CHAPITRE III LA SITUATION DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE ET DES FORMATEURS AU CAP
3. La formation des formateurs
3.2 La formation et professionnalisation des formateurs
D’après la législation capverdienne, « les formateurs doivent être habilités pour un
cours spécifique de formation qui atteste des compétences technico-scientifiques et
pédagogiques adéquates à la formation dispensée »
78. Du fait des dysfonctionnements du
77 Institut de l'Emploi et de la Formation Professionnelle.
78 Au-delà des qualifications académiques, pédagogiques et professionnelles dans le domaine les
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système éducatif, nous sommes pourtant en droit d’interroger les compétences des formateurs
capverdiens, et les actions de formation qui leur sont destinées.
En effet, la profession de formateur dépend de deux principes qui se superposent : le
premier est lié à la professionnalisation des formateurs, et le second au contenu des formations,
adapté aux profils professionnels exigés pour justement garantir cette professionnalisation. Cela
soulève donc deux questions qui nous semblent déterminantes : les formateurs qui exercent
actuellement sont-ils adaptés à l’évolution des dispositifs de formation ? Quel type de
professionnalisation envisager pour cerner cette réalité ?
Il est largement admis que la qualité de la formation
79dépend des compétences de
l’ensemble des acteurs de la formation. Or, comme le souligne le rapport CEDEFOP, (2010)
« agir sur la formation des formateurs est un moyen pour agir sur les systèmes de formations ».
psycho-sociaux. Les exigences technico-pédagogiques pour l’exercice de l’activité de formateur, selon le statut, sont les suivants :
a) La capacité de conduire le processus de formation et d’apprentissage selon les principes,
méthodes, et normes pédagogiques recommandés ;
b) Capacité de s’adapter à différents contextes organisationnels et différents groupes de formés ;
c) La capacité de contribuer à la création d’un environnement favorable à la formation ;
d) La capacité d’évaluer les résultats et de l’efficacité du processus de la formation
professionnelle ;
e) Capacité de contribuer à l’efficacité et à l’efficience du processus de formation.
En ce qui concerne les exigences psycho-sociales, ces exigences sont :
a) Etre responsables et autonomes ;
b) Esprit d’équipe
c) Leadership
d) Communication interpersonnelle ;
e) Autonomie émotionnelle
79 Qui dépend également de facteurs internes au centre de formation telle que : le niveau de formation
du formateur, le type de soutien donné aux personnels, les matériels pédagogiques disponibles et les équipements, que de facteurs externes comme par exemple le type de partenariat entre le centre et les entreprises.
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C’est pourquoi, les compétences occupent aujourd’hui une place centrale dans les politiques
d’éducation et de formation.
Souvent appelées « formation de formateurs » (à tort car l’appellation est plus restrictive
que la réalité), la formation d’initiation ou de perfectionnement s’étend, au-delà de la pédagogie
et de la didactique professionnelle, à l’organisation, à la gestion, à l’évaluation, et à
l’environnement social, juridique et politique de la formation. La multiplicité de l’offre
témoigne à la fois de la réelle nécessité de suivre les évolutions rapides et nombreuses du métier,
et d’un mouvement de professionnalisation qui s’illustre à travers le développement de
diplômes spécifiques. Garantissant les compétences professionnelles, la formation pédagogique
permet aux formateurs de se positionner par rapport à leur profession, car « les métiers de la
formation sont en voie de recomposition autour d’une double interrogation sur l’identité
professionnelle du formateur et la différentiation de ses fonctions » Carre, P., (2001).
Dans un article intitulé « se former aux métiers de la formation ou se professionnaliser
comme acteur de la formation ? », Gérard (1991) propose de dresser un panorama de l’offre de
formation en France pour comprendre les enjeux de la qualification des acteurs de la formation
dans l’espace social français et européen, en se référant notamment au Centre INFFO (Centre
pour le développement de l’information sur la formation permanente). À travers ce travail,
l’auteur questionne la place de la formation dans le processus de professionnalisation du
secteur. Dans l’esprit de ces interrogations, (Fablet, 2001) p. 39, constate que dans le discours
actuel « la formation » cède le pas à la « professionnalisation des acteurs ». Ce glissement
sémantique, ajoute-t-il, n’est pas seulement dû à un engouement du secteur pour un mot
nouveau, il semble comprendre une volonté des acteurs de donner une cohérence à leur
itinéraire et de s’approprier de leur avenir.
En effet, la professionnalisation des acteurs de la formation ne se réduit pas à un plan
ou une offre de formation. Selon Fablet (2001, p. 39), il s’agit d’un processus dynamique qui
permet aux individus de construire, dans la durée, une identité et une compétence
professionnelles, inscrites dans des références collectives et sociales :
- à l’échelle de l’individu, à travers des connaissances, des compétences et des
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- à l’échelle d’une structure de travail, d’une institution (organisme de formation
par exemple), à travers l’organisation du travail, et les relations qui existent au sein ou à
l’extérieur de l’organisme (les partenaires, les commanditaires);
- à l’échelle d’une communauté professionnelle, à travers la structuration de la
profession par elle-même, l’élaboration d’un corpus de savoirs reconnus, validés et légitimés,
et la construction d’une éthique.
D’après Fablet (2001), l’analyse des pratiques montre que le processus de
professionnalisation se construit en mobilisant des personnes et des collectifs à travers des
modalités très diverses, comme la formation initiale et continue, mais aussi l’exercice et la
maîtrise du métier, la possibilité de réaliser des activités variées, et l’analyse de l’expérience et
son réinvestissement dans d’autres situations. Néanmoins la formation joue un rôle déterminant
dans ce processus, car « si elle n’est qu’un élément parmi d’autres dans la dynamique de la
professionnalisation, écrit-il, la formation, courte, longue, diplômante ou non, doit cependant
en être un moment privilégié : celui de l’apprentissage, de la confrontation, de l’erreur
possible, de la remise en question accompagnée, mais aussi celui de l’expérimentation et de
l’invention ».
Pour Wittorski (2005 : p. 27) la professionnalisation peut prendre trois sens différents
selon le regard dont on pose. Ainsi il parle de :
- « Professionnalisation des activités, voire des métiers au sens de l’organisation sociale d’un ensemble d’activités (création de règles d’exercice de ces activités, reconnaissance sociale de leur utilité, construction de programmes de formation à ces activités, …) ;
- La professionnalisation des acteurs, au sens à la fois de la transmission de savoirs et de compétences (considérés comme nécessaires pour exercer la profession) et de la construction d’une identité de professionnel ;
- La professionnalisation des organisations, au sens de la formalisation d’un système d’expertise par et dans l’organisation ».
Dans cette perspective la professionnalisation est vue comme un processus de
négociation visant la reconnaissance sociale, l’autonomie et la spécificité d’un ensemble
d’activités et un processus de formation d’individus aux contenus d’une profession.
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Ainsi, on assiste aujourd’hui au développement d’un statut de la fonction enseignante
guidé par cette professionnalisation afin d’en améliorer les représentations sociales et garantir
la promotion professionnelle des enseignants. D’ailleurs, une grille salariale distincte de la
« Função Publica » été établie. En effet, dans toute profession, ancienne, récente ou émergente,
l’existence d’une formation spécifique dans des établissements spécialisés contribue à
crédibiliser les qualifications des acteurs et à renforcer « l’identité par autrui ». La formation
(scolaire, professionnelle, initiale ou continue) et le travail constituent en réalité des domaines
pertinents d’identification sociale.
Enfin, le système de formation professionnelle mise en place vient dans le sens de
renforcer les compétences et faire que les fonctionnaires puissent délimiter leurs territoires
professionnels. La professionnalisation en se référant au processus d’amélioration ou le
développement des compétences comme le dit Sorel (M.) et Wittorski (R.), 2005 cela met en
évidence la nécessité de la qualité de la relation entre le professionnel (expert dans son domaine
d’action) et les dirigeants. Ce rapport à toute évidence, suppose une réflexion sur la gestion des
compétences.
Nous allons dans le chapitre suivant centrer sur la gestion des compétences, pour mieux
comprendre les dispositifs, le processus de gestion des compétences pour une adaptation
adéquate à l’évolution du marché du travail.
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