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2.4 La diffusion des rayons X (SAXS)

2.4.4 La mesure des interactions de solutions de PM

Les différentes composantes du potentiel d’interaction. Les forces d’interaction

entre deux particules en solution sont la résultante de la combinaison de trois types d’interactions élémentaires : les interactions répulsives de volume exclu, les interactions électrostatiques et celles de polarisation liées à la nature électrostatique des molécules. Nous allons, dans la suite, détailler ces trois types d’interactions en considérant des par- ticules sphériques dans un système isotrope, c’est à dire où il n’existe pas de direction privilégiée pour les interactions, qui dépendent alors uniquement de la distance r. Nous aborderons ensuite les interactions solvant/colloïde

Les forces de volume exclu traduisent l’effet de répulsion des nuages électroniques de deux particules qui se rapprochent. Purement répulsives, elles sont aussi appelées forces de répulsion stérique ou cœur dur. De très courtes portées, ces forces se caractérisent par une augmentation brusque de leurs intensités lorsque deux molécules s’approchent. Pour les macromolécules biologiques, le modèle de sphères indéformables est une bonne première approximation. Dans ce cas l’expression du potentiel, dit de "sphère dure", est donnée par :

U(r) =

,

+∞ pour r<D

0 pour r>D (2.34)

avec D : diamètre de la particule

Il faut toutefois noter que d’autres modèles du potentiel de répulsion stérique existe afin de tenir compte de l’éventuelle compressibilité des particules, mais nous ne les aborderons pas dans ce travail.

Les interactions électrostatiques - Les forces coulombiennes (charge/charge)

Entre deux particules de charges Z1 et Z2 situées à une distance r dans un solvant

coulombiennes dont le potentiel s’écrit :

U(r) = Z1Z2

4πε0εsr

(2.35) où ε0 est la permittivité du vide, que pondère la constante diélectrique εs pour tenir compte du milieu.

Cette interaction à longue portée est attractive pour des particules de charges opposées, et répulsive pour des charges de même signe.

- Les forces charge/dipôle permanent

Avant de présenter les forces charges/dipôles, il convient ici de définir tout d’abord la notion de dipôle permanent. Il s’agit en fait d’une particule dont la structure présente deux pôles ponctuels de charges de signes opposés mais d’intensité égale, notée z. La "force" du dipôle est caractérisée par son moment dipolaire µ =zl, où l est le vecteur orienté de la charge négative vers la charge positive. Une molécule est constituée d’un ensemble de dipôles ui et peut être considérée comme un dipôle unique de moment dipolaire µ = - ui, si ce moment dipolaire est non nul (dans l’espace et dans le temps), la molécule est dite polaire.

En solution des interactions charges/dipôles vont se créer et dépendent de l’orien- tation du dipôle par rapport à la charge Z. Dans l’eau, l’interaction charge/dipôle est généralement d’intensité inférieure à l’énergie d’agitation thermique kBT, ce qui la rend négligeable. Les dipôles sont donc libres de tourner à peu près librement. En moyen- nant par une distribution de Boltzmann toutes les orientations de dipôles, le potentiel d’interaction est donné par :

U(r) = − Z 2µ2 6(4πε0εs)2kBT r4 pour 4πε0εsr2 < kBT (2.36)

- Les forces dipolaires (dipôle permanents/dipôle permanents)

L’interaction dipôle/dipôle permanents est encore plus faible que la précédente dans le cas de macromolécules. Elle n’induit pas d’alignement des molécules polaires, l’utilisation d’une moyenne de Boltzmann sur toutes les orientations donne l’expression du potentiel d’interaction entre deux dipôles µ2

1 et µ22 suivant : U(r) = − µ 2 1µ22 3(4πε0εs)2kBT r6 pour µ1µ2 4πε0εsr3 < kBT (2.37) Ce potentiel variant en 1/r6 est appelé potentiel d’orientation ou de Keesom. Il est l’un des

trois potentiels qui constituent l’interaction de van der Waals entre atomes et molécules (cf. §2.4.4, page97)

Les interactions de polarisation Tout atome ou toute molécule est polarisable,

c’est à dire que son nuage électronique peut être déformé sous l’action d’un champ élec- trique E extérieur. Ce champ électrique est créé par la présence des charges et dipôles permanents dans l’environnement de la particule considérée. Cette dernière présente alors un moment dipolaire induit µind proportionnel à E : µind = αE, où α est la polarisabilité de la particule. Il se défini alors trois potentiels d’interaction :

L’interaction charge/dipôle induit, entre une molécule de charge Z et une molécule

non-polaire (dipôle induit) de polarisabilité α :

U(r) = − αZ

2

2(4πε0εs)2r4

(2.38)

L’interaction dipôle permanent/dipôle induit, entre un dipôle permanent µ et

une molécule non-polaire de polarisabilité α :

U(r) = − αµ

2

(4πε0εs)2r6

(2.39) Appelée interaction de Debye ou induction, c’est la deuxième composante des interactions de van der Waals (cf. §2.4.4, page 97)

L’interaction dipôle induit/dipôle induit, entre tous les atomes ou molécules, y

compris celles neutres et apolaire. Les molécules apolaires possèdent un moment dipolaire en moyenne nul dans le temps, mais présente un moment dipolaire fini à chaque instant, créé par la position à l’instant t des électrons en rotation autour des protons du noyau. Ce dipôle instantané génère un champ électrique capable de polariser les atomes ou molécules voisines, qui deviennent alors à leur tour des dipôles induits. Le potentiel d’interaction entre deux atomes différents, de polarisabilité α1 et α2, et d’énergie première d’ionisation2

Ei1 et Ei2 s’écrit : U(r) = −3 2 α1α2 (4πε0εs)2r6 Ei1Ei2 Ei1+ Ei2 (2.40) Cette force est appelée force de dispersion ou force de London, et constitue la troisième et dernière composante des forces de van der Waals (cf. §2.4.4, page97)

Les interactions de van der Waals Les interactions de van der Waals caracté-

risent les interactions existantes entre deux entités polaires, ou polarisables. Comme nous l’avons introduit dans les paragraphes précédents les forces associées regroupent

1. les forces d’orientation, ou de Keesom (dipôle permanent/dipôle permanent)

2. les forces d’induction, ou de Debye (dipôle permanent/dipôle induit) 3. les forces de dispersion, ou de London (dipôle induit/dipôle induit)

toutes variant en 1/r6. L’expression du potentiel de van der Waals peut donc s’écrire :

Uvdw(r) = −

Jvdw

r6 = −

Jorient+ Jind+ Jdisp

r6 (2.41)

où Jorient, Jind, Jdisp peuvent être respectivement extraits des équations 2.37, 2.39, et

2.40, aussi bien pour les molécules que les atomes.

Dans le cas de deux macromolécules, l’interaction de van der Waals peut être calculée à l’aide de la théorie de Lifshitz qui considère les particules comme des milieux continus caractérisés par leur constante diélectrique statique et leur indice de réfraction. Ainsi pour deux particules sphériques de rayon R situées à une distance r l’une de l’autre, le potentiel de van der Waals s’écrit :

Uvdw(r) = − A 12 ( 4R2 r2− 4R2 + 4R2 r2 + 2ln " 1 − 4R2 r2 #) (2.42) où A est la constante de Hamaker qui dépend des constantes diélectriques (ε) et des indices de réfraction (n) de la particule (indicés p) et du solvant (indicés s) selon l’équation :

A = 3 4kT " εp− εs εp+ εs #2 + 3Ei 16√2 (n2 p− n2s)2 (n2 p+ n2s)3/2 (2.43) Son premier terme correspond aux interactions de Debye et de Keesom, alors que le second tient compte des forces de dispersions. En première approximation le potentiel d’ionisation (Ei = 12 eV), l’indice de réfraction (np = 1.519) et la constante diélectrique (εp = 2) sont constants d’une protéine à l’autre [149], ce qui permet d’estimer la constante de Hamaker à 3kBT.

Les interactions solvant/colloïde Comme on le voit par la présence du facteur εs dans les équations 2.35 à 2.40, les interactions vont subir des modifications, souvent non négligeables, en fonction du solvant. En effet celui-ci peut moduler les propriétés de la particule comme sa charge (en fonction du pH ou de la force ionique) ou sa polarisabilité. De façon réciproque, la présence du colloïde perturbe l’organisation locale du solvant par le volume qu’il occupe d’une part, et par les forces de solvatation qu’il engendre. Dans notre étude les particules (tensioactifs, micelles, protéines) étant toujours en solvant aqueux, les principales forces exercées sont les forces hydrophiles (d’hydratation) et les effets hydrophobes. Une surface hydrophile (souvent polaire ou chargée) présente une plus grande affinité pour l’eau que pour les autres surfaces hydrophiles. Elle va donc préférentiellement s’entourer de molécules d’eau, provoquant une restructuration de celles- ci (via les liaisons hydrogène) dans la couche d’eau vicinale à la surface. Deux colloïdes

hydrophiles en solution exercent ainsi une force d’hydratation répulsive l’un envers l’autre. A l’inverse, une surface hydrophobe montre peu d’affinité pour l’eau, produisant une force attractive pour les autres surfaces hydrophobes du milieu. Par conséquent, en solution les surfaces hydrophiles se repoussent et les surfaces hydrophobes s’attirent, ces phénomènes sont à l’origine de nombreux processus naturels tels que le repliement de protéine ou la micellisation.

Modulation des interactions et de la solubilité

Les effets de sel Les sels en solution sont des espèces chargées capables d’écranter

les charges de la protéine, ce qui va influer sur la force des interactions existantes, notam- ment via les forces de Coulomb. Pour des pH éloignés du point isoélectrique, pI, le nombre de charges des protéines augmente, induisant une plus grande répulsion entre protéines, et donc une augmentation du second coefficient du viriel. Inversement à pH proche du pI, les protéines sont faiblement chargées, les interactions coulombiennes répulsives sont plus faibles. Cependant les protéines étant très sensibles aux variations de pH, la plage où la protéine reste stable est limitée et dépend de chaque protéine.

Outre l’effet de pH, les sels jouent aussi un rôle par la force ionique qu’ils imposent. Ainsi les interactions protéine/protéine évoluent de façon continue du répulsif (à faible force ionique), à moins répulsif, ou attractif, à forte concentration en sel. Il faut toutefois noter qu’avant cette phase de "salting out", pour les faibles concentrations en sel, la plupart des protéines connaissent une courte phase de "salting in". Dans ce cas, l’ajout de sel provoque une augmentation de la solubilité des protéines qui se traduit par l’augmentation du A2 et des interactions répulsives. La portée de l’attraction amenée par un sel est faible,

et sa force est spécifique de la nature du sel (cf. figure 2.14). L’efficacité d’un anion à induire des attractions suit l’ordre direct ou inverse de la série de Hofmeister (en fonction du pH par rapport au pI de la protéine). Dans ces travaux de 1888 [150], repris par exemple par Zhang en 2006 [151], Hofmeister a classé les ions suivant leur capacité à faire précipiter les protéines en prenant pour modèle les protéines du blanc d’œuf de poule. Il a montré que l’effet déstabilisant des anions est supérieur à celui des cations suivant l’ordre :

•cations : NH+4<K+<Na+<Li+<Li+<Mg2+<Ca2+<CH6N+3 (Guanidinium)

•anions : SO2−4 <HPO2−4 <CH3CO−2<C6H5O3−7 (citrate)<F−<Cl−<Br−<NO−3

<ClO−

3<I−<ClO−4<SCN−

A pH<pI, la protéine porte une charge globale positive, les anions qui se lient à la protéine diminuent la charge nette de celle-ci, diminuant ainsi sa solubilité suivant l’ordre direct de la série de Hofmeister. A pH>pI la protéine est chargée négativement, l’efficacité des anions à induire la précipitation suit alors l’ordre inverse de la série de Hofmeister (figure2.14).

L’effet de la température Lorsque l’on augmente la température la solubilité de

la protéine est en général augmentée, et le diagramme de phase est décalé vers de plus grandes concentrations (cf. figure 2.14). Les protéines étant des espèces thermosensibles, cela limite la possibilité des variations de température. Il existe toutefois des conditions expérimentales pour lesquelles des protéines vont avoir un comportement inverse. C’est le cas par exemple de l’inhibiteur de trypsine pancréatique bovin (BPTI) dont le sens de l’influence de la température sur la solubilité dépend du sel utilisé. Ainsi la BPTI a pu être cristallisée à chaud [152].

Figure 2.14 – Effet des sels et de la température. Extrait de [50]. Variation du second coefficient du viriel et de la solubilité du lysozyme en fonction du sel, de sa concentration et de la température. Le lysozyme montre, dans l’ordre, une meilleure solubilité en présence d’ions acétate, chlorure, nitrate, et thiocyanate, résultats corrélés aux mesures de A2. Par ailleurs, plus

la température est élevée, plus les valeurs de A2 augmentent.

L’ajout de polymères non-adsorbants à une solution colloïdale produit une séparation de phase, avec une phase riche en colloïdes, et une phase riche en polymères (et pauvre en colloïdes). Ce phénomène fut décrit et commenté dès 1954 par Asakura et Oosawa [153], puis repris et expliqué par Vrij (1976) [154] et Lekkerkerker et coll. (1992) [155]. Il est le résultat de l’interaction attractive colloïde/colloïde nommée déplétion, provoquée par l’ajout de polymère. Cette force attractive à courte portée peut être expliquée d’après le modèle d’Asakura-Oosawa (figure 2.15).

En considérant une seule particule sphérique de rayon R en solution, les molécules de polymères sont réparties aléatoirement autour de sa surface exerçant sur elle une pression en moyenne nulle dans l’espace. Les molécules de polymère, considérées sphériques de rayon Rpol, ne pouvant pénétrer les surfaces des colloïdes, elles se situent au minimum à une distance R+Rpol de la surface du colloïde (les centres des particules servant de réfé- rences pour les distances). Le volume situé entre la surface colloïde et la sphère "fictive" de rayon R+Rpol, est appelé zone de déplétion. Si maintenant on considère deux particules en solution qui se rapprochent suite aux mouvements browniens, lorsque leurs surfaces

Figure 2.15 – Pression osmotique et forces de déplétion [153]. a) Les molécules de polymère (gris clair) sont réparties de façon homogène autour du colloïde (gris foncé). En gris intermédiaire est définie la zone de déplétion. La pression osmotique (flèches) est globalement nulle. b) Deux particules se sont rapprochées provoquant le recouvrement de leurs zones de déplétion. Les molécules de polymère se retrouvent expulsées de cette zone, créant un déséquilibre de pression osmotique, qui engendre une interaction attractive de déplétion (flèches blanches) entre les molécules de colloïdes.

se trouvent à une distance inférieure à Rpol, les zones de déplétion des deux particules se recouvrent et les molécules de polymères se retrouvent exclues de ce volume de recou- vrement. Cette région présente alors une pression osmotique en polymère plus faible que le reste de la solution, ce qui engendre une interaction attractive des colloïdes : c’est la force de déplétion. Par ailleurs ce rapprochement des particules libère dans la solution un nouveau volume accessible aux polymères, qui voient leur entropie augmenter, ce qui est thermodynamiquement plus favorable.

Le modèle d’Asakura-Oosawa exprime l’interaction de déplétion de la manière suivante en fonction de r la distance entre les deux centres des colloïdes de rayon R :

Udepl(r) =        +∞ pour r ≤ 2R

−ΠpolVoverlap(r) pour 2R<r≤2R+Rpol

0 pour r>2R+2Rpol

(2.44) avec :

– Πpol la pression osmotique exercée par les polymères sur les colloïdes, qui dépend de la concentration des polymères npol :

Πpol = npolkBT (2.45)

– Voverlaple volume de recouvrement des zones de déplétion, qui fait intervenir la taille du polymère Rpol : Voverlap(r) = 4 3π(R + Rpol)3  1 − 3r 4(R + Rpol) + 1 2 ( r 2(R + Rpol) )3  (2.46)

En pratique les polymères inertes utilisés comme agents cristallisants sont souvent de type PEG (poly éthylène glycol). Plus leurs masses moléculaires et leurs concentrations dans la goutte de cristallisation sont élevées, plus les interactions sont attractives (figure

2.16). La déplétion est un phénomène à longue portée. En présence de plusieurs agents cristallisants, les effets de sels et de PEG ont lieu de façon synergique, sans être additifs [56].

Figure 2.16 – Effet de PEG A) [156]. Évolution du second coefficient du viriel de l’urate oxidase (pH 8,5 à 20◦C) en fonction de la taille du PEG (3350, 8000 ou 20000 Da), et de sa

concentration. B) [157]. Évolution du second coefficient du viriel de complexe BR-OG (1,mg/mL BR, 40 mM OG, 20◦C) en fonction de la taille du PEG (3350 ou 8000 Da) et de sa concentration.

Plus la taille du PEG et sa concentration sont élevées, plus les valeurs de A2 sont faibles, ce qui

est caractéristique d’une plus forte attraction entre molécules de protéine.

Conclusion L’utilisation du second coefficient du viriel pour comprendre les méca-

nismes de cristallisation a mis en évidence que les interactions entre protéines solubles variaient en fonction du type de sel et du pH, et que les interactions attractives augmen- taient avec :

– la concentration en agent cristallisant (sel ou polymère non adsorbant) – la taille du polymère(rayon et masse molaire)

– la diminution de la température, en général.

Peu d’études portent sur le cas des protéines membranaires intégrales. Dans ces systèmes la proportion de détergent dans le complexe PDL est telle, qu’il a un rôle prédominant dans la première étape du rapprochement des complexes entre eux. Ainsi il semble important de réaliser l’étude des interactions sur les micelles libres de détergent, avant même de vouloir étudier des solutions de complexes PDL.

3 Études préliminaires à la diffusion des rayonne-

ments

Pour pouvoir interpréter les résultats de l’étude des tensioactifs par diffusion des rayon- nements, nous avons besoin de déterminer au préalable les propriétés optiques et volumé- triques des composés (dn

dc, vp). Le calcul de plusieurs paramètres intrinsèques aux molécules (nombre d’électrons, densités électroniques, etc) sera aussi utile pour la détermination de la masse des micelles, et les simulations de forme sous le logiciel SASfit.

3.1 Mesure des dn/dc par réfractométrie pour la diffusion de