espèces par rapport à ceux entretenus avec le solvant. Elle rend compte de l’énergie échangée par le système. Tout système ayant tendance à avoir l’énergie la plus basse possible, ΔH tend à être négatif. L’entropie fait référence au degré de désordre du système et dépend à la fois du réaménagement du solvant s’opérant autour des molécules lors de la reconnaissance et de la diminution des degrés de liberté des espèces au moment de l’interaction. Dans le cadre des interactions moléculaires, ces deux grandeurs correspondent à des mécanismes d’interactions différents (Fig. 38).

Figure 38 : Diagramme schématique représentant différents profils thermodynamiques d’interactions

moléculaires souvent rencontrées en biologie : (A) fortes liaisons hydrogène accompagnées de changements conformationnels ; (B) liaisons dominées par des interactions hydrophobes ; (C) contributions hydrophobes et faible contribution favorable de liaisons hydrogène (Ladbury, J. E. et Doyle, M. L. 2004).

* La microcalorimétrie de titrage isotherme (ITC)

Parmi les différentes méthodes qui permettent d’étudier la thermodynamique de la reconnaissance entre deux espèces (protéine-métal, protéine-sucre, protéine-protéine ou autre), la microcalorimétrie de titrage isotherme (ITC) est la seule permettant d’obtenir, de façon directe et quantitative, tous les paramètres caractérisant l’interaction (constante d’affinité Ka, stœchiométrie d’interaction n, contributions enthalpiques ΔH et entropiques S), en une seule expérience, à une température donnée. De plus, contrairement à d’autres

méthodes nécessitant l’immobilisation d’une des deux molécules, pouvant parfois gêner l’interaction et par là même l’interprétation des résultats, la microcalorimétrie laisse les molécules libres en solution. Elle permet alors d’accéder à des informations concernant la nature des forces menant à la formation d’un complexe (reconnaissance moléculaire), au maintien d’une structure tridimensionnelle (stabilité moléculaire), à la cinétique et la thermodynamique de réactions enzymatiques…

Le microcalorimètre contient deux cellules isolées de l’environnement externe par une enceinte adiabatique, maintenue à température constante pendant le temps du titrage. Une cellule de référence contient du tampon, uniquement. La même solution, contenant la protéine, est placée dans une deuxième cellule, dite de travail (Fig. 39).

Figure 39 : Microcalorimètre ITC

De petites quantités (environ 5 à 10 µL) de réactif sont ajoutées à l’aide d’une seringue, à intervalle régulier. A chaque injection, l’interaction entre les deux molécules s’accompagne d’un dégagement ou d’une absorption de chaleur (réaction exothermique ou endothermique) qui entraîne une variation de la température au sein de la cellule de travail. L’appareil applique alors une puissance électrique afin de rééquilibrer la température entre les deux cellules. C’est ce signal qui est mesuré par le microcalorimètre. La puissance fournie est mesurée en fonction du temps, puis intégrée (Fig. 40).

Figure 40 : Données microcalorimétriques. (A) données brutes (µcal/sec en fonction du temps). Si l’interaction provoque un

dégagement de chaleur (phénomène exothermique), la puissance DP (Differential Power) est négative et les pics observés sont orientés vers le bas. DP > 0 si le phénomène est endothermique et les pics sont dirigés vers le haut. (B) Données intégrées (kcal/mol de ligand en fonction du rapport molaire ligand/macromolécule). La courbe sigmoïde théorique est ajustée aux données expérimentales.

A partir des données brutes, la variation d’enthalpie ΔH, la constante d’association Ka et la stœchiométrie n peuvent être déterminées avec un ajustement de la courbe expérimentale sur le modèle théorique approprié, modèle obtenu par une régression utilisant la méthode des moindres carrés (Wiseman, T. et al. 1989). Il est alors possible de calculer la quantité de chaleur ΔQ instantanée. Pour un modèle d’interaction dans lequel chaque site est indépendant,

la chaleur cumulée au cours de toutes les injections s’écrit :

où [X]t et [M]t sont les concentrations respectives totales du ligand et de la protéine, Vo le volume effectif de la cellule de mesure et dQ la variation de la quantité de chaleur échangée, calculée à chaque point de la courbe de titrage. L’enthalpie ΔH et la constante d’affinité Ka permettent de déduire tous les autres paramètres thermodynamiques. L’enthalpie ΔH° influence directement l’amplitude de la courbe, tandis que la position du point d’inflexion donne la stœchiométrie n. En revanche, la forme générale de la courbe dépend du paramètre de Wiseman c qui est défini comme : c = n[M]0Ka où n[M]0 représente la concentration initiale de sites de liaison en solution. La détermination des paramètres thermodynamiques est optimale lorsque la courbe se rapproche de la forme sigmoïdale. En pratique, cela correspond à un facteur de Wiseman c compris entre 10 et 100 (Fig. 41).

Figure 41 : Variations de la forme des courbes de titrage ITC en fonction de c

A.3.2 Protocole expérimental

Les expériences de microcalorimétrie ont été effectuées dans le laboratoire de glycobiologie moléculaire (CERMAV, Grenoble) où j’ai été accueillie et formée par Anne Imberty et Catherine Gautier.

Les mesures microcalorimétriques de la réaction d’association de CopH ou ses mutants avec les ions Cu(II) ont été réalisées en tampon MOPS 20 mM pH = 7,5, à 25°C, à l’aide d’un calorimètre MicroCal VP-ITC dont la cellule de réaction contient exactement 1.4478 mL.

La solution protéique (2 mL) est préalablement dégazée puis disposée dans la cellule à l’aide d’une seringue, lentement pour éviter l’introduction de bulles d’air. La seringue est remplie avec la solution de CuCl2 fraîchement préparée et disposée dans la cellule contenant l’échantillon. La protéine CopH, concentrée à 50 µM (soit 100 µM en monomère), en tampon MOPS 20 mM pH = 7.5, est titrée avec la solution CuCl2 1,7 mM. La solution de cuivre est ajoutée par incréments de 5 µL, suivant 60 injections espacées de 240 secondes. Le blanc correspond à 60 injections de CuCl2 concentrée à 1,7 mM dans du tampon MOPS 20 mM pH = 7,5.

Les mutants, concentrés également à 50 µM (soit 100 µM en monomère) en tampon MOPS 20 mM pH = 7,5, sont titrés avec la solution CuCl2 concentrée à 1 mM. 30 injections de 10 µL sont effectuées, espacées de 300 secondes. Le blanc correspond à 30 injections de CuCl2 concentré à 1 mM dans du tampon MOPS 20 mM pH = 7.5.

Les constantes ΔH, ΔS, Ka et la stoechiométrie n de la réaction sont estimées à partir des isothermes obtenues en utilisant le programme d’analyse calorimétrique Origin pour

ITC.

A.4 Résonance plasmonique de surface (RPS)

A.4.1 Principe

Un système de détection utilisant la RPS permet de quantifier l’interaction entre molécules et la formation de complexes. L’un des partenaires est immobilisé sur une surface. Les appareils commercialisés par la marque Biacore AB associent une telle détection à un

système d’injection et de transfert de liquide. Ils disposent également de logiciels d’analyse cinétique des interactions mesurées.

Lors de la réflexion totale d’un faisceau laser sur une surface d’un matériau riche en électrons libres, un phénomène de résonance peut apparaître entre les électrons et l’onde évanescente produite près de la surface. Ce phénomène entraîne une chute d’intensité de la lumière réfléchie à un angle donné, variable suivant l’indice de réfraction du milieu situé près de la surface, dans le champ évanescent. Les variations de masse induites par la formation de complexes impliquant des molécules greffées sur la surface modifient cet indice et peuvent donc être mesurées. Le signal de résonance est quantifié en unité de résonance arbitraire (RU). Une variation de 1000 RU correspond à une déviation de l’angle de résonance de 0.1° et à une variation de masse de 1 ng.mm-2.

Une courbe de RPS, également appelée « sensorgramme », comprend en général trois phases :

* la phase d’association pendant laquelle le partenaire est injecté sur la surface dans un tampon bien choisi. Cette phase se caractérise par un signal croissant si l’interaction a lieu.

* à la fin de l’injection, vient la phase de dissociation pendant laquelle le tampon seul est injecté. Le signal décroît.

* la phase de régénération permet d’éliminer les reste de partenaires fixés à la surface et qui gêneraient les enregistrements ultérieurs. Cette phase correspond à l’injection de solution de lavage (par exemple du sel, du détergent, un chélateur plus fort que le partenaire en solution, etc…).

A.4.2 Protocole expérimental

Les expériences de SPR ont été effectuées dans le laboratoire d’enzymologie moléculaire (LEM/IBS-Grenoble), sur un appareil Biacore 1000 équipé d’une surface NTA (acide nitrilotriacétique), à 20°C. Les courbes ont été traitées avec le logiciel BiaEval.

L’appareil est initialisé en utilisant le tampon de travail (10 mM Hepes pH = 7,4, 150 mM NaCl, 50 µM EDTA et 0,005 % de tensio-actif P20) et la surface NTA est chargée avec 500 µM NiCl2.

La solution protéique (CopH ou ses mutants) est diluée dans le tampon de travail (50 µM dans 300 µL). La surface est tout d’abord chargée en ions Ni2+, à un débit de 5 µL/min. Lorsque la résonance est stabilisée, la solution protéique (300 µL) est injectée à un

débit de 30 µL/min (soit 10 minutes pour atteindre la résonance maximale pour la concentration en protéine donnée à la fin de la phase d’association dans notre cas). Après la phase de dissociation (environ 300 secondes), la surface est régénérée par l’injection d’EDTA (50 mM) à un débit de 15 µL/min. Pour chaque expérience, un blanc est effectué en parallèle sur une surface sans métal afin de pouvoir ensuite soustraire les éventuelles associations non spécifiques.

Concernant CopH, plusieurs solutions à différentes concentrations (50, 75, 100, 150, 200, 250, 400 µM) ont été analysées sur la surface Ni-NTA afin de pouvoir estimer la constante apparente de dissociation Kd.

Le même type d’expériences a été effectué avec les mutants (25, 50, 75, 100, 150, 200, 400, 800 µM).

L’étude de l’influence du pH sur l’association et la dissociation de CopH et du double mutant His24-26Ala sur la surface Ni-NTA a été effectuée en injectant des tampons à différents pH au cours de la phase de dissociation : Hepes pH = 7,5 – 7,0, Pipes pH = 6,8 – 6,1 et MES pH = 6,0 – 5,5.

A.5 Chromatographie d’affinité

Les affinités relatives des protéines CopH, His26Ala, His24Ala et His24-26Ala ont été comparées par chromatographie d’affinité sur colonne HiTrapTM Chelating HP (1mL) (GE Healthcare) chargée en cuivre.

La colonne est lavée en eau, chargée en cuivre (0,5 mL de CuCl2 100 mM) et repassée en eau avant d’être équilibrée en tampon 1 (Hepes 0,02 M pH = 7.5, NaCl 0,3 M) avec un débit de 0,5 mL/min. 500 µg de protéine dans 500 µL sont injectés sur la colonne. Cette dernière est lavée avec 3 mL de tampon 1 avant d’éluer la protéine par un gradient linéaire d’imidazole, de 0 à 100 mM, sur 10 mL.

A.6 Résonance magnétique nucléaire